Pour un nouveau saint-simonisme

Dossier : ExpressionsMagazine N°691 Janvier 2014
Par Jean-Marc CHABANAS (58)

Voilà près de dix ans qu’Hubert Lévy-Lam­bert (53) est par­ti à l’assaut des mythes, dans la fou­lée du « rap­port Cam­des­sus » inti­tu­lé « Le sur­saut ». Chaque année, au mois de décembre, le groupe X‑Sursaut qu’il pré­side pro­pose de nou­velles réflexions et de nou­velles pistes.

Dans les pas de Prosper Enfantin

Une banque publique d’investissement
Loin­tain ava­tar de l’Anvar, résul­tant de la fusion de CDC Entre­prise (filiale de la Caisse des dépôts), FSI (fonds stra­té­gique d’investissement) et Oseo, la BPI France, banque publique d’investissement, a été créée pour cofi­nan­cer l’investissement et l’innovation. Elle compte 22 direc­tions régio­nales et consacre 800 mil­lions d’euros aux aides à l’innovation, sous la férule de Paul-Fran­çois Four­nier (89).

Fai­sant revivre un ins­tant Pros­per Enfan­tin (1813), à l’occasion du bicen­te­naire de cette pro­mo­tion, Hubert Lévy-Lam­bert évoque l’idée saint-simo­nienne d’un pro­grès par­ta­gé pour sou­hai­ter trou­ver une ins­pi­ra­tion nouvelle.

Le col­loque débat suc­ces­si­ve­ment du décro­chage fran­çais (et com­ment s’en sor­tir), de la puis­sance publique (ni faire, ni lais­ser faire, mais faire faire), des clés de la renais­sance indus­trielle et d’un agen­da pour poser les condi­tions de la croissance.

Valoriser les points forts

Le pro­tec­tion­nisme est contre-productif

Nous avons des points forts, rap­pelle Laurent Daniel (96), en com­men­tant un récent rap­port de l’OCDE. La pro­duc­ti­vi­té horaire fran­çaise reste éle­vée (la France est clas­sée sep­tième sur trente-quatre pays). Nous avons bien résis­té en termes de baisse finan­cière. Nous sommes assez bien pla­cés dans les ser­vices si l’on prend en compte la valeur ajou­tée à l’exportation.

Les champions cachés

Par­mi les solu­tions évo­quées, il faut mettre en avant nos « cham­pions cachés », selon la for­mule chère à Sté­phan Guin­chard (94).

Mal connus du grand public, réa­li­sant moins de trois mil­liards d’euros de chiffre d’affaires, ces cham­pions se situent géné­ra­le­ment dans les trois pre­mières entre­prises mon­diales sur leur sec­teur d’activité.

On en dénombre 3 000 dans le monde, 1 300 en Alle­magne et moins de 200 en France, mais en fait, estime-t-il, pro­ba­ble­ment 300 à 400, encore plus cachés.

Arrière-cou­sin du célèbre mémo­ria­liste, Hen­ri, comte de Saint-Simon (1760−1825), deve­nu Saint-Simon tout court, fut suc­ces­si­ve­ment offi­cier, entre­pre­neur, spé­cu­la­teur et phi­lo­sophe. Il sou­tient dès 1817 que « la socié­té tout entière repose sur l’industrie », l’industriel étant un homme qui tra­vaille à pro­duire. Ce n’est qu’à sa mort, en 1825, que naît véri­ta­ble­ment le « saint-simo­nisme ». D’abord une sorte d’Église, il devient le fer de lance d’une poli­tique de grands pro­jets. On lui doit le déve­lop­pe­ment du che­min de fer, mais aus­si l’esquisse du canal de Suez ou du tun­nel sous la Manche, ou encore l’idée de libre-échange. Com­pé­tents, pas­sion­nés, sou­dés, les saint-simo­niens béné­fi­cient de l’appui de Napo­léon III pour défi­nir une vision du monde à long terme. Pros­per Enfan­tin (1813) et Michel Che­va­lier (1823) comptent par­mi les nom­breux poly­tech­ni­ciens les plus actifs du mouvement.

Un État fort, patient et pédagogue

« Je crois plus dans les hommes que dans les ins­ti­tu­tions », déclare Jean- Claude Pra­ger (64), qui plaide avec bien d’autres pour la sim­pli­fi­ca­tion dras­tique des struc­tures admi­nis­tra­tives sup­po­sées aider les créa­teurs d’entreprises ou les gérants de petites struc­tures. Selon lui, l’État doit être fort, mais aus­si patient et pédagogue.

Une Europe saint-simonienne

Dès 1813, Saint-Simon a pro­po­sé une orga­ni­sa­tion euro­péenne. « Nous devons remettre à jour ses idées, estime Phi­lippe Her­zog (59). Notre Europe actuelle est faite pour les citoyens, mais sans les citoyens. Il faut la refonder. »

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