La réussite des entreprises familiales

Dossier : Le tissu des PME françaisesMagazine N°522 Février 1997
Par Michel BERRY (63)

M. B. : Votre livre sur les entreprises familiales déborde visiblement le champ des PME auquel s’intéresse présentement La Jaune et la Rouge, mais ce débordement me paraît instructif. 

O. G. : L’en­tre­prise famil­iale s’é­tend depuis l’ate­lier de vil­lage jusqu’à Miche­lin et Solvay, mais dans la pra­tique je me suis cen­tré sur la fourchette des Moyennes Entre­pris­es Pat­ri­mo­ni­ales (MEP) de 200 à 2 000 salariés, soit en France plus de 10 000 entreprises.

J’ai mis en lumière que ces entre­pris­es con­stituent un atout majeur dans l’é­conomie française, avec le hand­i­cap d’une grande vul­néra­bil­ité fis­cale ; et que leur dis­pari­tion ou leur affaib­lisse­ment — ce qui n’est pas un dan­ger théorique — entraîn­erait une con­sid­érable perte de vital­ité et d’emploi pour notre pays. Et il ne faut pas compter sur le développe­ment des “grands groupes” pour com­penser cette perte.


Octave Gélin­ier
Michel BERRY (63)
Michel Berry

M. B. : N’êtes-vous pas un peu manichéen en opposant “entreprises familiales” et “groupes anonymes” ?

O. G. : Il est man­i­feste qu’il y a de grandes réus­sites par­mi les entre­pris­es non famil­iales et de médiocres per­for­mances par­mi les famil­iales. Mais les résul­tats d’en­quêtes sont éclairants :
— d’après l’IN­SEE l’indice du Résultat/CA est de 1,2 pour les MEP et 0,8 pour les non MEP : soit + 50 % ;
— d’après l’é­tude des pro­fesseurs d’u­ni­ver­sité Allouche (Ver­sailles) et Amann (Toulouse) sur 1992, la moyenne des 12 prin­ci­paux ratios de ges­tion est supérieure de 33 % dans les famil­iales “par rap­port aux non famil­iales” et les ratios soci­aux sont supérieurs de 30 à 40 % ;
— la Société de Bourse ODDO a analysé l’indice des cours de bourse de 250 entre­pris­es, le SBF 250, en faisant ressor­tir l’indice pro­pre aux 76 entre­pris­es famil­iales entrant dans l’échan­til­lon. Cet indice sur 1975–1976 est supérieur de 54 % à celui des autres entreprises ;
— ceci est con­fir­mé par les ratios de per­for­mance cal­culés par L’Ex­pan­sion pour les 1 000 pre­mières entre­pris­es françaises :

  • sur les 30 plus forts indices de per­for­mance bour­sière (MVA) 25 con­cer­nent des entre­pris­es à con­trôle familial,
  • sur les 15 plus forts indices de pro­duc­tiv­ité (EVA), 12 provi­en­nent du con­trôle familial.
     

M. B. : Je m’étonne que cela vous ait surpris. 

O. G. : Eh bien, hon­nête­ment oui ! Bien que fréquen­tant aujour­d’hui de nom­breux patrons de MEP très per­for­mants, je garde de vieux sou­venirs de dis­putes famil­iales et de fils à papa dans des entre­pris­es que j’ai vu, depuis lors, péri­cliter lamentablement.

Il y a donc eu un redresse­ment spec­tac­u­laire de la qual­ité du man­age­ment famil­ial au cours des vingt dernières années ; je l’at­tribue à une con­cur­rence dev­enue inter­na­tionale et implaca­ble : les enfants ne se dis­putent plus pour pren­dre une suc­ces­sion dan­gereuse, les neveux doivent faire leurs preuves avant de se faire embaucher…

M. B. : Ce qui peut aussi entraîner des conséquences négatives, inverses de celles d’hier si les fils refusent la succession. Même en Italie, ce phénomène apparaît, les enfants du petit patron, self-made-man s’orientent vers la profession d’avocat ou de cadre salarié. Nous avons vu en France un grand patron essayer successivement trois fils pour sa succession, et finalement ne garder que le troisième. Que donnera la génération des couples à deux enfants ?

O. G. : Il peut y avoir des éclipses. Voyez la famille Agnel­li : elle a lais­sé le pou­voir pen­dant une généra­tion à un dirigeant hors famille, et à la généra­tion suiv­ante elle l’a repris. La for­mule juridique “con­seil de sur­veil­lance + direc­toire” facilite ce genre d’al­ter­nance, mais l’ex­péri­ence mon­tre qu’un trop long éloigne­ment de la ges­tion directe prive la famille d’une vraie com­mu­nion avec l’entreprise.

Ceci étant, l’en­tre­prise famil­iale ne pré­tend pas être éter­nelle. L’évo­lu­tion du con­trôle famil­ial dans le temps peut pass­er par plusieurs phas­es, d’abord l’ou­ver­ture privée à des parte­naires minori­taires, puis intro­duc­tion en bourse, puis effrite­ment de l’in­flu­ence famil­iale, et finale­ment pas­sage de main. Ce qui est cer­tain, c’est que divers­es for­mules coex­is­tent pour faire face aux exi­gences de l’é­conomie mon­di­ale. J’ai cité plusieurs cas remar­quables dans mon livre.

M. B. : Les liens du sang sont-ils indispensables pour constituer une “entreprise familiale” ?

O. G. : Le lien déter­mi­nant, c’est celui des valeurs com­munes et de la philoso­phie com­mune de direc­tion de l’en­tre­prise. Notez que la famille biologique n’en est pas tou­jours le meilleur garant, car le fils prodigue existe… Les autres sys­tèmes dynas­tiques, basés sur l’ap­par­te­nance philosophique ou religieuse, sont cepen­dant plus aléatoires.

M. B. : La formule du fils adoptif, pratiquée par l’empereur Hadrien, n’est évidemment pas facile à répéter, mais une équipe dirigeante peut se renouveler par cooptation, au moins sur deux générations.
C’est peut-être pourquoi le handicap de la succession est moins souvent cité par les critiques de l’entreprise familiale que celui de la médiocrité des moyens : finances insuffisantes freinant la croissance, embauche à bas niveau pour ne pas porter ombrage au fondateur, faible capacité de renouvellement des produits, par attachement excessif à la tradition… 

O. G. : J’ai exam­iné ces objec­tions qui sont toutes mar­quées par une vision assez pes­simiste de la sit­u­a­tion. Il est remar­quable que mal­gré toutes ces dif­fi­cultés, réelles ou sup­posées, les MEP aient les résul­tats posi­tifs que nous avons observés et chiffrés tout à l’heure.

Évidem­ment elles ont su choisir leur ter­rain, en évi­tant les indus­tries à masse cri­tique élevée et à haute den­sité cap­i­tal­is­tique (à moins de trou­ver, comme les aciéries de Bres­cia, des moyens orig­in­aux pour abaiss­er la masse critique).

Et n’ou­blions pas le sur­croît d’ef­fi­cac­ité, résul­tant de leurs car­ac­téris­tiques fondamentales.

  • D’une part, l’en­gage­ment financier du man­ag­er en tant que per­son­ne physique actionnaire.
  • D’autre part, le sou­tien du noy­au sta­ble d’ac­tion­nar­i­at famil­ial, qui génère un micro­cli­mat — financier et humain — prop­ice à la durée, et autrement plus fer­tile que le mec­ca­no pra­tiqué par les groupes.

M. B. : Il me semble aussi que les domaines d’excellence de ces entreprises sont les métiers qui exigent une longue sagesse et où il faut avoir en affaire le “pied marin”. C’est ce qui est sorti du débat organisé à l’École de Paris sur le cas de la Compagnie Louis Dreyfus3. Bien que dirigée au quotidien par une génération plus jeune, l’entreprise se référait à l’expérience de “Monsieur Pierre” et “Monsieur Jean”, les deux actionnaires, alors âgés de 84–85 ans : car c’était, malgré leur grand âge, des hommes qui avaient le pied marin, dans un métier qui comporte une certaine continuité. Dans les périodes de tempête, il est bon de ne pas avoir des actionnaires fébriles.
À l’inverse, il n’est pas évident que l’entreprise patrimoniale soit la bonne formule pour des activités tout à fait neuves, progressant par bonds en avant (et retombées) et liées à des technologies très évolutives. 

O. G. : Ce sont pour­tant les activ­ités où les pio­nniers de type “Sil­i­con Val­ley” enga­gent tout ce qu’ils pos­sè­dent dans l’e­spoir de cen­tu­pler leur mise : une mise qui cherche à en sus­citer d’autres, beau­coup plus impor­tantes — provenant du “ven­ture cap­i­tal”, puis du NASDAQ4 — afin de financer l’ex­pan­sion ultra-rapi­de d’un pro­duit à vie brève. Ce sont des créa­tions expéri­men­tales, explo­rant de nou­veaux marchés, sans per­spec­tive famil­iale. Elles réus­sis­sent par­fois, échouent fréquem­ment, se redressent et changent de mains.

C’est une forme émi­nente de créa­tion entre­pre­neuri­ale, qui se dévelop­pera cer­taine­ment un jour en France.

Mais pour l’heure, notre atout est dans les MEP se plaçant dans la logique du “pat­ri­mo­ni­al à long terme”, c’est-à-dire de l’ac­cu­mu­la­tion, dans la durée et sur plusieurs généra­tions, d’un cap­i­tal tech­nique com­mer­cial et humain. C’est ce mod­èle, par­fois qual­i­fié de “rhé­nan”, que j’ai par­ti­c­ulière­ment étudié.

M. B. : Vous accordez beaucoup de prix à ce que les propriétaires dirigent leur entreprise.
C’est ce que les “organisateurs scientifiques”, à commencer par Taylor, ont contesté dès le siècle dernier. Les écrits de Taylor témoignent d’une ardeur combative pour remplacer l’incompétence des propriétaires par la science des ingénieurs. Il y a eu quasiment une “lutte des classes” entre la bourgeoisie savante et la bourgeoisie possédante.

Le livre d'Octave Gélinier : La réussite des entrerises familialesO. G. : Les “savants” ont cru au lende­main de la guerre que la par­tie était gag­née, et Burn­ham a annon­cé “l’ère des man­agers”. C’é­tait le man­ag­er qui incar­nait l’en­tre­prise et en con­stru­i­sait la réus­site. L’ac­tion­naire n’é­tait qu’un four­nisseur d’ar­gent atten­tif à ses dividendes.

Cette vision des choses partagée par une par­tie notable de l’opin­ion publique a duré pen­dant près de trente ans dans une économie de crois­sance per­me­t­tant une assez bonne visibilité.

Mais quand les tur­bu­lences sont arrivées, on s’est aperçu que le man­ag­er était sou­vent moins préoc­cupé de la sécu­rité de l’en­tre­prise que de l’ex­ten­sion de son pou­voir — ou de son pres­tige. Quelques gros échecs en ont résulté, dont tous les parte­naires de l’en­tre­prise ont pâti, à com­mencer par les actionnaires.

Le rôle de ces derniers est désor­mais apparu comme essen­tiel : en défen­dant mieux leur pat­ri­moine, ils assur­eraient l’avenir de l’entreprise.

Que cette défense prenne la forme d’un engage­ment direct dans la ges­tion opéra­tionnelle ou d’un con­trôle organ­isé des man­agers salariés, il ne pou­vait plus être ques­tion de met­tre les action­naires au plac­ard, comme le pro­po­sait François Bloch-Lainé il y a vingt-cinq ans. Notons enfin que le retour du dirigeant action­naire est par­al­lèle à la mon­tée d’un autre pou­voir d’ac­tion­naires, celui de ces fonds de pen­sion qui domi­nent les Bourses.

M. B. : Cet actionnaire, garant de la pérennité de l’entreprise, que vous réhabilitez, n’est pas l’actionnaire lambda, plus spéculateur qu’entrepreneur. C’est celui qui a engagé dans l’affaire une grosse partie de son patrimoine dans une perspective de durée. Ses actions ne devraient-elles pas avoir, dans les décisions majeures concernant l’entreprise, un poids beaucoup plus lourd que celles des autres détenteurs ?
La loi française ne permet pas d’aller, sur ce point précis, aussi loin que les Hollandais. 

O. G. : Certes oui, surtout à titre de pro­tec­tion con­tre cer­taines OPA destruc­tri­ces. Mais la pro­tec­tion con­tre le matraquage fis­cal est aus­si impor­tante, et à cet effet il ne faut pas oubli­er la deux­ième ligne d’ac­tion­naires, moins lour­de­ment engagés que ceux de la pre­mière ligne et pour moins longtemps. Car, lorsque l’en­tre­prise grandit, le noy­au sta­ble de pre­mière ligne peut dif­fi­cile­ment con­serv­er la majorité, et la fidél­ité de la deux­ième ligne est essentielle.

M. B. : Croyez-vous qu’une filiale de grand groupe, bénéficiant d’une large autonomie, puisse avoir les mêmes vertus qu’une MEP, avec en outre une moindre limitation financière et pas d’embarras familiaux ? 

O. G. : J’ai fait un tableau des atouts et hand­i­caps com­parés de ces deux types d’en­tre­pris­es. Les avan­tages que vous sig­nalez, à l’ac­t­if de la fil­iale, y fig­urent. Mais aus­si ses points faibles, trop fréquem­ment ren­con­trés : pré­car­ité du directeur général, incer­ti­tude sur les inten­tions de l’ac­tion­naire, for­mal­isme des rela­tions avec la mai­son mère…, et sécu­rité exces­sive du “filet” financier.

Il y a des réus­sites, mais ce n’est pas une panacée.

Quant aux lim­i­ta­tions finan­cières des MEP, c’est une évi­dence, mais elles peu­vent être salu­taires, car toutes les entre­pris­es n’ont pas voca­tion à la forte crois­sance. Celles qui en ont la volon­té et l’op­por­tu­nité arrivent générale­ment à con­tourn­er l’obstacle.

M. B. : Pourquoi donc, comme le dit, dans votre livre, un de vos interlocuteurs : “Il y a trois fois moins de MEP en France qu’en Allemagne ; elles sont trois fois plus petites ; et elles ne durent qu’une ou deux générations au lieu de quatre à cinq” ? 

O. G. : Parce qu’on n’aime pas beau­coup en France les têtes qui dépassent et que, hormis les vrais aven­turi­ers, tout homme qui s’en­ri­chit est sus­pect ; et il est poli­tique­ment payant de le surtaxer.

En out­re, depuis Col­bert et Napoléon, les Français font davan­tage con­fi­ance aux gross­es organ­i­sa­tions rationnelles et struc­turées qu’aux ini­tia­tives foi­son­nantes portées par des entre­pre­neurs autonomes. Les MEP sont cepen­dant très vivaces, et les “trente glo­rieuses” 1945–1975 ont vu la per­cée de mille entre­pris­es famil­iales, dont bon nom­bre ont par­ticipé à l’ex­pan­sion de l’ac­tiv­ité bour­sière. Mais elles en sont encore le plus sou­vent à la pre­mière généra­tion, et le piège à MEP, mis en place en 1984, et qui tue en quinze ans com­mence seule­ment à mon­tr­er ses effets. Ses débuts sont élo­quents : de 1992 à 1996, 74 impor­tantes entre­pris­es famil­iales se sont ven­dues à des entre­pris­es étrangères.

M. B. : Pouvez-vous expliquer le mécanisme de ce “piège à MEP” ?

O. G. : Sans entr­er dans les détails tech­niques, je vous en indique les com­posantes et le résul­tat : la com­bi­nai­son des droits de suc­ces­sion, de l’ISF, de l’IRPP et la tax­a­tion des plus-val­ues sur actions non cotées dépassent en moyenne, avec un étale­ment sur quinze ans, 80 % de la valeur de l’entreprise.

Cette charge ne frappe ni les fil­iales de groupes ni les entre­pris­es étrangères implan­tées en France ; c’est ce qui a per­mis à un patron de MEP belge de déclar­er à son homo­logue français : “si je mets de côté chaque année les coûts fis­caux que j’é­conomise par rap­port à vous, au bout de quinze ans, j’au­rai de quoi vous racheter.”

Cette accu­mu­la­tion d’im­pôts frappe sélec­tive­ment d’une part les entre­pris­es prospères qui ont en Bourse un PER élevé, d’autre part les entre­pris­es durables dont le noy­au sta­ble d’ac­tion­naires per­son­nes physiques per­sévère courageuse­ment (alors qu’ils y échap­peraient en ven­dant leurs parts).

Per­sévérance qui dés­espère le min­istère des Finances qui déclarait récem­ment : “Il y a encore mal­heureuse­ment en France un sen­ti­ment d’échec à vouloir se sépar­er de son entreprise.”

M. B. : Ce propos du ministère traduit la conviction que le rachat par un grand groupe serait profitable à l’entreprise et à l’économie nationale.

O. G. : Hélas ! ce n’est pas démon­tré par les faits !

Le rachat par un groupe français dans une logique de diver­si­fi­ca­tion, avec une “ratio­nal­i­sa­tion” qui dimin­ue l’emploi et la valeur ajoutée, a générale­ment des résul­tats médiocres ; seuls réus­sis­sent ceux qui obéis­sent à une saine logique indus­trielle (Danone, Sanofi, Synthélabo…).

Les rachats par un groupe indus­triel étranger engen­drent presque tou­jours le trans­port hors de France des activ­ités pro­duc­tives, et tou­jours celui des cen­tres de déci­sions. L’al­lége­ment fis­cal qui en résulte pour l’a­cheteur per­met quelque­fois de réalis­er un pro­grès de com­péti­tiv­ité sig­ni­fi­catif et pro­gres­sive­ment toute la branche indus­trielle tombe sous con­trôle étranger (c’est l’his­toire de l’élec­tromé­nag­er blanc et brun).

Quant aux groupes pure­ment financiers, ils visent générale­ment une plus-val­ue à court terme, basée sur un gon­fle­ment des prof­its immé­di­ats par dégrais­sage des effec­tifs et con­trac­tion des pro­jets d’avenir.

Donc, atten­tion à ne pas cass­er le ressort spé­ci­fique qui fait marcher les MEP !

M. B. : Vous avez donc proposé une série de mesures fiscales touchant principalement les successions et l’ISF. Que proposez-vous pour faire accepter ces mesures par l’opinion publique française ? Les “grosses fortunes” y sont impopulaires et les cadres d’entreprises familiales sont souvent très critiques à l’égard de la caste des propriétaires.

O. G. : Je sais que la con­ver­gence entre défense du pat­ri­moine et réus­site de l’en­tre­prise est con­testée. Les Français perçoivent mal que l’es­sor des MEP sig­ni­fie crois­sance, emploi et vital­ité de nos régions.

Indice de parformance boursière des entreprises familiales
Source : ODDO GESTION — DATASTREAM.

Car, qui con­naît la réal­ité des faits ? moi-même j’en ai décou­vert une large part en réal­isant mon enquête. Qui mesure l’im­por­tance pour une entre­prise d’avoir un patron vis­cérale­ment attaché à elle et atten­tif au loin­tain avenir ? Qui est con­scient du dan­ger cou­ru par l’é­conomie nationale du fait du reflux de ses entre­pris­es familiales ?

Le pre­mier devoir de ceux qui savent est de dis­siper l’ig­no­rance. C’est ce à quoi s’emploie l’As­so­ci­a­tion syn­di­cale des moyennes et petites entre­pris­es pat­ri­mo­ni­ales (ASMEP) que je sou­tiens sans réserve.

Je suis cer­tain que par le canal de groupes de réflex­ion de grande qual­ité, comme l’É­cole de Paris et le Cen­tre de recherche en ges­tion de l’É­cole poly­tech­nique, le courant d’in­for­ma­tion va s’am­pli­fi­er. D’ores et déjà un intérêt réel s’est man­i­festé dans l’en­tourage du Pre­mier ministre.

Toutes les sphères influ­entes doivent être touchées dans les prochains mois, car les événe­ments vont vite.

M. B. : Pourquoi le management familial est-il plus performant ? 

O. G. : D’abord en rai­son de la ter­ri­ble con­cur­rence mon­di­ale qui a bal­ayé le népo­tisme et le lax­isme d’autre­fois : aujour­d’hui, seuls mon­tent au filet les héri­tiers bardés de diplômes et d’expérience.

Mais surtout par la ver­tu du dirigeant action­naire per­son­ne physique, engagé dans la durée par le coeur et par le fric. Grâce aus­si à la ver­tu du “noy­au sta­ble” de pou­voir famil­ial, qui apporte à l’en­tre­prise un avan­tage incom­pa­ra­ble : une sorte de micro­cli­mat financier et humain qui lui per­met de réa­gir aux pres­sions du marché, avec une marge de liber­té, de sou­p­lesse créa­tive, de pro­gres­siv­ité, qui est sur le long terme, plus rentable, plus créa­trice d’emplois, plus civique. La Bourse même cote plus haut les firmes à con­trôle famil­ial de toutes tailles.

La maxime clas­sique qui voy­ait un pro­grès dans la sépa­ra­tion entre Pro­priété et Direc­tion doit être par­tielle­ment ren­ver­sée ; car cette sépa­ra­tion entraîne des coûts et des dys­fonc­tions qui sont épargnés aux entre­pris­es pat­ri­mo­ni­ales, dirigées par ceux dont le pat­ri­moine est engagé dans l’entreprise.

Au total l’ef­fi­cac­ité du man­age­ment dépend certes des méth­odes, mais plus encore du sys­tème de pou­voir qui les met en oeu­vre : elle est max­i­male pour des action­naires per­son­nes physiques engagés dans la durée.

________________________________
1. L’
École de Paris 94, boule­vard du Mont­par­nasse, 75014 Paris.
2. Édi­tions Max­i­ma, octo­bre 1996, 209 pages, par Octave Gélin­ier, prési­dent d’hon­neur de la Cegos.
3. Le pied marin en affaires, C. Boquin, sémi­naire “Vie des Affaires”, avril 1993.
4. Nation­al Asso­ci­a­tion of Secu­ri­ties Deal­ers Auto­mat­ed Quo­ta­tion (New York).

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Webzine Fam­i­ly Businessrépondre
7 juillet 2016 à 17 h 50 min

Excel­lent arti­cle
Inter­ven­tion très intéres­sante sur la Réus­site des Entre­pris­es famil­iales. A lire d’urgence !

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