Démographie, évolutions nouvelles et tendances anciennes

Dossier : Démographie, un monde de disparitésMagazine N°685 Mai 2013
Par Christian MARCHAL (58)

Si la com­para­i­son des dernières sta­tis­tiques (2011) avec celles de 2001 mon­tre la pour­suite de la baisse de la fécon­dité mon­di­ale, cette ten­dance générale cache de pro­fondes disparités.

Si la com­para­i­son des dernières sta­tis­tiques (2011) avec celles de 2001 mon­tre la pour­suite de la baisse de la fécon­dité mon­di­ale, cette ten­dance générale cache de pro­fondes dis­par­ités. L’Afrique sub­sa­hari­enne reste très pro­lifique. Avec en moyenne près de trois enfants par femme, l’Asie mérid­ionale et l’Asie occi­den­tale restent en expan­sion, tan­dis que l’Asie ori­en­tale (surtout la Chine) est tombée plus bas que l’Europe avec 1,5 enfant par femme. Con­scient du prob­lème, le gou­verne­ment chi­nois autorise depuis 1996 les Chi­nois des cam­pagnes à avoir un deux­ième enfant, et même un troisième depuis une douzaine d’années. Les Amériques et l’Asie du Sud-Est sont dans une sit­u­a­tion inter­mé­di­aire, très voi­sine de l’équilibre. Avec 1,6 enfant par femme, l’Europe en est encore bien loin, mais s’en rap­proche lente­ment, par­ti­c­ulière­ment en Russie où de nom­breuses mesures natal­istes ont été prises.

L’Afrique du Nord adopte un com­porte­ment démo­graphique inat­ten­du. Dans cette région du monde, comme ailleurs, la fécon­dité a forte­ment bais­sé entre 1970 et 2005, mais on con­state un arrêt de la baisse en Tunisie et au Maroc, et même une remon­tée spec­tac­u­laire en Algérie. Une évo­lu­tion liée sans doute aux vari­a­tions de l’âge du mariage, à celles de la con­tra­cep­tion, à la dif­fu­sion de l’instruction, et peut-être à la fin de la sanglante guerre civile algérienne.

Mais les sur­pris­es démo­graphiques ne se lim­i­tent pas à la fécon­dité. Ain­si, tan­dis que l’espérance de vie pro­gresse à peu près partout, un phénomène longtemps tenu pour mar­gin­al prend de l’ampleur : l’avortement sélec­tif des filles devient un vrai prob­lème en Inde, en Chine et dans quelques autres pays. Des asso­ci­a­tions chi­nois­es, coréennes, taïwanais­es vont chercher des épous­es pour les jeunes céli­bataires dans tous les pays de l’Asie du Sud-Est.

Enfin, il faut se pencher sur l’évolution par­ti­c­ulière de l’Europe. Avec partout, même en France, une natal­ité insuff­isante pour le sim­ple renou­velle­ment des généra­tions, mal­gré des efforts et des pro­grès récents, l’Europe reste trib­u­taire d’une immi­gra­tion de plus d’un mil­lion de per­son­nes par an. Certes, avec de nou­veaux moyens de com­mu­ni­ca­tion, les dif­férences nationales, lin­guis­tiques ou raciales ne sont plus les obsta­cles qu’elles étaient autre­fois, mais les dif­férences cul­turelles demeurent prégnantes.

La civil­i­sa­tion européenne, essen­tielle­ment gré­co-latine et judéo-chré­ti­enne, pos­sède une grande homogénéité qui favorise les migra­tions intra-européennes. Cer­tains immi­grants venus d’autres pays s’y adaptent remar­quable­ment (Viet­namiens, Cam­bodgiens). Il n’en est pas de même des migrants orig­i­naires des pays musul­mans. Le fos­sé cul­turel n’est pas si grave en ce qui con­cerne les immi­grants de la pre­mière généra­tion : ils savent bien qu’ils ne sont pas chez eux. Il n’en est pas de même pour leurs enfants et leurs petits-enfants qui, con­sciem­ment ou non, voudraient que la société dans laque­lle ils vivent fonc­tionne en har­monie avec leurs con­vic­tions. Cela présage-t-il un con­flit des cul­tures ? Pas néces­saire­ment, car il existe des signes encour­ageants, en par­ti­c­uli­er en ce qui con­cerne l’évolution des musul­mans modernes.

On peut penser que l’avenir du monde dépend de ces évo­lu­tions, au moins autant que des faits démo­graphiques ou économiques purs.

Commentaire

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Charles Mon­neronrépondre
16 mai 2013 à 10 h 15 min

Et la capac­ité de la planète ?
Eton­nant de voir un dossier sur la démo­gra­phie mon­di­ale pass­er sous silence les prob­lèmes de développe­ment durable. La majorité des arti­cles sem­ble soutenir l’idée qu’il faut encour­ager les nais­sances ; la planète n’est pas force­ment de cet avis.

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