Quand la donnée est au service de la recherche clinique

Quand la donnée est au service de la recherche clinique

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°770 Décembre 2021
Par Meriem SEFTA (2006)

Meriem Sef­ta (2006), Chief Data & Cli­ni­cal Solu­tions Offi­cer au sein d’Owkin, répond à nos ques­tions sur cette jeune entre­prise inno­vante qui met les tech­no­lo­gies de l’intelligence arti­fi­cielle et de la data au ser­vice de la recherche cli­nique en onco­lo­gie. Rencontre.

Au sein d’Owkin, vous êtes Chief Data & Clinical Solutions Officer. Dans ce cadre, quels sont votre périmètre d’action et votre feuille de route ?

Owkin tra­vaille sur la méde­cine de pré­ci­sion et sur l’utilisation de l’intelligence arti­fi­cielle pour amé­lio­rer la recherche et le déve­lop­pe­ment dans ce sec­teur avec un focus exclu­sif sur l’oncologie. Dans ce cadre, tous nos pro­jets de recherche et de déve­lop­pe­ment font l’objet d’un par­te­na­riat avec des ins­ti­tu­tions hos­pi­ta­lo-aca­dé­miques dont l’AP-HP, l’Institut Gus­tave Rous­sy, ou encore le Centre Léon Bérard… Nos prin­ci­paux clients sont les entre­prises et les groupes phar­ma­ceu­tiques que nous aidons et accom­pa­gnons dans l’optimisation de leur recherche et déve­lop­pe­ment grâce aux solu­tions que nous conce­vons et développons. 

Dans ce cadre, je dirige et manage une équipe de recherche et de déve­lop­pe­ment dont les prin­ci­pales mis­sions sont de nouer et de déve­lop­per des par­te­na­riats avec les hôpi­taux afin de pou­voir tra­vailler et exploi­ter les don­nées médi­cales de dif­fé­rents for­mats et à par­tir des­quelles nous pour­rons mettre en place des pro­jets de recherche en intel­li­gence arti­fi­cielle. Nous nous foca­li­sons sur la décou­verte et le déve­lop­pe­ment des médi­ca­ments, ain­si que sur le déve­lop­pe­ment de solu­tions diagnostiques. 

Plus de la moi­tié des membres de mon équipes sont des data scien­tists et des pro­ject mana­gers aux­quels s’ajoutent des pro­fils plus com­mer­ciaux en charge des rela­tions et des par­te­na­riats, et des experts en IT et en data qui sont en charge du déploie­ment des solu­tion tech­niques notam­ment des­ti­nées au trai­te­ment des données. 

Owkin est une entre­prise rela­ti­ve­ment jeune qui regroupe des talents aux exper­tises poin­tues. Cette recherche de l’excellence est au cœur de l’ADN de la socié­té et de sa poli­tique de recrutement. 

Au quo­ti­dien, c’est un plai­sir de tra­vailler et de gran­dir avec des per­sonnes pas­sion­nées et enga­gées sur des thé­ma­tiques inno­vantes et en rup­ture, mais éga­le­ment sur des sujets très poin­tus comme la recherche et le déve­lop­pe­ment, la défi­ni­tion de nou­veaux modèles éco­no­miques… C’est un uni­vers d’une très grande richesse où cha­cun peut appor­ter sa contribution. 

Au cœur de votre activité, on retrouve donc l’intelligence artificielle au service de la recherche clinique. Dans ce cadre, quels sont les sujets qui vous mobilisent ?

Nous ana­ly­sons les don­nées hos­pi­ta­lières et cli­niques venant de patients. Ce sont des don­nées mul­ti­mo­dales : géno­miques, cli­niques, ima­ge­ries en ana­to­mo­pa­tho­lo­gie digi­tale… Cette capa­ci­té à trai­ter ces diverses don­nées consti­tue, par ailleurs, un vec­teur de dif­fé­ren­cia­tion fort dans notre secteur. 

En paral­lèle, nos prin­ci­pales thé­ma­tiques de recherche tournent autour de l’oncologie. Nous cher­chons à pré­dire le pro­nos­tic des patients pour réduire l’errance thé­ra­peu­tique et mieux com­prendre à quel médi­ca­ment ou trai­te­ment un patient est sus­cep­tible d’avoir une meilleure réponse. Dans cette démarche, l’intelligence arti­fi­cielle est clé pour pou­voir réa­li­ser ces pré­dic­tions. Nous capi­ta­li­sons éga­le­ment sur l’intelligence arti­fi­cielle pour mieux com­prendre la bio­lo­gie des tumeurs et pou­voir mener des tra­vaux de recherche plus en amont afin d’identifier de nou­velles cibles thé­ra­peu­tiques. Nous déve­lop­pons aus­si des solu­tions qui prennent la forme de dis­po­si­tifs médi­caux et d’outils des­ti­nés à être uti­li­sés en rou­tine cli­nique par les médecins. 

Enfin, il est impor­tant de sou­li­gner que nous avons une approche très éthique de la ges­tion des don­nées de san­té. Au-delà de la dimen­sion sécu­ri­té et du res­pect de la confi­den­tia­li­té des don­nées, Owkin a déve­lop­pé des tech­no­lo­gies qui per­mettent d’analyser les don­nées de manière décen­tra­li­sée sans que les don­nées n’aient à être dépla­cées de leur centre res­pec­tif ou des hôpi­taux. C’est une garan­tie sup­plé­men­taire du res­pect de la confi­den­tia­li­té et un gage de sécu­ri­té renforcée. 

Quels sont vos axes de développement sur le moyen et long terme ?

Nous conti­nuons à tra­vailler sur la recherche cli­nique (bio­mar­queurs, opti­mi­sa­tion des essais cli­niques…) et à déve­lop­per des dis­po­si­tifs médi­caux visant à aider l’identification des patients can­di­dats pour des molé­cules spé­ci­fiques. Ce sont des outils qui ont notam­ment voca­tion à être uti­li­sés direc­te­ment par les ana­to­mo­pa­tho­lo­gistes dans leur pra­tique de soin. 

Owkin pour­suit, en paral­lèle, sa très forte crois­sance. Quand j’ai rejoint l’entreprise, il y a quatre ans, nous étions une dizaine. Aujourd’hui, nous sommes plus de 120 per­sonnes. À titre per­son­nel, je trouve que c’est une expé­rience extrê­me­ment enri­chis­sante de pou­voir suivre la crois­sance d’une entre­prise et d’assister à sa struc­tu­ra­tion et à son pas­sage à l’échelle. 

Dans ce cadre, ma mis­sion est aus­si de contri­buer à cette crois­sance en accom­pa­gnant la mon­tée en puis­sance de mon équipe qui est au cœur même de ce pas­sage à l’échelle vers une plus forte indus­tria­li­sa­tion de l’activité.

Et pour conclure, quel regard portez-vous sur la mixité dans votre secteur ?

Je trouve dom­mage que ce sec­teur qui est très inté­res­sant et pas­sion­nant n’attire pas plus les femmes. Je pense que les efforts de sen­si­bi­li­sa­tion et de visi­bi­li­té de nos métiers doivent viser en prio­ri­té les étu­diantes pen­dant leur par­cours et cur­sus uni­ver­si­taires. Il est impor­tant de pou­voir leur mon­trer qu’elles pour­ront s’épanouir dans les métiers de la data et de l’intelligence arti­fi­cielle pour les encou­ra­ger à inves­tir ce sec­teur et moti­ver les géné­ra­tions les plus jeunes à avoir un regard dif­fé­rent sur ce domaine. 


En bref

Cofon­dée en 2016 par Tho­mas Clo­zel, un méde­cin can­cé­ro­logue et cher­cheur, et Gilles Wain­rib, un ensei­gnant cher­cheur au dépar­te­ment infor­ma­tique de l’École nor­male supé­rieure après être pas­sé par l’université de Stan­ford aux États-Unis, Owkin est une socié­té spé­cia­li­sée dans les tech­no­lo­gies d’intelligence arti­fi­cielles appli­quées à la recherche cli­nique. Owkin per­met aux cher­cheurs d’utiliser des don­nées issues d’activités de soin ou de recherche pour entraî­ner des modèles inter­pré­tables de « machine lear­ning » qui vont per­mettre de mieux pré­dire le pro­nos­tic des patients et leurs réponses aux trai­te­ments, créant ain­si des nou­velles géné­ra­tions de biomarqueurs.

Owkin a été par­mi les pre­mières socié­tés à uti­li­ser les tech­no­lo­gies d’apprentissage fédé­ré, une approche d’analyse décen­tra­li­sée qui pro­tège les don­nées des patients en veillant à ce qu’elles ne quittent jamais l’hôpital.

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