Recherche loyauté désespérément…

Dossier : Les consultantsMagazine N°528 Octobre 1997
Par Jean-Marc Le ROUX (81)
Par Christophe LEMERY (87)

Pour réus­sir, il faut trou­ver de bons clients… et les garder. La fidéli­sa­tion des clients est dev­enue un sujet très en vogue mais la majorité des dirigeants ne le mette pas en pra­tique. Pour­tant, dans la plu­part des secteurs, plus un client est fidèle, plus il est rentable.

Les clients fidèles

En fait, la grande majorité des entre­pris­es ignore la valeur marchande de la fidél­ité car la compt­abil­ité ne prend pas en compte cette notion. Les principes compt­a­bles ont plutôt ten­dance à cacher la valeur que représente un client fidèle, en dépit de son impact très impor­tant sur les résul­tats. En réal­ité, deux effets se conjuguent :

L’ef­fet vol­ume - Imag­i­nons que vous attiriez régulière­ment de nou­veaux clients, mais que les anciens vous quit­tent tout aus­si régulière­ment. Si vous pou­viez ralen­tir le taux de défec­tion, le nom­bre total de clients aug­menterait bien plus rapi­de­ment. Toutes choses étant égales par ailleurs, il suf­fi­rait d’amélior­er le taux de fidéli­sa­tion de dix points pour que le porte­feuille clients dou­ble en sept ans.

L’ef­fet prof­it — Générale­ment, plus un client est fidèle, plus il génère de prof­it pour l’en­tre­prise. Per­dre un ancien client et le rem­plac­er par un nou­veau a des con­séquences économiques non nég­lige­ables, d’au­tant que dans la plu­part des secteurs les coûts d’ac­qui­si­tion sont très importants.

Les résul­tats d’une telle stratégie seront d’au­tant plus val­ables que les clients auront été cor­recte­ment sélec­tion­nés : cer­tains clients étant par nature plus fidèles que d’autres, il est préférable d’a­ban­don­ner ces derniers à la con­cur­rence et de con­cen­tr­er ses efforts sur les “bons” clients.

Les employés fidèles

Une fois qu’une entre­prise a réus­si à fidélis­er les bons clients et qu’elle obtient les avan­tages financiers cor­re­spon­dants, elle doit inve­stir dans le recrute­ment et la fidéli­sa­tion d’employés de qual­ité. Il y a une rela­tion directe entre la fidél­ité des employés et la fidél­ité des clients. Pourquoi ? Parce qu’il faut du temps pour con­stru­ire une rela­tion durable avec les clients. Les salariés fidèles devi­en­nent plus effi­caces avec le temps et per­me­t­tent d’é­conomiser des frais de recrute­ment et de formation.

QUELQUES OUTILS DE GESTION DE LA LOYAUTE
 
Le taux de fidéli­sa­tion mesure la pro­por­tion des clients tou­jours présents et act­ifs à la fin d’une péri­ode, par rap­port à un porte­feuille initial.
La valeur d’un client mesure la valeur actu­al­isée des cash flows générés par un client pen­dant la durée de sa rela­tion avec son fournisseur.
Le mod­èle économique simule l’im­pact sur la crois­sance et les prof­its de l’en­tre­prise de l’aug­men­ta­tion du taux de fidéli­sa­tion de cer­tains seg­ments de clientèle.
L’analyse des caus­es pro­fondes de défec­tion per­met d’i­den­ti­fi­er les moti­va­tions réelles de l’in­fidél­ité des clients à très forte valeur ain­si que les événe­ments déclencheurs de cette infidélité.

Les entre­pris­es qui réus­sis­sent sont celles qui investis­sent dans la loy­auté de leurs col­lab­o­ra­teurs et utilisent cette fidél­ité pour amélior­er celle de leurs clients.

La plu­part des dirigeants souhait­ent avoir des col­lab­o­ra­teurs fidèles mais rares sont ceux qui sont prêts à inve­stir pour obtenir cette loy­auté. Ils en con­nais­sent le coût mais pas la valeur. Licenci­er des employés est une source d’é­conomies, mais les con­séquences réelles de leur départ dépassent de loin tout ce que les dirigeants peu­vent imag­in­er. Dix ans d’ex­péri­ence et d’é­tudes dans ce domaine ont per­mis à Bain & Com­pa­ny de met­tre au point un mod­èle qui met en évi­dence sept avan­tages économiques apportés par la loy­auté des employés.

1. Les coûts de recrute­ment La plu­part des coûts sont évi­dents (chas­seurs de têtes, entre­tiens, muta­tions) mais n’ou­bliez pas que si vous devez engager trois col­lab­o­ra­teurs pour n’en garder qu’un sur les trois, le véri­ta­ble investisse­ment par employé triplera.

2. La for­ma­tion À long terme, la for­ma­tion des salariés per­ma­nents n’est plus source de coût mais de profit.

3. L’ef­fi­cac­ité Plus ils sont expéri­men­tés, plus les employés sont effi­caces. Et plus ils sont fiers de la valeur qu’ils créent pour les clients et pour eux-mêmes, plus ils sont motivés et travaillent.

4. La sélec­tion des clients Des com­mer­ci­aux expéri­men­tés sauront mieux trou­ver les clients des­tinés à devenir les plus fidèles.

5. Fidélis­er les clients La fidél­ité des clients dépend de celle des employés.

6. Recom­man­der des clients Ce sont sou­vent les col­lab­o­ra­teurs les plus anciens qui appor­tent le plus de clients.

7. Recom­man­der des col­lab­o­ra­teurs Les employés qui ont de l’an­ci­en­neté sont sou­vent ceux qui inci­tent les meilleurs pro­fils à postuler.

Toute­fois, il ne suf­fit pas de sim­ple­ment retenir vos employés pour obtenir de meilleurs résul­tats. Beau­coup d’en­tre­pris­es traî­nent du bois mort. Il faut pou­voir mesur­er effi­cace­ment la con­tri­bu­tion de cha­cun. Cal­culer la valeur de la fidél­ité des employés n’est pas un exer­ci­ce aus­si facile qu’il peut paraître. Il fau­dra prob­a­ble­ment créer de nou­veaux sys­tèmes de mesure et appren­dre à analyser les résul­tats. Mais il y a peu de doute sur ce que vous allez trou­ver : vous serez impres­sion­nés par ce que vous investis­sez en recrute­ment et en for­ma­tion et le manque à gag­n­er dû aux employés inex­péri­men­tés vous surprendra.

Les investisseurs fidèles

Lexus, la divi­sion luxe de Toy­ota, a été fondée dès sa créa­tion sur le principe de loy­auté. Selon David Illing­worth, pre­mier directeur général de Lexus États-Unis, “La seule mesure de sat­is­fac­tion val­able est la fidél­ité à la mar­que.” Pour rester à l’é­coute de ses clients, Lexus demande à chaque col­lab­o­ra­teur du siège social d’in­ter­roger qua­tre clients par mois. La société com­mu­nique égale­ment à son réseau de con­ces­sion­naires, au dol­lar près, ce que cha­cun d’eux gag­n­erait en amélio­rant son taux de fidéli­sa­tion et en aug­men­tant le vol­ume du ser­vice après-vente. Aujour­d’hui, 63 % des clients de Lexus sont fidèles à la mar­que. Et si, selon les experts de l’in­dus­trie auto­mo­bile, Lexus ne réalise que 2 % du chiffre d’af­faires de Toy­ota, elle con­tribue au tiers de ses prof­its. À titre de com­para­i­son, Infin­i­ty, la fil­iale de Nis­san qui tra­vaille sur le même seg­ment de clien­tèle, observe un taux de fidéli­sa­tion de 42 %.

La majorité des états-majors accorde une impor­tance plus grande à la valeur apportée aux action­naires qu’à celle apportée aux clients et aux employés et ils n’ont pas pour autant réus­si à s’as­sur­er la loy­auté de leurs investis­seurs. Aux États-Unis, la défec­tion moyenne des investis­seurs a grim­pé de 14 à 52 % au cours des trente-cinq dernières années. L’in­fidél­ité des action­naires est sans com­mune mesure avec celle des employés et des clients. “Si une société de cartes de crédit arrive à aug­menter le taux de fidéli­sa­tion de ses clients de 5 % chaque année (en accrois­sant son taux de fidéli­sa­tion de 90 à 95 % par exem­ple), les prof­its générés par un seul client aug­menteront, en moyenne, de 75%.” Les chefs d’en­tre­prise ne réfléchissent pas suff­isam­ment à ce que peu­vent leur apporter, au-delà de l’aspect financier, des action­naires fidèles : la sta­bil­ité du cap­i­tal, la valeur de leurs con­seils, leur expéri­ence, des obser­va­tions judi­cieuses. Par con­tre, cer­tains types d’in­vestis­seurs, préoc­cupés de résul­tats à court terme, génèrent des deman­des inutiles, des pertes de temps et même une cer­taine insta­bil­ité. Mécon­naître ces coûts et ces béné­fices con­duit à sous-éval­uer la valeur des investis­seurs de qualité.

De même qu’il y a des pro­fils de clients et d’employés qui cor­re­spon­dent bien à votre entre­prise, de même y a‑t-il des investis­seurs dont la démarche cor­re­spond à la vôtre. Ce sont ceux qui, en dehors de leur apport financier, créent de la valeur. Ils com­pren­nent le monde des affaires. Ils sont intéressés par des place­ments à long terme. Ils plan­i­fient leur investisse­ment en fonc­tion de votre pro­pre cycle de valeur. En d’autres ter­mes, ce sont des partenaires.

BAIN & COMPANY EN FRANCE
 
En 1973, William (Bill) Bain fonde à Boston la société qui va porter son nom. Au plan mon­di­al, elle est aujour­d’hui dirigée par 150 “part­ners” et compte 1 800 salariés répar­tis entre 24 bureaux. L’ou­ver­ture de 10 bureaux depuis 1991, en Asie, en Europe occi­den­tale, ain­si que la crois­sance des trois dernières années, mon­trent le dynamisme d’une firme qui compte par­mi les lead­ers mon­di­aux du con­seil en stratégie.
La fil­iale française de Bain & Com­pa­ny a été créée en 1985. Dans ses locaux de l’im­meu­ble des Trois-Quartiers, elle compte 70 con­sul­tants pour un effec­tif total de 90 per­son­nes. En France, les clients de Bain & Com­pa­ny vien­nent de secteurs aus­si var­iés que les ser­vices financiers, les sociétés de ser­vice, l’a­groal­i­men­taire, l’in­dus­trie ou la dis­tri­b­u­tion de biens de con­som­ma­tion. Ses prin­ci­paux axes d’in­ter­ven­tion sont : déf­i­ni­tion de straté­gies, amélio­ra­tion de per­for­mances, ren­force­ment des organ­i­sa­tions. Mis­sions déclinées avec un savoir-faire et une exper­tise issus de l’ex­péri­ence de son réseau inter­na­tion­al : ne se bor­nant pas à une étude appro­fondie assor­tie d’une recom­man­da­tion stratégique, Bain & Com­pa­ny accom­pa­gne le plus sou­vent son client dans sa mise en oeu­vre. D’où cette approche où coex­is­tent rigueur d’analyse, créa­tiv­ité et pragmatisme.

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