coffret du DVD : Le Couronnement de Poppée,

Claudio MONTEVERDI : Le couronnement de Poppée

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°680 Décembre 2012Par : L'Opéra d’Oslo, mise en scène Ole Anders TandbergRédacteur : Marc DARMON (83)

Mon­tever­di a com­posé une quin­zaine d’opéras (Énée, Ari­ane, Andromède, Apol­lon, etc.), dont seuls trois nous sont par­venus com­plets. Le pre­mier, Orfeo, est con­sid­éré comme le pre­mier opéra com­posé. Le dernier, L’Incoro­n­azione di Pop­pea, en français Le Couron­nement de Pop­pée, date de 1642, et fait l’objet depuis plus d’un siè­cle d’un débat sur son authen­tic­ité, de nom­breux spé­cial­istes, en l’absence de man­u­scrit auto­graphe, se deman­dant si l’ensemble de la par­ti­tion est bien de Monteverdi.

Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un chef‑d’œuvre, et de même qu’Orfeo trente-cinq ans aupar­a­vant changeait la face de la musique (le pre­mier opéra de l’histoire), de même L’Incoro­n­azione trans­forme le genre en trai­tant pour la pre­mière fois d’un sujet his­torique au lieu d’un sujet mythologique.

Dans Bri­tan­ni­cus de Racine, écrit trente ans plus tard, Néron, jaloux, rav­it au jeune prince la ten­dre Junie. Bien plus proche de la réal­ité his­torique, telle que relatée par Sué­tone et Tacite, l’opéra de Mon­tever­di racon­te com­ment sept ans plus tard Néron répudie son épouse Octavie au prof­it de la légère et intri­g­ante Pop­pée (Pop­pée avait aupar­a­vant épousé Oth­on, qui fut empereur quelques années après Néron). Comme la tragédie de Racine, le texte traite ici à la fois de pas­sion et de politique.

L’Incoro­n­azione di Pop­pea est désor­mais un des opéras du XVIIe siè­cle les plus représen­tés, et enreg­istrés. Mais cette pro­duc­tion de l’Opéra d’Oslo est un événe­ment dont la pub­li­ca­tion en DVD est très bien­v­enue. En effet, sous la direc­tion d’Ole Anders Tand­berg, fig­ure majeure du théâtre scan­di­nave, cette pro­duc­tion mod­ernise rad­i­cale­ment cet opéra sur plusieurs plans. On sort de cette représen­ta­tion très mar­qué, et com­plète­ment impres­sion­né. En l’absence de stars inter­na­tionales, on assiste tout de même à une des soirées impor­tantes de l’année 2011.

Comme dans tous les opéras de l’époque alter­nent dans les mêmes scènes chant (en fait une sorte de réc­i­tatif) et dans­es. Même dans la poignante scène de la mort de Sénèque (con­damné pour avoir ten­té de dis­suad­er Néron), adieux lar­moy­ants et dans­es se suc­cè­dent. Les nom­breux per­son­nages ont tous des inter­ven­tions assez équili­brées, même si Néron et Pop­pée sont un peu plus présents (mémorable duo final). Il faut donc une dizaine de chanteurs de bon niveau pour dis­tribuer cet opéra, d’autant que les deux empereurs Néron et Oth­on ont des voix de haute-con­tre, ce qui est le cas ici.

Men­tion spé­ciale dans le rôle de la nour­rice pour la grande Tone Kruse, que l’on est heureux de voir encore en activ­ité, elle qui a illu­miné le chant scan­di­nave il y a trente ans.

La réal­i­sa­tion accentue les effets de la mise en scène. L’image est tra­vail­lée, cer­taines scènes tournées en noir et blanc accentuent le rouge du sang, sang du bouc émis­saire Sénèque qui illu­mine tout l’opéra. Le son égale­ment est retra­vail­lé, mal­heureuse­ment légère­ment métallique.

Comme on l’a dit, la pro­duc­tion mon­tre de nom­breuses orig­i­nal­ités : par exem­ple le sang du philosophe qui ray­onne au cen­tre de la scène, et le côté osé du texte et de la musique, exac­er­bé par le jeu des acteurs.

C’est du reste mon seul DVD musi­cal inter­dit aux moins de douze ans, et on le com­prend. Mais ce côté grivois et à la lim­ite de la vul­gar­ité est fidèle aux spec­ta­cles du début XVIIe, et rend cette pro­duc­tion finale­ment très authen­tique, mal­gré son approche résol­u­ment moderne.

L’Opéra d’Oslo, ouvert en 2008, est une con­struc­tion con­tem­po­raine très élé­gante, acces­si­ble à pied du cen­tre-ville, mais sur­plom­bant la mer. L’intérieur et la salle sont égale­ment d’une moder­nité très étonnante.

Il faut avoir marché dans Oslo, avec des Norvégiens, pour réalis­er com­bi­en cette ville, somme toute petite, est fière de son Opéra. En voy­ant cette pro­duc­tion, on les comprend.

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