Président Giscard d'Estaing

Valéry Giscard d’Estaing, 1926–2020
Président de la modernité

Dossier : Valéry Giscard d'EstaingMagazine N°761 Janvier 2021
Par Marwan LAHOUD (X83)

Le décès d’un homme public est sou­vent l’occasion de pané­gy­riques appuyés et d’éloges flat­teurs, d’autant plus élo­quents qu’ils viennent de ceux qui furent jadis des adver­saires réso­lus, aux yeux des­quels le défunt ne pré­sen­tait aucune qua­li­té. Notre cama­rade Gis­card d’Estaing (44) ne déroge pas à la règle et le leit­mo­tiv le concer­nant est que, bien qu’incompris et mal aimé des fran­çais, il est le pré­sident de la Ve Répu­blique qui a moder­ni­sé notre pays, alors que les trente glo­rieuses tou­chaient à leur fin et que la pla­nète tout entière était dura­ble­ment affec­tée par le choc pétro­lier de 1973.

Qu’en est-il exactement ?

Il n’est nul besoin de rap­pe­ler qu’élu à 48 ans, il devient le plus jeune pré­sident de la Répu­blique depuis 1895. Il fau­dra attendre 2017 pour qu’il perde ce titre. Prô­nant une « socié­té libé­rale avan­cée », il fait voter, entre autres, l’abaissement de la majo­ri­té civile, la dépé­na­li­sa­tion de l’interruption volon­taire de gros­sesse, le divorce par consen­te­ment mutuel et la fin de la tutelle de la télé­vi­sion publique.

Sa poli­tique étran­gère est mar­quée par le ren­for­ce­ment de la construc­tion euro­péenne et par son rôle clé dans le lan­ce­ment du G7. Mal­gré les dif­fi­cul­tés éco­no­miques, il déve­loppe le pro­jet de train à grande vitesse (TGV) et relance l’industrie nucléaire. Nous lui devons le réel essor du pro­jet Air­bus et de l’accès auto­nome à l’espace avec Ariane ain­si que la moder­ni­sa­tion de l’équipement télé­pho­nique de notre pays ou la créa­tion de la Cité des sciences et de l’industrie. J’en oublie certainement.

Mais il n’était pas si incom­pris et mal aimé que le veut la légende, sa défaite en 1981 étant plu­tôt courte même si elle était plus mar­quée que celle de son adver­saire de 1974, vain­queur en 1981. Il suf­fit de la com­pa­rer aux résul­tats des élec­tions qui ont suivi.

Le pré­sident Gis­card d’Estaing est le troi­sième poly­tech­ni­cien pré­sident de la Répu­blique après Sadi Car­not (X1857) et Albert Lebrun (X1890). Il est celui des trois qui lais­se­ra le plus sa marque dans l’histoire de notre pays. Même si on a pu par­ler, à son sujet, de moder­ni­sa­tion inter­rom­pue ou d’ambitions déçues, il res­te­ra le pré­sident qui aura fait entrer la France dans l’ère moderne. Notre pays vient de perdre un de ses grands hommes et la com­mu­nau­té poly­tech­ni­cienne, un de ses plus hono­rables représentants.

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