Jean TIROLE (73)

Colloque de l’AX 2016 Table ronde : Emploi, un peu d’ambition !

Dossier : Publications des lecteursMagazine N°Colloque de l'AX 2016 Table ronde : Emploi, un peu d'ambition !

Chômage : organiser un Grenelle de l’emploi

Chris­tel Hey­de­mann (94), Senior Vice Pre­sident Cor­po­rate Stra­te­gy, Alliances & Deve­lop­ment de Schnei­der Electric,
Fran­cis Kra­marz ((76), direc­teur du CREST
et Gilles Mirieu de Labarre, pré­sident de Soli­da­ri­tés nou­velles face au chômage
ont eux aus­si appe­lé les poli­tiques à une vraie ambi­tion, en rup­ture avec la « pré­fé­rence fran­çaise pour le chô­mage ». Les visions idéo­lo­giques sont contre-pro­duc­tives : taxer les salaires de plus d’1 mil­lion € ne rap­porte presque rien mais dis­suade des grands groupes de s’ins­tal­ler ou se déve­lop­per en France.

Orga­ni­sons donc un véri­table Gre­nelle de l’emploi ! Nos maux viennent d’ins­ti­tu­tions qui ont atteint leurs limites : il faut les réfor­mer rapi­de­ment pour béné­fi­cier des oppor­tu­ni­tés qui se mul­ti­plient. Réfor­mer le mar­ché du tra­vail, c’est aus­si réfor­mer le mar­ché des biens et ser­vices. Tirer par­ti des nou­veaux mar­chés implique de revoir le mode d’ac­tion de la for­ma­tion pro­fes­sion­nelle : sur 32 mil­liards €, seule­ment 4 servent aux chô­meurs. Enfin, il faut revoir notre sys­tème de repré­sen­ta­tion qui ne donne pas la parole à ceux qui devraient parler.


Les articles de la brochure concernant l’emploi

Osons aller à contre-courant !

Jean TIROLE (73)
Prix Nobel d’économie

Le sujet dont je vais vous par­ler pour illus­trer l’intervention de l’économiste dans la poli­tique éco­no­mique est en fait mal choi­si : mes inter­ven­tions publiques dans ce domaine ont été jusqu’ici sans effet.

Il n’est pas besoin de vous dres­ser le constat de la situa­tion de l’emploi en France : elle est très mau­vaise. Nous sommes mar­qués par le type d’institutions de l’Europe du Sud, et nous serons sans doute les der­niers à les conser­ver. Ces ins­ti­tu­tions décou­ragent le recours au CDI, au pro­fit des CDD, avec des dis­po­si­tifs d’emplois aidés, une for­ma­tion pro­fes­sion­nelle très chère et cepen­dant peu effi­cace, une rup­ture conven­tion­nelle coû­teuse, etc.

Ceci a un double effet délé­tère : d’une part la géné­ra­li­sa­tion des CDD dis­suade l’entreprise d’investir à long terme dans le capi­tal humain de ses employés et coûte cher à l’assurance chô­mage du fait en par­ti­cu­lier de la per­mit­tence1 ; d’autre part la mobi­li­té reste limi­tée, car le sala­rié, même si son emploi ne le satis­fait pas, a peur du chan­ge­ment (vais-je retrou­ver un emploi équivalent ?).

Un emploi détruit, c’est une personne, un visage, et souvent un drame

Par ailleurs, le moral géné­ral en pâtit, avec une anxié­té qui atteint des sala­riés en CDI qui sont pour­tant par­mi les plus pro­té­gés au monde (à la dif­fé­rence par exemple des Danois, beau­coup moins pro­té­gés au niveau de l’emploi, mais pour­tant dotés d’une bien meilleure confiance dans leur ave­nir pro­fes­sion­nel. La Scan­di­na­vie pro­tège des per­sonnes plu­tôt que l’emploi). Il en découle un coût social bien sûr pour les sala­riés, mais aus­si pour l’État, coût qui finit d’ailleurs par retom­ber in fine sur le salarié.

Le syndrome de la victime identifiable

On peut se deman­der pour­quoi l’opinion publique ne voit pas ce qui se passe. Les psy­cho­logues avancent une expli­ca­tion : celle de la « vic­time iden­ti­fiable ». Il y a les vic­times que vous voyez, donc aux­quelles vous pou­vez vous iden­ti­fier, avec les­quelles vous pou­vez déve­lop­per de l’empathie. Et les vic­times indi­rectes que per­sonne ne voit.

On dis­tingue en éco­no­mie la « marge de créa­tion », les emplois qui se créent (on sait que les ins­ti­tu­tions fran­çaises actuelles décou­ragent la créa­tion d’emplois) et la « marge de des­truc­tion », avec bien sûr les licen­cie­ments. Un emploi non créé n’a pas de visage : il reste théo­rique, sans une per­sonne iden­ti­fiable. En revanche, un emploi détruit, c’est une per­sonne, un visage, et sou­vent – pré­ci­sé­ment dans nos pays – un drame.

Lorsque nous avions tra­vaillé sur ces ques­tions il y a une quin­zaine d’années avec Oli­vier Blan­chard, alors au MIT (il fut par la suite chef éco­no­miste du FMI), nous avions consta­té qu’une entre­prise qui pro­cède à un licen­cie­ment paie une par­tie du coût (l’indemnité de licen­cie­ment) mais de loin pas la tota­li­té du coût pour la socié­té, que prend en charge notam­ment l’assurance chô­mage. En revanche, celle qui garde ses sala­riés va être en quelque sorte « punie », car elle va payer les coti­sa­tions sociales qui ali­mentent les indem­ni­tés chô­mage géné­rées par celles qui licencient !

Le pollueur n’est pas le payeur

On est loin ici du prin­cipe pol­lueur-payeur qui a cours dans l’environnement. C’est même pire : celui qui ne pol­lue pas paye pour celui qui pol­lue. Vous me direz que ça ne se passe pas vrai­ment comme ça en France : il existe un contrôle des licen­cie­ments, exer­cés par les tri­bu­naux et les prud’hommes.

Mais ces der­niers ne peuvent pas faire grand-chose : ce n’est pas une ques­tion de com­pé­tence, mais de manque d’information sur l’opportunité de l’emploi pour l’entreprise, qui conduit sou­vent à des déci­sions arbi­traires (leur mis­sion est une mis­sion impossible).

Pour une responsabilisation des acteurs

Nous avions pro­po­sé un sys­tème bonus/malus, neutre en termes de pré­lè­ve­ment total pour les entre­prises. On encou­rage l’entreprise à ne pas trop licen­cier, en lui appli­quant une taxe de licen­cie­ment sous forme d’un malus sur les coti­sa­tions sociales ; l’entreprise qui garde ses sala­riés voit ses charges sociales allé­gées. Il y a aus­si bien sûr une mesure ex post : par exemple l’entreprise qui licen­cie un jeune infor­ma­ti­cien pari­sien de 30 ans, qui retrouve un emploi dès le len­de­main, n’a pas de rai­son de payer beau­coup de taxes.

Le chômage n’est pas un hasard

Était-ce réa­liste ? Oui, car ce sys­tème a été inven­té non pas par nous mais par Roo­se­velt, aux États-Unis, mais bien sûr dans un contexte de licen­cie­ments et d’indemnisation du chô­mage beau­coup plus faibles. Ce sys­tème a la ver­tu de res­pon­sa­bi­li­ser l’entreprise (et cor­ré­la­ti­ve­ment d’alléger la charge qui pèse sur les tri­bu­naux), mais aus­si de l’inciter à inves­tir sur son capi­tal humain, avec un per­son­nel qui aura ten­dance à res­ter plus long­temps. Elle éli­mi­ne­rait aus­si celles par­mi les rup­tures conven­tion­nelles qui sont prin­ci­pa­le­ment mues par l’externalisation du coût vers l’assurance chômage.

Le préalable : un accord bipartisan

Le chô­mage n’est pas un hasard. Il est struc­tu­rel en France, et cela ne va pas s’améliorer spon­ta­né­ment. Nous avons un pro­blème aigu de chô­mage des jeunes, et aus­si de la tranche 55–64 ans, dont le taux d’emploi est très faible en France. Réfor­mer est très dif­fi­cile, car on se heurte à des dif­fi­cul­tés des deux côtés : du côté des employeurs comme des sala­riés. C’est pour­quoi il est indis­pen­sable d’obtenir sur ce sujet un accord bipar­ti­san, de manière à avoir une cer­taine péren­ni­té, et que les acteurs puissent y croire.

Du côté des employeurs, c’est la crainte de se voir enga­gé par des CDI ; et du côté des sala­riés, c’est la crainte devant un sys­tème de contrat unique, qu’ils peuvent res­sen­tir comme une cer­taine pré­ca­ri­sa­tion. La solu­tion serait de main­te­nir les CDI ancienne for­mule pour les contrats exis­tants, et de pas­ser pro­gres­si­ve­ment aux CDI nou­velle for­mule lors des créa­tions de nou­veaux emplois.

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Syn­thèse des pro­pos tenus lors du col­loque du 10 décembre 2015.
1. Le terme de « per­mit­tence » désigne le phé­no­mène selon lequel des sala­riés béné­fi­ciant du régime de l’intermittence sont employés de façon per­ma­nente ou qua­si per­ma­nente par un même employeur. (source : Régime d’indemnisation des inter­mit­tents du spec­tacle, Cour des comptes, février 2007)

Jean-Claude PRAGER (64)Quelles mesures faudrait-il inventer aujourd’hui pour enfin résorber le chômage ?

Jean-Claude PRAGER (64)
Président de X‑Démographie-Économie

L’emploi et la baisse du chô­mage sont deve­nus le sujet le plus grave de la poli­tique fran­çaise après presque une qua­ran­taine d’années d’incapacité du pays à résor­ber un fléau des­truc­teur du lien social. Un jeune sur quatre se retrouve confron­té à une impasse pro­fes­sion­nelle. Les moindres sou­bre­sauts de la courbe du nombre de deman­deurs d’emploi agitent médias et poli­tiques. On a essayé nombre de pistes depuis l’opération des « 50 000 jeunes » à la fin 1975. Pra­ti­que­ment une mesure nou­velle chaque année.

On a essayé nombre de pistes, mais, en dehors des mul­tiples rap­ports aus­si­tôt oubliés, pour beau­coup du fait de l’absence de culture de l’évaluation des poli­tiques publiques dans notre pays, pas de recherche d’un diag­nos­tic serein et par­ta­gé sur l’efficacité réelle de la poli­tique éco­no­mique, celle de la poli­tique d’innovation et de crois­sance encore beau­coup mar­quée de l’interventionnisme des années 1980, celle de l’adaptation du droit du tra­vail de notre pays aux besoins de l’économie d’aujourd’hui.

Com­prendre et accep­ter les impé­ra­tifs de l’économie moderne où la réac­tion des entre­prises ne peut souf­frir de retards face aux chan­ge­ments tech­niques et des mar­chés du fait des sur­abon­dantes et instables régle­men­ta­tions dont notre pays est friand plus que les autres demande beau­coup de péda­go­gie, car, comme l’a mon­tré notre cama­rade Jean Pey­re­le­vade (X58) dans « His­toire d’une névrose »1, les Fran­çais, dans leur grande majo­ri­té et dans leur for inté­rieur, n’aiment pas leurs entre­prises, ils les veulent sou­mises au pou­voir poli­tique et pré­fèrent les rêves idéo­lo­giques dans les­quels un État omni­scient et omni­po­tent aurait la capa­ci­té de créer à sa guise richesse et emplois.

Et ils sont com­blés par le diver­tis­se­ment des gou­rous s’écharpant à coups d’anathèmes poli­tiques, beau­coup plus attrayants pour les indices d’écoute que des ana­lyses pru­dentes et les plus scien­ti­fiques pos­sible ou que des comptes ren­dus de négo­cia­tions dis­crètes et besogneuses.

En bref, cette ques­tion du chô­mage et de l’emploi est par excel­lence un mar­queur de la pré­fé­rence de la France pour le débat idéo­lo­gique au détri­ment des réa­li­tés éco­no­miques. Poli­tiques de tous bords, médias, experts, sont entraî­nés, par­fois mal­gré eux, dans une spi­rale polé­mique à chaque fois que la ques­tion du chô­mage et de la réforme du mar­ché du tra­vail revient au centre de l’agenda public. Le débat sur­réa­liste de la loi El Khom­ri en est un reflet éclatant.

Sur ce sujet de la recherche d’une crois­sance riche en emplois et du chô­mage, les rap­ports, les exper­tises, les études les plus sérieuses ne manquent pour­tant pas et les conclu­sions des éco­no­mistes sont assez conver­gentes. Il est néces­saire d’introduire au moins un peu de sou­plesse, voire plus, dans le droit du tra­vail, d’améliorer sérieu­se­ment la for­ma­tion pro­fes­sion­nelle des jeunes, en favo­ri­sant éga­le­ment leur mobilité.

Le débat idéologique au détriment des réalités économiques

Tout cela est prou­vé et bien connu et en par­ti­cu­lier a été illus­tré d’une manière excel­lente dans son der­nier petit livre par notre cama­rade Étienne Was­mer (X90), un des meilleurs spé­cia­listes actuels du sujet2 : le chô­mage de notre pays est assu­ré­ment lié au degré de pro­tec­tion de l’emploi, au niveau du salaire mini­mum, à l’importance et la com­plexi­té des taxes sur le tra­vail (le fameux coin fis­cal), au degré de cen­tra­li­sa­tion des négo­cia­tions pro­fes­sion­nelles, au degré de seg­men­ta­tion du mar­ché du tra­vail entre un sec­teur de forte pré­ca­ri­té et un sec­teur pro­té­gé voire super­pro­té­gé, for­mé des béné­fi­ciaires de CDI des grandes entre­prises et d’emplois sta­tu­taires (État, col­lec­ti­vi­tés locales, fonc­tion hos­pi­ta­lière, entre­prises publiques, etc.), aux insuf­fi­sances mar­quées de l’appareil édu­ca­tif et de for­ma­tion, et à l’absence de mobi­li­té du mar­ché du tra­vail ; sans par­ler, mais c’est un autre sujet, de la régle­men­ta­tion écra­sante et instable dans tous les domaines de la vie des entreprises.

Tout ce que l’on sait laisse à pen­ser que les effets à long terme des réformes sur ces ques­tions seront posi­tifs en termes de réduc­tion du chô­mage, mais les ana­lyses empi­riques exis­tantes ne peuvent pas dire sérieu­se­ment à quelle échéance ces effets posi­tifs se pro­dui­ront (pro­ba­ble­ment de 5 à 10 ans), ce que sera leur ampleur, ni ce qui se pas­se­ra concrè­te­ment entre-temps.

Quelles mesures prendre en prio­ri­té et com­ment pré­pa­rer les sala­riés à des tran­si­tions peut-être déli­cates ? Le débat est ouvert et il n’y a pas une seule bonne solu­tion. Et la manière dont sera réa­li­sé et accep­té un choix col­lec­tif majeur qui va peser sur les com­por­te­ments sociaux aura une forte inci­dence sur ses effets. C’est là que les enjeux exigent de savoir prendre le temps et les moyens d’expliquer l’intérêt de réformes en appa­rence à rebours du sens com­mun. Il n’est pas évident de faire com­prendre aux sala­riés que c’est la plus grande lati­tude de licen­cier lais­sée aux chefs d’entreprise qui sera por­teuse de créa­tions d’emplois. Ou qu’un peu de flexi­bi­li­té des salaires est une des condi­tions de la pros­pé­ri­té de tous et pas seule­ment de celle des patrons.

Le sens com­mun milite plu­tôt à l’opposé des conclu­sions des éco­no­mistes pour­tant les plus répu­tés dans le monde. Les réac­tions des acteurs éco­no­miques, ménages, sala­riés ou entre­prises, ne sont d’ailleurs jamais méca­niques et leurs anti­ci­pa­tions sont déci­sives ; si les agents éco­no­miques, sala­riés ou chefs d’entreprises, consi­dèrent que les mesures de poli­tique éco­no­mique doivent ame­ner dans la durée de l’embauche et de la crois­sance, ils vont accom­pa­gner ce mou­ve­ment, et la crois­sance aura des bonnes chances de se réaliser.

Une des forces du pays, sa capacité de se projeter collectivement dans l’avenir

Si, au contraire, les chefs d’entreprises pensent que la flexi­bi­li­sa­tion du contrat de tra­vail ne sera que tem­po­raire parce qu’ils n’ont pas confiance en la per­sé­vé­rance des diri­geants publics, ceux qui ont déjà, ou qui craignent d’avoir à un terme rap­pro­ché, des sur effec­tifs vont pro­fi­ter de cette sou­plesse tem­po­raire pour réduire leur per­son­nel et ce com­por­te­ment entraî­ne­ra une cer­taine hausse du chô­mage, don­nant rai­son aux détrac­teurs des réformes et les déci­deurs publics risquent de devoir reve­nir en arrière sous une forme ou sous une autre. D’où l’impérieux besoin de la confiance avec les par­te­naires sociaux. Le lien très fort consta­té entre le degré de confiance sociale et le taux de chô­mage est d’ailleurs un élé­ment cen­tral, mais encore insuf­fi­sam­ment connu de l’analyse éco­no­mique récente3. Les pays à faible taux de chô­mage sont des pays à fort degré de confiance sociale et les pays où le taux de chô­mage est le plus éle­vé sont les pays de l’Europe médi­ter­ra­néenne où la confiance sociale est faible.

Les réformes en pro­fon­deur du mar­ché du tra­vail, pour être accep­tées et réus­sir, deman­de­ront donc une longue col­la­bo­ra­tion avec les syn­di­cats qui, eux, et mal­gré ce que l’on peut en dire, ont la confiance des sala­riés. Il eût mieux valu, depuis le début des années 1980, perdre cinq ou dix ans à ana­ly­ser, à expli­quer et à négo­cier, que s’agiter d’une manière com­pul­sive autour de solu­tions de cir­cons­tances, sou­vent reje­tées, et fina­le­ment se retrou­ver aujourd’hui sans aucune autre pers­pec­tive que de nou­velles déchi­rures de l’opinion publique et du tis­su social.

Pour réduire le chô­mage en pro­fon­deur, ce ne sont donc pas de nou­velles solu­tions seule­ment mira­cu­leuses sur le papier dont a besoin la France, c’est de confiance sociale, de cré­di­bi­li­té des diri­geants publics et sur­tout de per­sé­vé­rance de leur part dans un domaine qui doit deve­nir un thème de consen­sus social, comme l’a été la recons­truc­tion indus­trielle pen­dant les trente glo­rieuses et devrait l’être éga­le­ment la com­pé­ti­ti­vi­té du pays. Cette confiance et ce consen­sus se construi­ront dans la durée et non pas à coups de beaux discours.

Il convient donc, sans reve­nir à la pla­ni­fi­ca­tion d’une époque révo­lue, de reve­nir à ce qui a fait une des forces du pays, sa capa­ci­té de se pro­je­ter col­lec­ti­ve­ment dans l’avenir, et de rendre au long terme une impor­tance dans la ges­tion publique qu’il a per­due depuis bien long­temps4, de la confier à une per­son­na­li­té recon­nue et indé­pen­dante d’esprit comme a pu l’être un Paul Delou­vrier ou l’est un Louis Gal­lois aujourd’hui.

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1. His­toire d’une névrose, La France et son éco­no­mie, Albin Michel, 2014
2. Dans son ouvrage facile à lire, écrit avec J.-B. Eyméoud Vers une socié­té de mobi­li­té : les jeunes, l’emploi et le loge­ment, aux Presses de Sciences Po, 2016 ; voir éga­le­ment la syn­thèse de O. Blan­chard, F. Jau­motte and P. Loun­ga­ni, 2013, Unem­ploy­ment, labour-mar­ket flexi­bi­li­ty and IMF advice : Moving beyond mantras
3. Blan­chard et al., 2013, cité, p. 9 ; voir éga­le­ment P. Aghion, Y. Algan, and P.Cahuc, 2011, Civil Socie­ty and the State : The Inter­play bet­ween Coope­ra­tion and Mini­mum Wage Regu­la­tion, Jour­nal of the Euro­pean Eco­no­mic Association
4. Sou­ve­nons-nous qu’en 1981 Michel Rocard avait été « puni » d’avoir ima­gi­né pou­voir être can­di­dat aux pré­si­den­tielles par une nomi­na­tion comme ministre du Plan et de l’Aménagement du territoire.

Gilles de LABARRERéconcilier éthique et politique

Gilles de LABARRE
Manager de la transition numérique auprès du Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique

Les débats sur les nou­velles formes d’emploi sont mar­qués par la nos­tal­gie d’un pas­sé issu de la recons­truc­tion de l’après Deuxième Guerre mon­diale (l’âge d’or du CDI dans la même entre­prise jusqu’à sa retraite) et la fas­ci­na­tion de cer­tains pour un ave­nir fan­tas­ma­go­rique, la fin du sala­riat. Au risque de déplaire, l’objectivité mini­male et la vision non idéo­lo­gique des évo­lu­tions de l’emploi doivent éclai­rer sans a prio­ri le débat poli­tique et per­mettre de se for­ger une opi­nion sans suc­com­ber aux thèses manipulatrices.

Rappe­lons en pre­mier lieu que la construc­tion légis­la­tive et juris­pru­den­tielle du CDI comme emploi pro­té­gé et stable ne date que des crises des années 1970, alors qu’au même moment, le légis­la­teur recon­nais­sait et encou­ra­geait l’intérim et le CDD, leur assu­rant ain­si une pro­gres­sion fulgurante.

En fait, depuis le début des années 2000 et même avec la crise de 2008, la répar­ti­tion des grandes com­po­santes de l’emploi – CDI, tem­po­raire et indé­pen­dant – est stable. En France, comme ailleurs, le CDI demeure la forme ultra-domi­nante d’emploi, autour de 87 % de l’emploi sala­rié. La part d’emplois en CDD et en inté­rim (en stock) est, elle aus­si, stable alors que le tra­vail indé­pen­dant s’est sta­bi­li­sé autour de 10 % de l’emploi total, avec un regain récent tiré par l’auto-entrepreunariat.

Par contre, on assiste à une diver­si­fi­ca­tion des formes juri­diques d’emploi aux confins du sala­riat et du tra­vail indé­pen­dant, avec le por­tage sala­rial, les coopé­ra­tives d’activité et d’emploi, ou lorsqu’un indé­pen­dant exerce son acti­vi­té dans un cadre contraint (la fran­chise, l’agent com­mer­cial man­da­taire indé­pen­dant, le gérant non sala­rié, etc.). Mais ces formes d’emploi res­tent très minoritaires.

Face à ce constat, peut-on dire pour autant que rien n’a chan­gé ? Si, bien sûr, c’est même à un véri­table bou­le­ver­se­ment auquel nous assis­tons avec une grande vague de flexi­bi­li­sa­tion et d’individualisation, qui touche toutes les condi­tions d’emploi.

Concer­nant les CDI, la pro­gres­sion du temps par­tiel, très sou­vent subi avec horaires flexibles et déca­lés, est ful­gu­rante, avec plus de 4 mil­lions de sala­riés, soit près de 16 % du nombre total de CDI. 48 % des sala­riés tra­vaillent le same­di et près d’un tiers des sala­riés tra­vaillent habi­tuel­le­ment le dimanche alors que cette pro­por­tion n’était que de 20 % il y a 20 ans.

Quant à la part des horaires à la carte, elle a qua­si­ment dou­blé et dépasse 10 %, sans comp­ter l’évolution de la spa­tia­lié du tra­vail, le télé­tra­vail concer­nant près de 17 % des sala­riés. In fine, seule­ment 25 % des CDI tra­vaillent encore selon le modèle de la jour­née for­diste à l’usine, ce qui n’a rien d’étonnant compte tenu de la baisse conti­nue de la part de l’emploi ouvrier dans la popu­la­tion active.

D’autre part, le CDI n’est plus syno­nyme d’une sta­bi­li­té de l’emploi : sait-on que plus d’un tiers des CDI sont rom­pus avant un an, que ce soit en rai­son d’une démis­sion, d’une fin de période d’essai, d’un licen­cie­ment ou d’une rup­ture conven­tion­nelle (dont le nombre est en très forte progression).

Concer­nant les CDD, la flexi­bi­li­sa­tion est là aus­si à l’œuvre, les flux d’emploi de moins de trois mois en CDD ou en inté­rim repré­sen­tant 9 embauches sur 10 !

Quant à l’emploi indé­pen­dant sans sala­rié, il s’individualise de plus en plus avec en son sein plus de 1 mil­lion d’auto-entrepreneurs, mais dont plus de la moi­tié ont un chiffre d’affaires inexis­tant ou symbolique.

Mais le phé­no­mène le plus mar­quant de ces der­nières années est l’individualisation de l’activité elle-même, avec l’explosion de la plu­ri­ac­ti­vi­té – avoir plu­sieurs emplois sala­riés ou un emploi sala­rié et un emploi indé­pen­dant. Elle concerne aujourd’hui plus de 2,3 mil­lions d’actifs, contre 1 mil­lion il y a 10 ans.

Enfin, deux éco­no­mistes d’Oxford, Mes­sieurs Frey et Osborne, ont publié en 2014 un article fra­cas­sant où ils éva­luaient à 47 % la pro­por­tion d’emplois mena­cés par l’automatisation aux États-Unis, leur méthode don­nant 42 % en France selon les cal­culs réa­li­sés par le cabi­net Roland Ber­ger. D’où une crainte sur l’avenir de l’emploi lui-même et au-delà de la socié­té tout entière. Dès lors pour­quoi le prin­cipe schum­pe­te­rien de « des­truc­tion créa­trice » ne fonc­tion­ne­rait plus dans nos éco­no­mies ? Au-delà d’un pes­si­misme rele­vant plus de la pos­ture psy­cho­lo­gique, trois rai­sons sont mises en avant dans un rap­port remar­qué conjoint de la banque amé­ri­caine Citi et de l’université anglaise d’Oxford1.

D’abord le chan­ge­ment va plus vite : il avait fal­lu 75 ans pour que le télé­phone, lan­cé en 1878, compte 100 mil­lions d’utilisateurs. Il aura fal­lu à peine 7 ans à Inter­net et deux ans au réseau social de par­tage de pho­tos Ins­ta­gram pour abou­tir au même résul­tat ! Autre signe : la robo­ti­sa­tion s’accélère, avec des achats de robots indus­triels en pro­gres­sion de 17 % par an depuis 2010 contre 3 % avant la crise finan­cière de 2008. Ensuite, les tech­no­lo­gies de l’information bous­culent toute l’économie et pas seule­ment quelques filières indus­trielles. Enfin, contrai­re­ment au pas­sé, les fruits du chan­ge­ment tech­no­lo­gique pro­fitent à quelques-uns et non au plus grand nombre.

C’est cette ques­tion de la répar­ti­tion et donc du par­tage qui est donc au cœur des déci­sions poli­tiques à venir. Sans reve­nir sur les tra­vaux mon­dia­le­ment connus de John Rawls2, d’Esther Duflo3 ou encore plus récem­ment de Tho­mas Piket­ty4, il est frap­pant de voir les experts de Citi évo­quer la mise en place d’un cré­dit d’impôt pour les pauvres et le par­tage du tra­vail (déjà évo­qué par J.M. Keynes qui pré­di­sait déjà la jour­née de tra­vail de 3 heures !).

De la même manière, la lit­té­ra­ture et les débats sur le reve­nu mini­mal uni­ver­sel ne cessent de pro­gres­ser, cer­tains éco­no­mistes, think tank ou ins­ti­tu­tions (y com­pris le Conseil natio­nal du numé­rique) y trou­vant un inté­rêt majeur pour assu­rer de meilleures régu­la­tions sociales au sein de nos sociétés.

Mais sur la ques­tion de la créa­tion d’emploi, une autre lec­ture est pos­sible car il y a ce que l’on voit (les emplois qui dis­pa­raissent) et ce que l’on ne voit pas (le tra­vail qui va naître et qui fait que 50 % des emplois créés d’ici 5 ans ne sont aujourd’hui ni connus ni iden­ti­fiés). Ain­si, l’emploi appa­raî­tra sous des formes qui ne res­semblent pas for­cé­ment à l’emploi du XXe siècle. D’autre part, de nom­breux éco­no­mistes5 s’intéressent au phé­no­mène de « pola­ri­sa­tion » qui consiste en une aug­men­ta­tion de la part des emplois très qua­li­fiés, dont la rému­né­ra­tion s’accroît for­te­ment, et des emplois peu qua­li­fiés, dont la rému­né­ra­tion stagne, avec une réduc­tion de la part des métiers inter­mé­diaires qui ont ten­dance à disparaître.

La mise en exergue de ces ten­dances n’est pas sans impact sur l’assurance contre la perte d’emploi qui sera donc, elle aus­si, dif­fé­rente. Les sou­bre­sauts issus de l’actuelle rené­go­cia­tion de la conven­tion rela­tive à l’assurance chô­mage n’en sont que les pré­mices. Et ce n’est pas en modi­fiant à la marge quelques para­mètres tech­niques que l’on pré­pare et anti­cipe les évo­lu­tions majeures que les per­sonnes et les employeurs vont avoir à vivre dans les toutes pro­chaines années.

C’est d’une réforme struc­tu­relle dont nous avons besoin afin de créer le der­nier pilier de notre modèle de sécu­ri­té sociale à la fran­çaise, celle des par­cours pro­fes­sion­nels. Il est grand temps ! 70 ans après le pro­gramme du Conseil natio­nal de la Résis­tance qui a posé le socle de notre pro­tec­tion sociale.

Mais cela sup­pose de récon­ci­lier éthique et poli­tique, ou encore l’axe ver­ti­cal du pou­voir et le vivre-ensemble hori­zon­tal. En cela à Soli­da­ri­tés Nou­velles face au Chô­mage, nous nous fai­sons les dignes suc­ces­seurs d’Aristote, der­nière figure phi­lo­so­phique à pen­ser ensemble ces deux registres de l’agir humain.

En s’attachant, à notre humble échelle, à réar­ti­cu­ler éthique et poli­tique, Soli­da­ri­tés Nou­velles face au Chô­mage entend faire en sorte que le sou­hai­table (éthique) puisse orien­ter le pos­sible (poli­tique). En remet­tant le bien com­mun et la bien­veillance envers l’autre au centre (éthique), nous dif­fu­sons un sens par­ta­gé de ce à quoi notre socié­té aspire et nous espé­rons que le pou­voir ver­ti­cal (poli­tique) se montre capable de l’entendre et de l’interpréter. C’est cette uto­pie créa­trice qui nous trans­cende et qui fait de chaque béné­vole un com­bat­tant pour l’emploi et un résis­tant contre la fata­li­té du chômage.

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1. Tech­no­lo­gy at work. The Future I Not What It used to Be. Oxford Mar­tin School / Citi jan­vier 2016
2. John Rawls, Théo­rie de la jus­tice, Seuil, 1987
3. E sther Duflo, Repen­ser la pau­vre­té, Les livres du nou­veau monde, Seuil, 2012
4. Tho­mas Piket­ty, Le Capi­tal au XXe siècle, Paris, Seuil, 2014
5. S. Cathe­rine, A. Lan­dier, D. Thes­mar, Mar­ché du tra­vail. La grande frac­ture. Paris, Ins­ti­tut Mon­taigne, 2015

Laurent DANIEL (96)L’emploi industriel en France : comparaison avec l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne

Laurent DANIEL (96)
Président de X‑Sursaut

Cet article se centre sur l’analyse com­pa­rée des dyna­miques de l’emploi indus­triel et du rôle des réformes du mar­ché du tra­vail réa­li­sées après la crise dans une sélec­tion de pays de la zone euro pour en tirer des leçons pour la France.

Les tendances de l’emploi industriel

L’emploi indus­triel en France, Alle­magne, Espagne et Ita­lie a sui­vi des ten­dances dif­fé­rentes au cours des quinze der­nières années :

  • En France, une baisse mar­quée et conti­nue depuis 2001
  • En Alle­magne, une baisse entre 2001 et 2006 ; un rebond depuis 2011
  • En Espagne et en Ita­lie, une sta­bi­li­té entre 2000 et 2008, puis une baisse mais qui a été stop­pée en 2014.

En 2014 en par­ti­cu­lier, l’emploi indus­triel s’est réduit de – 1,3 % en France contre – 0,2 % en Ita­lie et une pro­gres­sion de + 0,4 % en Espagne et + 0,5 % en Alle­magne. Les chiffres dis­po­nibles pour 2015 indiquent une pour­suite de cette ten­dance avec une réduc­tion de l’emploi indus­triel de – 1,3 % en France et de – 0,5 % en Ita­lie et une pro­gres­sion de + 3 % en Espagne et + 0,4 % en Allemagne.

Emplois industriels dans une sélection de pays de la zone euro
Emplois indus­triels en mil­lions dans une sélec­tion de pays de la zone euro

Les raisons du déclin de l’emploi industriel

L’emploi indus­triel suit une ten­dance bais­sière en France depuis 1975 pas­sant de 5,7 mil­lions emplois fin 1974 à 3,0 mil­lions fin 2014, soit une baisse de 47 %. En moyenne, l’emploi indus­triel a dimi­nué de 65 000 per­sonnes par an au cours des 40 der­nières années. Ce déclin de l’emploi indus­triel a été accen­tué par la crise éco­no­mique de la fin des années 2000 qui a conduit à une perte de 174 000 emplois indus­triels sur la seule année 2009. Sur la période 2009- 2011, 880 fer­me­tures de sites indus­triels en France ont été annon­cées selon une étude de Tren­deo cité par Les Echos1, contre 494 ouver­tures, soit 386 usines de moins en trois ans.

Le déclin de l’emploi indus­triel est la conjonc­tion de trois phé­no­mènes conco­mi­tants, tout d’abord le recours crois­sant à l’externalisation dans les ser­vices mar­chands, d’autre part les gains de pro­duc­ti­vi­té et la défor­ma­tion de la demande au pro­fit des ser­vices et enfin la perte de parts de mar­ché par rap­port à la concur­rence internationale.

Dans une note de la direc­tion géné­rale du Tré­sor2 (DGT) de 2010, les contri­bu­tions3, entre 1980 et 2007, de cha­cune de ces trois com­po­santes de la dés­in­dus­tria­li­sa­tion fran­çaise sont esti­mées : 25 % pro­vien­drait de l’externalisation vers les ser­vices mar­chands., 30 % aux gains de pro­duc­ti­vi­té ; et entre 13 % et 39 % selon plu­sieurs métho­do­lo­gies uti­li­sées des emplois détruits seraient liés à la concur­rence inter­na­tio­nale. Les deux approches montrent une accen­tua­tion de ce phé­no­mène dans la période plus récente.

La comparaison France-Allemagne

Nous allons nous concen­trer sur la par­tie cor­res­pon­dant à la perte de mar­ché de la France par rap­port à ses par­te­naires, les autres cor­res­pon­dant à des ten­dances normales.

Les rai­sons struc­tu­relles de la diver­gence de l’emploi indus­triel entre la France et l’Allemagne sont bien connues (voir notam­ment Mettre un terme à la diver­gence de com­pé­ti­ti­vi­té entre la France et l’Allemagne, 2011, COE, Rexe­code) ; il s’agit notam­ment du nombre et du dyna­misme des entre­prises fami­liales de taille inter­mé­diaire, de la bonne coopé­ra­tion de l’industrie, l’enseignement et la recherche alle­mands, des syner­gies entre les petites et grandes entre­prises, de la logique gagnant-gagnant du dia­logue social, du rôle des banques régio­nales, des efforts impor­tant en termes d’innovation per­met­tant un posi­tion­ne­ment haut de gamme, et des dis­po­si­tifs notam­ment régio­naux favo­risent les expor­ta­tions des entre­prises allemandes.

Ce qui appa­raît nou­veau depuis la crise est la concur­rence de la part de l’Espagne et de l’Italie qui ont réus­si à stop­per ou ralen­tir le déclin de leur emploi indus­triel. Même s’il est trop tôt pour éva­luer leur effi­ca­ci­té de manière éco­no­mé­trique, il appa­raît que les réformes du mar­ché du tra­vail ont contri­bué au redres­se­ment de ces deux pays.

En Espagne, les réformes du mar­ché du tra­vail menées depuis 2008 ont pour­sui­vi comme objec­tifs prin­ci­paux de réduire la dua­li­té du mar­ché du tra­vail, de pro­po­ser des méca­nismes de flexi­bi­li­té interne pour évi­ter les licen­cie­ments, de pla­cer la négo­cia­tion col­lec­tive au niveau de l’entreprise et d’améliorer l’employabilité.

Les réformes incluent notam­ment un assou­plis­se­ment des pos­si­bi­li­tés de licen­cie­ment éco­no­mique en contrat à durée indé­ter­mi­née et des pro­cé­dures de licen­cie­ment plus souples et dont le coût est réduit. Un nou­veau contrat a été créé pour les entre­prises de moins de 50 sala­riés avec une période d’essai d’un an.

En Ita­lie, deux séries de réformes du mar­ché du tra­vail ont été conduites par les gou­ver­ne­ments Mon­ti (2012) et Ren­zi (2014−2015) visant notam­ment un assou­plis­se­ment du droit du licen­cie­ment avec une aide finan­cière à l’embauche en CDI, un recours faci­li­té aux CDD et une décen­tra­li­sa­tion du droit de la négo­cia­tion col­lec­tive, ain­si qu’une condi­tion­na­li­té plus stricte de l’indemnisation chô­mage. Le CDI à pro­tec­tion crois­sante inclus dans le Jobs Act de 2014 en est une des mesures clés.

Bilan des réformes menées en Italie et en Espagne

En Espagne, les réformes ont entraî­né un coût du tra­vail moindre pour les entre­prises, notam­ment pour les per­sonnes chan­geant d’emplois ou celles pas­sant du chô­mage à l’emploi. La com­pé­ti­ti­vi­té de l’industrie espa­gnole a béné­fi­cié de cette baisse du coût de la main‑d’œuvre ce qui a contri­bué au redres­se­ment des emplois indus­triels en 2014 et 2015.

Le minis­tère du Tra­vail ita­lien, dans une éva­lua­tion de cer­taines réformes, a mon­tré une aug­men­ta­tion du nombre de pro­cé­dures de conci­lia­tion préa­lable au licen­cie­ment. Pour le Jobs Act, et notam­ment le CDI à pro­tec­tion crois­sante, l’effet est atten­du à moyen terme. D’après le FMI, la réforme du mar­ché du tra­vail contri­bue­rait à une aug­men­ta­tion de 1,1 % de PIB à 5 ans.

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1. Source : http://www.lesechos.fr/journal20111228/lec2industrie/0201809350658-desindustrialisation-pres-de-900-usines-francaises-ont-ete-fermees-en-trois-ans-268452.php
2. Direc­tion géné­rale du Tré­sor, Tré­sor Eco n° 77, Le recul de l’emploi indus­triel en France de 1980 à 2007 : quelle est la réa­li­té ? sep­tembre 2010.
3. Les trois contri­bu­tions n’égalent pas 100 % car celles-ci ne sont pas consi­dé­rées comme exhaus­tives ni comme indé­pen­dantes dans l’étude de la DGT.

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