Stravinsky : Pulcinella Mozart/Poulenc : Concertos pour deux pianos

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°745 Mai 2019
Par Marc DARMON (83)

MMe­dia est une plate­forme fondée en 2011 par l’ancien chef d’orchestre Michel Swier­czews­ki, com­prenant prin­ci­pale­ment un bou­quet de qua­tre chaînes cul­turelles thé­ma­tiques dont une con­sacrée à la musique clas­sique. En stream­ing, comme sur Net­flix ou Spo­ti­fy, on a ain­si accès sur tous sup­ports (nou­velles télévi­sions con­nec­tées, smart­phones, tablettes, ordi­na­teurs) à une qua­si-infinité (plus de mille heures) de con­certs clas­siques mag­nifique­ment filmés et réal­isés, en haute déf­i­ni­tion (voire pour beau­coup en 4K/UHD), dif­fusées dans le monde entier. Chaque con­cert est accom­pa­g­né sur le site d’un com­men­taire introductif.

Bien évidem­ment, un an de rubriques ne suf­fi­rait pas à citer les tré­sors disponibles sur cette plate­forme. Par­mi les per­les trou­vées sur cette plate­forme, citons par exem­ple la suite du bal­let Pul­cinel­la de Stravin­sky, par l’orchestre de cham­bre de Bâle dirigé par Umber­to Benedet­ti Michelan­geli. Ce bal­let com­posé en 1919 pour Diaghilev comme Petrouch­ka, L’Oiseau de feu, Le Sacre du print­emps est fait de col­lages de morceaux de Per­golèse, ou attribués, à l’époque de leur com­po­si­tion, à Per­golèse, com­pos­i­teur ital­ien ayant vécu près de deux siè­cles avant Stravin­sky. Mais ce sont des col­lages dans le style « néo-clas­sique » de Stravin­sky, un peu comme Richard Strauss ou Rav­el adap­tant Couperin. À la ques­tion vicieuse que l’on posait à Stravin­sky « quelle est votre œuvre favorite de Per­golèse ? », il répondait mali­cieuse­ment : Pul­cinel­la.

La suite que nous voyons ici en a été tirée en 1922, écrite pour trois voix et un orchestre réduit de trente-deux instru­men­tistes. Elle a été créée à l’Opéra de Paris le 15 mai 1920 par les bal­lets russ­es, sur une choré­gra­phie de Léonide Mas­sine. Les décors étaient de Pablo Picas­so. La suite place les par­ties vocales dans l’orchestre et réduit la par­ti­tion à onze pièces. Un délice !

Nous avons remar­qué égale­ment un con­cert rare où Frank Bra­ley et Bertrand Chamay­ou jouent les Con­cer­tos pour deux pianos de Mozart et Poulenc. Con­cert très bien filmé, ce qui est impor­tant car voir et sen­tir les deux pianos se répon­dre est indis­pens­able dans ces deux œuvres. Après le déli­cieux con­cer­to de Mozart, les mêmes inter­prètes jouent le « canaille » con­cer­to de Poulenc. Il est dif­fi­cile d’imaginer des styles plus éloignés. Le Con­cer­to pour piano nº 10 de Mozart K.365 en mi bémol majeur est com­posé en jan­vi­er 1779 pour sa sœur Nan­nerl et lui-même, il mon­tre l’influence de l’école de Mannheim.

Le Con­cer­to en ré mineur pour deux pianos et orchestre de Poulenc a cent cinquante ans de moins. C’est une des dernières œuvres de sa pre­mière péri­ode, une œuvre gaie et très acces­si­ble que Poulenc, dont on dis­ait qu’il était à la fois « moine et voy­ou ». Il est com­posé selon la mode de l’époque aux envi­rons de 1930, qui a vu aus­si un retour à Bach chez Hin­demith, à Tchaïkovs­ki chez Stravin­sky… Poulenc emprunte là non seule­ment à l’histoire de la musique occi­den­tale, Saint-Saëns dans la toc­ca­ta du début, des qua­si-con­tre­points à la Bach, Rach­mani­nov dans l’écriture pianis­tique, trois cita­tions de Mozart (con­cer­tos n° 20, 21 et 26), une de Rav­el (con­cer­to en sol), mais il emprunte aus­si à la musique ori­en­tale de game­lan qu’il venait de décou­vrir. L’œuvre est écrite pour le pianiste Jacques Févri­er, ami d’enfance de Poulenc avec qui il l’a créée en 1932 à La Fenice à Venise. Un très beau concert.

Faites comme moi, nav­iguez à l’envie sur la plate­forme MMe­dia, une véri­ta­ble cav­erne d’Ali Baba.

Deux con­certs sur mmediatv.com

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