La souveraineté numérique européenne : sécurité, confidentialité et performance

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°763 Mars 2021
Par Luc d'URSO

Luc d’Urso, PDG du groupe Atempo.Wooxo, nous par­le des actions menées par son entre­prise pour bâtir la sou­veraineté numérique européenne tout en garan­tis­sant la sécu­rité, la con­fi­den­tial­ité et la performance.

Atempo.Wooxo œuvre pour préserver l’écosystème des données. Dites-nous en plus sur votre cœur de métier.

Notre rai­son d’être émane d’une vision : la don­née est la ressource la plus pré­cieuse du XXIe siè­cle et son exploita­tion est source de créa­tion de valeur. Cet act­if stratégique est stocké et traité au sein de sys­tèmes com­posés d’applications et de matériel tou­jours plus sophis­tiqués, plus com­plex­es et plus hétérogènes. Nous voyons cet ensem­ble en per­pétuelle muta­tion comme un écosys­tème, con­cept qui nous paraît plus appro­prié que celui d’environnement, générale­ment util­isé en infor­ma­tique. À l’instar des écosys­tèmes naturels, la qual­ité d’un écosys­tème de don­nées se mesure à sa capac­ité à évoluer dans le temps, à main­tenir son équili­bre, et à se rétablir rapi­de­ment en cas d’agression.

Notre méti­er con­siste à préserv­er cet écosys­tème de tout sin­istre : depuis des erreurs humaines de manip­u­la­tion jusqu’aux cat­a­stro­phes naturelles, en pas­sant par les pannes matérielles, et depuis quelques années, les cyber­at­taques tou­jours plus nom­breuses et dévas­ta­tri­ces. Plus par­ti­c­ulière­ment, notre inter­ven­tion con­siste à sauve­g­arder, à archiv­er et à déplac­er les don­nées de nos clients, au moyen d’un porte­feuille de solutions :

Miria : pour sauve­g­arder, syn­chro­nis­er, migr­er et déplac­er les grands vol­umes de don­nées et les fichiers non struc­turés entre stock­ages hétérogènes ;

Lina : une solu­tion de sauve­g­arde en con­tinu des postes de tra­vail fix­es ou en itinérance ;

Tina : pour la sauve­g­arde, la restau­ra­tion et la reprise d’activité des serveurs physiques et virtuels.

En effet, une sauve­g­arde cor­re­spond à une copie des don­nées qui peut être util­isée pour restau­r­er les don­nées orig­i­nales dans le cas où ces dernières seraient endom­magées ou per­dues (sup­pres­sions acci­den­telles, cor­rup­tions de fichiers, prob­lèmes tech­niques…). Cela con­cerne générale­ment les don­nées qui sont régulière­ment util­isées au sein de l’organisation. Quant à l’archivage, il cor­re­spond à un ou plusieurs enreg­istrements de don­nées, dédiés à une con­ser­va­tion plus ou moins longue dans l’éventualité d’une exploita­tion ultérieure.

Notre rôle, en tant qu’expert de la data pro­tec­tion, con­siste avant tout à pro­téger l’écosystème de don­nées de nos clients con­tre des cyber­me­n­aces, de plus en plus com­plex­es et capa­bles de con­tr­er les sys­tèmes de pro­tec­tion tra­di­tion­nels. Le rem­part ultime con­siste à con­serv­er une copie des don­nées sauve­g­ardées sur un média non con­nec­té au sys­tème d’information (Air Gap). Afin de restau­r­er le max­i­mum de don­nées, nous met­tons en place des dis­posi­tifs étroite­ment liés aux work­flows et à la chaîne d’information de nos clients. Dans un hôpi­tal par exem­ple, la pri­or­ité sera accordée au rétab­lisse­ment du ser­vice d’urgence avant de pass­er aux appli­ca­tions qui sont moins indispensables. 

D’autre part, notre exper­tise dans le data man­age­ment nous per­met d’offrir à nos clients de la vis­i­bil­ité sur le vol­ume, les stock­ages, la typolo­gie et les mod­i­fi­ca­tions enreg­istrées par leurs données.

Quels sont les principaux enjeux liés à la protection et à la migration de très grands volumes de données ?

La pre­mière dif­fi­culté réside dans l’obligation de garan­tir la disponi­bil­ité des don­nées au sein de très gros vol­umes, notam­ment en cas de sinistre. 

Nos clients ont besoin de ces infor­ma­tions vitales afin d’assurer leurs activ­ités (sci­ences de la vie et de la terre, mod­éli­sa­tion indus­trielle, véhicules con­nec­tés, indus­trie pétrolière, recherche génomique, média…). Nous ne pou­vons donc en aucun cas inter­rompre leurs cycles de pro­duc­tion parce que les don­nées ne sont pas acces­si­bles. De même, garan­tir l’accès à ces don­nées requiert de les sauve­g­arder ou de les archiv­er de manière très rapi­de. Nous nous appuyons sur des algo­rithmes de traite­ment spé­ciale­ment dévelop­pés à cet effet, afin de faire face à cette exi­gence de véloc­ité qui ne cesse de croître. Au-delà, nous devons assur­er la bonne répar­ti­tion de ces don­nées entre les dif­férents types de serveurs. Les don­nées « chaudes » dont nos clients ont besoin au quo­ti­di­en, doivent être stock­ées dans des serveurs très per­for­mants et qui en con­séquence, coû­tent chers. Quant aux infor­ma­tions moins sol­lic­itées, elles peu­vent être sauve­g­ardées dans des serveurs plus économiques. En par­al­lèle, puisque ces don­nées doivent être acces­si­bles, nous devons les organ­is­er de manière à en faciliter le tri. En cas de recherche, le client doit être capa­ble d’identifier la typolo­gie et de recon­naître l’usage de ces don­nées le plus vite pos­si­ble. Dans la post pro­duc­tion ciné­matographique par exem­ple, notre rôle con­siste à con­serv­er leurs œuvres (les mas­ters) afin de les met­tre à dis­po­si­tion des dif­férents inter­venants qui assurent leur traite­ment (cor­rec­tion des couleurs, effets spé­ci­aux, sous-titrage…) et ce, en temps réel. C’est ain­si qu’approximativement un film ou dessin ani­més sur deux pro­duits aux États-Unis est traité par nos solu­tions. Il en est de même dans les jeux vidéos. 

Miria est égale­ment util­isée dans des cas d’usage tels que la migra­tion depuis un ancien serveur vers un nou­veau, ou depuis un serveur sur site vers le cloud ou l’inverse, tout ceci sans perte de don­nées et sans aucune inter­rup­tion d’activité.

Avec le déploiement massif du télétravail, la protection des données est devenue une nécessité stratégique. Comment accompagnez-vous vos clients à ce niveau ?

Le pas­sage au télé­tra­vail a sig­ni­fica­tive­ment accru la sur­face d’exposition au risque cyber­crim­inel. L’utilisation d’ordinateurs famil­i­aux non con­trôlés par les DSI et avec des antivirus et anti­mal­wares non pro­fes­sion­nels et rarement à jour, l’usage com­biné pro-per­so et la con­nex­ion au sys­tème d’information depuis un accès inter­net grand pub­lic non sécurisé con­stituent autant de failles de sécu­rité dans lesquelles les cyber­crim­inels se sont engouf­frés. Les cyber­at­taques ont ain­si redou­blé en inten­sité et en sophis­ti­ca­tion depuis le début de la crise san­i­taire. Afin d’y faire face, nous avons rejoint Open Sol­i­dar­i­ty, une ini­tia­tive d’OVHcloud répon­dant à l’appel lancé par Cédric O, le Secré­taire d’État au numérique, pour aider à sécuris­er les postes des util­isa­teurs en télé­tra­vail. Toute organ­i­sa­tion pro­fes­sion­nelle, sans dis­tinc­tion de sa local­i­sa­tion géo­graphique dans le monde, a pu ain­si sauve­g­arder leurs don­nées à l’aide de notre solu­tion de sauve­g­arde Lina et les héberg­er gra­tu­ite­ment chez OVH­cloud pen­dant toute la péri­ode de con­fine­ment. Dans la con­ti­nu­ité de cette démarche et puisque le télé­tra­vail prend une pro­por­tion plus impor­tante au sein des organ­i­sa­tions, nous avons conçu des solu­tions des­tinées aux entre­pris­es de toutes tailles (TPE, PME et ETI). Elles peu­vent ain­si stock­er leurs don­nées sur leurs pro­pres serveurs, en mode Cloud privé ou pub­lic auprès de nos prestataires d’hébergement sou­verains (OVH­Cloud, Outscale, Scale­way, Jaguar Net­works, ASP Serveur…). Nos ser­vices sont con­formes au RGPD ce qui représente un gage de sécu­rité et de con­fi­den­tial­ité pour nos clients. Ils sont aus­si à l’abri du Patri­ot Act améri­cain. Notre rôle dépasse donc le sim­ple ser­vice de sauve­g­arde pour sat­is­faire les oblig­a­tions légales de nos clients et les pro­téger des risques juridiques et financiers liés.

Comment voyez-vous votre secteur évoluer dans les prochaines années ?

Au-delà de la crois­sance du vol­ume de don­nées qui est de l’ordre de 68 % par an, les don­nées per­son­nelles, qui con­stituent aujourd’hui la majorité de ce stock, vont devenir minori­taires. En effet, cette pro­por­tion sera rem­placée par des don­nées indus­trielles qui provien­dront en grande par­tie de l’IoT ain­si que des appli­ca­tions métiers qui sont en train de se dévelop­per. Ce nou­veau gise­ment sera donc mas­sif puisque nous esti­mons qu’il y aura plus de 21 mil­liards d’objets com­mu­ni­cants dans les prochaines années. En par­al­lèle, l’hébergement dans le Cloud passera de 80 % à seule­ment 20 % d’ici dix ans. Ces don­nées seront hébergées dans des serveurs de prox­im­ité, d’où l’émergence du Edge Com­put­ing. Il s’agit d’une vraie révo­lu­tion parce qu’elle con­cerne non seule­ment le mode de stock­age mais aus­si la prove­nance des données.

Vous vous êtes récemment associés à OVHcloud et IBM afin de proposer aux organisations européennes une nouvelle solution de stockage. Dites-nous en plus.

Pour répon­dre aux besoins de sécu­rité, de sou­veraineté et de résilience des sociétés et des insti­tu­tions européennes en matière de con­ser­va­tion des don­nées, nous avons col­laboré avec OVH­cloud et IBM afin de met­tre en place une offre de « Stock­age-as-a-ser­vice ». Cette solu­tion reposera sur le stock­age sur ban­des mag­né­tiques conçues par IBM, sera orchestrée par notre plate­forme logi­cielle Miria et opti­misée par la tech­nolo­gie d’erasure cod­ing d’OVHcloud. L’expertise com­binée de ces trois acteurs per­me­t­tra aux util­isa­teurs de dis­pos­er d’une solu­tion unique répon­dant aux exi­gences régle­men­taires en matière de con­ser­va­tion de don­nées tout en étant ultra-com­péti­tive, et avec le meilleur rap­port prix/performance. Ce pro­jet est une vraie source de fierté française et européenne. 


En bref

  • Une équipe de 200 collaborateurs
  • Plus de 20 mil­lions d’euros de chiffre d’affaires
  • Présence dans 194 pays à tra­vers le monde
  • Les fil­iales du Groupe sont établies en Europe, aux États-Unis, en Chine, en Corée, et à Singapour
  • Six implan­ta­tions en France : Massy, Vannes, Toulouse, Mar­seille, Lyon et un lab­o­ra­toire de recherche en Intel­li­gence Arti­fi­cielle à Orléans (Nex­ti­no)

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