Injection d'eau pour le gaz de schiste

Exploitation du gaz et du pétrole de schiste :

Dossier : Dossier FFEMagazine N°697 Septembre 2014
Par Pascal RÉMY (80)

« Nous traitons l’eau de plus de 500 mil­lions d’habitants à tra­vers le globe et de plusieurs mil­liers de sites indus­triels » explique Pas­cal Rémy.

Dans l’extraction pétrolière, les poly­acry­lamides, en vis­cosi­fi­ant l’eau, accrois­sent le taux de récupéra­tion de pét­role dans les réser­voirs exis­tants. Cette tech­nolo­gie, qui ménage l’environnement et dont le coût est inférieur à 15 $ par bar­il, est en voie de général­i­sa­tion rapide.

Elle con­tribue à aug­menter la taille des réserves disponibles et per­met de réduire la con­som­ma­tion d’eau par bar­il de pét­role extrait.

« Dans l’exploitation des gaz et pét­role de schiste, notre activ­ité aux USA a été décu­plée en quelques années, nos polymères étant util­isés en frac­tura­tion hydraulique afin de réduire de plus de 50 % l’énergie néces­saire à l’injection d’eau ».

A l’aune de l’exemple de SNF, la chimie est un secteur d’avenir. Elle est non seule­ment à la source de la vie mais elle est égale­ment à la base de toute l’activité humaine. Elle irrigue ain­si tous les secteurs indus­triels et se trou­ve au cœur des enjeux de civil­i­sa­tion de demain.

« Qu’il s’agisse de san­té, d’alimentation, de ges­tion de l’eau, d’optimisation des ressources en hydro­car­bu­re, des éner­gies nou­velles, d’économie d’énergie dans les trans­ports ou l’habitat, la chimie est à la base de toutes les solutions ».

Les gaz de schiste : arbitres du développement économique de la planète

Avec un prix du gaz divisé par plus de trois en quelques années, les Etats-Unis sont en train d’acquérir un avan­tage com­péti­tif mas­sif sur l’Europe. La pétrochimie améri­caine vit un renou­veau que nul n’aurait imag­iné, il y a seule­ment cinq ans. Or, la chimie est une indus­trie qui irrigue toutes les autres et sa com­péti­tiv­ité accrue va pro­gres­sive­ment se dif­fuser à toute l’économie américaine.

À terme, les emplois créés par ce renou­veau indus­triel améri­cain dépasseront les cinq mil­lions. A con­trario, si l’Europe ne réag­it pas, c’est toute sa pétrochimie et une par­tie de son aval indus­triel qui sont men­acés. Or, l’Europe pos­sède des réserves de gaz et de pét­role de schiste, très importantes.

À ce jour, les prin­ci­paux pays d’Europe ont tous décidé d’apprécier le poten­tiel de leur réserve : l’Allemagne, la Pologne, le Dane­mark, même le Roy­aume-Uni vient de se lancer franchement.

En France, le débat sur la soi-dis­ant « tran­si­tion énergé­tique » ne doit pas occul­ter un point essen­tiel : il n’y a pas de crois­sance durable sans énergie à bas prix.

Une politique énergétique doit se préoccuper avant tout de la sécurité des approvisionnements et de la compétitivité

En France, le débat se focalise sur la réduc­tion des émis­sions de CO2. Mais les efforts poten­tiels de la France en la matière ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan des émis­sions du reste du monde. « Le char­bon va devenir l’une des prin­ci­pales sources d’énergie au monde dans 10 ans. L’Europe, l’Espagne, le Roy­aume Uni et l’Allemagne ont migré mas­sive­ment vers le char­bon. Or, les plus grands pol­lueurs d’Europe sont les verts alle­mands qui ont pro­mu des éoli­ennes dont la pro­duc­tion inter­mit­tente doit être com­pen­sée par le recours mas­sif au char­bon » ajoute Pas­cal Rémy.

Les gaz et pét­role de schiste sont la seule alter­na­tive crédi­ble au développe­ment mas­sif du char­bon. Les éner­gies renou­ve­lables sont encore très chères et sont, et res­teront intermittentes.

D’après l’administration améri­caine de l’énergie, à hori­zon 2020, le coût de l’électricité solaire ther­mique ou de l’éolien off­shore aux USA restera de qua­tre à cinq fois supérieur à celui de l’électricité issue du gaz, en cycle com­biné. Par ailleurs, le gaz a une empreinte car­bone de 50 % inférieure au charbon.

L’Allemagne et le Roy­aume-Uni ne s’y sont pas trompés en autorisant l’exploitation des gaz de schiste, après avoir été ten­tés par un bannissement.

En France, le débat actuel sur les gaz et pét­role de schiste et sur la frac­tura­tion hydraulique est une car­i­ca­ture. « À peu près tous les argu­ments avancés par les détracteurs sont faux. »

La frac­tura­tion hydraulique est une tech­nolo­gie anci­enne qui a été mise en oeu­vre pour la pre­mière fois en 1947. Elle s’est général­isée depuis une dizaine d’années. Or, cette activ­ité a fait l’objet d’un nom­bre tout à fait réduit de prob­lèmes envi­ron­nemen­taux, alors que près d’un mil­lion de puits ont été forés depuis plus de 60 ans.

De même, les ressources néces­saires en eau sont mod­estes, l’eau util­isée est sou­vent non potable, et après traite­ment, elle peut être recyclée.

Par ailleurs, l’empreinte ter­ri­to­ri­ale de cette activ­ité est faible puisque les équipements de frac­tura­tion sont typ­ique­ment util­isés quelques semaines et que les sites peu­vent ensuite être ren­dus à leur état d’origine. Enfin, le nom­bre de pro­duits chim­iques util­isés peut être réduit à qua­tre, com­prenant un réduc­teur de fric­tion, un géli­fi­ant, un oxy­dant et un inhib­i­teur de dépôt. Plus encore, il est tout à fait con­cev­able d’envisager l’utilisation unique d’un réduc­teur de fric­tion et d’un géli­fi­ant, tous deux non toxiques.

Quant au film Gasland, il con­fond, à des­sein, le méthane ther­mogénique, issu des pro­fondeurs du sol, et le méthane biogénique présent en surface.

Enfin, il n’y a pas d’alternative crédi­ble à la frac­tura­tion hydraulique. Les pistes évo­quées en France (recours au gaz, aux explosifs ou à un arc élec­trique) sont en fait des tech­nolo­gies du passé qui ont été sup­plan­tées par la frac­tura­tion hydraulique.

Si la France veut redy­namiser son indus­trie, elle doit avoir le courage de lancer de nou­veaux grands pro­jets indus­triels, à l’instar de ce qui a été fait dans les années 1960. L’exploitation du gaz et du pét­role de schiste est une très belle oppor­tu­nité pour la France, non seule­ment de réduire ses impor­ta­tions de gaz, mais égale­ment de redy­namiser son industrie.

C’est en fait toute une fil­ière indus­trielle qui pour­rait émerg­er : matériels de for­age et de frac­tura­tion, traite­ment des eaux, pro­duits chim­iques adap­tés aux con­traintes envi­ron­nemen­tales, sépa­ra­tion des gaz, fil­ière de raf­fi­nage à par­tir d’une base gaz, développe­ment de nou­velles tur­bines à gaz individuelles.

La fracturation hydraulique peut se concevoir avec des produits non toxiques

La France est le seul pays qui envis­age de ban­nir toute réflex­ion sur le sujet. Tout se passe comme si la France avait per­du con­fi­ance dans la sci­ence et dans le pro­grès et fer­mait une à une toutes les portes sur l’avenir : nucléaire, gaz de schiste, OGM, nan­otech­nolo­gies, cel­lules souche.

La France est engluée dans un dog­ma­tisme écologique, qui prône la régres­sion économique et l’anti-progrès. Le lan­gage de cette écolo­gie est celui de la peur, de l’interdit et des con­cepts creux tels l’économie cir­cu­laire ou la tran­si­tion énergé­tique. La posi­tion actuelle de la France est sui­cidaire mais, heureuse­ment, elle est égale­ment inten­able car la mon­tée pro­gres­sive du chô­mage et la destruc­tion con­tin­ue d’emplois indus­triels obligeront le pays à exploiter les gaz et pét­role de schiste.

Il faut juste espér­er que cette prise de con­science ne sera pas trop tar­dive et que la rai­son fini­ra par l’emporter sur le dog­ma­tisme et l’utopie.

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