Schéma de fonctionnement de Stryng

Gérer de façon optimale les relations avec les clients

Dossier : TrajectoiresMagazine N°728 Octobre 2017
Par Olivier COSTE (86)
Par Hervé KABLA (84)

On peut être X‑Mines et finale­ment aban­don­ner tout le con­fort des cab­i­nets min­istériels ou des états-majors de grands groupes pour par­tir s’in­staller à New York et créer sa start-up, VideoDesk rebap­tisée Stryng lors d’un change­ment de ver­sion. Il s’ag­it d’un ser­vice de mes­sagerie adap­té aux rela­tions clients. 

Tu te lances dans la vidéo dès 2012. Était-ce visionnaire ?

L’idée est venue de mon asso­cié, Igor Schlum­berg­er, entre­pre­neur en série du monde du web. Depuis plus de vingt ans, il invente des solu­tions per­me­t­tant aux com­merçants en ligne de ven­dre plus facilement. 


Stryng pro­pose un ser­vice de mes­sagerie client adap­té aux nou­veaux com­porte­ments des con­som­ma­teurs et des vendeurs.

Met­tre un vendeur à la dis­po­si­tion des inter­nautes pour un dia­logue vidéo nous a sem­blé une manière naturelle de recréer la rela­tion humaine du mag­a­sin physique. 

En 2013, Ama­zon lance une solu­tion équiv­a­lente sur ses ter­minaux Kin­dle. En 2014, Microsoft nous con­tacte alors pour installer notre solu­tion sur leur site de e‑commerce, sur lequel ils vendent des tablettes, des Xbox et des software. 

En 2015, la CEO d’IBM cherche à faciliter la vente de solu­tions en ligne et s’enthousiasme devant une démon­stra­tion de notre solu­tion. Donc, oui, il y avait bien là une vision partagée de l’avenir du com­merce en ligne. 

Qu’est-ce qui a changé en cinq ans dans ton secteur ?

En cinq ans, qua­si­ment tout a changé. Le com­merce élec­tron­ique était exclu­sive­ment sur ordi­na­teur, il est main­tenant prin­ci­pale­ment sur mobile. 

“ La France propose un environnement exceptionnel pour la R & D de start-up ”

Les prin­ci­paux moyens de com­mu­ni­ca­tion étaient le télé­phone et l’e‑mail, c’est main­tenant la mes­sagerie, entre amis (What­sApp, Face­book, Mes­sen­ger, WeChat…) ou entre col­lègues (Slack…), qui a le vent en poupe. 

Dès lors, les con­som­ma­teurs ne cherchent plus en pri­or­ité à « par­ler » avec les vendeurs, mais préfèrent net­te­ment la mes­sagerie mobile : un court mes­sage texte, une pho­to du pro­duit, des émoticônes, un ren­dez-vous vidéo si le sujet est com­pliqué. Les entre­pris­es doivent s’adapter aux nou­velles habi­tudes de leurs clients. 

Pourquoi être parti t’installer aux États-Unis ?

Parce que 95 % de notre chiffre d’affaires était aux USA. Les clients améri­cains sont très ouverts à l’innovation du monde entier, donc il n’y a pas de frein « nation­al » à choisir une tech­nolo­gie non américaine. 

En revanche, la présence du CEO sur le sol améri­cain crée de la con­fi­ance pour une rela­tion de long terme. Nous sommes passés de con­trats pour des opéra­tions pilotes à des con­trats pluri­an­nuels une fois le démé­nage­ment réalisé. 

N’est-ce pas difficile de conserver la R & D en France ?

La France pro­pose un envi­ron­nement humain et financier excep­tion­nel pour la R & D de start-up. La pres­sion sur les salaires des développeurs est telle aux États-Unis que toutes les entre­pris­es sous-trait­ent la R & D à l’étranger, en Israël, en Inde ou ailleurs. 

Les con­di­tions pro­posées aux start-up en France sont par­ti­c­ulière­ment favor­ables : CIR, CII, JEI, TEPA… Mais il faut être français pour com­pren­dre ces sigles et ces mécan­ismes. Et les con­di­tions devi­en­nent beau­coup moins com­péti­tives quand l’entreprise grossit. 

Comment survivre dans le milieu de la technologie aujourd’hui ?

J’aimerais bien le savoir ! Le marché est immé­di­ate­ment mon­di­al, avec 4 mil­liards de con­som­ma­teurs assez facile­ment acces­si­bles. C’est sans précé­dent dans l’histoire.

Smartphone avec l'application Stryng
Stryng com­bine SMS, e‑mail et Mes­sen­ger, avec l’appui de l’intelligence artificielle.

Simul­tané­ment, les cycles sont très rapi­des, une tech­nolo­gie promet­teuse peut dis­paraître en quelques mois. Air­bus conçoit des avions pour vingt ou trente ans. Nokia (ex-Alca­tel) conçoit des tech­nolo­gies mobiles pour trois à cinq ans. Google mod­i­fie Chrome tous les mois. 

Et dans le domaine de la vidéo ?

Il y a cinq ans, nous avions fait le choix pru­dent de ne pas aller sur les ter­rains bat­tus de la vidéo­con­férence où se trou­vaient déjà Microsoft (Skype), Google (Hang­outs), Apple (Face­Time), Cis­co (WebEx) et de nom­breux autres. 

Au même moment, un ingénieur de San Fran­cis­co lançait Zoom, en con­cur­rence frontale con­tre ces dif­férents acteurs. Zoom vaut aujourd’hui 1 mil­liard de dol­lars. Avons-nous été trop prudents ? 

Videodesk a changé de nom il y a un an pour devenir Stryng. Pourquoi ?

Pour lancer un nou­veau pro­duit de mes­sagerie client adap­té aux nou­veaux com­porte­ments des con­som­ma­teurs et des vendeurs : mobiles, sur smart­phones, com­bi­nant SMS, e‑mail et Mes­sen­ger, avec l’appui de l’intelligence arti­fi­cielle pour faciliter la vie de tous. 

Pour l’anecdote, Stryng n’est pas en anglais une tenue dénudée, mais une référence à la corde (the string), le lien, la relation. 

Qu’est-ce qui t’a poussé à quitter un grand groupe pour créer ta société ?

Une mul­ti­tude de raisons. En vrac : la rage de voir l’entreprise où je tra­vail­lais per­dre pied dans la com­péti­tion mon­di­ale et promise à une con­cen­tra­tion douloureuse. 

L’ambition de créer un nou­veau pro­duit. L’espoir de gag­n­er de l’argent.

Qu’est-ce que cela change dans ton quotidien ?

À Matignon, je voy­ageais en pre­mière. Chez Alca­tel, en busi­ness. Main­tenant je suis en économique… Plus sérieuse­ment, l’émigration aux États-Unis est un choix pro­fond, évi­dent pour moi sur un plan pro­fes­sion­nel, mais très engageant sur un plan per­son­nel, pour moi comme pour ma femme et nos enfants. 

Nous sommes impres­sion­nés par la qual­ité des ren­con­tres, des études, des oppor­tu­nités, mais la France est un beau pays chaleureux qui nous manque. 

Et si c’était à refaire ?

La joie de mon­ter une équipe, de créer un pro­duit et de gag­n­er des clients est immense, c’est une drogue dont je ne me lasse pas. J’ai fait beau­coup d’erreurs.

J’aimerais croire que j’en ferai moins aux prochaines aven­tures, mais je n’en suis même pas bien sûr.

Poster un commentaire