Claude Cheysson (40), la force de conviction

Dossier : ExpressionsMagazine N°693 Mars 2014Par : Daniel VINCENT (53)

Une carrière exceptionnelle

Après l’X (pro­mo­tion 40), Claude rejoint les Forces français­es libres et par­ticipe en 1944 au débar­que­ment et aux com­bats de libéra­tion de la France au sein de la 2e DB.

Il désire alors s’orienter vers la diplo­matie et entre à l’ENA. Il passera ensuite qua­tre ans à Bonn puis deux à Saï­gon où il est con­seiller du Prési­dent du gou­verne­ment du Viêt-Nam. En 1954, chef de cab­i­net de Pierre Mendès France, il par­ticipe à la con­férence de Genève sur l’Indochine.

En 1957, mis à l’écart à la suite de son rap­port sur l’indépendance de l’Algérie, il occupe pen­dant cinq ans le poste de secré­taire général de la CCTA, organ­isme de coopéra­tion tech­nique basé à Lagos, ce qui lui fera décou­vrir l’Afrique.

Conseiller Kennedy

Pas diplomate, Claude Cheysson ? C’est vite dit : en 1962, alors qu’il était un simple fonctionnaire français en poste à Alger, il était reçu par le président Kennedy qui voulait connaître son avis sur l’avenir des pays africains indépendants depuis peu.

En 1962, il est con­vo­qué par le général de Gaulle qui le charge de diriger l’Organisme saharien con­sti­tué après la sig­na­ture des accords d’Évian. En 1966, il est nom­mé ambas­sadeur en Indonésie puis devient, en 1973, Com­mis­saire européen, en charge des rela­tions avec les pays en développement.

Là, il devien­dra l’artisan des accords de Lomé qui fixe­ront de nou­velles rela­tions entre la Com­mu­nauté européenne et les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Paci­fique (pays ACP).

Il devient, en mai 1981, min­istre des Rela­tions extérieures, poste qu’il con­servera jusqu’en 1985. Il rejoint ensuite de nou­veau la Com­mis­sion européenne où il est respon­s­able des rela­tions Nord-Sud, puis est, de 1989 à 1994, député européen.

Un diplomate atypique

« Il est extra­or­di­naire de voir un spé­cial­iste de la diplo­matie aus­si peu diplo­mate », lui déclarait François Mit­ter­rand en lui remet­tant la cra­vate de la Légion d’honneur. Certes, Claude Cheysson était un diplo­mate atyp­ique. Il ne s’embarrassait pas de for­mules alam­biquées. Pour le dire en un mot, c’était un fon­ceur. Cer­tains s’en formalisaient.

Par­lait-on de ses gaffes, il n’en avait cure. L’essentiel pour lui était d’être effi­cace, d’obtenir des résul­tats. L’homme d’action, chez Cheysson, l’emportait sur le diplo­mate, et le poly­tech­ni­cien appa­rais­sait sou­vent dans la clarté de ses analy­ses et la pré­ci­sion de ses conclusions.

Le meilleur des patrons

On peut se pro­cur­er le livre Claude Cheysson, une force de con­vic­tion sur Internet

et y con­sul­ter des doc­u­ments com­plé­men­taires. Tous ceux qui l’ont con­nu sont invités à pub­li­er sur le site leur témoignage ou, s’ils en ont, des doc­u­ments et des photos.

Pour ses col­lab­o­ra­teurs, Claude Cheysson était un patron exigeant, tyran­nique même, dis­aient cer­tains. Tra­vailleur infati­ga­ble, il demandait aux équipes sous ses ordres un engage­ment de chaque instant. Dif­fi­cile à con­va­in­cre, il deve­nait, une fois con­va­in­cu, le meilleur défenseur des dossiers les plus dif­fi­ciles. Bref, c’était le meilleur des patrons.

Claude Cheysson est décédé le 15 octo­bre 2012. Il s’était refusé, mal­gré la pres­sion exer­cée par ses amis, à écrire ses mémoires, exer­ci­ce qu’il qual­i­fi­ait d’autosatisfaction.

Après son décès, son épouse a entre­pris avec l’aide des proches, famille et anciens col­lab­o­ra­teurs, de combler une lacune. Danièle Cheysson a rassem­blé en un vol­ume un cer­tain nom­bre de témoignages, venant de per­son­nal­ités pres­tigieuses (Boutros Boutros-Ghali, Jacques Delors, Jean-Pierre Chevène­ment, Abdou Diouf, Stéphane Hes­sel, bien d’autres encore) ou de proches col­lab­o­ra­teurs, ain­si que plusieurs notes ou inter­views de Claude Cheysson du plus grand intérêt.

3 Commentaires

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GERARD Michelrépondre
16 mars 2014 à 17 h 48 min

Claude CHEYSSON

Mer­ci à Daniel Vin­cent de cette nécrolo­gie élo­gieuse, très large­ment méritée par Claude Cheysson. Je verse au crédit de l’in­téressé la con­sti­tu­tion d’une doc­u­men­ta­tion colos­sale sur l’Afrique, sans bar­rières poli­tiques. Cette doc­u­men­ta­tion a été d’une util­ité très grande au moment des indépendances.

A titre d’ex­em­ple beau­coup de choses tech­nique­ment (éco-tech­nique­ment devrais-je dire) intéres­santes se fai­saient en Afrique du Sud mais à cause de la poli­tique de l’a­partheid les con­tacts étaient très difficiles.

Sans aucune sym­pa­thie de sa part pour une telle poli­tique, Claude Cheysson a fait val­oir que la tech­nique pou­vait pass­er par dessus les bar­rières politiques.

Une remar­que : il me sem­blait que le pre­mier prési­dent de l’Or­gan­i­sa­tion com­mune des Régions Sahari­ennes était Olivi­er Guichard et non Claude Cheysson comme le dit Daniel.

Del­wasse (86)répondre
16 mars 2014 à 21 h 01 min

Cheysson à l’X

Cheysson était GénéK il serait dom­mage de ne pas le men­tion­ner… http://claude.cheysson.fr/2014/01/claude-cheysson-a-lx/

20 avril 2018 à 20 h 39 min

Hom­mage

Claude Cheysson a suc­com­bé à des suites d’une longue mal­adie à son domi­cile parisien à l’âge de 92 ans, a annon­cé sa famille. 

http://www.avis-de-deces.com/deces-celebrites/1387/Claude-CHEYSSON

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