Robe imprimée en polymères

FORMNEXT : le plus grand salon mondial de l’impression 3D

Dossier : La fabrication additiveMagazine N°756 Juin 2020
Par Joël ROSENBERG (84)

Cette man­i­fes­ta­tion plutôt récente s’impose comme le véri­ta­ble ren­dez-vous mon­di­al de la fab­ri­ca­tion addi­tive (FA), ou addi­tive man­u­fac­tur­ing en anglais. Pourquoi en par­ler ? Parce que tous les acteurs de la chaîne de valeur sont présents à ce salon et parce que, crise de la Covid oblige, c’était le dernier événe­ment réu­nis­sant l’impression 3D, les ren­dez-vous de ce print­emps ayant tous été annulés.

On vient à Form­next des qua­tre coins du monde. Après l’Allemagne, les pays les plus représen­tés sont la Chine, les États-Unis, la France, l’Italie, le Roy­aume-Uni, l’Espagne et les Pays-Bas. Tout l’écosystème de la FA est présent, logi­ciels de design et de con­cep­tion, matéri­aux, procédés, machines d’impression, les post-traite­ments des pièces pro­duites, leurs con­trôles. Sans oubli­er l’impact humain sur les équipes et leur sécu­rité ain­si que les con­traintes envi­ron­nemen­tales que doit respecter la fab­ri­ca­tion additive. 


REPÈRES

Depuis 2014, la fab­ri­ca­tion addi­tive se réu­nit fin novem­bre à Franc­fort dans le parc d’exposition Messe. Ce salon, qui tenait sur un seul niveau d’un hall d’exposition lors de la pre­mière édi­tion, puis l’année précé­dente sur un hall et deux niveaux gigan­tesques, occu­pait pour cette dernière édi­tion (2019) deux halls et qua­tre niveaux, soit + 60 % de sur­face d’exposition entre 2018 et 2019 et + 240 % en cinq ans. Il fal­lait au moins deux pleines journées pour par­courir les 50 000 m2 d’exposition de l’édition 2019. Cette cinquième édi­tion affiche une forte crois­sance, tant par le nom­bre d’exposants, 867 con­tre 632 en 2018 (+ 37 %), que par celui des vis­i­teurs, 35 000 con­tre près de 27 000 en 2018 (+ 28 %). 285 entre­pris­es – soit un tiers des exposants – venaient pour la pre­mière fois au salon.


Couvre-culasses de Bugatti - Chiron imprimés en alliage d’aluminium dans la SLM 800 en 6 jours.
Huit cou­vre-culass­es de Bugat­ti — Chi­ron imprimés en alliage d’aluminium dans la SLM 800 en 6 jours.

La fabrication additive est vue comme un futur Eldorado

Un des fins obser­va­teurs des cinq édi­tions me le fai­sait remar­quer : ce salon est un vrai con­traste entre la débauche d’opérations mar­ket­ing et la réal­ité du marché de l’impression 3D. En effet, si Forbes estime début mai 2020 que l’en

sem­ble de la chaîne de valeur de la fab­ri­ca­tion addi­tive représente près de 12 Md$ en 2019, avec 25 Md$ atten­dus en 2025, la plu­part des acteurs ont du mal à gag­n­er de l’argent. La plu­part ne sont pas cotés et ne pub­lient donc aucune infor­ma­tion finan­cière mais, si l’on con­sid­ère trois des sociétés qui ont par­mi les plus beaux stands du salon et qui sont cotées, on trouve : 

SLM Solu­tions (Alle­magne), dont le chiffre d’affaires 2018 était de 72,0 M€ pour 13,4 M€ de pertes et dont le chiffre d’affaires 2019 est de 49,0 M€ pour 47,1 M€ de pertes, a une cap­i­tal­i­sa­tion bour­sière début mai 2020 de 130,0 M€ – alors que GE avait fait une offre sur cette société à env­i­ron trois fois le pic his­torique de sa cap­i­tal­i­sa­tion bour­sière. Hélas pour les dirigeants et action­naires, un fonds activiste améri­cain a voulu faire mon­ter les enchères et GE a changé du jour au lende­main son fusil d’épaule pour un con­cur­rent… Le cap­i­tal-risque me l’a appris, les occa­sions de rêve ne passent jamais deux fois. 

Strata­sys (USA, Israël), dont le chiffre d’affaires 2018 était de 663,0 M$ pour 8,8 M$ de pertes et dont le chiffre d’affaires 2019 est de 636,0 M$ pour 11,7 M$ de pertes, a une cap­i­tal­i­sa­tion bour­sière début mai 2020 de 900 M$ alors que la société avait dépassé les 5 Md$ en 2014. 

3D Sys­tems (USA), his­torique­ment la pre­mière société d’addi­tive man­u­fac­tur­ing, dont le chiffre d’affaires 2018 était de 688,0 M$ pour 45,5 M$ de pertes et dont le chiffre d’affaires 2019 est de 629,0 M$ pour 67,7 M$ de pertes, a une cap­i­tal­i­sa­tion bour­sière début mai 2020 de 850 M$ alors que la société avait dépassé la valeur de 10 Md$ en 2014.

Impression en laser-lit de poudre : construction des pièces avec balayage des lasers
Impres­sion en laser-lit de poudre : con­struc­tion des pièces avec bal­ayage des lasers.

Impression en laser-lit de poudre : dépoudrage avec aspirateur.
Impres­sion en laser-lit de poudre : dépoudrage avec aspirateur.

Impression en laser-lit de poudre : dépoudrage au pinceau.
Impres­sion en laser-lit de poudre : dépoudrage au pinceau.

Une brève histoire de la fabrication additive 

Tout com­mence en 1984, à la fois sur le plateau de Saclay – où l’invention, brevetée, restera dans des car­tons – et aux États-Unis où Chuck Hull fondera 3D Sys­tems avec le pre­mier procédé mis au point, la stéréolith­o­gra­phie : elle utilise un laser ultra­vi­o­let qui chauffe un photo­polymère liq­uide et le solid­i­fie couche par couche. Très vite, un con­cur­rent de taille va appa­raître dans le domaine des machines d’impression des matéri­aux polymères, Strata­sys : ces deux con­struc­teurs d’imprimante pour polymères domineront le marché jusqu’en 2014–2015 où leur cap­i­tal­i­sa­tion bour­sière dépassera les 5 Md$, mul­ti­pli­ant les acqui­si­tions de tech­nolo­gies ou de start-up achetées beau­coup trop cher et le plus sou­vent mal inté­grées. L’histoire se répète pour Gen­er­al Elec­tric qui a procédé à de très nom­breuses acqui­si­tions achetées très cher, comme les fab­ri­cants de machine Con­cept Laser et Arcam – pour 1 250 M€ en 2016, un prix stratosphérique à en croire les experts. L’offre ini­tiale­ment faite sur SLM Solu­tions était 850 M€, soit 1,4 Md$ pour à la fois Arcam (seul fab­ri­cant au monde d’imprimantes métal à fais­ceau d’électrons) et SLM Solu­tions, des mon­tants extrav­a­gants en ter­mes de ROI.

Depuis 2014, des géants indus­triels comme GE, HP, Ricoh, et l’année dernière Rank Xerox, etc., sont entrés à dif­férents niveaux d’implication dans la FA et présen­tent de beaux stands à Form­next… Que ce soit dans les matéri­aux polymères ou dans les matéri­aux métalliques, l’offre 2020 four­mille de très nom­breuses solu­tions ou machines, à tel point qu’il devient dif­fi­cile de choisir… De nou­veaux mod­èles et tech­nolo­gies appa­rais­sant, on peut être ten­té d’attendre la prochaine machine de fab­ri­ca­tion addi­tive, plus pré­cise, plus rapi­de, avec de plus grands vol­umes de production…

“Tous les segments
de la 3D sont devenus très concurrentiels.”

Une douzaine de famille de procédés 

Beau­coup de tech­niques se sont dévelop­pées et on recense aujourd’hui plus d’une douzaine de familles de procédés dif­férents suiv­ant les matéri­aux util­isés (plas­tique, métal, céramique, com­pos­ite, sable, résine, sil­i­cone…), leur forme (poudre, fil­a­ment, fil, bâton­nets…) ou le type d’énergie util­isé (laser, fais­ceau d’électrons, arc élec­trique, plas­ma, sim­ple chauffage…). L’avantage de l’impression 3D tient à la rapid­ité de la chaîne con­cep­tion-fab­ri­ca­tion et son faible investisse­ment (pour un sys­tème com­plet de pro­duc­tion). Son incon­vénient est la cadence de pro­duc­tion trop basse ou trop chère en général pour une pro­duc­tion de masse, mais il y a des excep­tions et elles vont se mul­ti­pli­er. Notons qu’on peut imprimer des pièces directe­ment ou imprimer des moules pour obtenir de grandes séries, comme le fait Miche­lin qui imprime un mil­lion de moules par an pour les sculp­tures de ses pneus. Suiv­ant le méti­er (aéro­nau­tique, médi­cal, den­taire, joail­lerie, con­struc­tion, énergie, biolo­gie…), la géométrie des pièces, leur niveau de pré­ci­sion ou de crit­ic­ité, l’état de sur­face recher­ché, la taille des séries, le souci de per­son­nal­i­sa­tion…, l’enjeu est de sélec­tion­ner le bon procédé.

La fabrication additive métallique 

Le plus fort développe­ment est atten­du dans la FA métallique et com­pos­ite, avec des moyens de pro­duc­tion hybride com­bi­nant divers procédés addi­tifs et sous­trac­t­ifs. Il y avait moins d’une dizaine d’acteurs dans le métal il y a dix ans, ils étaient 150 exposants sur l’édition Form­next 2019, les four­nisseurs aus­si bien de poudre que de machines, que de post-traite­ments, que de soft pour des sim­u­la­tions, etc. Le métal est un écosys­tème large­ment dévelop­pé qui a la crois­sance la plus élevée. Pour pren­dre l’impression 3D en métal la plus répan­due, la tech­nolo­gie laser-lit de poudre (SLM ou LBM), on dénom­bre les acteurs indus­triels alle­mands SLM Solu­tions, EOS, Trumpf, DMG Mori, l’anglais Ren­ishaw, le hol­landais Addi­tive Indus­tries, le français AddUp, le chi­nois Far­soon, les améri­cains Velo3D, Gen­er­al Elec­tric qui a racheté l’allemand Con­cept Laser en 2016, 3D Sys­tems qui a racheté le français Phenix Sys­tems en 2013. Tous ces acteurs sont sur le salon avec des stands énormes, voire démesurés pour GE, EOS, Trumpf. Le procédé SLM est très utile si on a besoin de pré­ci­sion, de struc­tures com­plex­es géométrique­ment, avec une san­té-matière très exigeante, ou de den­sité très forte.

AddUp, filiale de Michelin et Fives créée fin 2015 

En ce qui con­cerne les nou­veautés dans le métallique, citons SLM Solu­tions qui a mon­tré la proof of con­cept d’une machine métal avec une dizaine de lasers ; la mul­ti­pli­ca­tion du nom­bre de lasers per­me­t­trait d’augmenter la pro­duc­tiv­ité ou d’accélérer la vitesse de con­struc­tion des pièces. Par­mi les machines en tech­nolo­gie laser-lit de poudre offrant un grand vol­ume, citons la SLM 800, avec 4 lasers agis­sant sur une cham­bre de vol­ume 500 x 280 x 850 mm. Le français AddUp est présent avec des solu­tions pour ses machines laser-lit de poudre qui peu­vent utilis­er des poudres extrême­ment fines pour des pièces métal de grande pré­ci­sion, tout en assur­ant une sécu­rité max­i­male pour les opéra­teurs. AddUp accueille aus­si les machines BeAM – achetées mi-2018 à une val­ori­sa­tion très bien négo­ciée par Jean-Dominique Senard, à l’époque PDG de Miche­lin, qui est très mal passée pour la plu­part des pres­tigieux action­naires qui avaient per­mis à cette société de naître et de se dévelop­per. BeAM con­stru­it des machines de pro­jec­tion de poudre métallique, tech­nolo­gie beau­coup plus rapi­de, adap­tée à la con­struc­tion de grandes pièces et au recharge­ment (pour la répa­ra­tion de pièces, de moteur d’avion par exem­ple) comme à l’ajout de fonc­tions sur des pièces réal­isées par d’autres procédés : l’une de ces machines équipe le lab­o­ra­toire de mécanique de l’X. AddUp a aus­si acheté le français Poly-Shape, prestataire de ser­vices spé­cial­isé dans la réal­i­sa­tion de pièces tech­nique­ment très avancées pour Das­sault Avi­a­tion, Air­bus, etc., qui pos­sède un parc machines de plusieurs constructeurs.

Chambre de combustion avec structure lattice pour le circuit de refroidissement minimisant le poids et les post-traitements imprimée sur SLM 280 en superalliage base nickel 718 en 5 jours : parfait exemple de lightweight construction.
Cham­bre de com­bus­tion avec struc­ture lat­tice pour le cir­cuit de refroidisse­ment min­imisant le poids
et les post-traite­ments imprimée sur SLM 280 en super­al­liage base nick­el 718 en 5 jours : par­fait exem­ple de light­weight construction.

Test de l’étrier de frein de Bugatti imprimé en titane par SLM Solutions
Test de l’étrier de frein de Bugat­ti imprimé en titane par SLM Solu­tions, de 400 km/h à 0 en 9 secondes.

Stratasys nous en fait voir de toutes les couleurs

Sur le plateau supérieur, on retrou­ve 3D Sys­tems qui présente des machines d’impression métal ou polymères et, tout proche, son con­cur­rent de tou­jours, Strata­sys, qui présente des machines d’impression en résines et polymères. Notons que leur nou­velle machine J850 est la pre­mière machine d’impression 3D au monde qui per­me­tte d’imprimer avec plus de 500 000 nuances de couleurs cer­ti­fiées par Pan­tone une infinité de matéri­aux com­pos­ites, présente une capac­ité de charg­er jusqu’à sept matéri­aux dif­férents mixés au niveau du vox­el – qui est à la 3D ce que le pix­el est à la 2D – avec une pré­ci­sion de ± 100 µ pour un vol­ume de fab­ri­ca­tion de 490 x 390 x 200 mm.

Un point sur le binder jetting 

C’est une tech­nolo­gie d’impression net­te­ment plus rapi­de. Sur des métiers qui vont deman­der une pro­duc­tiv­ité plus impor­tante ou un nom­bre de pièces en série plus impor­tant, le binder jet­ting – qui con­stru­it des pièces plus rapi­de­ment que la tech­nolo­gie SLM – peut être une réponse très intéres­sante. Sur ces machines, à chaque pas­sage il y a un dépôt de matière sous forme de poudre et de liant ; cette matière (poudre) est frit­tée, c’est-à-dire chauf­fée dans des fours très haute tem­péra­ture – il faut bien enten­du enlever toute poudre non utile car sinon, au moment du frit­tage (élé­va­tion de tem­péra­ture), la poudre non désirée pour­rait s’agglomérer avec la pièce. Il y a un retrait très impor­tant, de l’ordre de 20 % à 24 %, et la pièce devient dense à 98 % – comme on le fait avec la céramique. Cette tech­nolo­gie n’est cepen­dant pas adap­tée pour cer­taines struc­tures com­plex­es : les pièces métal néces­si­tant de très hautes pré­ci­sions con­tin­ueront à utilis­er le procédé laser-lit de poudre. Les pro­duc­teurs de ces machines d’impression 3D sont ExOne (Israël) et Dig­i­tal Met­al (Suède), ExOne, le pio­nnier de cette tech­nolo­gie, pro­duisant aus­si des machines qui impri­ment du sable et ven­dant des sys­tèmes depuis de nom­breuses années. Il y a aus­si Desk­top Met­al (start-up et licorne issue du MIT, née en 2015, qui a levé 440 M$, soit le finance­ment en cap­i­tal-risque le plus impor­tant jamais réal­isé dans la fab­ri­ca­tion addi­tive) et HP. Pour HP comme pour Desk­top Met­al, cela reste un effet d’annonce, avec pour l’instant quelques machines de bêta-test sans offre com­mer­ciale autre que pour polymères.

guitare smash-proof en titane de Sandvik
La très lourde gui­tare smash-proof en titane de Sand­vik dans les mains d’Adeline Riou,
Aubert & Duval, chef des ventes pour les poudres métalliques.

Enjoliveur de portière de DS3 en titane dans la chambre d’impression.
Enjo­liveur de por­tière de DS3 en titane dans la cham­bre d’impression.

Enjoliveur de portière de DS3 en titane monté sur le véhicule imprimé sur machine EOS chez Spartacus 3D.
Enjo­liveur de por­tière de DS3 en titane mon­té sur le véhicule imprimé sur machine EOS chez Spar­ta­cus 3D.

La galaxie EOS 

Dans le troisième hall, on entend le son puis­sant d’une gui­tare élec­trique inde­struc­tible smash-proof imprimée en titane par le sué­dois Sand­vik qui fait réson­ner des accords très rock. À l’étage, on trou­ve le fab­ri­cant alle­mand EOS. Avec un chiffre d’affaires de 350 M€, la société fondée en 1989 est le leader dans le secteur du frit­tage laser direct métal ain­si que polymère, avec un total de 3 800 imp­ri­mantes 3D indus­trielles ven­dues dans le monde, dont 450 sys­tèmes en 2019. Le trip­tyque sys­tème-matéri­au-paramètres d’EOS per­met de garan­tir qual­ité et répéta­bil­ité des pièces imprimées, et donc de pro­duire en série des pièces indus­trielles, aus­si bien en plas­tique – avec des vol­umes jusqu’à 700 x 380 x 580 mm – qu’en métal avec des vol­umes jusqu’à 400 x 400 x 400 mm et 4 lasers. Des mod­ules sont disponibles pour automa­tis­er au max­i­mum toutes les étapes de fab­ri­ca­tion et inté­gr­er l’impression 3D dans des chaînes de pro­duc­tion. EOS pos­sède cinq autres sociétés dans l’addi­tive man­u­fac­tur­ing détenues à 100 %, dont ALM (Advanced Laser Mate­ri­als) – pour le développe­ment de poudres plas­tiques (PEKK et plas­tiques haute per­for­mance). EOS est détenue par la famille du fon­da­teur qui vient de céder sa place de dirigeant à sa fille. C’est un écosys­tème, la famille ayant créé un fonds de cap­i­tal-risque, AM Ven­tures, qui a des par­tic­i­pa­tions dans vingt sociétés, toutes dans la fab­ri­ca­tion addi­tive. On y retrou­ve par exem­ple Dye­Man­sion, qui traite la par­tie post-pro­cess­ing pour les polymères, colo­riages et traite­ments des sur­faces, les sociétés de soft­ware 3YourMind et Addi­tive Works, Sin­tratec, de toutes petites imp­ri­mantes en lit de poudre plas­tique, Lithoz, des imp­ri­mantes en céramique, AM Met­als, qui développe des poudres métalliques (dif­férents types d’aluminium, d’acier). La famille détient aus­si en direct Scan­lab, qui fait des scan­ners pour numéris­er des objets en 3D.

Les horaires du salon sont très clas­sique­ment de 9 h à 18 h mais le soir, à Form­next, nom­breux sont les stands qui organ­isent une fête pour con­tin­uer de par­ler de FA. Ain­si, AM Ven­tures fait le deux­ième soir avec toutes ses par­tic­i­pa­tions une soirée dev­enue un ren­dez-vous qua­si incon­tourn­able bap­tisé avec à‑propos Rave til AM, où la bière coule à flots et rassem­ble tout cet écosystème…

Les logiciels

Par­lons main­tenant des logi­ciels, secteur en forte crois­sance. Com­mençons par le français Das­sault Sys­tèmes (3DS) qui offre une panoplie qui se com­plète chaque année et qui, après avoir mis sur le marché en 2017 une solu­tion de mod­éli­sa­tion 3D inté­grant native­ment de l’optimisation topologique pour des pièces soumis­es à des con­traintes sta­tiques, a dévoilé sa nou­velle solu­tion d’optimisation flu­ide : opti­miser la forme d’un con­duit en min­imisant les tur­bu­lences de perte de pres­sion en sor­tie. Il y a bien sûr pléthore de logi­ciels de CAO : Autodesk, Siemens, 3DS (avec Catia) et Altair (roi de l’optimisation topologique). Il y a des logi­ciels de pré­pa­ra­tion de pièces pour la FA qui font le « sup­port­age » et le « tran­chage ». Le plus con­nu a été mis au point par le belge Mate­ri­alise, un des grands prestataires de ser­vices pour la fab­ri­ca­tion addi­tive qui com­mer­cialise ain­si le soft qu’il a créé pour lui. De fac­to c’est le stan­dard, mais il y a aus­si Autodesk (Net­fabb) et Siemens (NX), et encore Das­sault Sys­tèmes (Delmia). Pas­sons au soft de sim­u­la­tion du procédé : il s’agit de lancer une analyse ther­mique qui va cal­culer la carte des tem­péra­tures pen­dant l’impression 3D. Dans le cas de gra­di­ents ther­miques trop impor­tants, la pièce accu­mule des con­traintes résidu­elles qui vont provo­quer la dis­tor­sion de la pièce. Prédire ces dis­tor­sions et essay­er de les éviter en changeant les paramètres du procédé de fab­ri­ca­tion (puis­sance du laser, vitesse d’impression…), c’est ce que font Autodesk, Siemens, 3DS, Ansys (qui a racheté 3DSIM pour ce pro­duit) et MSC (qui a acheté Sim­u­fact il y a quelques années), main­tenant détenu par Hexagon.

Pour optimiser la production avec ESI Group 

Addi­tive Works (start-up de l’université de Brême) est un logi­ciel de sim­u­la­tion d’impression métal qui per­met de vision­ner les ten­sions internes dans une pièce, anticipe les tor­sions, sug­gère un design en amont pour la fab­ri­ca­tion. Par exem­ple, en CAO, on des­sine une pièce de 10 mm mais, à la sor­tie, il va y avoir une dis­tor­sion de 1 %. Addi­tive Works per­met de redessin­er la pièce, telle qu’on l’obtiendra à la sor­tie de 3D. Cette pos­si­bil­ité existe égale­ment chez Das­sault Sys­tèmes avec son appli­ca­tion Vir­tu­al to Real Shape Mor­ph­ing. Citons encore le français ESI Group qui pro­pose avec ses spé­cial­istes en physique des matéri­aux une solu­tion com­plète, ESI AM, qui simule le procédé à dif­férentes échelles et répond aus­si bien à des ques­tions liées à la fab­ri­ca­bil­ité (dis­tor­sions, con­traintes résidu­elles) qu’à l’optimisation en pro­duc­tion et aux inter­ro­ga­tions sur les pro­priétés matéri­aux et leur certification.

Les soft de gestion de la production

Grow est une solu­tion de DRM (ges­tion des droits dig­i­taux) con­cur­rente d’Identify3D et de notre opéra­teur nation­al Orange qui est leader dans ce domaine : c’est un élé­ment-clé de ces process indus­triels. Il s’agit par exem­ple de per­me­t­tre à un prestataire de faire un nom­bre lim­ité d’impressions (voire une seule impres­sion) en lui trans­met­tant les fichiers de la géométrie de la pièce et du mode opéra­toire pour la machine qui réalise l’impression : il pour­ra n’être autorisé à fab­ri­quer qu’une seule pièce. Autre élé­ment-clé, Link3D est une solu­tion de MES (c’est-à-dire ges­tion de la pro­duc­tion) con­cur­rente de 3YourMind, Authen­tise, 3dTrust… La ges­tion de la pro­duc­tion devient extrême­ment com­plexe dès qu’il y a plusieurs machines. Il y a des temps d’attente, il faut pré­par­er les pièces avant, les détach­er du plateau en fin de pro­duc­tion, les sabler, pré­par­er les fini­tions, met­tre les pièces à cuire dans des fours pour obtenir les bonnes car­ac­téris­tiques mécaniques, etc. Das­sault Sys­tèmes a fait l’acquisition en 2013 de la société Apriso, c’est devenu le nom de leur solu­tion capa­ble de gér­er des sites avec dif­férentes local­i­sa­tions géo­graphiques et d’optimiser l’ensemble des tâch­es néces­saires et séquen­tielles du proces­sus de pro­duc­tion. 3YourMind s’intègre avec les ERP. Ce logi­ciel s’insère dans les logi­ciels CAO et 3YourMind pro­pose les dif­férents prestataires capa­bles de fab­ri­quer la pièce.

Les structures lattices, spécialité de nTopology 

Il y a de plus en plus de logi­ciels qui pro­posent des struc­tures lat­tices qui sont des empile­ments de microstruc­tures con­sti­tués de petites bar­res cylin­driques. L’ensemble de la pièce est sous forme de grille ou treil­lis à l’intérieur de la pièce, avec pour but l’allégement max­i­mal pour une struc­ture très solide. Les sociétés très actives sont Mate­ri­alise, Siemens, 3DS. L’américain nTopol­o­gy se focalise sur la créa­tion de lat­tices, conçoit ces struc­tures avec des cal­culs très sophis­tiqués néces­si­tant de gross­es puis­sances de cal­cul et les envoie à d’autres logi­ciels pour la con­struc­tion de pièces comme Catia, Siemens. Le prob­lème des lat­tices, c’est la taille des mod­èles. Un CAO clas­sique peut faire 1 000 à 2 000 élé­ments, mais pas 100 000. Il faut avoir codé une struc­ture de don­nées par­ti­c­ulières pour être effi­cace, et c’est ce que fait par­ti­c­ulière­ment bien nTopology.

Positionner intelligemment les pièces sur le plateau avec Etteplan 

Cette société d’engineering, basée en Fin­lande, pro­pose le moyen de faire un max­i­mum de pièces sur un plateau avec des sup­ports qui s’enlèvent facile­ment, presque à la main. On prend la même pièce dupliquée en X et Y, mais aus­si en Z. On peut ain­si aug­menter le nom­bre de pièces que l’on veut imprimer. Peu ou pas de sup­port – il faut du savoir-faire ! – ou alors des sup­ports très faciles à enlever, ce qui fait gag­n­er énor­mé­ment de temps, l’enlèvement des sup­ports et la fini­tion des pièces pou­vant être des activ­ités déli­cates et très chronophages, qui coû­tent très cher : le parachève­ment, c’est sou­vent 50 % du prix de la pièce métallique en impres­sion 3D. Notons aus­si la ten­dance à aug­menter la puis­sance d’un laser (ain­si, en une passe, on saute d’une impres­sion de 30 microns à 90 microns, donc on fait moins de tranch­es, on peut aller beau­coup plus vite). Prenons exem­ple d’une pièce métal de 200 mm de haut qui peut pren­dre à titre indi­catif 40 heures en SLM : la méthode indiquée per­met de gag­n­er 60 % de temps.

150 pièces métalliques imbriquées avec support qui se cassent à la main (empilement réalisé avec la méthodologie Etteplan). Construction : 3 jours et 3 heures.
150 pièces métalliques imbriquées avec sup­port qui se cassent à la main (empile­ment réal­isé avec la méthodolo­gie Etteplan).
Con­struc­tion : 3 jours et 3 heures.

Suivant la puissance du laser et la taille des poudres, on peut avoir un gain de 60 % en temps de construction des pièces.
Suiv­ant la puis­sance du laser et la taille des poudres, on peut avoir un gain de 60 % en temps de con­struc­tion des pièces.

SLM Solutions a réussi à imprimer des angles très faibles sans support
SLM Solu­tions a réus­si à imprimer des angles très faibles sans support.

L’impression de fil métal 

La prom­e­nade le long des allées révèle des objets extra­or­di­naires, par­fois très imposants – notam­ment en matéri­aux plas­tiques ou com­pos­ites – comme la car­rosserie d’une voiture, mais aus­si en métal avec nom­bre de bras robo­t­isés qui impri­ment à par­tir de bobines de fil­a­ment des objets de grande taille de plusieurs mètres de long. Par exem­ple, la tech­nolo­gie Gefer­tec est fondée sur le procédé WAAM du soudage à l’arc, asso­cié à une ciné­ma­tique 3 ou 5 axes : une buse guide un fil métallique qui est fusion­né et déposé par un arc élec­trique sur un sub­strat, avec une haute qual­ité métal­lurgique. L’utilisation de fil bon marché comme matéri­au de base ain­si qu’un faible coût d’outillage offrent aux util­isa­teurs une tech­nolo­gie très attrac­tive en ce qui con­cerne le coût de fab­ri­ca­tion. En util­isant ce type de procédé, Naval Group a imprimé une pale d’hélice de sous-marin. Creuse, l’hélice est ain­si plus légère et per­me­t­tra de tester dif­férents matéri­aux absorbants pour amélior­er la dis­cré­tion du bâtiment.

Les matériaux

Venons-en enfin aux fab­ri­cants de matéri­aux. Ils sont tous présents, il y a les fab­ri­cants très spé­cial­isés ou les géants con­nus comme BASF, moins con­nus comme Cove­stro. Men­tion­nons les acteurs français :

Aubert & Duval, les poudres métalliques 

Four­nisseur de poudres métalliques, il présente une nou­velle gamme de matéri­aux haute per­for­mance pour des machines laser-lit de poudre comme EOS, SLM Solu­tions, AddUp, etc. : des alliages base nick­el des­tinés à un usage à haute tem­péra­ture jusqu’à 900 °C, résis­tant à l’oxydation, pour des appli­ca­tions telles que les moteurs spa­ti­aux, les tur­bines aéro­nau­tiques et à gaz et la com­péti­tion auto­mo­bile ; des poudres aci­er inoxyd­able en 316L et 17–4PH pour usages médi­caux, indus­triels et du luxe, Aubert & Duval a dévelop­pé un procédé unique qui per­met d’obtenir une très grande pro­preté des poudres pro­duites sur les plus grands atom­iseurs du monde avec une charge de plus de 10 tonnes ; ain­si que des poudres de titane, pour usages aérospa­ti­aux et médicaux.

“Des moulages
par injection pour les chaussures d’Usain Bolt.”

Arkema décline une infinité d’applications

Chimiste de spé­cial­ité, spé­cial­iste de matéri­aux avancés, Arke­ma a dévelop­pé des appli­ca­tions de pro­duits en impres­sion 3D pour accom­pa­g­n­er les secteurs-clients de longue date comme l’aéronautique et le sport. C’est aujourd’hui toute une palette de pro­duits qui con­cerne, out­re les 2 secteurs nom­més, le den­taire, le médi­cal, l’automobile. Arke­ma développe une gamme de pro­duits qui cou­vre les prin­ci­pales tech­nolo­gies d’impression 3D et s’appuie sur des parte­nar­i­ats avec des lead­ers de la fab­ri­ca­tion de machines comme HP, EOS, Prod­ways ou Car­bon. Citons le Kep­stan® PEKK, qui est un polymère qui tient les hautes tem­péra­tures (260 °C) pour les appli­ca­tions aéro­nau­tiques. Arke­ma développe avec ses parte­naires des fil­a­ments et des poudres de PEKK chargés, ce qui per­met l’impression de pièces ren­for­cées très résis­tantes et légères par­ti­c­ulière­ment adap­tées aux con­traintes aéro­nau­tiques. Citons encore les résines pho­torétic­u­la­bles (util­isées par exem­ple par les machines Prod­ways en bijouterie ou en den­tis­terie). Ce sont ces mêmes résines qui sont util­isées avec la machine Car­bon pour la fab­ri­ca­tion annuelle de dizaines de mil­liers de semelles de chaus­sure de sport. Un marché qu’Arkema con­naît bien puisque son ther­mo­plas­tique élas­tomère phare Pebax® est util­isé depuis des années en moulages par injec­tion pour les chaus­sures d’Usain Bolt. Le Pebax® juste­ment, ce matéri­au à mémoire de forme, est main­tenant disponible pour l’impression 3D sous forme de fil­a­ment ou de poudre. Sa légèreté et son élas­tic­ité uniques attirent l’attention des secteurs du sport et de l’électronique où Arke­ma est très présent, par exem­ple dans les écrans de télé­phone – avec les polymères élec­troac­t­ifs de Piezotech – ou dans les bat­ter­ies. Arke­ma est le seul chimiste au monde à pro­duire du Polyamide 11, un matéri­au qui pos­sède une duc­til­ité et une résis­tance aux chocs uniques dans le monde de l’impression 3D. Ce matéri­au est util­isé par la société anglaise HEXR qui fait des casques de vélo sur mesure très solides, légers, avec beau­coup d’aération… BMW pro­pose dans la nou­velle ver­sion des Mini le pro­gramme Mini Yours : chaque client peut per­son­nalis­er la planche de tableau de bord qui fait face au pas­sager, tou­jours en PA11, seul matéri­au qui tenait les très hautes exi­gences de sécu­rité, en cas d’accident, car la planche de bord doit résis­ter au choc du pas­sager et ne pas éclater.

Erpro établit un record avec les brosses de mascara Chanel 

Biosour­cé (d’origine végé­tale), le PA11 est un matéri­au ven­du sous la mar­que Ril­san®. L’une des util­i­sa­tions remar­quables de ce Ril­san est faite par la société Erpro, un fab­ri­cant français de pièces qui utilise dif­férentes machines d’impression 3D et de mul­ti­ples matéri­aux. Pour Chanel, Erpro a réus­si à imprimer sur des machines EOS une brosse de mas­cara en Ril­san® PA11 à la fois flex­i­ble et très résis­tant, qui per­met de dépos­er le mas­cara sur les cils d’une façon homogène sans avoir à recharg­er la brosse : « Le Vol­ume Révo­lu­tion de Chanel ». À cette occa­sion, Erpro a établi un record du nom­bre de pièces en fab­ri­ca­tion addi­tive, en imp­ri­mant un mil­lion de bross­es par mois, avec une pro­duc­tion en mai 2020 de 18 mil­lions de bross­es. Gageons que ce n’est qu’un début… 


Références

  • L’impression 3D : Porte d’entrée dans l’industrie du 21e siè­cle, Joël Rosen­berg, Pas­cal Morand, Dominique Tur­cq, sep­tem­bre 2015 – CCI Paris-IdF & CGARm & Insti­tut Boost­zone – télécharge­able gra­tu­ite­ment sur inter­net : https://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/impression-3d-etude-1509.pdf
  • Fab­ri­ca­tion addi­tive, Claude Bar­li­er, Alain Bernard, Dun­od, avril 2016.
  • L’impression 3D et le droit d’auteur, CSPLA, juin 2016.
  • Futur de la fab­ri­ca­tion addi­tive, DGE, CGET, Pipame, jan­vi­er 2017.
  • Wohlers Report 2020.

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