La passion des mathématiques

Dossier : PolytechniciennesMagazine N°712 Février 2016
Par Isabelle GALLAGHER (92)

Au lycée, j’aimais autant les sci­ences (surtout les math­é­ma­tiques) que la musique ; je suiv­ais des cours de piano et d’alto au con­ser­va­toire de Nice. Mais j’avais con­science de ne pas avoir le niveau pour devenir musi­ci­enne professionnelle.

La car­rière d’ingénieur du son me parais­sait un bon com­pro­mis, et une classe pré­para­toire était une façon de pren­dre le temps de décider d’une ori­en­ta­tion professionnelle.

Mal­gré une pré­pa de type « famil­ial » (au lycée Massé­na à Nice), j’ai trou­vé les débuts très durs. Je tra­vail­lais beau­coup mais les résul­tats ne suiv­aient pas.

Il a fal­lu plusieurs mois pour qu’enfin j’obtienne la moyenne à un con­trôle de maths, mon meilleur sou­venir de prépa.

Enseignants et chercheurs

J’ai eu la chance d’intégrer l’X en trois-demi (non sans mal car, à l’époque, il y avait un « petit oral » et un « grand oral »). On pas­sait d’abord un an au ser­vice mil­i­taire, une coupure totale. Le retour à la vie étu­di­ante à l’X n’a pas été facile.

Mais je me rendais compte que la plu­part de mes enseignants étaient des chercheurs de très haut niveau, et cela m’a don­né envie de mieux con­naître leur méti­er. J’ai suivi de manière occa­sion­nelle le « sémi­naire des élèves » qu’organisait le Cen­tre de math­é­ma­tiques de l’X.

Au cours de ma sco­lar­ité je me suis de plus en plus ori­en­tée vers les math­é­ma­tiques. Mes choix de thé­ma­tiques se sont faits au gré des ren­con­tres et des con­seils de professeurs.


Un court stage à l’X en acous­tique m’a con­va­in­cue que le méti­er d’ingénieur du son n’était pas pour moi.

La fin de la sco­lar­ité à l’X con­siste en un stage de recherche de trois mois ; j’ai décidé de l’effectuer dans un lab­o­ra­toire de météorolo­gie, car ce sujet m’a tou­jours intéressée et cela me per­me­t­tait de tester la recherche très « appliquée ».

J’en suis sor­tie avec la cer­ti­tude que, finale­ment, les math­é­ma­tiques fon­da­men­tales m’intéressaient le plus.


De la météo aux équations

J’ai suivi un DEA (M2 actuelle­ment) de math­é­ma­tiques à Paris-VI, choix fait suite à des dis­cus­sions avec l’un de mes enseignants de l’X, Jean- Yves Chemin, qui enseignait aus­si dans ce DEA.

Puisque je m’intéressais à la météorolo­gie, il m’a pro­posé un sujet de stage de DEA lié à cette matière. Puis j’ai rédigé une thèse d’analyse math­é­ma­tique d’équations de la mécanique des flu­ides géo­physiques, et des équa­tions de Navier-Stokes.

Recrutée au CNRS, j’ai con­tin­ué à tra­vailler sur ces ques­tions, tout en élar­gis­sant mon champ de recherch­es à des sujets de nature plus fon­da­men­tale d’analyse mathématique.

J’ai ensuite obtenu un poste de pro­fesseur de math­é­ma­tiques à l’université Paris-Diderot (Paris-VII), poste que j’occupe tou­jours. Je pense avoir com­mencé à penser à ce méti­er à l’X. Aupar­a­vant, j’ignorais que l’on pou­vait exercer cette pro­fes­sion en mathématiques.

Une grande liberté

Le méti­er de chercheur ou d’enseignant- chercheur offre une grande liber­té. Certes, les heures de cours et les activ­ités admin­is­tra­tives néces­si­tent des horaires fix­es, mais la recherche s’organise de manière très personnelle.

“ On fait les mêmes mathématiques partout dans le monde, ce qui est très enrichissant ”

On peut, surtout en math­é­ma­tiques, tra­vailler chez soi, dans le métro, dans la salle d’attente d’un médecin. Mes recherch­es, sou­vent menées en petits groupes de 2 ou 3 per­son­nes, sont ponc­tuées de sémi­naires où l’on ren­con­tre des col­lègues tra­vail­lant sur des sujets voisins.

On voy­age très régulière­ment, en France mais aus­si un peu partout à l’étranger : on fait le même type de math­é­ma­tiques partout dans le monde, ce qui est très enrichissant.

Il faut persévérer

La per­sévérance est une qual­ité fon­da­men­tale. Il ne faut pas se laiss­er décourager par les dif­fi­cultés, par l’absence de bons résul­tats sco­laires. En math­é­ma­tiques cer­tains con­cepts, très dif­fi­ciles au pre­mier abord, finis­sent, à force de les manip­uler, par devenir des objets familiers.

Il ne faut pas se laiss­er impres­sion­ner par des cama­rades qui sem­blent com­pren­dre beau­coup plus vite, qui réus­sis­sent des exer­ci­ces apparem­ment insur­monta­bles : dans la recherche en math­é­ma­tiques, mieux vaut met­tre plus de temps et com­pren­dre en pro­fondeur, que raison­ner le plus vite pos­si­ble et ris­quer des erreurs.


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