Le LMD ou le deep learning du climat

Dossier : Nouvelles du PlatâlMagazine N°740 Décembre 2018
Par Laurent DALIMIER (65)
Sim­u­la­tion à l’horizon 2100 de l’augmentation des tem­péra­tures par rap­port à la péri­ode 1951–1980.

Prenez 479 bal­lons-son­des, 120 chercheurs, les équa­tions de Navier & Stokes, un lidar et quelques petaflops, et vous n’aurez qu’un avant-goût des tal­ents du Lab­o­ra­toire de météorolo­gie dynamique, dont une bonne moitié se cache dans d’humbles bureaux de l’aile 5 à Palaiseau. C’est pour­tant ce labo, au nom un peu vin­tage, qui, avec celui de Météo-France, ali­mente péri­odique­ment les scé­nar­ios du Giec sur les change­ments cli­ma­tiques, et que Riw­al Plougonven (95) a fait décou­vrir au groupe X‑Recherche.

Au départ, en 1968, les cam­pagnes de bal­lons-son­des atmo­sphériques, qui four­nissent vers 1980 les don­nées du pre­mier mod­èle général de cir­cu­la­tion atmo­sphérique, le LMDZ, pièce maîtresse du mod­èle cli­ma­tique glob­al de l’Institut Pierre-Simon-Laplace. 

Comme tous les mod­èles cli­ma­tiques, il procède par dis­créti­sa­tion et sim­u­la­tion numérique, ce qui, pour des scé­nar­ios sur cent ans, mobilise les plus gross­es machines du marché. D’année en année, il se per­fec­tionne : l’atmosphère, puis la sur­face ter­restre, l’océan et la cryosphère, les aérosols, le cycle du car­bone, la végé­ta­tion, la chimie atmo­sphérique, et bien­tôt les nuages.

Actuelle­ment, la mod­éli­sa­tion colle bien à ce que l’on sait de l’histoire des cli­mats, et le con­sen­sus s’est fait sur la ten­dance générale : réchauf­fe­ment glob­al, ampli­fi­ca­tion aux pôles, plu­viométrie accrue aux hautes lat­i­tudes et dans le Paci­fique ouest, fonte de la cryosphère. Les mod­èles actuels diver­gent, notam­ment pour l’Afrique de l’Ouest et le sud de l’Europe, l’Antarctique. Trois domaines résis­tent encore à la mod­éli­sa­tion : les fac­teurs économiques, les nuages, la cir­cu­la­tion thermohaline.

“Actuellement, la modélisation colle bien à ce que l’on sait de l’histoire des climats”

Les mesures atmo­sphériques se per­fec­tion­nent avec la télédé­tec­tion du lidar du Sir­ta : un mag­nifique ray­on vert pointant à 30 km d’altitude. Si l’on ajoute les cam­pagnes en pré­pa­ra­tion Stratéole 2 de bal­lons stratosphériques, et un con­trat de déf­i­ni­tion de futures mis­sions spa­tiales, on voit que le cycle vertueux obser­va­tion-théorie-mod­èles-sim­u­la­tion n’est pas près de se tarir. 

Le LMD étend main­tenant ses mod­éli­sa­tions aux atmo­sphères des planètes et exo­planètes, aus­si bien qu’aux sys­tèmes régionaux et locaux (Méditer­ranée, cyclones, etc.). Le pro­jet Trend‑X (voir le dossier prin­ci­pal de ce numéro) élar­git le puz­zle des con­nais­sances et recherch­es aux domaines sociétaux. 

Instru­ments inno­vants, mod­éli­sa­tion, algo­rith­mique, bases de don­nées, opti­mi­sa­tion numérique : le LMD pro­gresse imper­turbable­ment ; il fait enten­dre sa voix bien au-delà de l’École, au niveau européen et inter­na­tion­al. Les pieds sur terre, tou­jours pio­nnier, il développe des parte­nar­i­ats indus­triels avec une dizaine de grands groupes, accom­pa­gne des start-up, et est con­sulté par les plus hautes instances. Alors, comme le dit avec mal­ice son directeur Philippe Drobin­s­ki (D1998) : pourquoi céderait-il à la mode et chang­erait-il de nom ? 

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