« Pas de problèmes entre gens de bonne foi »

Dossier : X-Expertise : entre science et conflitsMagazine N°685 Mai 2013
Par Philippe FLEURY (59)

Créé il y a trente ans par Michel Brisac (47), le groupe X‑Expertise regroupe aujourd’hui une trentaine de mem­bres, sou­vent experts auprès des tri­bunaux, mais aus­si plus spé­cial­isés. Leurs com­pé­tences d’ingénieur met­tent la sci­ence au ser­vice de la réso­lu­tion des conflits.

Les motifs de la créa­tion du groupe X‑Expertise ont été claire­ment exprimés à l’origine, explique l’actuel prési­dent, Philippe Fleury (59) : « Favoris­er des con­tacts entre le monde judi­ci­aire et les poly­tech­ni­ciens, sus­citer de nou­velles voca­tions d’experts et d’arbitres, faire con­naître l’expertise et l’arbitrage à tous les cama­rades intéressés. »

Un travail policier et scientifique

Dans la pra­tique, Philippe Fleury explique que les experts sont man­datés par les dif­férentes juri­dic­tions (tri­bunaux de com­merce, de grande instance, admin­is­trat­ifs, cour d’appel et Cour de cas­sa­tion), ils peu­vent aus­si l’être par des entre­pris­es ou des instances d’arbitrage.

« Il leur faut établir les faits qui causent un préju­dice. C’est un tra­vail d’enquête et d’analyse, de type polici­er, où il faut inter­roger, déduire, voire établir des mod­èles infor­ma­tiques afin de dégager les liens entre les caus­es, leurs con­séquences et valid­er les mon­tants des préjudices.

« L’expertise dans le domaine des grands pro­jets indus­triels devient ain­si de plus en plus com­pliquée et du ressort d’ingénieurs expéri­men­tés capa­bles de met­tre la sci­ence au ser­vice des con­flits. « Ils doivent rester objec­tifs, sans dire le droit. Ils peu­vent toute­fois « l’exsuder », comme le soulig­nait Michel Brisac. »

Trois types d’expert
Les experts d’assurances œuvrent pour le compte de com­pag­nies d’assurances, directe­ment ou par l’intermédiaire de courtiers ou de cab­i­nets spécialisés.
Les experts de par­tie tra­vail­lent pour le compte de telle ou telle par­tie, dans la recherche de con­cil­i­a­tion, de médi­a­tion ou d’arbitrage, donc dans un cadre amiable.
Les experts judi­ci­aires sont désignés par un juge, le plus sou­vent en référé, pour l’éclairer sur des domaines autres que le droit, donc dans un cadre con­tentieux. C’est une par­tic­u­lar­ité très française. Dans les con­trées de droit anglo-sax­on, chaque par­tie désigne son expert et le juge écoute les uns comme les autres.

Philippe FLEURY (59) X‑Expertise

Prési­dent : Philippe Fleury (59)
Secré­taire g​énéral : Jacques Lut­fal­la (55)
Mem­bre du Bureau : Claude Bulté (53)
Adresse : 21, place des Vos­ges, 75003 Paris
Tél. : 01 48 87 85 92
Cour­riel : jacques.lutfalla [at] m4x.org

Philippe Fleury (59), 73 ans, 2 enfants, 6 petits-enfants, est ingénieur des Ponts et Chaussées. Spé­cial­iste des routes, puis des finances, il est un des pio­nniers des mod­èles économétriques.
À trente-neuf ans, il pré­side une société de travaux publics qui l’entraîne dans de nom­breux pays étrangers et qu’il reprend au titre d’un LBO, appelé à l’époque RES (reprise d’entreprise par ses salariés). Il dirige depuis vingt ans une société de con­seil famil­iale spé­cial­isée dans les grands pro­jets de bâti­ment et travaux publics.
Il a été mag­is­trat con­sulaire au tri­bunal de Créteil.
Adepte du rug­by, du jog­ging, du ten­nis et du piano, il adore la lecture.
À la recherche de l’accord raisonnable

Rap­por­teur près le Con­seil con­sul­tatif inter­ré­gion­al de règle­ment ami­able des marchés publics, Philippe Fleury, grâce à son expéri­ence de mag­is­trat con­sulaire, se flat­te de met­tre tout en oeu­vre pour régler les prob­lèmes à l’amiable, afin de ne pas encom­br­er les juridictions.

Une conférence tous les deux mois

« Le groupe X‑Expertise rassem­ble des experts de toutes les spé­cial­ités, sou­vent d’un cer­tain âge, mais son ambi­tion est aus­si d’intéresser de plus jeunes cama­rades, pour­suit Philippe Fleury.

« Nous comp­tons aujourd’hui une trentaine de mem­bres réguliers, nous nous réu­nis­sons tous les deux mois, par­fois en col­lab­o­ra­tion avec le groupe X‑Droit.

« Une réu­nion typ­ique regroupe à la Mai­son des X un con­férenci­er et les mem­bres intéressés. Son exposé d’une trentaine de min­utes est pour­suivi par des échanges. Le dîn­er, fac­ul­tatif, coûte actuelle­ment 46 euros. Une petite somme est prélevée pour ani­mer notre site Inter­net et nous dis­penser de cotisation.

« C’est moi-même qui recherche les inter­venants et notre secré­taire général qui sol­licite les mem­bres sur Inter­net. La dif­fi­culté est d’en trou­ver un de bon renom, dis­posé à faire partager son expérience. »

Un rebond d’utilité sociale

« J’essaie d’ouvrir le groupe aux non‑X, par exem­ple aux cen­traliens ou aux anciens des Travaux publics, qui n’ont pas de groupes équivalents.

« L’objectif per­son­nel des experts est de trou­ver en fin de car­rière un rebond d’utilité sociale.

« Bien sûr, le méti­er de l’expertise s’exerce de façon indi­vidu­elle, mais il est tou­jours intéres­sant d’échanger des expériences. »

Les ori­en­ta­tions de Bruxelles
La dernière réu­nion, tenue fin mars 2013, a vu l’intervention d’Emmanuelle Per­ron, vice-prési­dente de la Fédéra­tion nationale des travaux publics, sur le thème des « nou­velles ori­en­ta­tions de Bruxelles ».

Renvoyer l’ascenseur

Quelles sont les moti­va­tions per­son­nelles de Philippe Fleury pour s’être lancé dans cette ani­ma­tion d’un groupe X ?

« Je con­sid­ère que j’ai béné­fi­cié, comme tous mes chers cama­rades, d’avantages con­sid­érables et qu’il est temps pour moi de ren­voy­er l’ascenseur.

« Faire mon­ter les jeunes est un devoir moral, à l’exemple des Romains qui avaient instau­ré un sys­tème d’adoption totale­ment dif­férent du sys­tème actuelle­ment en vigueur, per­me­t­tant au séna­teur romain d’adopter un dauphin. L’exemple de Bru­tus et de César est bien connu.

« Quant à l’expertise, c’est chaque fois une nou­velle enquête où l’obtention d’un com­pro­mis sat­is­faisant pour tous est gratifiante.

« On peut tou­jours trou­ver une solu­tion entre gens de bonne foi. »

Pro­pos recueil­lis par
Jean-Marc Cha­banas (58)

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