Éthique et pratique sportive

Dossier : ExpressionsMagazine N°670 Décembre 2011
Par Serge DERONGS

La pra­tique sportive organ­ise la ren­con­tre d’individus qui vont s’opposer en obser­vant des règles et en se con­for­mant à cer­taines valeurs morales. Ces règles et cette morale organ­isent le sport, en fix­ent les lim­ites et tran­scen­dent le com­porte­ment du pratiquant.

L’émergence du sport mod­erne dans les col­leges anglo-sax­ons au XIXe siè­cle est liée à la volon­té de « grands édu­ca­teurs » de for­mer des élites dotées de capac­ités com­porte­men­tales et de valeurs morales élevées : celles-ci sont par­fois évo­quées sous le terme de fair-play.

Celui-ci se voit d’emblée con­fron­té au respect de ces règles et de ses adver­saires. Dans sa recherche per­son­nelle d’excellence, il fait appel à ses qual­ités et à sa volon­té. Les dirigeants sportifs et les enseignants s’emploient à inscrire sa démarche de pro­grès dans l’esprit du jeu, dans la maîtrise de soi, dans la loy­auté envers les autres, dans la dig­nité lors des défaites et dans l’humilité lors des victoires.

La con­fronta­tion sportive amène les par­tic­i­pants à une coopéra­tion qui se situe entre con­cur­rence et entraide. Cette coopéra­tion, qui fait naître tolérance et com­préhen­sion mutuelle, per­met de décou­vrir la notion de fraternité.

Ne pas céder à l’adversité

Au-delà de la morale sportive, des­tinée à s’épanouir ultérieure­ment dans la vie sociale, le pra­ti­quant peut trou­ver une pos­si­bil­ité d’aller plus loin et d’élaborer une éthique per­son­nelle. Celle-ci prend dif­férents aspects selon la sen­si­bil­ité de cha­cun. Le pra­ti­quant apprend que, pour réus­sir, il ne doit pas céder à la dif­fi­culté ou à l’adversité. Il doit vouloir ce qu’il désire. Ce vouloir doit être suff­isam­ment affer­mi pour qu’il ne se laisse pas détourn­er de son désir. Jacques Lacan, psy­chi­a­tre et psy­ch­an­a­lyste bien con­nu, for­mule cette démarche éthique per­son­nelle en un apho­risme : « Ne pas céder sur son désir. »

Répondre de ses actes

La con­fronta­tion sportive amène à une coopéra­tion qui se situe entre con­cur­rence et entraide

Le pra­ti­quant peut aus­si priv­ilégi­er une éthique tournée vers l’autre. Max Weber, soci­o­logue et écon­o­miste alle­mand, l’un des fon­da­teurs de la soci­olo­gie mod­erne, évoque la néces­sité d’une éthique de respon­s­abil­ité qui repose sur l’acceptation de répon­dre de ses actes. Ain­si le pra­ti­quant, tout entier tourné vers l’action, apprend à mesur­er ce qu’il fait et à en assumer les conséquences.

Au-delà de ces exem­ples, d’autres démarch­es éthiques per­son­nelles peu­vent s’élaborer dans le cadre de la pra­tique sportive, quelles que soient les dis­ci­plines con­cernées, des plus col­lec­tives aux plus individuelles.

Un contexte éducatif

À l’École poly­tech­nique, la for­ma­tion sportive, une des com­posantes de la for­ma­tion humaine et mil­i­taire, porte dans ses pro­jets péd­a­gogiques la volon­té de trans­met­tre les valeurs du sport et s’efforce d’offrir à l’ensemble des élèves du cycle ingénieur, mais égale­ment à des mas­ters, des pro­grammes inter­na­tionaux, voire des doc­tor­ants, un con­texte édu­catif dans lequel cha­cun peut con­tin­uer à con­stru­ire son éthique per­son­nelle. Cette ambi­tion de con­tribuer à la réflex­ion sur l’éthique des décideurs de demain repose sur un idéal : trans­met­tre, par la pra­tique et l’échange, nos valeurs humaines et sportives au plus grand nombre.

Commentaire

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dun­ablarépondre
2 décembre 2011 à 17 h 40 min

fasci­nant
le niveau intel­lectuel de la jaune et la rouge ne cesse de s’élever…

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