Être mère et travailler : c’est tout à fait compatible

Dossier : ExpressionsMagazine N°686 Juin/Juillet 2013
Par Diane DESSALLES-MARTIN (76)

La Jaune et la Rouge anime, soude la com­mu­nau­té poly­tech­ni­cienne et est le reflet des hommes et des femmes qui la composent. 

Les opi­nions peuvent être diverses. Il me semble impor­tant de mettre en regard de l’article de Mme Rou­vier l’opinion de femmes poly­tech­ni­ciennes dont le par­cours et les valeurs s’inscrivent en faux par rap­port aux affir­ma­tions déve­lop­pées dans l’article.

L’article, de par son titre, a pour ambi­tion d’expliquer pour­quoi les Euro­péennes ont peu d’enfants et, par voie de consé­quence, de pro­po­ser des pistes pour inver­ser cette ten­dance. Consta­tons que les thèmes évo­qués, les argu­ments avan­cés n’expliquent en rien le pro­pos ini­tial. Ils ne sont aucu­ne­ment étayés par des études socio­lo­giques et, pour cer­tains, sont car­ré­ment contre­dits par la réa­li­té de la situa­tion en Europe. 

Les femmes ont aujourd’hui en France la pos­si­bi­li­té et le droit de choi­sir la mater­ni­té. C’est une liber­té fon­da­men­tale. Pour celles qui font le choix de la mater­ni­té, dési­rer, attendre, mettre au monde des enfants est une période magique et fait entiè­re­ment par­tie de la vie d’une femme qui veut par­ti­ci­per à cette aven­ture, pro­jet qui se par­tage à deux au sein du couple, dans un bon­heur et une res­pon­sa­bi­li­té entiè­re­ment partagés. 

Pas­sons rapi­de­ment sur le carac­tère futile des com­men­taires sur la tenue ves­ti­men­taire et le corps fémi­nin qui ne serait pas valo­ri­sé lorsqu’il est por­teur de pro­messe : encore heu­reux que les créa­teurs de mode ne s’y sont pas trom­pés et savent pro­po­ser des gammes qui mettent en valeur les rondeurs. 

Allons au plus sérieux : au « carac­tère incon­ci­liable du tra­vail fémi­nin et d’une mater­ni­té plei­ne­ment et dura­ble­ment assu­mée ». Vou­loir assu­mer entiè­re­ment une vie pro­fes­sion­nelle inté­res­sante tout en ayant le sou­ci d’une famille équi­li­brée, c’est la gageure, le petit exploit quo­ti­dien de bon nombre de poly­tech­ni­ciennes, puisqu’il s’agit de notre com­mu­nau­té, mais aus­si de nom­breuses femmes dans notre pays. 

Il est vrai­ment pos­sible de conci­lier vie pro­fes­sion­nelle et mater­ni­té : éle­ver ses enfants, accom­pa­gner leur déve­lop­pe­ment, les voir s’épanouir. Il faut le dire. Le pire serait de bais­ser les bras. 

Lais­ser croire à cette impos­si­bi­li­té, c’est deman­der aux femmes de faire un choix exclu­sif entre car­rière pro­fes­sion­nelle et « car­rière » familiale. 

Devant ce choix cor­né­lien, les femmes modernes récla­mant leur par­ti­ci­pa­tion à la vie active penchent vers la solu­tion de la « non­ma­ter­ni­té ». Un pays euro­péen comme l’Allemagne, qui valo­rise à l’extrême la posi­tion de la mère au foyer, en fait l’amère expé­rience. Loin d’améliorer le taux de nata­li­té, cet état d’esprit rend la démo­gra­phie alle­mande problématique. 

Comme démen­ti fla­grant à l’assertion de Mme Rou­vier, je conseille la lec­ture du livre récent, édi­té à l’occasion du qua­ran­tième anni­ver­saire de l’entrée des femmes à l’X : Femmes de pro­grès, femmes de Poly­tech­nique.

Y sont décrits une palette de par­cours pro­fes­sion­nels de poly­tech­ni­ciennes. Elles n’ont renon­cé ni à leur fémi­ni­té, ni à leur mater­ni­té. Elles mènent des car­rières pas­sion­nantes, contri­buant au rayon­ne­ment de notre École. 

Pour que les mères se sentent plei­ne­ment accueillies dans la com­mu­nau­té, il faut les aider, les encou­ra­ger. À ce titre, l’organisation de la socié­té fran­çaise a por­té ses fruits : ne pas culpa­bi­li­ser les mères qui tra­vaillent, béné­fi­cier d’écoles mater­nelles de qua­li­té le plus tôt pos­sible, valo­ri­ser le métier d’assistante mater­nelle, pro­po­ser des centres aérés en dehors des horaires scolaires. 

Il faut être vigi­lant et atten­tif à gar­der ces avan­tages qui nous dis­tinguent de nom­breux autres pays européens. 

Doit-on évo­quer l’avis de l’auteure de l’article sur la rela­tion amou­reuse ? Une « image ter­ri­fiante de l’acte amou­reux » serait véhi­cu­lée par les médias. Par­ler à nos jeunes, les mettre en confiance, s’assurer qu’ils savent se pro­té­ger contre les pièges de la vie, ce n’est pas les terrifier. 

Il faut trou­ver les mots justes, c’est tout. 

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