Serge Prokofiev

Serge Prokofiev : les sept symphonies, les cinq concertos pour piano, les deux concertos pour violon, Symphonie concertante pour violoncelle, Ivan le Terrible, Alexandre Nevski

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°757 Septembre 2020
Par Marc DARMON (83)

Orchestre du Mari­in­sky, direc­tion Valery Gergiev
7 DVD ou 4 Blu-Ray Arthaus

À l’occasion des cent vingt-cinq ans de la nais­sance de Serge Prokofiev, Valery Gergiev s’est lancé en mars 2016 dans un hom­mage marathon sur trois jours
entre Moscou et Saint-Péters­bourg. Toutes les sym­phonies et les con­cer­tos (et les grandes can­tates tirées des films d’Eisenstein), soit plus de onze heures de musique en cinq con­certs sur trois jours ! Évidem­ment, l’orchestre du Mari­in­sky est le meilleur orchestre de Russie et le boulim­ique Valery Gergiev, son chef depuis vingt-cinq ans, est l’interprète idéal pour l’œuvre de Prokofiev, lui qui en appré­cie depuis son jeune âge, comme il le racon­te, les mélodies, les rythmes, les har­monies, le lyrisme et l’énergie.

Le cof­fret est bien présen­té selon trois péri­odes, la jeunesse (1911–1918), la péri­ode améri­caine (une tournée inter­na­tionale qui dura finale­ment quinze ans, loin des bolcheviques, 1918–1932), puis le retour en Union sovié­tique stal­in­i­enne (1932–1953). Mort le même jour que Staline, Prokofiev n’a bien sûr pas été hon­oré comme il aurait dû l’être.

Gergiev fait remar­quer avec rai­son que Tchaïkovs­ki lui-même avait ouvert à la fin de sa vie, avec sa six­ième sym­phonie « Pathé­tique » et Casse-Noisette, des per­spec­tives musi­cales nou­velles et que la musique que Tchaïkovs­ki aurait com­posée s’il avait vécu plus longtemps aurait été prob­a­ble­ment pas­sion­nante. Valery Gergiev fait le même com­men­taire sur Prokofiev et con­sid­ère que le com­pos­i­teur, s’il avait vécu après sa sep­tième sym­phonie, aurait égale­ment con­tin­ué à offrir des sur­pris­es sans se répéter. Effec­tive­ment l’ensemble de l’œuvre orches­tral de Prokofiev est à con­naître et touche sou­vent des sommets.

Naturelle­ment tout le cof­fret est mémorable et con­stitue une somme de référence. Par où com­mencer ? Le morceau le plus acces­si­ble est for­cé­ment la pre­mière sym­phonie, dite « Clas­sique », pas­tiche du style de Haydn et Mozart par un potache de vingt-six ans. Les chefs‑d’œuvre sym­phoniques sont prob­a­ble­ment les cinquième et sep­tième sym­phonies, con­den­sé de tout son art. Par­mi les con­cer­tos, dif­fi­cile de choisir entre le pre­mier pour piano (par un génie de vingt ans), le troisième pour piano (mer­veille absolue) et le pre­mier pour vio­lon d’une sub­til­ité incroy­able (et ici inter­prété par un Leonidas Kavakos bril­lan­tis­sime). Ensuite, décou­vrez la troisième sym­phonie, entière­ment com­posée sur des motifs de son opéra mau­dit L’Ange de feu, puis son deux­ième con­cer­to pour piano, joué tout en puis­sance par le colosse Denis Mat­suev. Et bien enten­du les can­tates con­sti­tuées pour le con­cert d’après les musiques com­posées pour les deux chefs‑d’œuvre d’Eisenstein, Alexan­dre Nevs­ki et Ivan le Ter­ri­ble. L’épopée d’Alexandre Nevs­ki, qui boute au XIIIe siè­cle les Teu­tons hors de Russie (nous sommes en 1938 !), a été resti­tuée par le grand cinéaste Eisen­stein dans un film chef‑d’œuvre où l’association et la syn­chro­ni­sa­tion du film et de la musique seront une référence pour le reste du siècle. 

Vous l’avez com­pris : un cof­fret où l’on revien­dra sans cesse, pour de nou­velles décou­vertes. 

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