Les bétons du futur

Dossier : BâtimentMagazine N°667 Septembre 2011
Par Pascal CASANOVA (87)

Dif­fé­rentes orien­ta­tions touchent aux nou­velles sources d’éner­gie ou aux éner­gies renouvelables

Du point de vue des enjeux indus­triels, on peut choi­sir trois axes de recherche : l’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique, à la fois dans la fabri­ca­tion des maté­riaux et dans les bâti­ments qui les uti­lisent ; le béné­fice envi­ron­ne­men­tal et sani­taire, c’est‑à – dire tout ce qui per­met, à tra­vers les maté­riaux, d’ob­te­nir un impact posi­tif sur l’en­vi­ron­ne­ment, notam­ment la réduc­tion des émis­sions de CO2 ou de la pol­lu­tion de l’air, la ges­tion de l’eau ; et la réduc­tion du coût de la construc­tion, qui passe aus­si bien par la pro­duc­ti­vi­té sur les chan­tiers que par des sys­tèmes construc­tifs per­met­tant, par exemple, de construire des loge­ments abordables.

Recentrer la recherche

D’un point de vue pure­ment scien­ti­fique, à l’heure actuelle, il faut res­ter très atten­tifs au déve­lop­pe­ment du cal­cul molé­cu­laire des­ti­né à modé­li­ser la matière au niveau nano­mé­trique, afin de défi­nir des ciments qui seraient plus résis­tants et per­met­traient de réduire les consom­ma­tions de matières, pour atteindre les mêmes per­for­mances de construction.

Recherche et exi­gences locales

Nos recherches s’in­té­ressent aus­si aux construc­tions en zones rurales en Inde ou en Afrique. Pour ces bâti­ments en terre for­te­ment endom­ma­gés par les pluies, qu’il est néces­saire de répa­rer chaque année, nous avons déve­lop­pé des asso­cia­tions de nos maté­riaux avec les modes de construc­tion locaux, de manière à les rendre plus durables et plus résis­tants aux intem­pé­ries, tout en main­te­nant la même faci­li­té de construction.


250 per­sonnes au Centre de recherche de Lafarge

D’autres orien­ta­tions touchent aux nou­velles sources d’éner­gie ou aux éner­gies renou­ve­lables (uti­li­sa­tion éten­due de l’éner­gie solaire, de bio­masse ou de bio­car­bu­rants), très impor­tantes pour l’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique de nos pro­cé­dés. Il faut s’in­té­res­ser aus­si à l’in­te­rac­tion entre l’or­ga­nique et le miné­ral qui allient légè­re­té et résis­tance pour, demain, être en mesure de fabri­quer des maté­riaux indus­triels fon­dés sur ces concepts.

Enfin, tout le domaine de la modé­li­sa­tion au sens large, qui va du maté­riau à la struc­ture et qui devrait à l’ho­ri­zon 2020 deve­nir sys­té­ma­tique à tra­vers des plates-formes inter­ac­tives où, à la fois, l’ar­chi­tecte, l’en­tre­prise de construc­tion, le bureau d’é­tudes, les fabri­cants de maté­riaux peuvent com­mu­ni­quer sur un modèle numé­rique 3D d’un ouvrage et pro­po­ser des solu­tions constructives.

Inventer le béton du futur


En Afrique, il faut répa­rer chaque année.
© ISTOCKPHOTO

En termes de béton du futur, plu­sieurs axes de recherche devraient voir le jour d’i­ci à 2020 : l’un des plus impor­tants est le béton iso­lant. À titre d’exemple, le pro­duit Ther­me­dia 0.6 de Lafarge, qui ne peut pas encore com­plè­te­ment se pas­ser d’i­so­la­tion rap­por­tée, va déjà dans cette direc­tion, en étant trois fois plus iso­lant qu’un béton ordi­naire, ce qui per­met de réduire les déper­di­tions ther­miques entre les dalles et les façades. Autre axe très impor­tant, le béné­fice envi­ron­ne­men­tal. Citons aus­si le lan­ce­ment, dans plu­sieurs pays, du nou­veau béton drai­nant Hydromedia.

Ce béton très per­méable réduit les risques d’i­non­da­tions en cas de fortes pluies et mini­mise l’im­pact de l’ur­ba­ni­sa­tion sur le cycle natu­rel de l’eau, car il per­met une réali­men­ta­tion natu­relle des nappes phréa­tiques. L’in­té­rêt de ce pro­duit est éga­le­ment d’é­vi­ter la construc­tion de réseaux d’é­va­cua­tion de taille impor­tante pour la col­lecte de l’eau, ain­si que son trai­te­ment en sta­tion d’épuration.

Sur la réduc­tion de l’empreinte CO2 , nous avons éla­bo­ré un ciment dans le cadre du pro­jet Aether , aujourd’­hui sub­ven­tion­né à tra­vers le pro­gramme euro­péen Life +, qui réduit de 25 % les émis­sions de CO2 , tout en offrant des pro­prié­tés simi­laires à celles d’un ciment Port­land ordinaire.

Ce nou­veau ciment est rela­ti­ve­ment facile à déployer puis­qu’il s’a­git de modi­fier les pro­por­tions des matières pre­mières uti­li­sées et de bais­ser les tem­pé­ra­tures de cuis­son, sans avoir besoin de pro­cé­der au rem­pla­ce­ment des équipements.

Sur la réduc­tion du temps de la construc­tion, et donc des coûts, évo­quons la gamme Chro­no­lia , qui garan­tit une résis­tance don­née à un temps don­né, pour une exé­cu­tion plus rapide sur chantier.

Concilier procédé et performance

Le pro­duit et sa mise en oeuvre dans un sys­tème construc­tif doivent être performants

Au cours des dix der­nières années, seule était pri­vi­lé­giée la per­for­mance finale, et on ne tou­chait au pro­cé­dé que lorsque c’é­tait néces­saire pour atteindre la per­for­mance. Aujourd’­hui, avec les nou­veaux enjeux, notam­ment éner­gé­tiques et envi­ron­ne­men­taux, la recherche pro­cé­dé est reve­nue sur le devant de la scène. Même si la recherche sur les valeurs d’u­sage reste majo­ri­taire, la recherche pro­cé­dé a pris une part très signi­fi­ca­tive, notam­ment lors­qu’il s’a­git de réduire son empreinte énergétique.

Cepen­dant, le vrai sujet com­mun en termes de concur­rence inter­na­tio­nale concerne l’a­mé­lio­ra­tion éner­gé­tique des pro­cé­dés et la réduc­tion de l’im­pact CO2. Au-delà de la concur­rence directe, l’ef­fi­ca­ci­té éner­gé­tique des bâti­ments est une pro­blé­ma­tique com­mune avec d’autres indus­tries comme celles du verre et de l’a­cier, de même que l’ef­fi­ca­ci­té sur chantier.

Prendre en compte l’environnement

La véri­table évo­lu­tion de ces der­nières années est que la recherche ne se foca­lise plus uni­que­ment sur les pro­duits. Il s’a­git aujourd’­hui de tra­duire les pro­blé­ma­tiques de construc­tion en sujets maté­riaux. Cela sup­pose d’al­ler plus en aval, d’a­bord pour com­prendre les besoins, et ensuite pour être nous­mêmes capables de mettre au point les sys­tèmes construc­tifs qui uti­lisent nos produits.

Ce n’est plus le pro­duit qui doit être per­for­mant, mais le pro­duit et sa mise en œuvre dans un sys­tème construc­tif. Pour cela, de plus en plus de pla­te­formes col­la­bo­ra­tives se mettent en place sur la construc­tion pour consi­dé­rer le sys­tème construc­tif dans son ensemble. Il faut tra­vailler davan­tage avec les archi­tectes et les bureaux d’é­tudes pour se rap­pro­cher des clients et de l’en­semble de la chaîne. Aujourd’­hui, nos équipes sont consti­tuées d’in­gé­nieurs struc­tures ther­mi­ciens et méthodes, qui connaissent le métier des clients pour être en inter­face avec eux à un niveau de tech­ni­ci­té suf­fi­sant pour leur appor­ter des solutions.

Lafarge
Lea­der mon­dial des maté­riaux de construc­tion, Lafarge consacre 150 mil­lions d’eu­ros à l’in­no­va­tion tous les ans. Basé près de Lyon, son centre de recherche mobi­lise les com­pé­tences de 250 per­sonnes d’une dou­zaine de natio­na­li­tés, tout en asso­ciant concep­teurs et pro­fes­sion­nels du bâti­ment au déve­lop­pe­ment de pro­duits et tech­niques de pointe.

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