Julie Desk

Utiliser les services d’une assistante virtuelle

Dossier : TrajectoiresMagazine N°712 Février 2016
Par Julien HOBEIKA (09)
Par Hervé KABLA (84)

Julie est une assis­tante vir­tuelle, qui prend les ren­dez-vous à votre place par cour­riel. Jamais fati­guée, jamais en congé, elle tra­vaille jour et nuit et s’améliore au fil du temps par appren­tis­sage en intel­li­gence arti­fi­cielle. Mais si elle fonc­tionne aus­si bien c’est parce qu’elle est quand même super­vi­sée par un opé­ra­teur humain.

Tu as créé Julie, l’assistante virtuelle. De quoi s’agit-il ?

Julie est une assis­tante à intel­li­gence arti­fi­cielle. C’est une assis­tante vir­tuelle, qui prend les ren­dez-vous à votre place par cour­riel. Elle n’est jamais fati­guée, jamais en congé, elle tra­vaille jour et nuit et même le week-end. Sans par­ler de son coût, marginal.

Lorsqu’on sait qu’un diri­geant d’entreprise ou un mana­ger n’a pas tou­jours d’assistant et passe presque une demi-jour­née (quatre heures) par semaine à gérer ses ren­dez-vous ou son agen­da, le cal­cul est vite fait : pour 50 à 80 euros par mois, j’économise deux jours par mois, que je peux pas­ser sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.

Concrètement, comment fait-on appel à Julie ?

Il suf­fit de s’inscrire sur le site  et d’y indi­quer les ren­sei­gne­ments utiles pour par­ta­ger votre agen­da avec Julie.

Julie fonc­tionne avec tout type de calen­drier (entre autres, Google, Icloud, Micro­soft Exchange ou Office 365) et vous deman­de­ra de répondre à quelques ques­tions pour mieux vous connaître avant de com­men­cer (par exemple : quels sont vos horaires de tra­vail, com­ment vous vous dépla­cez pour cal­cu­ler vos temps de tra­jet, etc.).

Ima­gi­nez ensuite que vous vou­liez prendre ren­dez-vous avec votre client, appe­lons-le Hen­ri. Envoyez un cour­riel à Hen­ri en met­tant Julie (julie [at] juliedesk.com) en copie. Julie se char­ge­ra alors d’organiser le ren­dez-vous. Elle enver­ra un cour­riel à Hen­ri en lui pro­po­sant des dates qui peuvent conve­nir en fonc­tion de votre agen­da et de vos habitudes.

Et Hen­ri va donc dis­cu­ter avec Julie jusqu’à ce qu’une date soit trou­vée. Et tout cela en uti­li­sant du lan­gage natu­rel, comme une véri­table per­sonne, et sans vous importuner.

Julie peut échan­ger autant de cour­riels que néces­saire avec vos contacts. Quand une date qui convient à tout le monde est trou­vée, elle ajoute l’événement à votre agen­da et envoie les invi­ta­tions automatiquement.

Quels sont les types d’algorithmes utilisés ?

Nous uti­li­sons des algo­rithmes de NLP (natu­ral lan­guage pro­ces­sing) et de machine lear­ning, pour per­mettre à Julie de com­prendre le texte qui lui est envoyé et de s’améliorer au fil du temps.

En pra­tique, Julie est un sys­tème com­plexe dans lequel le pro­ces­sus d’une prise de ren­dez- vous est théo­ri­sé. Quelles sont les dif­fé­rentes étapes à effec­tuer pour pas­ser d’un cour­riel qui demande à Julie de prendre un ren­dez-vous à la prise de ren­dez-vous finale.

Chaque étape de ce pro­ces­sus est décom­po­sée en étapes plus petites pour ali­men­ter des algo­rithmes d’apprentissage dans un pre­mier temps, et dans un second temps pou­voir être trai­tée par un algo­rithme entraîné.

N’y a‑t-il vraiment aucune intervention humaine ?

Par rap­port à des ser­vices com­pa­rables, toute la force de Julie réside dans l’intervention humaine. On pense tous à Siri, l’assistant à com­mande vocale dis­po­nible sur tous les smart­phones Apple. On lui dicte : « Siri, appelle Zoé », et Siri appelle Chloé. On peut alors annu­ler l’appel et pro­ba­ble­ment que Siri apprend de cette erreur et s’améliore.

Mais, dans le cas de Julie, les ren­dez-vous de nos clients sont impor­tants. Nous ne pou­vons pas nous per­mettre de prendre un ren­dez-vous à la mau­vaise date ou de répondre à un cour­riel par un mes­sage incompréhensible.

Julie est donc super­vi­sée par un opé­ra­teur humain. De cette façon, aucun ren­dez-vous ne peut être raté. On prend le meilleur des deux mondes : l’efficacité et la rapi­di­té de la machine asso­ciées à la sub­ti­li­té d’un être humain.

À qui s’adressent ces services ?

Ils inté­ressent prin­ci­pa­le­ment des diri­geants de PME. Mais aus­si, plus géné­ra­le­ment, des mana­gers de grandes entre­prises qui n’ont pas d’assistant(e), ou encore les popu­la­tions de com­mer­ciaux ou de res­pon­sables RH qui prennent beau­coup de rendez-vous.

Aujourd’hui, nous tra­vaillons pour des entre­prises comme Leet­chi, Ame­tix ou cer­tains fonds comme Axa Stra­te­gic Ven­tures ou Bree­ga. Nous ven­dons éga­le­ment 30 % de nos licences aux États-Unis sans avoir de pré­sence phy­sique là-bas pour le moment.

Pour les grandes sociétés, n’y a‑t-il pas des besoins particuliers ?

Si, et c’est pour­quoi nous sommes en train d’élaborer des pilotes auprès de plu­sieurs grandes socié­tés, comme Ernst & Young, PwC, Socié­té Géné­rale, etc. Je pense qu’en 2016 nous aurons réa­li­sé au moins une ins­tal­la­tion de ce nou­veau service.

Avant de créer Julie, tu avais lancé WePopp. Peux-tu nous en parler ?

Nous avions lan­cé WePopp, appli­ca­tion sur mobile, en juin 2013, juste après avoir fini nos études. Elle per­met­tait d’organiser des sor­ties entre amis, via un sys­tème d’invitation qui com­bi­nait cour­riel, SMS et réseaux sociaux. Cela per­met­tait de déci­der où et quand se retrou­ver entre amis.

Guillaume Michiels, Nico­las Mar­lier et moi avons arrê­té l’aventure en mars 2014, après avoir réa­li­sé plus de 250 000 téléchargements.

Pourquoi avoir pris cette décision ?

Nous avons déci­dé d’arrêter WePopp parce que la via­bi­li­té du modèle éco­no­mique exi­geait des mil­lions d’utilisateurs. Pour atteindre le mil­lion, la dif­fu­sion de l’application devait se répandre par effet de bouche à oreille.

Et pour cela, l’application devait être uti­li­sée quo­ti­dien­ne­ment. Or WePopp n’était uti­li­sée qu’une fois tous les mois, voire tous les deux mois. Nous nous sommes alors concen­trés sur les ren­dez-vous pro­fes­sion­nels, qui sem­blaient offrir un poten­tiel plus important.

Nous avons donc sor­ti un pre­mier pro­duit, WeTime, entre juin et sep­tembre 2014. WeTime a posé les pré­mices de Julie. C’était un outil qui s’installait sur Gmail ou Out­look, et per­met­tait d’envoyer sim­ple­ment et plus rapi­de­ment des cré­neaux dis­po­nibles à vos interlocuteurs.

D’autre part, lorsque vous rece­viez des pro­po­si­tions, l’outil détec­tait la date et vous pro­po­sait de l’ajouter tout de suite à votre agen­da si vous étiez dis­po­nible. C’est en octobre 2014, en s’inspirant aus­si de concepts amé­ri­cains, que nous avons fait le pivot de Julie Desk.

Pour tes­ter le mar­ché au départ, nous fai­sions nous-mêmes les assis­tants, manuel­le­ment mais aidés par l’outil de WeTime pour aller plus vite. Puis la crois­sance nous a obli­gés rapi­de­ment à faire des déve­lop­pe­ments nouveaux.

Qu’est-ce qui fait le succès d’une application mobile ?

Sans aucun doute, la fré­quence d’usage. Une appli­ca­tion qu’on n’utilise pas toutes les semaines (ou tous les jours, voire toutes les heures) aura de grandes dif­fi­cul­tés à gar­der sa place sur votre smartphone.

Com­ment fait-on pour assu­rer une fré­quence d’utilisation éle­vée ? Il faut déjà que l’application résolve un vrai pro­blème et que ce pro­blème soit fré­quent auprès de vos uti­li­sa­teurs poten­tiels. Ensuite, il faut que l’application soit irré­pro­chable à la réso­lu­tion de ce pro­blème très spécifique.

Si l’application contient des erreurs ou n’est pas très bien conçue, les uti­li­sa­teurs pas­se­ront très vite à autre chose. C’est d’ailleurs pour cela qu’Apple aime mettre en avant les appli­ca­tions qui viennent de sor­tir et qui sont dès leur pre­mière ver­sion très bien faites (ça nous est arri­vé quatre fois avec WePopp).

Qu’est-ce qui t’a paru le plus difficile durant ces deux dernières années ?

Res­ter moti­vé pen­dant la phase de recherche d’adéquation entre le pro­duit et son mar­ché. Une fois qu’on a iden­ti­fié un pro­duit qui a un mar­ché, tout devient plus exci­tant et motivant.

L’équipe compte à ce jour huit per­sonnes, l’aventure est encore longue avant le suc­cès, mais c’est une expé­rience inéga­lée à vivre.

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