Construire des infrastructures durables grâce à la digitalisation et à une meilleure connaissance des matériaux

Construire des infrastructures durables grâce à la digitalisation et à une meilleure connaissance des matériaux

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°788 Octobre 2023
Par Nicolas MIRAVALLS

Dans un pro­jet d’infrastructure, le choix des matéri­aux n’impacte pas seule­ment le coût. C’est aus­si un élé­ment décisif en matière de dura­bil­ité, d’empreinte car­bone et d’économie cir­cu­laire. Dans un secteur très con­som­ma­teur en matéri­aux, ORIS Mate­ri­als Intel­li­gence a dévelop­pé une plate­forme dig­i­tale qui per­met à tous les acteurs du monde de l’infrastructure d’avoir accès à une large base de don­nées et de nou­velles capac­ités de sim­u­la­tion pour opti­miser leurs pro­jets. Expli­ca­tions de Nico­las Miravalls, CEO d’ORIS Mate­ri­als Intel­li­gence. 

Comment est née la plateforme ORIS ? 

ORIS est née d’un con­stat très sim­ple : dans les pro­jets d’infrastructure, la con­som­ma­tion des matéri­aux n’est pas opti­male à cause de la forte décon­nex­ion qui existe entre les acteurs de cette chaîne et d’une mécon­nais­sance du rôle de ces matéri­aux. Pour appréhen­der cette prob­lé­ma­tique, ORIS se posi­tionne à la croisée de trois exper­tis­es : les matéri­aux de con­struc­tion, l’ingénierie envi­ron­nemen­tale et de l’infrastructure, et les tech­nolo­gies numériques avancées (en par­ti­c­uli­er, l’intelligence arti­fi­cielle). Com­binées, ces exper­tis­es per­me­t­tent d’établir des con­nex­ions et des syn­er­gies à forte valeur ajoutée au ser­vice d’une meilleure prise de décision. 

Au départ, la plate­forme a été dévelop­pée dans le cadre d’une ini­tia­tive intrapre­neuri­ale au sein du départe­ment de R&D de HOLCIM, un major des matéri­aux de con­struc­tion. Après des années d’incubation qui ont per­mis de dévelop­per la plate­forme et sa base de don­nées, ORIS Mate­ri­als Intel­li­gence est dev­enue une entre­prise indépen­dante en 2021. Aujourd’hui, cette indépen­dance nous per­met d’avoir plus de légitim­ité et de per­ti­nence vis-à-vis de l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur que nous adressons. 

Notre ambi­tion est de révo­lu­tion­ner le secteur de la con­struc­tion des infra­struc­tures en don­nant accès, de manière trans­par­ente, à la con­nais­sance des matéri­aux, un sujet qui doit être pris en compte dès les phas­es amont d’un pro­jet d’infrastructure. Les divers­es fonc­tion­nal­ités d’ORIS per­me­t­tent ain­si aux dif­férentes par­ties prenantes de faire des choix éclairés à toutes les étapes de leur pro­jet, depuis les phas­es de pré­con­cep­tion jusqu’à l’exécution.

À qui s’adresse-t-elle et à quels besoins répond-elle ? 

ORIS s’adresse à tous les acteurs de la con­struc­tion : les maîtres d’ouvrage, qui sont générale­ment les autorités publiques et les décideurs ; les design­ers ; les ingénieurs de pro­jet ; les maîtres d’œuvre ; les con­struc­teurs et les four­nisseurs de matéri­aux. Nous cou­vrons véri­ta­ble­ment tous les acteurs de cette chaîne de valeur, de l’amont à l’aval. En par­al­lèle, ORIS référence l’ensemble des matéri­aux de con­struc­tion disponibles pour chaque typolo­gie de pro­jet. 

Con­crète­ment, pour un pro­jet don­né, comme une route, il va être pos­si­ble de réalis­er des sim­u­la­tions sur ORIS et de créer des scé­nar­ios pour iden­ti­fi­er la solu­tion la plus per­ti­nente en fonc­tion de dif­férents critères (local­i­sa­tion, con­texte, enjeux, disponi­bil­ité, pro­priétés mécaniques et envi­ron­nemen­tales…). Alors que les matéri­aux impactent pour 60 % le coût des infra­struc­tures et 85 % l’empreinte car­bone, dis­pos­er des bonnes infor­ma­tions et de don­nées trans­par­entes pour objec­tiv­er les choix est plus que jamais stratégique ! 

Concrètement, comment fonctionne votre plateforme et que permet-elle de faire ? 

La plate­forme référence des mil­liers de don­nées sur des matéri­aux de con­struc­tion, ain­si que des infor­ma­tions con­textuelles sur les pro­jets (ter­rain, relief, cli­mat, sols…). À par­tir de cette base de don­nées, elle offre dif­férents ser­vices liés à la vis­i­bil­ité des matéri­aux, leur référence­ment, le cal­cul de l’empreinte car­bone, le coût de trans­port, l’optimisation des tra­jets, l’édition de doc­u­ments néces­saires à la ges­tion des déchets comme la déc­la­ra­tion d’acceptation préalable…

Elle offre aus­si des ser­vices d’ingénierie de pointe afin de cal­culer les impacts con­crets des matéri­aux, d’identifier des solu­tions alter­na­tives pour obtenir plus de cir­cu­lar­ité, moins d’impact car­bone, une meilleure résilience au change­ment cli­ma­tique, aux exi­gences en matière de sécu­rité routière… 

nos équipes peu­vent accom­pa­g­n­er nos clients dans leurs pro­jets les plus com­plex­es sur des sujets d’analyse d’impact, de pro­jets… Sur ce volet, récem­ment, pour un pro­jet de lien fer­rovi­aire d’une cen­taine de kilo­mètres com­por­tant 250 typolo­gies d’ouvrage, grâce à notre plate­forme, nous avons pu obtenir une opti­mi­sa­tion de l’empreinte car­bone de plus de 20 % et une iden­ti­fi­ca­tion des poten­tiels de réu­til­i­sa­tion des matéri­aux sur site pour réduire l’impact sur les ressources naturelles.

Notre manière d’appréhender l’impact des matéri­aux de con­struc­tion, dès la phase de con­cep­tion, en iden­ti­fi­ant des solu­tions alter­na­tives ou bien en réal­isant des sim­u­la­tions dans le con­texte réel du pro­jet per­met d’obtenir des opti­mi­sa­tions sig­ni­fica­tives. Par exem­ple, sur des pro­jets de chaussées, nous avons enreg­istré 15 à 30 % d’optimisation des coûts. En matière d’empreinte car­bone et d’utilisation des ressources naturelles, nous avons des taux d’optimisation qui peu­vent aller respec­tive­ment jusqu’à 50 et 80 % selon les solu­tions choisies. 

Cette démarche inclut aus­si la ques­tion de la main­te­nance des infra­struc­tures et per­met d’analyser le pro­jet sur le cycle de vie de l’ouvrage.

Au cœur de son modèle, on retrouve une démarche innovante qui se base sur des algorithmes uniques, de la data science et de l’intelligence artificielle. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

ORIS Mate­ri­als Intel­li­gence est une DeepTech. Ou nous qual­i­fie aus­si de Con­struc­tion­Tech d’InfraTech en fonc­tion de nos inter­locu­teurs. Dans le cœur tech­nologique de notre plate­forme, on retrou­ve plusieurs exper­tis­es et dis­ci­plines : la data sci­ence, l’ingénierie des matéri­aux, l’intelligence arti­fi­cielle, le machine learn­ing… Nos équipes ont aus­si des com­pé­tences avancées en cal­cul, en sim­u­la­tion, en sta­tis­tiques, en visu­al­i­sa­tion des don­nées, en exploita­tion et val­ori­sa­tion de la data… Nous déployons des algo­rithmes très avancés adossés à des tech­niques d’apprentissage automa­tique afin de faire de meilleures pro­jec­tions et recommandations. 

Au-delà de la trans­parence et de la lis­i­bil­ité de notre base de don­nées et des infor­ma­tions que nous met­tons à dis­po­si­tion des util­isa­teurs, nos recom­man­da­tions sont totale­ment neu­tres. Nous nous appuyons sur l’ensemble des normes inter­na­tionale­ment recon­nues pour effectuer les analy­ses. Par exem­ple, nos mod­èles de cal­cul de car­bone sont basés sur les normes européennes et ISO recon­nues en la matière. Dans ce cadre, nos mod­èles ont d’ailleurs été véri­fiés par Intertek. Les éval­u­a­tions de sécu­rité routière sont, quant à elles, réal­isées en parte­nar­i­at avec l’International Road Assess­ment Pro­gram (iRAP), une référence inter­na­tionale­ment recon­nue, notam­ment par les Nations Unis. Et enfin, sur les aspects cli­ma­tiques, nous util­isons les don­nées et les pro­jec­tions du GIEC qui sont nos références en ter­mes d’exposition cli­ma­tique aux dif­férents risques (chaleur, gel, inondation…). 

En matière d’économie circulaire, quelle est votre position de valeur ? 

L’économie des ressources pri­maires est intime­ment liée à la maîtrise de notre empreinte car­bone. Ces deux dimen­sions sont au cœur même du mod­èle et de l’approche d’ORIS Mate­ri­als Intel­li­gence. Nous dévelop­pons toutes les fonc­tion­nal­ités qui per­me­t­tent d’identifier la disponi­bil­ité et l’impact poten­tiel de l’économie cir­cu­laire dans le monde de l’infrastructure, qui con­somme énor­mé­ment de matéri­aux naturels. Pour un pro­jet don­né, nous allons pou­voir cal­culer automa­tique­ment des sché­mas alter­nat­ifs en nous bas­ant sur des indi­ca­teurs de cir­cu­lar­ité et d’économie cir­cu­laire. Les util­isa­teurs vont aus­si pou­voir iden­ti­fi­er à tra­vers ORIS la disponi­bil­ité des matéri­aux recy­clés ou issus de la démo­li­tion pour leur pro­jet. Dans ce cadre, sur un pro­jet fer­rovi­aire, nous avons été en mesure de simuler la réu­til­i­sa­tion et le réem­ploi de matéri­aux issus de tun­nels pour des ouvrages, des bétons, des fon­da­tions…

Aujourd’hui, comment vous projetez-vous sur le marché ? Quels sont vos enjeux et perspectives ? 

Nous sommes dans une phase de développe­ment très dynamique. Actuelle­ment, nous tra­vail­lons avec de grands acteurs du secteur de l’infrastructure à une échelle inter­na­tionale : AECOM, EGIS, Eiffage, Auto­bahn GmbH,…, mais aus­si des investis­seurs insti­tu­tion­nels comme la Banque Asi­a­tique de Développe­ment. Au-delà des ser­vices ren­dus au tra­vers de notre plate­forme, nous pou­vons aus­si les accom­pa­g­n­er dans leur pro­jet dans le monde entier grâce à notre offre de conseil. 

En par­al­lèle, nous tra­vail­lons sur l’amélioration de notre plate­forme pour la ren­dre plus acces­si­ble et per­me­t­tre à tous les acteurs du marché de l’utiliser de manière tou­jours plus autonome. 

Aujourd’hui, nous ciblons en pri­or­ité l’Europe avec la France, l’Allemagne, le Roy­aume-Uni et les pays nordiques. Nous nous dévelop­pons aus­si rapi­de­ment en Asie Cen­trale et en Afrique. Nous envis­ageons de nous dévelop­per prochaine­ment en Amérique du Nord. 

Les enjeux du secteur du trans­port en matière de mesure, maîtrise et opti­mi­sa­tion de l’impact des infra­struc­tures nous ouvrent, par ailleurs, de belles per­spec­tives de développe­ment. Plus par­ti­c­ulière­ment, en France, avec l’intégralité de nos offres, nous sommes en mesure de répon­dre aux besoins de toute la chaîne de com­mande de l’investissement pub­lic en matière d’infrastructures de trans­port, depuis la maîtrise d’ouvrage, avec les don­neurs d’ordre — munic­i­pal­ités, con­seil départe­men­tal, DREAL ou réseau nation­al — jusqu’à l’exécution en pas­sant par les four­nisseurs de matériaux !


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