Eumetsat : un engagement fort sur les questions climatiques

Dossier : Dossier FFEMagazine N°714 Avril 2016
Par Alain RATIER (78)

Quelques mots pour nous présenter EUMETSAT, votre périmètre d’action, vos missions et objectifs ?

EUMETSAT a été créé en 1986 pour prendre en charge les satel­lites Meteo­sat opé­ra­tion­nels, dont l’apport à la pré­vi­sion météo­ro­lo­gique avait été démon­tré par le pro­gramme Meteo­sat de l’ESA.

Aujourd’hui, l’organisation regroupe 30 états membres – 26 membres de l’EU, Islande, Nor­vège, Suisse et Tur­quie – et capi­ta­lise plus de 30 ans d’observations de l’atmosphère, des océans et des terres émergées.

Notre mis­sion ini­tiale était de déve­lop­per et exploi­ter des satel­lites opé­ra­tion­nels pour la sur­veillance du temps, dans le cadre de pro­grammes obli­ga­toires finan­cés par nos états membres au pro­ra­ta de leur PIB.

NOTRE MISSION INITIALE ÉTAIT DE DÉVELOPPER ET EXPLOITER DES SATELLITES OPÉRATIONNELS EUROPÉENS POUR LA SURVEILLANCE DU TEMPS. EN 2000, CETTE MISSION A ÉTÉ ÉTENDUE À LA SURVEILLANCE DU CLIMAT ET LA DÉTECTION DU CHANGEMENT CLIMATIQUE.

En 2000, cette mis­sion a été éten­due à la sur­veillance du cli­mat et à la détec­tion du chan­ge­ment cli­ma­tique, en ouvrant la pos­si­bi­li­té de pro­grammes sup­plé­men­taires à carac­tère option­nel. Le pre­mier pro­gramme option­nel consa­cré au cli­mat a été la mis­sion « Jason‑2 » de sur­veillance des cou­rants océa­niques et du niveau de la mer, en coopé­ra­tion avec le CNES et les États-Unis.

Nous déli­vrons H24 des ser­vices de don­nées à toutes les par­ties pre­nantes, grâce à des seg­ments sol per­met­tant de col­lec­ter, trai­ter, dis­tri­buer en temps réel et archi­ver les don­nées de notre flotte de satel­lites. Cette flotte com­prend aujourd’hui 9 satel­lites sur 3 orbites dif­fé­rentes – 5 Meteo­sat, 2 Metop et 2 Jason par­ta­gés avec le CNES et les États-Unis – et 15 satel­lites sont en cours de déve­lop­pe­ment pour garan­tir la conti­nui­té de l’observation jusqu’en 2040.

Nous serons aus­si l’opérateur des mis­sions Sen­ti­nelle ‑3, ‑4, ‑5 et ‑6 du pro­gramme Coper­ni­cus de l’Union Euro­péenne consa­crées à la sur­veillance de l’océan et de la com­po­si­tion atmo­sphé­rique, dont deux seront réa­li­sées par des ins­tru­ments sup­plé­men­taires embar­qués sur nos satellites.

Depuis 2000, l’une de vos missions principales est la surveillance du changement climatique : en quoi cela consiste-t-il ?

D’abord, assu­rer la conti­nui­té des obser­va­tions glo­bales de l’atmosphère, de l’océan et des sur­faces conti­nen­tales sur plu­sieurs décen­nies. Pour C’est notre rai­son d’être, pour la météo­ro­lo­gie comme pour le climat.

cela, nous exploi­tons des séries de plu­sieurs satel­lites iden­tiques et nous déve­lop­pons en paral­lèle les futurs sys­tèmes de nou­velle géné­ra­tion, équi­pés de nou­velles capa­ci­tés d’observation.

Pour dis­po­ser de longues séries d’observations cohé­rentes, il faut aus­si garan­tir l’inter-étalonnage entre les satel­lites suc­ces­sifs d’une même série et d’une géné­ra­tion à la sui­vante, grâce à des périodes de recou­vre­ment en orbite et en conser­vant les don­nées de carac­té­ri­sa­tion de chaque ins­tru­ment d’observation fabriqué.

Nous pro­cé­dons au rééta­lon­nage et au retrai­te­ment sys­té­ma­tique des don­nées his­to­riques avec les meilleurs algo­rithmes dis­po­nibles pour mettre à dis­po­si­tion des cher­cheurs et des four­nis­seurs de ser­vices cli­ma­to­lo­giques les longues séries homo­gènes dont ils ont besoin.

EUMETSAT joue un rôle actif dans la coor­di­na­tion inter­na­tio­nale de cet effort qui implique des opé­ra­teurs de satel­lites des États-Unis, de Chine, d’Inde, du Japon, de Rus­sie, etc.

Enfin, la sur­veillance du cli­mat exige un ser­vice d’archivage de grande capa­ci­té : nous avons atteint le Peta­oc­tet en 2015 et dis­po­sons de capa­ci­tés suf­fi­santes jusqu’en 2025.

Quels sont les moyens que vous mettez à la disposition des différentes parties prenantes dans le cadre du changement climatique et de sa surveillance ?

Nous met­tons à dis­po­si­tion toutes les infor­ma­tions extraites des obser­va­tions de nos satel­lites et de celles des mis­sions Coper­ni­cus que nous exploi­tons, en offrant un accès sans limite à nos archives, qui contiennent des séries cli­ma­to­lo­giques de qua­li­té contrô­lée, consti­tuées d’observations ré-éta­lon­nées, retrai­tées et validées.

Nous orga­ni­sons aus­si des for­ma­tions, nous par­ti­ci­pons à des pro­jets euro­péens de recherche visant à déve­lop­per les ser­vices cli­ma­to­lo­giques et nous accueillons des visi­teurs scien­ti­fiques du monde entier.

Quels sont les enjeux, mais aussi les axes de développement que vous avez identifiés ?

Le pre­mier enjeu, c’est d’alimenter en séries homo­gènes retrai­tées de plus en plus longues et de plus en plus fiables les ser­vices d’information cli­ma­to­lo­gique qui se déve­loppent en Europe, sous l’impulsion de Copernicus.

Il nous faut déve­lop­per des méthodes d’estimation des incer­ti­tudes, en garan­tis­sant leur tra­ça­bi­li­té de l’observation en orbite au pro­duit final, ce qui exige un tra­vail scien­ti­fique considérable.

NOUS CONTRIBUONS DÉJÀ À LA DYNAMIQUE CRÉÉE PAR LA COP21, MAIS NOUS SOUHAITONS PARTICIPER AU DÉFI DE LA SURVEILLANCE DES ÉMISSIONS ANTHROPOGÉNIQUES ET DES AUTRES FLUX DE CARBONE EN DEVENANT L’OPÉRATEUR DE NOUVELLES MISSIONS EUROPÉENNES DE SURVEILLANCE DU CO2 ATMOSPHÉRIQUE.

Dès 2016, nous allons déli­vrer plus d’observations des océans, en pour­sui­vant avec nos par­te­naires la mis­sion Jason avec Jason 3, lan­cé le 17 jan­vier der­nier, sui­vi de deux satel­lites Jason-CS (Conti­nui­té de Ser­vice), et en exploi­tant la mis­sion océa­nique Sen­ti­nelle-3A de Coper­ni­cus, lan­cée le 16 février dernier.

Pour pré­pa­rer l’avenir à long terme de l’observation, nous devons assu­rer le suc­cès des pro­grammes de déve­lop­pe­ment de nou­veaux sys­tèmes très inno­vants – Meteo­sat de Troi­sième Géné­ra­tion (MTG) et Sys­tème polaire de seconde géné­ra­tion (EPS-SG) – qui mobi­lisent plus de 6 mil­liards d’euros d’investissement de nos Etats-Membres.

Avec ces sys­tèmes, on dis­po­se­ra en 2040 d’enregistrements cli­ma­to­lo­giques de plus de 60 ans. Enfin, même si les don­nées spa­tiales sont extrê­me­ment struc­tu­rées, nous tra­vaillons sur une stra­té­gie d’exploitation des tech­no­lo­gies « Big Data » pour faci­li­ter leur uti­li­sa­tion croi­sée avec d’autres sources d’information.

Ain­si, nous contri­buons déjà à la dyna­mique créée par la COP21, mais nous sou­hai­tons aus­si par­ti­ci­per au défi de la sur­veillance des émis­sions anthro­po­gé­niques et des autres flux de car­bone en deve­nant l’opérateur de nou­velles mis­sions Euro­péennes d’observation du CO2 atmo­sphé­rique, venant en com­plé­ment des capa­ci­tés d’observation de la com­po­si­tion atmo­sphé­rique de nos propres mis­sions et des mis­sions Sen­ti­nelle- 4 et ‑5 que nous exploi­te­rons à l’horizon 2020.

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