Aux racines du transhumanisme France 1930-1980

Aux racines du transhumanisme
France 1930–1980

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°758 Octobre 2020Par : Alexandre Moatti (78)Rédacteur : Robert Ranquet (72)Editeur : Éditions Odile Jacob, février 2020

L’auteur nous con­duit à la décou­verte des racines français­es de l’idée de tran­shu­man­isme dans les années 1930–1980. Ce faisant, il nous fait crois­er, non sans avoir évo­qué quelques pio­nniers plus loin­tains de l’idée de dépasse­ment de l’humain comme Auguste Comte, Charles Péguy ou Georges Duhamel, le poly­tech­ni­cien Jean Coutrot (X 1913), inven­teur du mot tran­shu­man­isme dès 1937 même si ce mot n’accédera à la pop­u­lar­ité qu’une ving­taine d’années plus tard avec le biol­o­giste Julian Hux­ley ; le prix Nobel de médecine Alex­is Car­rel, que son obses­sion de l’ « amélio­ra­tion de la race humaine » égar­era dans l’idéologie eugéniste vichys­soise ; le biol­o­giste vul­gar­isa­teur Jean Ros­tand, appelant à la pro­duc­tion du surhu­main ; le jésuite et paléon­to­logue Pierre Teil­hard de Chardin, et son « ultra-humain » en ascen­sion vers le point Oméga. 

Si leurs pro­pos, que l’auteur juge sou­vent plus prophé­tiques que réelle­ment sci­en­tifiques, restent ceux d’hommes réputés de sci­ence, l’idée de tran­shu­man­isme chem­ine aus­si dans cette péri­ode dans d’autres sphères intel­lectuelles, comme le mou­ve­ment sur­réal­iste d’André Bre­ton, l’abhumanisme de Jacques Audib­er­ti, jusqu’au nou­veau roman de Michel Butor. L’auteur mon­tre com­ment ces défricheurs français de l’idée de tran­shu­man­isme ont anticipé et posé les prin­ci­pales prob­lé­ma­tiques qui émer­gent aujourd’hui, alors que le développe­ment tech­nique en matière de biotech­nolo­gies ou d’intelligence arti­fi­cielle per­met d’entrevoir la réal­i­sa­tion prochaine de cer­taines de ces aspi­ra­tions, sans même évo­quer des per­spec­tives plus loin­taines pour les utopies que sont encore le télécharge­ment de l’esprit ou la cryonie. 

Cette lec­ture pas­sion­nante et éru­dite ne pour­ra qu’inciter le lecteur à se deman­der, une fois de plus, pourquoi ces idées, si bril­lam­ment lancées par les intel­lectuels français au siè­cle dernier, trou­vent aujourd’hui leur réal­i­sa­tion con­crète et rémunéra­trice loin d’ici, sur les rivages du Paci­fique. Ne nous restera-t-il que les philosophes et les prophètes ?

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