Toutes les croissances ne se valent pas

Dossier : Entreprise et managementMagazine N°628 Octobre 2007
Par Jean ESTIN

Croître à long terme, de façon rentable, et net­te­ment au-delà de la crois­sance économique moyenne (pour sim­pli­fi­er au-delà de 4 à 5 % par an), est un impératif si l’on veut « créer de la valeur » pour ses action­naires (en leur procu­rant un TSR1 supérieur au coût du capital).

En deçà, et même si l’en­tre­prise est forte­ment rentable, l’ac­tion­naire ne peut espér­er comme rentabil­ité sur son investisse­ment que le coût du cap­i­tal. Il obtient une rémunéra­tion nor­male du risque pris, sans créa­tion de valeur.

Une entre­prise (rentable) qui croît à env­i­ron 10 % par an apporte aujour­d’hui2 un TSR d’en­v­i­ron 14 % à ses action­naires (5 % au-delà d’un coût du cap­i­tal typ­ique). Une entre­prise (rentable) qui croît à 3 % par an apporte un TSR d’en­v­i­ron 9 % à ses action­naires (c’est-à-dire plus ou moins son coût spé­ci­fique du cap­i­tal) (cf. tableau 1).

Autrement dit, les « vach­es à lait » sans crois­sance ne créent pas de valeur : elles peu­vent être très renta­bles (avec par exem­ple un ROCE (Return on Cap­i­tal Employed) deux à trois fois supérieur au coût du cap­i­tal), avoir une cap­i­tal­i­sa­tion bour­sière trois fois supérieure à leur valeur compt­able ; mais leur TSR annuel ne peut être très dif­férent de leur coût du capital.

Pour créer de la valeur, il faut croître, de façon sig­ni­fica­tive, et sur longue période.

Cepen­dant, à taux de crois­sance don­né, même large­ment supérieur à la moyenne de l’é­conomie, toutes les crois­sances ne se valent pas. L’en­jeu est en effet de croître à rentabil­ité suff­isante4, sans dégra­da­tion de cette rentabil­ité et avec des investisse­ments con­tenus. La crois­sance ne doit pas être dilutive.

Le TSR induit par la crois­sance dépend de deux fac­teurs struc­turants : la crois­sance des marchés sur lesquels l’en­tre­prise opère et la force du mod­èle d’ac­tiv­ité (cf. tableau 2). Plus les marchés sous-jacents sont en forte crois­sance, moins il est néces­saire « d’a­cheter » celle-ci (baiss­es des prix, gains de parts de marché, acqui­si­tion de con­cur­rents à prix pro­hibitifs…). Plus le mod­èle d’ac­tiv­ité est « fort » (attrac­tiv­ité, robustesse, dif­féren­ci­a­tion…), moins la valeur risque de se trans­fér­er vers les clients ou les fournisseurs.

Il y a donc qua­tre types de crois­sance longue.

La déclinaison d’un modèle d’activité différencié dans un marché en forte croissance

C’est dans les marchés en forte crois­sance longue (glob­ale ou par mon­tée en puis­sance suc­ces­sive de dif­férents pays ou pro­duits), où un leader peut pour­suiv­re ou déclin­er sys­té­ma­tique­ment un mod­èle d’ac­tiv­ité forte­ment dif­féren­cié, que la valeur bour­sière peut croître le plus forte­ment et le plus régulière­ment, bien au-delà de la rémunéra­tion nor­male du capital.

Les lead­ers y créent de la valeur pour leurs action­naires, non seule­ment pour les action­naires d’o­rig­ine ayant investi à la valeur compt­able mais égale­ment pour ceux d’en­tre eux qui investis­sent à tout moment en Bourse à la valeur du marché et « pren­nent le train en marche ».

Des exem­ples de telles straté­gies sont don­nés par Proc­ter & Gam­ble, Home Depot, L’Oréal, Essilor… Elles ont con­duit à des taux de crois­sance d’en­v­i­ron 10 à 30 % par an sur vingt-cinq ans avec des TSR pour les action­naires de 15 à 25 % par an sur la même péri­ode5 (cf. tableau 3)

Dans ce type de stratégie, et au-delà des plans des divi­sions opéra­tionnelles à trois ou à cinq ans, l’at­ten­tion des direc­tions générales doit être focal­isée en per­ma­nence sur la recherche de nou­veaux relais de crois­sance à cinq ou à huit ans. La ges­tion fine du tim­ing de matéri­al­i­sa­tion de ces relais et leur taille poten­tielle par rap­port à l’ex­is­tant sont critiques.

Les risques asso­ciés à ce type de crois­sance sont de deux natures.

Le risque stratégique : un nou­veau relais de crois­sance atten­du met plus de temps à se matéri­alis­er ou subit un à‑coup con­jonc­turel grave (Chine, Russie, Inde…) ; le mod­èle d’ac­tiv­ité ou la tech­nolo­gie sont sub­sti­tués par un mod­èle ou une tech­nolo­gie plus per­for­mants ; de nou­veaux con­cur­rents struc­turelle­ment plus com­péti­tifs préemptent la croissance.

Un ralen­tisse­ment tem­po­raire d’un ou deux ans est faible­ment sanc­tion­né pour un leader qui a une per­for­mance his­torique régulière. En revanche, une chute de 15 % à 5 % dans les antic­i­pa­tions de crois­sance annuelle à long terme peut entraîn­er une divi­sion par deux du cours de Bourse.

Ce risque peut être anticipé et maîtrisé par des analy­ses con­cer­nant les marchés et la con­cur­rence et par une atten­tion per­ma­nente don­née à l’en­vi­ron­nement de l’en­tre­prise. Cela sup­pose de rechercher sys­té­ma­tique­ment et de bien vouloir enten­dre les mau­vais­es nou­velles pour entre­pren­dre des straté­gies cor­rec­tri­ces suff­isam­ment tôt.

Le risque opéra­tionnel : la décli­nai­son du mod­èle dans une nou­velle géo­gra­phie, un nou­veau pro­duit ou un nou­veau seg­ment de clien­tèle demande plus d’ef­forts et de temps que prévu ; le sou­tien à la crois­sance du marché demande plus d’in­vestisse­ments ; le mix d’in­vestisse­ments et les leviers opéra­tionnels sup­por­t­ant la crois­sance dans un nou­veau marché sont dif­férents de ceux des marchés his­toriques ; les com­pé­tences req­ui­s­es par les nou­veaux marchés s’éloignent des com­pé­tences clés des équipes de man­age­ment, etc. ; les économies et la rentabil­ité se dégradent : la crois­sance devient dilutive.

Ce deux­ième risque peut égale­ment être anticipé voire géré. La crois­sance opéra­tionnelle n’est rien d’autre que le pro­duit d’un investisse­ment par son impact (fort ou faible) et par le temps néces­saire à cet impact pour se matéri­alis­er (court ou long). Ces fac­teurs s’ap­préhen­dent, voire se mod­élisent dans cer­tains métiers, et il est ain­si pos­si­ble de mesur­er le poten­tiel de crois­sance d’un mod­èle d’ac­tiv­ité dans un nou­v­el environnement.

Une dynamique d’investissements, de coûts et de prix, supérieure à celle des concurrents

Dans des marchés mon­di­aux en forte crois­sance où les pro­duits et les ser­vices sont faible­ment dif­féren­ciés, une stratégie de crois­sance clas­sique est de croître plus rapi­de­ment que les con­cur­rents en investis­sant plus vite et plus forte­ment qu’eux, en gag­nant des parts de marché et en étab­lis­sant de fortes échelles de pro­duc­tion, de mar­que ou de dis­tri­b­u­tion, et en étouf­fant ses con­cur­rents avec une dynamique de baisse de coûts et de prix dif­fi­cile à suivre.

Le mod­èle d’ac­tiv­ité de l’en­tre­prise n’est pas vrai­ment dif­féren­cié mais la dynamique d’in­vestisse­ment et de gain de part de marché crée à elle seule l’a­van­tage sur les concurrents.

Cemex dans le ciment, Gen­er­al Elec­tric Finan­cial Ser­vices dans le finance­ment d’ac­t­ifs mobiliers (avions, con­teneurs, imagerie médi­cale…), Wal-Mart dans les hyper­marchés aux USA, Teva dans les médica­ments génériques, ou Sam­sung dans les D‑RAM sont des exem­ples de telles straté­gies au cours des vingt dernières années. Dans cette dernière activ­ité par exem­ple, la crois­sance est d’en­v­i­ron 60 à 80 % par an (en vol­ume), les prix bais­sent d’en­v­i­ron 30 % par an (en dol­lars con­stants), et la part des trois lead­ers est passée d’en­v­i­ron 30 % en 1990 à plus de 65 % aujour­d’hui (Sam­sung ayant aujour­d’hui env­i­ron 30 % du marché).

Le temps, la rapid­ité et le jeu con­cur­ren­tiel sont des vari­ables cri­tiques dans de telles straté­gies (jusqu’où est-il utile d’aller en ter­mes de con­cen­tra­tion de l’in­dus­trie ? L’a­van­tage de coût peut-il être rat­trapé ou non ? Quels con­cur­rents faut-il laiss­er sur­vivre ? Quels arbi­trages entre rentabil­ité et crois­sance, etc. ?).

Après quelques années, les TSR résul­tant de ces straté­gies peu­vent rester élevés (et supérieurs au coût du cap­i­tal), mais sou­vent inférieurs à ceux du cas précédem­ment décrit (cf. tableau 3). Une crois­sance essen­tielle­ment basée sur des prix com­péti­tifs implique en effet un trans­fert de valeur au moins par­tiel vers le client.

Les risques stratégiques et opéra­tionnels liés à ces straté­gies sont les mêmes que précédem­ment. Deux risques sup­plé­men­taires s’y ajoutent.

Celui d’un mau­vais arbi­trage entre la rentabil­ité et la crois­sance par des poli­tiques de prix et d’in­vestisse­ment mal maîtrisées ou à con­tre cycles. Ce risque peut être éval­ué et maîtrisé par des analy­ses com­par­a­tives con­cer­nant les coûts et les investisse­ments des concurrents.

Celui d’une diminu­tion pro­gres­sive des effets d’échelle au cours du temps (évo­lu­tion des tech­nolo­gies, des struc­tures de coûts, etc.). La valeur des gains de parts de marché dimin­ue forte­ment : la crois­sance devient dilu­tive. Ce risque peut égale­ment être anticipé par des analy­ses con­cer­nant l’évo­lu­tion des fac­teurs économiques clés de l’activité.

La resegmentation et la redéfinition des marchés

Dans les marchés sans crois­sance, il est sou­vent pos­si­ble de reseg­menter l’ac­tiv­ité par seg­ments de clien­tèle, zones géo­graphiques, niveaux de ser­vice, par­ties de gammes de pro­duits, etc., et de retrou­ver une forte crois­sance par cette focal­i­sa­tion et avec un mod­èle d’ac­tiv­ité forte­ment redéfini.

South­west et Ryanair dans le trans­port aérien low cost sont des exem­ples de telles straté­gies. Dyson dans les aspi­ra­teurs haut de gamme est un autre exem­ple de telles stratégies.

Le poten­tiel de crois­sance lié à cette redéf­i­ni­tion du marché est plus ou moins grand suiv­ant la taille que représente à terme la niche sélec­tion­née au sein d’un marché glob­ale­ment en faible crois­sance. Il s’ag­it d’une bouf­fée d’air qui peut dur­er quelques années, mais dépasse rarement dix ans.

Pour un leader du marché, le risque d’une telle stratégie est la can­ni­bal­i­sa­tion de ses pro­pres activ­ités de cœur de marché. La mise en œuvre de mod­èles d’ac­tiv­ité forte­ment dif­féren­ciés, voire d’or­gan­i­sa­tions indépen­dantes, et la décli­nai­son de poli­tiques fines et autoseg­men­tantes (prix, offre, con­di­tions…) per­me­t­tent de lim­iter ce risque.

Pour un acteur de niche, le risque majeur d’une telle stratégie est celui de la rétor­sion éventuelle de la part des grands lead­ers du marché. Plus la part des coûts partagés est impor­tante entre cette niche et le reste du marché, et plus ce poten­tiel de rétor­sion est grand et risque de se matéri­alis­er. Le dan­ger est par­ti­c­ulière­ment grand dans les activ­ités de réseaux (télé­com­mu­ni­ca­tions, trans­port aérien, poste…).

Lorsque la redéf­i­ni­tion du marché est faite de façon plus struc­turelle, ces straté­gies peu­vent pro­duire leur effet à plus long terme. Swatch dans les mon­tres entre 1985 et 1995 est un exem­ple de redéf­i­ni­tion com­plète d’un métier.

La crois­sance des mutuelles d’as­sur­ance sans inter­mé­di­aire dans les années 70, 80 et 90 ou le développe­ment des acteurs chi­nois dans la plu­part des biens indus­triels exporta­bles aujour­d’hui et demain sont égale­ment des exem­ples de telles straté­gies. Il ne s’ag­it plus alors de straté­gies de niche, mais de redéf­i­ni­tion fon­da­men­tale d’un cœur de marché par sub­sti­tu­tion qua­si com­plète de la con­cur­rence établie. Les TSR résul­tants sont alors iden­tiques à ceux du cas n° 1. Mal­heureuse­ment, lorsque la stratégie a par­faite­ment réus­si et la sub­sti­tu­tion a atteint la total­ité du marché poten­tiel, il n’y a plus de crois­sance pos­si­ble. Les TSR s’ef­fon­drent alors sou­vent brutalement.

Les stratégies de consolidation dans les marchés mûrs

Elles con­sis­tent à croître de façon organique ou plus sou­vent en rachetant les con­cur­rents pour ratio­nalis­er l’in­dus­trie et con­tin­uer à baiss­er les coûts. Le prob­lème est que la valeur créée par ces ratio­nal­i­sa­tions est le plus sou­vent trans­férée aux clients à tra­vers des baiss­es de prix. La crois­sance en valeur y est sou­vent beau­coup plus faible qu’en vol­ume. Dans tous les marchés mûrs en effet, la valeur tend à dis­paraître en migrant vers l’aval. Les seuls gag­nants sont les action­naires des sociétés rachetées.

Les straté­gies de con­sol­i­da­tion dans les pneu­ma­tiques, la sidérurgie, l’a­lu­mini­um, l’édi­tion musi­cale, les fibres de verre de ren­force­ment, etc., sont des exem­ples de telles straté­gies. La phar­ma­cie pour­rait bien suiv­re le même chemin. À crois­sance don­née, les TSR y sont sou­vent beau­coup plus faibles que dans les cas précédents.

Qua­tre types de crois­sance et qua­tre types de TSR pour l’ac­tion­naire : un TSR élevé et sur longue durée dans le pre­mier cas (tant que la crois­sance se main­tient) ; sou­vent plus faible dans le deux­ième cas mais tou­jours sig­ni­fi­catif ; au-delà du coût du cap­i­tal mais sou­vent tran­si­toire dans le troisième cas s’il s’ag­it d’une stratégie de niche, ou très élevé s’il s’ag­it d’une stratégie de redéf­i­ni­tion com­plète d’un marché ; dif­fi­cile­ment au-delà du coût du cap­i­tal, voire en deçà dans le qua­trième cas (cf. tableau 4).

Qu’en conclure pour l’action ?

Rien, si l’on con­sid­ère qu’une entre­prise est pris­on­nière d’un méti­er ou d’un porte­feuille de métiers et de géo­gra­phies. On ne peut alors que s’adapter à la stratégie de crois­sanc class=“SurTitre“e per­mise par la dynamique de ce porte­feuille, la déclin­er au mieux en gérant les risques asso­ciés (voir ci-dessus) et béné­fici­er du TSR résul­tant struc­turelle­ment de cette stratégie (fort ou faible).

Tout, si l’on con­sid­ère que le rôle d’un dirigeant est de faire évoluer le mix de métiers et de géo­gra­phies d’une entre­prise pour max­imiser le TSR de ses action­naires et non seule­ment de gér­er au mieux les métiers exis­tants. Au-delà des ratio­nal­i­sa­tions et redresse­ments for­cé­ment tem­po­raires, les faits sont en effet têtus : on ne peut offrir à ses action­naires des TSR supérieurs au coût du cap­i­tal si on n’est pas présent dans des marchés et des géo­gra­phies en forte crois­sance longue, avec des mod­èles d’ac­tiv­ité « forts » et des posi­tions de lead­er­ship dans ces marchés et géographies.

Pas de crois­sance, pas de valeur. Et cer­tains types de crois­sance rap­por­tent aux action­naires beau­coup plus que d’autres.

La baisse struc­turelle des taux d’in­térêt sur les vingt-cinq dernières années a dis­simulé cette réal­ité en procu­rant 3 à 5 points addi­tion­nels de TSR à la plu­part des grands groupes, indépen­dam­ment de leur crois­sance. Dans un nou­veau con­texte de taux d’in­térêt sta­bles (ou pire en crois­sance), la dif­férence entre les straté­gies de crois­sance rentable et les straté­gies de non-crois­sance devien­dra critique.

Dans ses deux pre­mières années d’ex­er­ci­ce, un dirigeant est pris­on­nier du porte­feuille d’ac­tiv­ités dont il hérite. En revanche, après cinq à huit ans d’ex­er­ci­ce, il est pleine­ment respon­s­able du mix d’ac­tiv­ités et de géo­gra­phies et donc du taux de crois­sance de son entreprise.
On ne peut vouloir créer de la valeur et ne pas chang­er de méti­er aus­si sou­vent que néces­saire. La ges­tion active du porte­feuille de métiers et de géo­gra­phies est un élé­ment essen­tiel de la crois­sance et donc de la créa­tion de valeur.

1. TSR : Total Share­hold­er Return, rentabil­ité pour l’ac­tion­naire sur son investisse­ment (div­i­den­des, dis­tri­b­u­tion d’ac­tions gra­tu­ites, rachats d’ac­tions, plus-val­ues sur titres, etc.).
2. Base juin 2007, toutes choses égales par ailleurs, sans évo­lu­tion des taux d’in­térêt, et avec une rentabil­ité con­stante supérieure au coût du capital.
3. Voir égale­ment l’ar­ti­cle « Il faut croître à long terme » de mars 2007.
4. Au moins supérieure au coût du cap­i­tal, et si pos­si­ble per­me­t­tant de financer la croissance.
5. Net de l’im­pact posi­tif de la baisse des taux d’intérêt.

Estin & Co est un cab­i­net inter­na­tion­al de con­seil en stratégie basé à Paris, Lon­dres, Genève et Shang­hai. Le cab­i­net assiste les direc­tions générales de grands groupes européens et nord-améri­cains dans leurs straté­gies de crois­sance, ain­si que les fonds de pri­vate equi­ty dans l’analyse et la val­ori­sa­tion de leurs investissements.

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