Comment décider et gérer un programme de recherche scientifique ?

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°607 Septembre 2005Par : Bernard BEAUZAMY (68)Rédacteur : Gérard de LIGNY (43)

Ce qui devrait faire le suc­cès de cet ouvrage, c’est que c’est un “manuel pra­tique” pour un type d’utilisateur bien iden­ti­fié : l’entreprise. Celle-ci vise un résul­tat qui lui donne un atout dans l’exercice de son méti­er, ne seraitce que dépass­er le sim­ple empirisme et arriv­er à com­pren­dre “ com­ment ça marche ”. La dis­tinc­tion entre recherche fon­da­men­tale et appliquée n’est pas essen­tielle, car pour “com­pren­dre” il faut par­fois plonger dans le fonde­ment du savoir.

L’auteur éclaire très bien l’équilibre à assur­er entre l’exigence à l’égard du chercheur et la lib­erté à lui laiss­er, cela aux dif­férents stades du pro­gramme de recherche.

Il souligne le rôle indis­pens­able d’un obser­va­teur de la démarche des chercheurs, béné­fi­ciant d’un cer­tain recul qui lui fait détecter les voies sans issue et à l’inverse dis­cern­er les bons choix.

Les sit­u­a­tions aux­quelles l’ouvrage s’intéresse sont celles que l’entreprise ren­con­tre réelle­ment : des don­nées incom­plètes, des expéri­ences non répéta­bles, des mod­éli­sa­tions imparfaites…

Mais il faut quand même débouch­er, dans un délai com­pat­i­ble avec l’enjeu de la recherche, sur des répons­es util­is­ables et des déci­sions opéra­tionnelles, y com­pris quelque­fois celle de renoncer.

L’auteur est très pré­cis sur les critères de choix des per­son­nes à affecter à une recherche et du rôle à leur don­ner. Il est apparem­ment un peu sévère avec cer­tains pro­fils de chercheurs tels le thésard trop novice ou l’universitaire per­fec­tion­niste (dont il recon­naît pour­tant l’utilité dans une équipe insuff­isam­ment rigoureuse).

Mais l’ouvrage respire la com­pé­tence et la solide expéri­ence par sa façon d’examiner les divers aspects qui peu­vent se présen­ter. Cela lui per­met sou­vent d’affirmer sans démon­tr­er : les “ règles à respecter ” qu’il énonce relèvent du “ dire d’expert ” sûr de lui. En fait cet expert a der­rière lui un pal­marès de réus­sites assez excep­tion­nel : la “Société de Cal­cul Math­é­ma­tique ” – dont l’appellation sem­blait choisie pour faire fuir ses clients – a obtenu en dix ans une crédi­bil­ité défi­ant les som­bres pronos­tics de ses détracteurs. Bernard Beauza­my a l’élégance de ne pas s’en van­ter ; son livre n’est pas une brochure pub­lic­i­taire pour son cab­i­net. C’est plutôt un manuel pour ses clients, aus­si intel­li­gent que le petit livre de Bruno Latour sur la soci­olo­gie de la recherche, paru il y a une dizaine d’années.

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