Engelbert Humperdinck : Hansel et Gretel

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°766 Juin 2021
Par Marc DARMON (83)

Les con­tes de fées sont très rarement des sujets d’opéras. Tous les per­son­nages des mytholo­gies antiques, de L’Énéide et de l’histoire romaine, de l’Arioste, de la Bible, de Shake­speare, Hugo, Wal­ter Scott ont leurs opéras. Très peu d’opéras se sont inspirés de Grimm, Ander­sen ou de Per­rault comme Rusal­ka de Dvořák, dont le thème est proche La Petite Sirène. Hansel et Gre­tel est un opéra féérique beau­coup joué au Roy­aume-Uni et très sou­vent à Covent Gar­den, le grand opéra de Lon­dres. Très facile d’accès, per­me­t­tant des mis­es en scène tra­di­tion­nelles plaisant à tous, il est très « payant » et Kara­jan et Solti qui l’ont dirigé et enreg­istré ne s’y sont pas trompés. Richard Strauss l’a créé en 1893, et Mahler l’a dirigé dès 1894. 

Libre­ment adap­té des frères Grimm (les par­ents sont dans l’opéra de bien meilleurs par­ents), le livret reprend textuelle­ment les pas­sages rimés du con­te, notam­ment les charmes de la sor­cière. Pre­mière adap­ta­tion depuis que les frères Grimm ont immor­tal­isé, le sujet a été depuis de très nom­breuses fois adap­té au XXe siè­cle (au ciné­ma, en man­ga, avec Mick­ey, un télé­film de Tim Bur­ton, un musi­cal, etc.).

Humperdinck est un élève de Wag­n­er. Dans cet opéra de 1893, il mêle l’orchestre et les couleurs de Wag­n­er (on croit recon­naître par­fois les mur­mures de la forêt) aux chan­sons enfan­tines et chants folk­loriques. Dans cet opéra plus court que le pro­logue du Cré­pus­cule des dieux, la musique est très adap­tée à l’esprit féérique, et on se croit par­fois plus proche de Mozart que de Wag­n­er. Comme Bruno Bet­tel­heim le rap­pelle dans son analyse des con­tes de fées, un tel con­te trans­mis de généra­tion en généra­tion doit se lire à plusieurs degrés, la musique aussi.

Cette pro­duc­tion est dirigée à l’opéra de Lon­dres de Covent Gar­den en 2008 par Sir Col­in Davis, qui adore cette musique, et qui a été le directeur musi­cal de Covent Gar­den dès 1971. Quelle dis­tri­b­u­tion ! Les stars qui tien­nent les pre­miers rôles sont tous des piliers de Covent Gar­den. Mag­nifique Gre­tel de Diana Dam­rau, habil­lée en gamine, par­faite Ange­li­ka Kirch­schlager (comme dans le Jules César com­men­té ici en juin 2020), Hansel courageux. La légendaire Anja Sil­ja, en sor­cière Grig­note malé­fique et dépoitrail­lée, est ter­ri­ble dans Hocus-Pocus. Et l’impressionnant Thomas Allen, en père tru­cu­lent. Les décors et cos­tumes sont beaux et élé­gants, par­faite­ment adaptés.

Col­in Davis dirige un orchestre très bien enreg­istré (et très bien filmé dans l’ouverture et la course des sor­cières). C’est donc un enchante­ment pour petits et grands. 


Covent Gar­den, Lon­dres, Diana Dam­rau, Ange­li­ka Kirch­schlager, Anja Sil­ja, dir. Sir Col­in Davis

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