Le Soleil bleu couvert de neige

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°526 Juin/Juillet 1997Par : Paul BLONDEL (44)Rédacteur : Henri CUNY (26)

Un poète sort de l’ombre et c’est un cama­rade. Paul Blon­del a fait impri­mer, pour notre bon­heur, un volume impor­tant, près de 250 poèmes écrits depuis l’X jusqu’à nos jours, tous excellents.

Mais, com­ment défi­nir cet ensemble, com­ment décrire les sous-ensembles dont il est com­po­sé ? Blon­del lui-même nous dit qu’il n’a pu y réus­sir de façon rigoureuse.

En par­cou­rant (quitte à y reve­nir) le Soleil bleu cou­vert de neige, on trouve d’abord ses pre­miers poèmes, sous le titre “ bal­bu­tie­ments ” et plus loin des inclas­sables inti­tu­lés “ fatra­sies ” et ces deux titres montrent la modes­tie de leur auteur, jamais satis­fait sans doute de ce qu’il a écrit comme le scien­ti­fique qui, cher­chant des cer­ti­tudes, croit long­temps n’avoir trou­vé qu’une hypo­thèse expli­quant un plus grand nombre de phé­no­mènes que celle com­mu­né­ment admise.

Ne négli­geons pas les poèmes de cir­cons­tances écrits pour ses cama­rades (il en avait beau­coup) de l’X et du CPA et pour sa paren­tèle (nom­breuse) lors des anni­ver­saires. C’est un genre dif­fi­cile, comme sont tou­jours dif­fi­ciles des sujets impo­sés. Mais dans ce genre, il excelle, nous mon­trant son humour et sa sen­si­bi­li­té (qui a dit que la Poé­sie était malade du coeur ?). La Poé­sie est là, sa Poé­sie, comme elle est aus­si dans cer­tains poèmes en prose, qui chantent l’amour à la manière du Can­tique des Can­tiques.

Elle est là puisque sa muse n’est pas ima­gi­née comme il nous le fait accroire, elle l’habite, elle est en lui.

Elle l’habite encore et sur­tout dans deux petites gestes, dont les titres disent l’importance et qu’il nous a gar­dées pour la fin de notre lecture.

Elles s’appellent “ le Jar­din des Muses ” et “ Quête du Sei­gneur ”, toutes deux au som­met de l’inspiration poé­tique de l’auteur, la seconde accom­pa­gnant les psaumes comme deux voix chan­tant à l’unisson, on pense alors à Patrice de la Tour du Pin.

Mais il reste la forme. Le maître du lan­gage qu’il fut dans sa sco­la­ri­té est deve­nu un maître du lan­gage poé­tique, ce lan­gage que nul ne peut uti­li­ser s’il n’a pas maî­tri­sé au préa­lable le lan­gage du prosateur.

Blon­del est tel­le­ment à l’aise dans la forme poé­tique clas­sique qu’il la pra­tique sans effort et poète d’abord, ami des muses, ses poèmes, il les vêt en pas­sant d’un “ habit de lumière ”. Cet habit de lumière est adap­té à chaque poème. Ses vers sont des alexan­drins, mais aus­si des octo­syl­labes, par­fois des rythmes plus rares. Peu de son­nets comme si qua­torze vers ne suf­fi­saient pas à expri­mer le trop plein de ses sen­ti­ments par un art qui est l’arme d’une âme généreuse.

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