Schéma de fonctionnement Sylfen par mauvais temps de nuit

Sylfen : acteur et contributeur de la transition énergétique

Dossier : Dossier FFEMagazine N°730 Décembre 2017
Par Nicolas BARDI

Quelques mots sur la genèse de Sylfen et le positionnement de la start-up aujourd’hui ?

J’ai fait mes débuts pro­fes­sion­nels dans le monde de l’énergie au CEA et à l’Institut Français du Pét­role, un univers qui m’a très vite pas­sion­né. Au cours de ma car­rière, j’ai eu l’occasion de tra­vailler sur plusieurs sujets dont l’hydrogène et les piles à com­bustible et de diriger un lab­o­ra­toire puis un départe­ment de recherche. 

Fin 2013, à quar­ante ans, j’ai fait le choix de me lancer dans l’entrepreneuriat et de créer ma start-up, Sylfen. Notre prin­ci­pale mis­sion est d’apporter une solu­tion tech­nique et logi­cielle qui va con­tribuer à la réus­site et la con­créti­sa­tion de la Tran­si­tion Énergétique. 

Actuelle­ment, la prin­ci­pale prob­lé­ma­tique autour de la Tran­si­tion Énergé­tique reste l’intermittence des éner­gies renou­ve­lables comme le solaire, l’éolien et l’hydroélectricité. Ces éner­gies sont par nature dépen­dantes de la météo. Le défi est donc de par­venir à met­tre au point une solu­tion qui va per­me­t­tre de faire l’équilibre entre l’offre et la demande. 

La flex­i­bil­ité de la demande c’est-à-dire le pilotage de la con­som­ma­tion dans les bâti­ments ne per­met pas de traiter cette prob­lé­ma­tique com­plète­ment. Sylfen pro­pose donc une solu­tion qui allie deux fonc­tions complémentaires : 

  • le stock­age et le dés­tock­age de l’énergie : quand il y a un sur­plus d’énergie, on stocke et quand il y a au con­traire un manque on déstocke ; 
  • la pro­duc­tion com­binée d’électricité et de chaleur à par­tir de méthane : la molécule de gaz CH4.

Actuelle­ment, il s’agit majori­taire­ment d’une énergie fos­sile, mais la molécule peut aus­si être pro­duite par la méthani­sa­tion, qui con­naît un véri­ta­ble développe­ment avec la pro­duc­tion de bio méthane à par­tir des déchets, des sta­tions d’épuration, des résidus agricoles. 


 
Schéma de fonctionnement Sylfen par beau temps de jour

Dans le cadre de la Transition Énergétique, l’autonomie énergétique est un axe stratégique. Comment appréhendez-vous cette dimension au travers de Sylfen ?

Aujourd’hui, le secteur du bâti­ment représente 40 % de la con­som­ma­tion énergé­tique et rejette autant de CO2 à des échelles dif­férentes selon les pays. 

Il y a actuelle­ment des efforts pour la réha­bil­i­ta­tion des immeubles pour éviter qu’ils ne soient des pas­soires ther­miques, des ini­tia­tives pour leur per­me­t­tre de pro­duire de l’énergie, notam­ment solaire, mais ce n’est pas suffisant. 

Pour faire face à cette sit­u­a­tion, nous enten­dons de plus en plus par­ler du con­cept d’autonomie des bâti­ments. Con­crète­ment, un bâti­ment autonome est capa­ble de pro­duire sa pro­pre énergie avec des pan­neaux solaires, de la cogénéra­tion, la stock­er, l’utiliser ou la réin­jecter sur le réseau. Il peut arbi­tr­er et pilot­er son action énergétique. 

Ce mode de gou­ver­nance alter­natif annonce une véri­ta­ble révo­lu­tion énergé­tique qui va favoris­er la général­i­sa­tion de l’échange d’énergie, que nous con­nais­sons et expéri­men­tons déjà avec les Smart Grids. Pour accélér­er cette ten­dance, il faut donc de plus en plus de bâti­ments autonomes dotés de cette capac­ité à pren­dre des déci­sions ayant trait à leur util­i­sa­tion de l’énergie.

Qu’en est-il du rôle des batteries dans le cadre de cette autonomie énergétique ?

C’est un sujet cen­tral qui fait l’objet de nom­breux débats dans le domaine de l’énergie. Actuelle­ment, le prix actuel pour un kilo­watt-heure est com­pris entre 400 et 500 euros, alors qu’il est à env­i­ron 12,5 euros pour l’hydrogène. Mal­gré une baisse des prix, l’hydrogène reste plus com­péti­tif. En plus, l’hydrogène per­met de stock­er beau­coup plus d’énergie.

LES BATTERIES VONT PERMETTRE DE FOURNIR DE LA PUISSANCE AUX BÂTIMENTS, ALORS QUE L’HYDROGÈNE PERMETTRA DE PROLONGER L’AUTONOMIE DU BÂTIMENT.

Ain­si, les bat­ter­ies vont per­me­t­tre de fournir de la puis­sance aux bâti­ments, alors que l’hydrogène per­me­t­tra de pro­longer l’autonomie du bâti­ment. Dans cette logique, nous avons déposé une ving­taine de brevets au CEA autour de la tech­nolo­gie d’électrolyse et pile à com­bustible réversible. Le même équipement, à tour de rôle, soit stocke l’énergie en pro­duisant de l’hydrogène, soit la dés­tocke en pro­duisant de l’électricité et de la chaleur pour le bâtiment. 

En com­plé­ment, nous dévelop­pons tout un volet logi­ciel pour pilot­er effi­cace­ment les actions énergé­tiques de façon adap­tée à chaque bâtiment. 

L’autonomie énergétique doit aussi être réfléchie à l’échelle des régions, des agglomérations. Qu’en est-il ?

À l’échelle des aggloméra­tions et des régions, le développe­ment des éner­gies renou­ve­lables se fait de manière locale avec des épisodes où les pro­duc­tions solaire, éoli­enne ou hydraulique peu­vent être très faibles ou max­i­males sur tout le ter­ri­toire : quand le soleil brille fort au-dessus d’un bâti­ment, tous les autres bâti­ments du quarti­er pro­duiront égale­ment beaucoup ! 

À terme, on con­naî­tra donc des dif­fi­cultés au niveau du pilotage des réseaux de dis­tri­b­u­tion à cause de ces excès ou de ces man­ques ter­ri­to­ri­aux d’énergie.

Pour faire face à cette sit­u­a­tion, il faut raison­ner en ter­mes de flex­i­bil­ité de la demande qui reste, néan­moins, une alter­na­tive lim­itée qui ne per­met de faire face qu’à des péri­odes de cour­tes de durée. 

À cela s’ajoutent les inter­con­nex­ions per­me­t­tant de trans­porter l’énergie d’une région à l’autre avec un réseau de très bonne qual­ité en France qui per­met de main­tenir une cer­taine garantie. 

Mais dans les journées d’hiver froides gris­es et sans vent, il faut bien garan­tir à cha­cun son énergie : on main­tient donc de gross­es capac­ités ali­men­tées par des sources d’énergie fossiles. 

Le stock­age, la cogénéra­tion et l’hydrogène sont des solu­tions pour apporter cette robustesse et sécuri­sa­tion de l’approvisionnement en énergie d’abord au niveau des bâti­ments puis pro­gres­sive­ment au niveau des quartiers, des aggloméra­tions et des villes. 

Par ailleurs, on con­state une évo­lu­tion sociale et poli­tique pro­fonde, qui est une réap­pro­pri­a­tion du sujet « énergie » à l’échelle locale : une entre­prise, un quarti­er, pour se diriger vers des ter­ri­toires 100 % renou­ve­lables et à énergie positive. 

En parallèle, les choses s’accélèrent pour Sylfen avec votre première levée de fonds. Quelles sont les prochaines étapes ?

En effet, nous sommes focal­isés sur la réus­site de notre pre­mière lev­ée de fond qui devrait être final­isée cet automne. Nous tra­vail­lons aus­si sur la final­i­sa­tion de l’intégration de notre pre­mier pro­to­type et preuve de con­cept de notre tech­nolo­gie chez notre pre­mier client, un grand groupe français de l’énergie.

Nous avons aus­si pour ambi­tion de nous dévelop­per sur le marché inter­na­tion­al. Pour y par­venir, nous voulons nouer des parte­nar­i­ats indus­triels et com­mer­ci­aux pour accélér­er notre développe­ment en respec­tant bien évidem­ment les spé­ci­ficités locales. 

L’univers de l’énergie est un écosys­tème indus­triel, qui requiert la col­lab­o­ra­tion de dif­férents acteurs, afin de faire réus­sir la Tran­si­tion Énergétique. 

Et pour accom­pa­g­n­er nos pro­jets de développe­ment, nous exé­cu­tons un impor­tant plan de recrute­ment pour accélér­er et boost­er notre crois­sance. Nous recher­chons des com­pé­tences pour réus­sir l’intégration de nos solu­tions dans un proces­sus de pro­duc­tion industrielle. 

Cela néces­site la qual­i­fi­ca­tion des sous-trai­tants, la déf­i­ni­tion et la mise en oeu­vre des lignes de pro­duc­tion pour pass­er de la ver­sion pilote à des sché­mas indus­triels opti­misés avec des con­traintes de coût et de qualité… 

À cela s’ajoute un enjeu fort de com­mer­cial­i­sa­tion et de mon­tage de pro­jets pour mul­ti­pli­er le nom­bre de sites pilotes qui vont nous per­me­t­tre de tester notre tech­nolo­gie, la qual­i­fi­er en con­di­tion réelle, cap­i­talis­er sur ce retour d’expérience afin de les inté­gr­er dans nos pro­duits com­mer­ci­aux prévus pour 2020.

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