Haptique : Homme portant un masque et des gants de réalité virtuelle

L’Haptique : le ressenti en Haute définition

Dossier : Supplément InnovationMagazine N°746 Juin 2019
Par Gilles MEYER

Actron­i­ka per­met de plonger dans des univers virtuels explorables au touch­er à l’aide de la créa­tion d’effets hap­tiques très haute déf­i­ni­tion. Ren­con­tre avec Gilles Mey­er, l’un des co-fon­da­teur de l’entreprise qui nous en dit plus.

Dites-nous-en plus sur la genèse et le développement d’Actronika ?

Co fondée par deux chercheurs spé­cial­istes dans le domaine de l’haptique Rafal Pijew­s­ki, Vin­cent Hay­ward et moi-même, entre­pre­neur aguer­ri avec déjà 5 start­up à son act­if. Actron­i­ka a vu le jour en 2016. Nous révo­lu­tion­nons les inter­faces homme-machines grâce à notre tech­nolo­gie qui nous per­met de pro­duire une librairie d’effets hap­tiques réalistes.

Nous avons été en 2016 Lau­réat du Con­cours d’Innovation Numérique (CIN) de la BPI en 2016 et nous avons obtenus 3 pro­jets Hori­zon 2020 (H2020) ce qui prou­ve notre réus­site et notre capac­ité à innover. Grâce à Quadriv­i­um et Novares Ven­ture Cap­i­tal, nous avons réal­isé deux lev­ées de fond, pour un mon­tant total de 2,4 mil­lions d’euros.

Plus par­ti­c­ulière­ment, Actron­i­ka a dévelop­pé une plate­forme hard­ware per­me­t­tant l’haptisation des sur­faces par le biais d’actionneurs. L’idée est d’avoir un posi­tion­nement B2B et de pou­voir com­mer­cialis­er nos solu­tions inno­vantes via la plate­forme Tac­tron­ik. Nous util­isons, en effet, des tech­nolo­gies du Voice Coil que nous met­tons à dis­po­si­tion de nos clients du monde de l’automobile, de la télé­phonie mobile mais aus­si de la réal­ité virtuelle.

L’entreprise regroupe actuelle­ment 20 col­lab­o­ra­teurs et réalise 60 % de son chiffre d’affaires à l’international notam­ment aux États-Unis, en Alle­magne, en Fin­lande et en Chine.

Spécialiste des systèmes haptiques, quelles sont les technologies que vous avez développées et pour quelles applications ?

Notre sys­tème hap­tique est une plate­forme qui per­met de dévelop­per des effets dynamiques de retour vibro-tac­tiles. Ces effets haute déf­i­ni­tion sont pré­cis et très réal­istes, c’est ce qui nous per­met de nous dif­férenci­er sur le marché. Le touch­er est un élé­ment pri­mor­dial, et cette tech­nolo­gie est une réelle inno­va­tion pour toutes les inter­faces hommes-machines.

La plate­forme se décom­pose en trois parties :

  • Soft­ware | La par­tie logi­ciel : notre librairie d’effets haptiques ;
  • Firmware | Le logi­ciel qui per­met de con­trôler l’actionneur ;
  • Hard­ware | La par­tie élec­tromé­canique. En maîtrisant ces dif­férents aspects, nous avons réus­si à obtenir une cer­taine facil­ité d’intégration à des coûts com­péti­tifs mais aus­si à créer une hap­tique haute déf­i­ni­tion très proche de la sen­sa­tion du touch­er humain.

Votre technologie est déjà utilisée dans certains domaines par des entreprises. Qu’en est-il ?

Dans le monde de la réal­ité virtuelle, l’haptique vient com­pléter l’ouïe et la vision.

Pour illus­tr­er ce phénomène, je me réfère au film “Ready Play­er One“ de Steven Spiel­berg où, dans un univers virtuel, l’acteur porte une com­bi­nai­son hap­tique à tra­vers laque­lle il peut ressen­tir ce qu’il voit. À ce titre, l’haptique apporte réelle­ment une avancée révo­lu­tion­naire dans le monde du gam­ing ou encore de la for­ma­tion : une très forte com­posante ludique que nous dévelop­pons continuellement.

Pour la télé­phonie mobile, les développeurs auront la capac­ité de génér­er des émo­jis hap­tiques que les util­isa­teurs pour­ront ressen­tir dans la paume de leurs mains.

En par­al­lèle, pour le monde de l’automobile, nous appor­tons plusieurs fonc­tion­nal­ités uniques au niveau des sièges auto­mo­biles via des tech­nolo­gies “smart sur­faces“. Ces dis­posi­tifs vien­dront rem­plac­er les bou­tons de con­trôle dans le cock­pit de la voiture. Ces sen­sa­tions vont pou­voir guider le con­duc­teur au niveau de l’écran et aug­menter de plus de 70 % la con­cen­tra­tion au volant. Le sens du touch­er vien­dra sub­stituer le sens de la vision. La tech­nolo­gie dévelop­pée par Actron­i­ka per­met de pro­duire une librairie d’effets hap­tiques par le biais d’actionneurs. Ces action­neurs peu­vent repro­duire tout type de sen­sa­tion ou tex­ture et être inté­grés à quel­conque objet de la vie courante. Le but est de trans­former l’expérience util­isa­teur dig­i­tale en créant des sen­sa­tions. Nous nous pen­chons de plus en plus vers une expéri­ence réelle grâce à la qual­ité des effets et des sen­sa­tions que nous avons la capac­ité de générer.

Quels sont les sujets qui vous mobilisent actuellement ?

Nous nous focal­isons actuelle­ment sur l’intégration de l’haptique dans le monde de la réal­ité virtuelle. Ain­si, nous sommes en train de dévelop­per un sys­tème de com­bi­nai­son hap­tique qui per­me­t­tra de créer des effets et des sen­sa­tions proches de la réalité.

Par exem­ple, dans un jeu de guerre avec un casque VR, l’utilisateur aura la pos­si­bil­ité de ressen­tir la balle qui le transperce ou encore la grenade qui vient d’exploser.

Nous menons égale­ment des recherch­es con­tin­ues rel­a­tives au “mul­ti-touch“ : la capac­ité de ressen­tir les effets sur un écran de façon local­isée. Il s’agit de la pos­si­bil­ité d’effectuer plusieurs réglages à la fois (con­trôle cli­ma­tique, vol­ume de la musique…) sans ressen­tir ce que l’autre util­isa­teur fait.

Nous suiv­ons aus­si de près l’évolution des sur­faces intel­li­gentes qui vous per­me­t­tent de con­trôler une fonc­tion à tra­vers le touch­er de la sur­face. Nous cher­chons à répon­dre à la demande crois­sante des con­cep­teurs auto­mo­biles et de l’industrie immo­bil­ière qui souhait­ent met­tre au point des sur­faces rétro-éclairées ayant une fonc­tion­nal­ité bien pré­cise et modulable.

Quels sont vos principaux enjeux et challenge ?

Nous tra­vail­lons sur l’industrialisation et la com­mer­cial­i­sa­tion de nos solu­tions. Notre chal­lenge est de met­tre au point une tech­nolo­gie aboutie. Sur un plan plus opéra­tionnel, il faut rassem­bler les moyens néces­saires pour pou­voir indus­tri­alis­er nos pro­duits. Vient ensuite la phase de com­mer­cial­i­sa­tion qui néces­site une cer­taine force com­mer­ciale assez per­ti­nente et bien for­mée. Au niveau de la R&D, nous sommes très bien suiv­is et bien financés. Nous avons, en effet, beau­coup d’idées et de moyens qui nous per­me­t­tent de con­cré­tis­er nos solu­tions novatrices.

Qu’en est-il de vos perspectives ? Votre actualité ?

Nous cher­chons à attein­dre plus de 100 col­lab­o­ra­teurs et 20 mil­lions d’euros en chiffre d’affaires dans les 5 prochaines années. Notre prin­ci­pale ambi­tion est de devenir l’acteur incon­testable, incon­tourn­able et incon­testé des effets hap­tiques com­plex­es haute déf­i­ni­tion. Pour attein­dre cet objec­tif nous mis­ons sur la Recherche & Développe­ment menée par nos jeunes chercheurs émérites. Ces derniers nous per­me­t­tent égale­ment de béné­fici­er de Crédits d’Impôt en faveur de la Recherche (CIR) pour le finance­ment de nos activités.

La pro­priété intel­lectuelle se présente égale­ment comme un axe majeur de notre stratégie puisque nous déposons beau­coup de brevets. Nous éten­dons aus­si nos brevets à l’international : une tâche à la fois dif­fi­cile, coû­teuse et complexe.

Pour cela, nous avons noué un parte­nar­i­at avec l’Institut Nation­al de la Pro­priété Indus­trielle (INPI) mais aus­si avec un cab­i­net de con­seil en pro­priété intel­lectuelle. À cela s’ajoutent des rela­tions étroites avec la SATT LUTECH.

Le mot de la fin ?

L’haptique est une dis­ci­pline qui va con­sid­érable­ment révo­lu­tion­ner le monde high-tech et les inter­faces homme-machines. Il s’agit d’ajouter le sens du touch­er là où nous n’utilisions aupar­a­vant que l’ouïe et la vue.

Poster un commentaire