La troisième voie

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°537 Septembre 1998Par : Bruno MÉGRET (69)Rédacteur : Gérard BERTAUX (39)

Il faut… “ chan­ger radi­ca­le­ment la poli­tique actuel­le­ment sui­vie et pro­po­ser aux Fran­çais une grande alter­na­tive éco­no­mique et sociale”. C’est par ces pro­pos ambi­tieux que l’auteur intro­duit son dis­cours dont voi­ci quelques idées.

Le chô­mage n’est pas un mal struc­tu­rel devant lequel tous les gou­ver­ne­ments se déclarent impuis­sants ; c’est sur­tout un mal fran­çais : faillite de l’école, tra­vail acca­blé par l’administration, immi­gra­tion incon­trô­lée ; nous souf­frons d’un vrai sida social. “L’économie devient barbare. ”

La crise éco­no­mique se double d’une crise des valeurs et d’une crise démo­gra­phique sui­ci­daire. Celle-ci est aggra­vée par la dété­rio­ra­tion de la poli­tique familiale.

La mon­tée de l’étatisme (taux des pré­lè­ve­ments obli­ga­toires, mul­ti­pli­ca­tion des situa­tions d’assistés, etc.) ne fait qu’aggraver notre vul­né­ra­bi­li­té face au libre-échan­gisme mon­dial ; la France a déjà per­du des sec­teurs entiers de production.

Com­ment en sor­tir ? d’abord par un retour aux principes.

La soli­di­té d’une nation est fon­dée sur l’équilibre entre trois fonc­tions (G. Dumé­zil) : la fonc­tion réga­lienne, la fonc­tion guer­rière et la fonc­tion pro­duc­tive (ora­tores, bel­la­tores, labo­ra­tores). L’excès de l’une sur les autres entraîne des dys­fonc­tion­ne­ments mor­tels (tota­li­ta­risme, dic­ta­ture mili­taire, mer­can­ti­lisme) ; le mer­can­ti­lisme domine actuel­le­ment le monde déve­lop­pé. Pour réta­blir cet équi­libre, l’Europe n’est pas prête à prendre le relais de la patrie.

Pre­mière action : encou­ra­ger le sur­gis­se­ment d’hommes valables, par une vraie poli­tique fami­liale (ins­tau­ra­tion du reve­nu paren­tal par exemple), le déve­lop­pe­ment de l’esprit d’émulation et du sens des res­pon­sa­bi­li­tés, la for­ma­tion tech­nique de nom­breux jeunes dès l’âge de 14 ans.

Deuxième action : encou­ra­ger la pro­duc­tion ; à cet effet avoir comme le Japon par exemple une poli­tique vrai­ment natio­nale en éta­blis­sant un pré­lè­ve­ment doua­nier géné­ra­li­sé de 10 % à l’importation, en pra­ti­quant la pré­fé­rence natio­nale en matière d’embauche (quel pays ne la pra­tique pas plus ou moins ouver­te­ment ?) et en faci­li­tant le retour des étran­gers dans leur pays natal. De telles mesures sont éga­le­ment sou­hai­tables au niveau euro­péen ; il faut rené­go­cier les trai­tés dans le sens d’une Europe des nations.

D’autres mesures plus tech­niques sont elles aus­si essen­tielles, comme de por­ter l’effort fis­cal sur la consom­ma­tion et non sur la pro­duc­tion ; il ne faut pas faire fuir l’argent des riches, mais au contraire l’attirer car il crée des emplois (méthode anglaise).

Afin d’encourager l’esprit d’entreprise il fau­dra dimi­nuer le nombre des fonc­tion­naires, en sup­pri­mant notam­ment un éche­lon ter­ri­to­rial, tant il est vrai que “ l’emploi crée la fonc­tion ” ! Enfin il faut don­ner plus de sou­plesse à notre sys­tème d’assurances sociales et de retraites, en pri­vi­lé­giant le long terme dans les pers­pec­tives démo­gra­phiques qui sont les nôtres.

Mais la conver­sion la plus impor­tante est d’ordre cultu­rel. “ Plus l’autorité publique inter­vient pour enca­drer et assis­ter les indi­vi­dus, plus elle limite leur liber­té, les rabaisse, les sou­met et les dépouille de leur digni­té.” C’est au contraire par la prise de conscience de ses res­pon­sa­bi­li­tés que se relève un homme en tous les sens du terme ; c’est d’un lan­gage de fer­me­té morale dont on a besoin actuellement.

Dans cet ouvrage bien plus riche que ce qui est rele­vé ci-des­sus, l’argumentation est sou­te­nue par des éva­lua­tions chif­frées des consé­quences des mesures pro­po­sées ; celles-ci sont donc pon­dé­rées et paraissent suf­fi­sam­ment rai­son­nables pour être prises en considération.

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