” De la théorie au concret ” David Fattal (98), lauréat du prix Pierre Faurre 2010

Dossier : ExpressionsMagazine N°664 Avril 2011
Par Pauline SERRAZ

En 2001, sor­ti cinquième de l’X, j’ai inté­gré briève­ment le corps des Mines avant de démis­sion­ner pour pour­suiv­re un PhD à Stan­ford, forte­ment influ­encé par Pierre Fau­rre lui-même.

J’a­ban­donne alors mes envies de physique des par­tic­ules pour finale­ment m’ori­en­ter vers l’in­for­ma­tique quan­tique et ter­min­er ma thèse sur les sources de pho­tons uniques.

Professeur ou industriel

Je dois à nou­veau faire face à un choix : entre un tenure track (pro­fesseur assis­tant avant tit­u­lar­i­sa­tion, NDLR) qui m’est pro­posé par le MIT et une propo­si­tion de Hewlett- Packard (HP) qui vient de créer un groupe de recherche sur l’in­for­ma­tique quan­tique, mon cœur bal­ance. Je me décide finale­ment pour HP qui m’of­fre la pos­si­bil­ité d’ac­quérir une expéri­ence indus­trielle dans un cadre par­ti­c­ulière­ment favor­able. HP recherche quelqu’un pour dévelop­per un ordi­na­teur quan­tique ; je suis embauché en post­doc puis en poste per­ma­nent six mois plus tard.

Utilis­er la lumière pour com­mu­ni­quer à l’in­térieur des puces

Beau­coup de liber­té et d’indépen­dance nous sont accordées dans le choix des direc­tions de recherche, notam­ment grâce à la présence de Ray Beau­soleil, qui a dévelop­pé l’al­go­rithme de la souris optique, couron­né d’un large suc­cès financier pour HP. Cet envi­ron­nement idéal pour faire de la recherche n’en devient pas moins un piège car nous man­quons d’ob­jec­tifs clairs.

Je fais donc le choix d’align­er mes recherch­es sur les objec­tifs à court et moyen terme d’HP. En clair, je tra­vaille désor­mais sur un pro­gramme d’in­ter­con­nex­ion optique, ou com­ment utilis­er la lumière pour com­mu­ni­quer à l’in­térieur des puces d’or­di­na­teur (entre deux processeurs par exem­ple). La lumière per­met de véhiculer l’in­for­ma­tion de manière plus dense que ne le peut un courant électrique.

Si l’on résume mon par­cours uni­ver­si­taire et pro­fes­sion­nel, on remar­que que j’ai com­mencé sur des travaux très théoriques pour essay­er de me rap­procher, ensuite, d’ap­pli­ca­tions concrètes.

Le choix industriel

Le choix de la Fon­da­tion pour m’at­tribuer le prix cette année récom­pense peut-être ce qu’on appelle le tech­ni­cal lead­er­ship. Mon par­cours théorique, voire tech­nique et math­é­ma­tique, à l’É­cole poly­tech­nique m’a aidé pour dévelop­per des appli­ca­tions con­crètes dans mon méti­er ; j’ai appliqué mes connaissances.

Quelques messages de vieux chouffe

Si je devais don­ner quelques con­seils d’an­cien à mes jeunes cama­rades de l’É­cole, je leur dirais d’os­er. Notre for­ma­tion nous ouvre beau­coup de portes, mais elle a sou­vent ten­dance à engen­dr­er une atti­tude trop pas­sive vis-à-vis du monde du tra­vail. Aux États-Unis, les under­grads sont impliqués dans la créa­tion d’en­tre­pris­es (start-ups) ou par­ticipent à de vrais pro­jets de recherche qui leur don­nent une expéri­ence con­crète (qui s’ap­par­ente à ce que font les élèves en Pro­jet sci­en­tifique col­lec­tif, NDLR) aboutis­sant sou­vent à une pub­li­ca­tion ou un brevet. Les élèves de l’X doivent pren­dre con­science qu’ils ont tous les out­ils à leur dis­po­si­tion pour porter eux aus­si leur mar­que sur le monde réel avant leur sor­tie de l’École.

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