18 leçons sur la politique économique

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°586 Juin/Juillet 2003Par : Jean-Claude PRAGER (64) et François VILLEROY De GALHAU (78)Rédacteur : Michel DIDIER (60)

Deux de nos cama­rades prati­ciens de la vie économique, enseignants et hommes de con­vic­tions, se sont livrés à un tra­vail de pesée de l’économie européenne, de ses atouts et de ses retards face aux États-Unis, ain­si qu’à un exa­m­en atten­tif des pos­si­bil­ités de réac­tions des dirigeants pour une poli­tique plus active pour l’Europe. Dans un livre de plus de 500 pages, dense mais d’accès aisé pour tous, ils nous con­duisent dans le monde mal con­nu de la poli­tique économique et pro­posent une explo­ration des marges de manœu­vre réelles du politique.

Leurs con­clu­sions sont claires : mal­gré tout ce que l’on peut dire et lire sur l’économie, le poli­tique n’est pas près de per­dre son rôle majeur. Mais si la poli­tique économique veut rester effi­cace dans ce monde qui a totale­ment changé depuis Keynes, elle doit recon­sid­ér­er ses méth­odes d’intervention. Il faut aban­don­ner l’espoir d’un pilotage qua­si mécanique et don­ner la pri­or­ité à l’idée de régu­la­tion d’un sys­tème com­plexe, incer­tain et non totale­ment maîtris­able. Il faut s’adapter aux muta­tions pro­fondes qui ont mar­qué les vingt dernières années : inter­dépen­dance mon­di­ale, développe­ment (donc insta­bil­ité) des marchés, rythme rapi­de d’innovations.

La régu­la­tion économique est la ges­tion des incer­ti­tudes, dans un monde de plu­ral­ité d’acteurs et de leviers d’intervention. La matière pre­mière du poli­tique est l’information et son influ­ence par le jeu des antic­i­pa­tions des con­som­ma­teurs et des investis­seurs. Il faut accepter de renon­cer aux “cer­ti­tudes heureuses de l’ingénieur” pour appli­quer une sorte de “ principe de pré­cau­tion économique”, qui con­siste à con­cen­tr­er l’effort du poli­tique là où le besoin est man­i­feste et l’utilité de l’action évi­dente. Il faut savoir accepter d’en faire moins, voire rien du tout, là où on pense que les effets sont mineurs, ou peu­vent même être con­tre-pro­duc­tifs à terme par les réac­tions qu’elles sont sus­cep­ti­bles de provoquer.

Le véri­ta­ble hori­zon de la poli­tique publique est le long terme, sa pri­or­ité est de ren­dre les struc­tures économiques plus effi­caces. “Dans un monde si grave­ment court ter­miste, les États ont comme pre­mier devoir d’être les gar­di­ens du long terme ” écrivent les auteurs.

Aux pre­miers rangs des préoc­cu­pa­tions des pou­voirs publics fig­urent l’amélioration du fonc­tion­nement du marché de l’emploi, la néces­saire réforme de l’État, de la san­té et des retraites, le niveau des prélève­ments oblig­a­toires et la com­péti­tiv­ité des entreprises.

Tout cela est traité abon­dam­ment, sérieuse­ment mais de façon acces­si­ble dans l’ouvrage de nos deux cama­rades, dont la lec­ture est vive­ment recom­mandée à tous ceux qui s’intéressent à notre avenir économique et d’abord bien sûr à ceux qui nous dirigent.

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