Le climat change, la météo doit agir

Dossier : La météorologie partie 2Magazine N°748 Octobre 2019Par Valérie MASSON-DELMOTTE

Les pro­grès des sci­ences du cli­mat ont été impres­sion­nants. Les mes­sages du GIEC sont clairs. Les événe­ments mar­quants s’accumulent. Pour­tant, la cul­ture sci­en­tifique en matière de cli­mat reste faible par­mi les décideurs et le grand pub­lic ; le sujet est absent de nos pro­grammes académiques ; et nous vivons avec des marchands du doute, habiles dans les médias.

L’augmentation de 1 °C de la tem­péra­ture moyenne à la sur­face du globe (depuis 1850) est la plus impor­tante, rapi­de et syn­chrone en tous lieux depuis deux mille ans. Ce réchauf­fe­ment est dû aux rejets de gaz à effet de serre par les activ­ités humaines. Nous vivons déjà ce change­ment cli­ma­tique et ses effets, avec des ten­dances et des extrêmes qui affectent les écosys­tèmes et les moyens de sub­sis­tance partout. Au rythme actuel de + 0,2 °C par décen­nie, le réchauf­fe­ment plané­taire attein­dra 1,5 °C entre 2030 et 2050, quand nos enfants auront notre âge. Les risques liés au cli­mat pour les écosys­tèmes et pour les activ­ités humaines chang­eront davan­tage à mesure de l’ampleur du réchauf­fe­ment. En ce sens, chaque demi-degré de réchauf­fe­ment compte.

Le niveau actuel d’émissions de gaz à effet de serre con­duirait à un réchauf­fe­ment de la planète de 3 °C ou plus d’ici 2100 ; pour le lim­iter à 2 °C, il faudrait réduire les émis­sions mon­di­ales de CO2 de 25 % d’ici 2030 et attein­dre le zéro net vers 2070 ; pour 1,5 °C, 50 % d’ici 2030 et attein­dre le zéro net vers 2049…

Changer nos habitudes

Cela néces­site des tran­si­tions justes, rapi­des, pro­fondes et sans précé­dent dans les domaines de l’énergie, de l’utilisation des sols, de l’urbanisme, de l’industrie et des infra­struc­tures, en util­isant une large palette de tech­nolo­gies mais aus­si de trans­for­ma­tions et de change­ments de com­porte­ment pour maîtris­er la demande en énergie, en matéri­aux non renou­ve­lables et la pres­sion sur les terres.

Tous ces enjeux con­cer­nent la météorolo­gie, qui chaque jour scrute la planète, s’engage avec ses prévi­sions, s’adresse à nos conci­toyens et à nos décideurs, alerte et instru­it. La météorolo­gie intè­gre les recherch­es à l’interface de mul­ti­ples dis­ci­plines, y com­pris les sci­ences sociales, elle traduit et démul­ti­plie l’engagement des sci­en­tifiques dans la société. Les ser­vices météorologiques sont désor­mais météo-cli­ma­tiques. Face à ce défi mul­ti­forme, ils doivent résol­u­ment con­tribuer à la sur­veil­lance des flux de gaz à effet de serre, à la résilience face aux risques naturels, à la prise en compte des dif­férentes échelles tem­porelles dans l’information quo­ti­di­enne et à long terme. Les Objec­tifs du développe­ment durable sont aus­si ceux de la météorologie.

Interroger le futur pour agir au présent

En 2049 aurons-nous une meilleure sur­veil­lance du « sys­tème Terre », des sys­tèmes d’alerte pré­coce, des prévi­sions saison­nières et décen­nales, des pro­jec­tions à court et à long terme pour ren­forcer la résilience et gér­er les risques ? Aurons-nous mieux com­pris les rétroac­tions du sys­tème cli­ma­tique et tout par­ti­c­ulière­ment celles liées aux nuages qui jouent un rôle clé dans l’amplitude de la réponse du cli­mat aux per­tur­ba­tions de son bilan d’énergie ? Aurons-nous réus­si à réduire forte­ment les émis­sions de gaz à effet de serre, à préserv­er la bio­di­ver­sité, à élim­in­er l’extrême pau­vreté par l’innovation tech­nologique, économique et sociale ? Aurons-nous réus­si à utilis­er la sci­ence, la tech­nolo­gie et la sagesse pour le pro­grès humain ?

Tout cela dépend de nos actions main­tenant. Plac­er la sci­ence au ser­vice des trans­for­ma­tions de nos sociétés, agir de manière lucide et respon­s­able, pour le plus grand défi que nous ayons aujourd’hui à relever ensem­ble. Voilà notre défi collectif.


Cet arti­cle fait par­tie d’une col­lec­tion de points de vue et de rêves sur la “météo en 2049”…

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