Antenne 4G

Des standards de communication ouverts et universels sont indispensables

Dossier : L'internet des objetsMagazine N°723 Mars 2017
Par Laurent TOUTAIN
Par Alexander PELOV

Les objets con­nec­tés doivent évide­ment pou­voir com­mu­ni­quer, avec des par­tic­u­lar­ités par rap­port aux réseaux habituels, en par­ti­c­uli­er en ce qui con­cerne l’au­tonomie énergé­tique, la dis­tance et les coûts de trans­mis­sion. Des solu­tions spé­ci­fiques exis­tent mais la 4G et bien sûr la 5G ont des canaux spé­ci­fiques pour ces fonctions. 

En matière d’autonomie et de coût de trans­mis­sion, de nou­velles tech­nolo­gies de trans­mis­sion sont venues rebat­tre les cartes en pro­posant des approches en rup­ture avec les réseaux de com­mu­ni­ca­tion habituels. Elles se basent sur l’utilisation de fréquences radios util­is­ables sans licence. 

« Il est possible de transmettre des données à très faible puissance sur de très grandes distances »

Orig­i­nale­ment, cette gamme de fréquence autour des 868 MHz était des­tinée aux com­mu­ni­ca­tions à courte dis­tance, comme le con­trôle d’une porte de garage ou des équipements domotiques. 

Les pro­grès en traite­ment du sig­nal per­me­t­tant d’étendre la portée des trans­mis­sions ouvrent ces fréquences à des appli­ca­tions pour la ville, l’agriculture, la ges­tion de l’énergie, l’industrie.

Il est ain­si pos­si­ble de trans­met­tre des don­nées à très faible puis­sance (25 mW) sur de très grandes dis­tances ; de l’ordre de quelques kilo­mètres en ville et de plusieurs dizaines en cam­pagne. Les objets jouis­sent d’une autonomie de plusieurs années. 

REPÈRES

Si on utilise beaucoup le terme d’Internet des objets, l’intégration desdits objets dans le Web est loin d’être aussi poussée. Les protocoles et les applications mis en oeuvre ne garantissent aucune interopérabilité entre des systèmes similaires. Cette approche verticale ou en silos permet un développement rapide, mais limite la pérennité et induit des coûts de conception plus élevés. Or si certaines niches, comme la gestion de la collecte des déchets, justifient ces développements spécifiques, cela ne représente qu’une petite fraction des 60 milliards d’objets prévus par les analystes en 2020.

DES ÉMISSIONS LIMITÉES

En con­trepar­tie, la quan­tité d’émission est forte­ment lim­itée pour per­me­t­tre la cohab­i­ta­tion des dif­férents ser­vices. Le régu­la­teur impose qu’un équipement ne puisse émet­tre au max­i­mum que 1 % du temps (i.e. 36 s par heure) sur des canaux déjà à bas débit. 

L’architecture du réseau se voit sim­pli­fiée et par con­séquent les coûts de col­lecte des don­nées s’en trou­vent allégés. Des relais, placés sur des points hauts du ter­ri­toire, vont capter les mes­sages émis par les objets. 

Le mail­lage rel­a­tive­ment fin, mais beau­coup moins dense que pour les réseaux cel­lu­laires de télé­phonie, assure une très forte prob­a­bil­ité de récep­tion, voire une local­i­sa­tion des équipements. Deux tech­nolo­gies se sont imposées. 

LE MODÈLE SIGFOX…

La société Sig­fox déploie un réseau mon­di­al unique­ment adap­té à la com­mu­ni­ca­tion des objets. Un objet peut émet­tre jusqu’à 140 mes­sages par jour d’une taille max­i­male de 12 octets (ce qui cor­re­spond à la taille d’une coor­don­née GPS) et recevoir 4 mes­sages du réseau. Les mes­sages sont répétés trois fois sur des fréquences choisies aléa­toire­ment en util­isant le codage Ultra Nar­row Band. 

Ces choix qui peu­vent sem­bler dras­tiques priv­ilégient les remon­tées de don­nées par les cap­teurs et sont adap­tés pour la plu­part des usages. Cela per­met d’avoir des objets très sim­ples, peu coû­teux, ayant une forte autonomie qui ne se réveil­lent que pour trans­met­tre leurs données. 

… ET LA SOLUTION SEMTECH

Actuelle­ment les opéra­teurs télé­coms préfèrent l’approche du fab­ri­quant de com­posants élec­tron­iques Semtech qui a intro­duit la mod­u­la­tion LoRa. Cette approche ne se situe pas au même endroit dans la chaîne de valeur. 

En effet, la LoRa Alliance stan­dard­ise sa couche réseau LoRaWAN garan­tis­sant l’interopérabilité entre les fab­ri­cants d’équipements, les opéra­teurs des réseaux et les con­cep­teurs de ser­vices. Les objets sont pilotés par le réseau pour s’adapter à dif­férentes configurations. 

Ce cou­plage des objets avec le réseau offre un plus grand éven­tail de mode de fonc­tion­nement en con­trepar­tie d’une com­plex­ité de ges­tion un peu plus élevée par rap­port à Sig­fox. Il est égale­ment pos­si­ble de con­stru­ire des réseaux privés cou­vrant une entre­prise, une ville, etc. 

SANS OUBLIER LA « 4G » DE LA TÉLÉPHONIE MOBILE

Le secteur des télé­coms a été devancé par les acteurs comme Sig­fox ou LoRa, mais il a égale­ment adap­té ses stan­dards pour le GSM et la 4G. La 4G inclut dans les nou­velles spé­ci­fi­ca­tions la pos­si­bil­ité de trans­met­tre à faible débit (Nar­row Band- IoT), mais surtout réduisant la con­som­ma­tion d’énergie pour une autonomie d’une dizaine d’années.

« Adapter les protocoles pour permettre aux objets de communiquer directement avec les autres équipements sur l’Internet »

Les déploiements sont prévus en 2017. Les trans­mis­sions se font dans la par­tie du spec­tre licen­ciée aux opéra­teurs offrant ain­si plus de capac­ité. La prochaine généra­tion (5G) per­me­t­tra égale­ment de pren­dre en compte des paramètres de qual­ité de ser­vice, comme le temps de réponse, essen­tiel à cer­taines appli­ca­tions comme la com­mu­ni­ca­tion avec les véhicules intelligents. 

D’autres déploiements sont en cours. En France, la société Qow­isio déploie un réseau sur des principes proches de Sig­fox. Dans le reste du monde, d’autres pro­to­coles sont envis­agés comme RPMA ou Weightless‑P.

LEVER LES FREINS À LA DÉMOCRATISATION

Si les radios longue portée réduisent dras­tique­ment le coût de la trans­mis­sion, le coût de ges­tion des équipements, la mise en place d’infrastructures robustes reste un frein à la démocratisation. 


La 4G per­met des trans­mis­sions à faible débit. © JONATHAN STUTZ / FOTOLIA.COM

Dans les approches décrites précédem­ment, toutes les don­nées sont envoyées dans le cloud pour être traitées. 

Les développeurs doivent définir leur mod­èle d’interaction avec les objets. Une inter­ac­tion plus forte avec l’Internet est le seul moyen d’obtenir des économies d’échelle, d’intégrer de manière trans­par­ente et sûre les don­nées provenant de réseaux longue portée. 

L’IETF, l’organisme de stan­dard­i­s­a­tion des pro­to­coles de l’Internet, a déjà défi­ni un ensem­ble de stan­dards pour rac­corder cer­taines caté­gories d’objets à l’Internet. Il s’agit prin­ci­pale­ment de redéfinir les pro­to­coles exis­tants afin de s’adapter aux con­traintes en ter­mes de traite­ment, de mémoire, d’alimentation électrique. 

Un des buts est d’atteindre une com­pat­i­bil­ité avec les stan­dards du Web, aus­si bien dans la représen­ta­tion des requêtes, des don­nées que sur les aspects de chiffre­ment et d’autorisation d’accès, pour inté­gr­er les objets dans l’écosystème exis­tant forte­ment dominant. 

FÉDÉRER LES INITIATIVES POUR PLUS DE STANDARDISATION

Pour pren­dre en compte les con­traintes de trans­mis­sion dras­tiques des réseaux radio longue portée, un groupe de tra­vail regroupant les prin­ci­paux intéressés vient d’être créé. Il a pour but d’adapter les pro­to­coles de l’Internet pour per­me­t­tre aux objets de com­mu­ni­quer directe­ment avec les autres équipements sur l’Internet.

Cela implique des mécan­ismes de com­pres­sion, mais égale­ment des briques de ges­tion des équipements stan­dard­is­és qui per­me­t­tent la mutu­al­i­sa­tion des infra­struc­tures et des objets. 

Même si on peut la déplor­er, l’absence de fédéra­tion est naturelle quand une nou­velle tech­nolo­gie arrive. Elle a été vécue dans les années 1980 à la nais­sance des réseaux infor­ma­tiques. Chaque méti­er définis­sait ses appli­ca­tions adap­tées et opti­misées pour son secteur. 

L’utilisation de stan­dards ouverts et uni­versels, qui com­parés à une solu­tion opti­misée peu­vent appa­raître moins per­for­mants, a per­mis le développe­ment rapi­de des réseaux et la créa­tion de ser­vices com­bi­nant dif­férentes sources d’information.

L’Internet des objets à grande échelle ne trou­vera son sens qu’avec une inté­gra­tion fine dans l’écosystème existant.

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