RATP neutralité carbone

RATP : des engagements ambitieux en faveur de la neutralité carbone

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°780 Décembre 2022
Par Sophie MAZOUÉ

Mobil­ité élec­trique, tran­si­tion énergé­tique des flottes, réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre, per­for­mance et sobriété énergé­tique, lutte con­tre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique… sont au cœur de la stratégie du groupe RATP pour con­tribuer à relever les grands défis cli­ma­tiques et énergé­tiques de demain. Le point avec Sophie Mazoué, respon­s­able du développe­ment durable du groupe RATP.

Comment appréhendez-vous la question de la neutralité carbone et, dans ce cadre, quelles sont les grandes lignes de votre stratégie en la matière ? 

Comme le souligne le rap­port du GIEC, le cli­mat représente un enjeu cru­cial et il nous faut attein­dre dès 2050 la neu­tral­ité car­bone. Les trans­for­ma­tions à men­er sont majeures, alors que cha­cun doit se mobilis­er à son niveau : l’État, les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, les entre­pris­es et les citoyens. C’est dans ce cadre que le groupe RATP a pris de nom­breux engage­ments en faveur de la neu­tral­ité car­bone. Nous sommes avant tout un Groupe au ser­vice de la ville, et de par notre ADN, nous sommes en pre­mière ligne dans la lutte con­tre le change­ment cli­ma­tique. En effet, à l’échelle de la planète, les émis­sions de gaz à effet de serre des villes représen­tent 70 % des émis­sions de la planète. Et le trans­port est la pre­mière cause de ces émis­sions en France. 

En 2021, le Groupe a donc réaf­fir­mé son engage­ment à con­tribuer à la neu­tral­ité car­bone et struc­ture ain­si son action autour de deux leviers : 

  • par­ticiper à la décar­bon­a­tion en offrant des ser­vices bas car­bone : sur un même tra­jet, nous émet­tons 60 fois moins d’émissions de gaz à effet de serre en prenant le métro, le RER ou le tramway qu’en voiture indi­vidu­elle. Nous aidons ain­si nos clients à réduire leur empreinte car­bone en met­tant à leur dis­po­si­tion des ser­vices de mobil­ité bas car­bone, attrac­t­ifs et acces­si­bles à tous ;
  • pour­suiv­re nos efforts en ter­mes de réduc­tion de nos pro­pres émis­sions en mobil­isant l’ensemble de notre écosys­tème (nos col­lab­o­ra­teurs, nos four­nisseurs, nos parte­naires indus­triels). Dans cette démarche, nous action­nons plusieurs leviers dont l’énergie afin de pou­voir agir sur notre sobriété et per­for­mance énergé­tique. En 2021, la RATP a réaf­fir­mé sa volon­té de réduire de 50 % ses émis­sions de gaz à effet de serre d’ici 2025 par rap­port à 2015. Pour ce faire, nous déployons des sys­tèmes de man­age­ment de l’énergie. Nous sommes, d’ailleurs, le pre­mier opéra­teur mul­ti­modal à avoir obtenu la cer­ti­fi­ca­tion ISO 50 001 sur le man­age­ment de l’énergie en 2017. Nous l’avons, par ailleurs, renou­velée en 2020. En par­al­lèle, nous tra­vail­lons sur l’efficacité et la sobriété éner­ge­tique. Au niveau des achats, nous inté­grons des critères « car­bone » dans nos marchés de matériels roulants notam­ment et envis­ageons d’en faire de même dans l’instruction des investisse­ments. Enfin, au quo­ti­di­en ce sont nos 69 000 col­lab­o­ra­teurs qui sont mobil­isés sur ces enjeux.

En interne et sur le terrain, comment cela se traduit-il ? Quelles actions déployez-vous en ce sens ? Pouvez-vous nous donner des exemples ?

L’ensemble de nos activ­ités ont voca­tion à con­tribuer à nos efforts pour dimin­uer notre con­som­ma­tion énergé­tique et nos émis­sions de gaz à effet de serre. Ain­si, avec Île-de-France Mobil­ités, nous dévelop­pons un pro­jet majeur visant à con­ver­tir notre flotte de 4 800 bus à une énergie pro­pre d’ici 2025. Ce pro­jet inédit et sans équiv­a­lent en Europe vise à con­ver­tir notre flotte pour moitié en bus élec­trique et l’autre au bioGNV. À terme, c’est 240 000 tonnes de CO2 équiv­a­lent qui vont ain­si être évitées chaque année grâce à ce pro­gramme Bus 2025. 

Pour le matériel roulant fer­ré, nous sys­té­ma­ti­sons la récupéra­tion d’énergie au freinage et les dis­posi­tifs de resti­tu­tion d’énergie. Nous équipons tous nos nou­veaux matériels en ce sens. 

La pour­suite du déploiement d’un nou­veau matériel sur la ligne 14 du métro per­me­t­tra ain­si de réduire de 17 % la con­som­ma­tion énergé­tique des rames (par rap­port au train de dernière généra­tion) grâce à ce sys­tème de freinage élec­trique avec récupéra­tion d’énergie, à une motori­sa­tion plus per­for­mante et à un éclairage inté­grale­ment assuré par LED. 

Dans nos bâti­ments, nous met­tons en œuvre des actions de sobriété qui ont per­mis à fin 2021 de réduire de plus de 10 % la con­som­ma­tion de nos sites indus­triels par rap­port à 2015. En out­re, nous étu­dions sys­té­ma­tique­ment la pos­si­bil­ité de recourir aux éner­gies renou­ve­lables. Dans cette logique, nous avons recours au Pow­er Pur­chase Agree­ment (PPA), un con­trat qui per­met d’acheter directe­ment de l’énergie auprès d’un pro­duc­teur d’énergie renou­ve­lable. En 2020, nous avons signé un pre­mier PPA d’électricité verte avec EDF pour une durée de trois ans qui nous per­met de cou­vrir 4 % de notre con­som­ma­tion annuelle d’énergie. Pour ce faire, EDF met à notre dis­po­si­tion cinq parcs éoliens. Nous venons de sign­er un PPA addi­tion­nel pour de l’énergie solaire afin de cou­vrir 6 % de notre con­som­ma­tion annuelle d’électricité.

Notre objec­tif est de réduire de 50 % nos émis­sions de gaz à effet de serre sur la prochaine décen­nie. 

Vous travaillez également sur une politique transverse sur le climat. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

Si nous déployons des actions pour cibler toutes les thé­ma­tiques envi­ron­nemen­tales, nous avons toute­fois souhaité faire du cli­mat une pri­or­ité et align­er nos engage­ments et actions en la matière avec la Stratégie Nationale Bas Car­bone qui définit les tra­jec­toires par secteur afin d’atteindre la neu­tral­ité car­bone. C’est aus­si une illus­tra­tion con­crète de l’importance que nous accor­dons à ce sujet.

Notre feuille de route s’articule ain­si autour de divers­es ori­en­ta­tions dont :

  • la réduc­tion des gaz à effet de serre générés directe­ment ou pas par notre activ­ité via des actions ciblées avec un focus sur l’énergie, qui est notre pre­mière source d’émission directe, au tra­vers d’un tra­vail sur les achats et les investisse­ments ; 
  • aider nos clients dans leur tran­si­tion bas car­bone, c’est-à-dire nos voyageurs, les autorités organ­isatri­ces des mobil­ités, les col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, en dévelop­pant des ser­vices bas car­bone qui vont per­me­t­tre aux villes, de manière plus glob­ale de lut­ter con­tre le change­ment cli­ma­tique. 

Nous nous pré­parons aus­si au change­ment cli­ma­tique en dévelop­pant des solu­tions d’adaptation. Si notre pri­or­ité reste la neu­tral­ité car­bone, il nous faut tout de même anticiper les réper­cus­sions du change­ment cli­ma­tique : pics de forte chaleur, inon­da­tions… Et nos activ­ités sont plus par­ti­c­ulière­ment exposées au risque d’inondation de nos réseaux souter­rains. Depuis les années 2000, nous tra­vail­lons sur cet axe afin de préserv­er nos instal­la­tions et favoris­er la reprise rapi­de de l’exploitation après une crue, par exem­ple. 

Nous entendons de plus en plus que l’hydrogène va jouer un rôle important. Qu’en est-il pour la RATP ? 

À l’heure actuelle, le développe­ment et le déploiement hydrogène dans les trans­ports en com­mun doit relever plusieurs défis : 

  • la généra­tion d’hydrogène vert/renouvelable : pour tenir les engage­ments de réduc­tion des émis­sions de gaz à effet de serre et pro­pos­er une alter­na­tive plus intéres­sante que le bioGNV, l’hydrogène pro­duit doit être vert. Cela per­me­t­tra aus­si d’apporter une solu­tion pour absorber l’intermittence des éner­gies renou­ve­lables ; 
  • l’approvisionnement et le stock­age : aujourd’hui, on recense trop peu de points de recharge. Pour un acteur comme la RATP, il faut trou­ver un com­pro­mis entre la généra­tion de l’hydrogène dans nos cen­tres ou dans des sites avec une prox­im­ité immé­di­ate. Cela impose des con­traintes sur nos instal­la­tions clas­siques en ter­mes de pro­tec­tion de l’environnement, alors que si la pro­duc­tion se fait hors site, il fau­dra garan­tir le trans­port de l’hydrogène avec des moyens décar­bonés pour faire sens ; 
  • le coût : le sur­coût pour l’acquisition d’un bus hydrogène est très impor­tant. Il faut compter 150 000 euros de plus pour un bus élec­trique et 400 000 euros de plus qu’un bus au gaz.

Pour relever l’ensemble de ces défis, il nous faut pou­voir met­tre en place des con­sor­tiums, dépass­er les cli­vages en asso­ciant les énergéti­ciens, les opéra­teurs de trans­port, les ges­tion­naires de déchets…

Plus par­ti­c­ulière­ment, sur la ques­tion de l’hydrogène, nous avons opté pour une démarche pro­gres­sive. Nous menons actuelle­ment des tests avec un pre­mier bus à La Roche-sur-Yon pour mieux con­naître et appréhen­der cette tech­nolo­gie et sommes impliqués dans plusieurs pro­jets de tran­si­tion énergé­tique de flotte de bus, dont une par­tie à l’hydrogène à Lori­ent et en Île-de-France.  

Poster un commentaire