Dessin de Nina Miolane

Nina Miolane (2009) La joie de la mathématique et la joie du sport

Dossier : TrajectoiresMagazine N°769 Novembre 2021
Par Pierre LASZLO

Nina Miolane est fille d’Édith et Yves Miolane, phar­ma­ci­enne et ingénieur. L’un et l’autre s’investirent pour l’excellence de l’enseignement dans leur région ; ils furent dona­teurs de la Fon­da­tion de l’université de Ver­sailles, lorsque celle-ci vit le jour. Leur souci de l’éducation de leurs enfants, ten­ant à leur fournir des sco­lar­ités de haut de gamme, était bien dans leur caractère. 

Avec ses deux frères plus jeunes, Léo et Tom, Nina pas­sa son enfance à Guyan­court, dans les Yve­lines. Elle s’en écar­ta fort peu pour ses sco­lar­ités : le sec­ondaire au lycée fran­co-alle­mand de Buc, à quelques kilo­mètres à l’est de Guyan­court ; puis la pré­pa à Ginette, à Ver­sailles, à quelques kilo­mètres seule­ment au nord-est de Guyan­court ; et enfin l’École, à Palaiseau, aus­si tout à prox­im­ité de la mai­son familiale. 

Les lettres, les maths ou la politique ?

Sa matière préférée ? Les math­é­ma­tiques. À Buc, tout d’entrée de jeu la ten­tait : les let­tres, les maths, voire la poli­tique. Un pro­fesseur l’aida et la pous­sa vers les math­é­ma­tiques, pour lesquelles elle était douée. Elle inté­gra l’X en 2009 et fit son ser­vice mil­i­taire à l’armée de terre, au Rég­i­ment du ser­vice mil­i­taire adap­té (RSMA) du Lamentin, Mar­tinique. À l’X elle rejoint l’équipe de vol­ley, sport qu’elle pra­tique encore aujourd’hui. Elle s’investit aus­si dans une mul­ti­tude de binets, dont notam­ment une liste Kès, X‑Projets, les Journées de ski poly­tech­ni­ci­ennes (JSP), le binet Œnolo­gie et surtout le binet Niversaire.

Son frère Léo suiv­it son exem­ple : il inté­gra l’X en 2012, puis fut chercheur au Courant Insti­tute of Math­e­mat­i­cal Sci­ences de New York Uni­ver­si­ty, après une thèse de doc­tor­at copar­rainée par l’École nor­male supérieure et l’Inria ; il tra­vaille à présent pour G‑Research à Lon­dres. Quant à Tom, le plus jeune, il est étu­di­ant en médecine.

“Cérébrale par nature,
cérébrale par destination.”

Après sa sco­lar­ité à l’X, Nina Miolane élar­git notable­ment son ray­on d’action : par un mas­ter en physique théorique sur la rel­a­tiv­ité générale, à l’aide de la géométrie rie­man­ni­enne, à l’Imperial Col­lege, à Lon­dres ; puis par une thèse de doc­tor­at, sous la direc­tion de Xavier Pen­nec (89), à l’Inria, à Sophia-Antipo­lis, près d’Antibes. Xavier Pen­nec fut un précurseur pour dévelop­per la théorie des sta­tis­tiques dans des espaces non linéaires (var­iétés rie­man­ni­ennes, groupes de trans­for­ma­tion) et dans son appli­ca­tion aux prob­lèmes con­crets d’analyse d’images médi­cales, dont le recalage d’images dif­féo­mor­phes et les sta­tis­tiques de formes. Sous sa super­vi­sion, la thèse de Nina por­ta sur l’imagerie du cerveau humain pour infér­er de divers­es tech­niques comme l’IRM ou les scans PET des con­tours pré­cis pour les divers­es par­ties de l’encéphale. Elle soutint sa thèse en décem­bre 2016. 

La mathématique du vivant

Cérébrale par nature comme par des­ti­na­tion, elle retrou­va avec plaisir un paysage math­é­ma­tique fam­i­li­er : la géométrie rie­man­ni­enne met en équa­tion la tra­jec­toire courbe de la lumière dans l’espace-temps. En médecine, la tra­jec­toire de l’information neu­ronale dans le cor­tex visuel est elle aus­si courbe. Cela est dû à des raisons phys­i­ologiques. Il paraît donc logique d’utiliser la géométrie sous-rie­man­ni­enne pour met­tre en équa­tion la tra­jec­toire de l’information neu­ronale dans le cor­tex visuel.

Puis elle fit des séjours à l’étranger : aux États-Unis, à Stan­ford surtout pour plusieurs années de post-doc­tor­at, à Palo Alto en Cal­i­fornie ; Japon et Angleterre. Elle tra­vail­la égale­ment dans plusieurs start-up de la Sil­i­con Val­ley en tant qu’ingénieur informatique. 

Elle dirige à présent un lab­o­ra­toire de recherche à l’uni­ver­sité de Cal­i­fornie à San­ta Bar­bara où elle encadre des étu­di­ants et thésards. Elle s’y focalise sur la descrip­tion math­é­ma­tique des formes biologiques à dif­férentes échelles : formes de pro­téines, de cel­lules et d’organes – et leur rôle dans le fonc­tion­nement du corps humain. Prenons l’exemple du cerveau. L’IRM donne accès à sa forme d’ensemble, à son échelle glob­ale. À la même échelle, l’IRM fonc­tion­nelle ren­seigne sur les zones activées du cerveau lors de l’oxygénation. Tou­jours à la même échelle d’ensemble, on dis­pose d’informations sur le con­nec­tome, carte com­plète des con­nex­ions cérébrales, indis­pens­able pour inter­préter les mesures des sig­naux trans­mis entre les neurones. 

Autre infor­ma­tion, à reli­er aux précé­dentes, les sig­naux élec­triques issus des neu­rones et four­nis par les élec­troencéphalo­grammes et les implants pro­fonds. Cette infor­ma­tion est disponible aux deux échelles, macro­scopique et micro­scopique. Vient enfin, en com­plé­ment et représen­tant l’échelle nanoscopique, l’imagerie molécu­laire que four­nit la cry­omi­cro­scopie élec­tron­ique d’échantillons gelés. 

À peine la trentaine atteinte, Nina Miolane fait déjà des émules, ain­si de Béné­dicte Col­net (2014). Désor­mais basée en Cal­i­fornie, elle répar­tit son temps entre non seule­ment recherche et enseigne­ment, mais aus­si beach-vol­ley et surf. La vie lui sem­ble belle sous le soleil !

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