Le numérique, problème environnemental ou solution ?

Le numérique, problème environnemental ou solution ?

Dossier : Numérique et environnementMagazine N°754 Avril 2020
Par Francis CHARPENTIER (75)

Dans ce dos­sier, nous ten­tons d’éclairer cette ques­tion en inter­ro­geant quelques experts du sujet.

En effet, l’économie conti­nue de réchauf­fer la pla­nète, sans véri­table régu­la­tion environ­nementale. Le numé­rique (dési­gné naguère sous le terme « Tech­no­lo­gies de l’information et de la com­mu­ni­ca­tion » ou TIC), comme tous les sec­teurs éco­no­miques, y par­ti­cipe, à son échelle. Selon une source sérieuse, les TIC auraient émis en 2015, der­nière année mesu­rée à l’heure de cette publi­ca­tion, quelque 2,4 % des émis­sions glo­bales de GES ou 3,2 % de celles de CO2, pour un péri­mètre com­pre­nant aus­si l’électronique grand public. Mais, au fait, com­ment peut-on mesu­rer l’empreinte du numé­rique ? Pas si simple, et les rares experts ne convergent pas vrai­ment. Une équipe sué­doise s’est don­né depuis quinze ans la tâche labo­rieuse de col­lec­ter un maxi­mum de don­nées mon­diales à ce sujet. Alors qu’on s’attendait à de mau­vais indi­ca­teurs pour la décen­nie écou­lée, avec une crois­sance moyenne du débit de don­nées de 25 % par an, para­doxa­le­ment l’équipe scan­di­nave estime que l’empreinte s’est sta­bi­li­sée. Par quel miracle ? Les pro­grès de la micro­élec­tro­nique se sont char­gés de com­pen­ser la ten­dance à la crois­sance grâce à l’efficacité éner­gé­tique. Le sec­teur du numé­rique connaît ain­si un répit. Mais que va-t-il se pas­ser ensuite ? Qui va gagner cette course de vitesse entre le flux de don­nées et l’efficacité éner­gé­tique par octet transporté ?

Les progrès de la micro-électronique
se sont chargés de compenser la tendance
à la croissance grâce
à l’efficacité énergétique.

Le numé­rique est un sec­teur sys­té­mique, comme l’énergie, l’alimentation, l’éducation, la san­té, la construc­tion, la finance. Son effet posi­tif pour l’économie des pays en déve­lop­pe­ment est avé­ré, mais l’effet néga­tif de sa sur­con­som­ma­tion dans les pays déve­lop­pés l’est aus­si. On mise beau­coup sur lui pour lut­ter contre le chan­ge­ment cli­ma­tique, pour géné­ra­li­ser des cas exem­plaires consta­tés à petite échelle, par exemple pour le chauf­fage et la cli­ma­ti­sa­tion des bâti­ments ou pour la ratio­na­li­sa­tion des trans­ports, mais cela reste un poten­tiel à concré­ti­ser. D’autant plus que divers « effets rebond » s’en mêlent et conti­nue­ront à s’en mêler pour gri­gno­ter les réduc­tions des émis­sions dif­fi­ci­le­ment obtenues.

Dès lors, com­ment enga­ger une forme de sobrié­té numé­rique, l’application au champ des TIC de la sobrié­té tout court ? On se serre la cein­ture ? Un terme plus appro­prié, ou appro­priable par le consom­ma­teur moyen, serait peut-être « modé­ra­tion » ? En tout cas, il s’agit de main­te­nir l’empreinte maté­rielle des TIC dans des limites rai­son­nables, par exemple en pro­lon­geant la durée de vie des smart­phones, en modé­rant les usages de la vidéo en ligne, en opti­mi­sant le mode veille des antennes mobiles 5G, ou encore en déve­lop­pant lar­ge­ment le recy­clage de cer­tains métaux des cartes élec­tro­niques, toutes choses qui contri­buent à la réduc­tion des émis­sions. Les opé­ra­teurs par la voix de leur asso­cia­tion la GSMA sou­haitent contri­buer à tra­cer la voie. Ils veulent atteindre la neu­tra­li­té car­bone en 2050, cer­tains plus tôt. Mais il va fal­loir y tra­vailler dur car cela n’a rien d’automatique. Et il ne suf­fi­ra pas que les TIC fassent leur part du tra­vail si les autres sec­teurs ne font pas la leur. 

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