Électrolyseur PEM Elogen, en fin d’assemblage.

Elogen : l‘expert français de l’électrolyse

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°780 Décembre 2022
Par Jean-Baptiste CHOIMET (X01)

Elo­gen développe des tech­nolo­gies de pointe pour con­cevoir et pro­duire les élec­trol­y­seurs qui per­me­t­tront de pro­duire l’hydrogène vert néces­saire à la réus­site de la tran­si­tion énergé­tique et à la lutte con­tre le change­ment cli­ma­tique. Expli­ca­tions de son Directeur général, Jean-Bap­tiste Choimet (X01).

Au cœur de l’activité d’Elogen, on retrouve l’hydrogène vert. Dans ce cadre, quel est votre positionnement ? 

Elo­gen est une entre­prise de tech­nolo­gies. Nous sommes des con­cep­teurs et des fab­ri­cants d’électrolyseurs, des équipements qui per­me­t­tent à nos clients, à par­tir de l’eau et de l’électricité, de pro­duire de l’hydrogène et de l’oxygène. Nous sommes basés en Île-de-France, avec un ate­lier et un cen­tre de R&D aux Ulis. Nous dis­posons aus­si d’une fil­iale en Alle­magne à Cologne qui, notam­ment, tra­vaille sur des sujets de R&D avec nos parte­naires académiques et indus­triels alle­mands. L’entreprise existe depuis 25 ans. Elle a été fondée en 1997 sur le cam­pus de l’École poly­tech­nique. Au fil des années, son action­nar­i­at a évolué et, depuis octo­bre 2020, elle a été rachetée par le groupe GTT et a été rebap­tisée Elo­gen à cette occasion. 

Elo­gen dis­pose d’une expéri­ence de plus de 15 ans avec des élec­trol­y­seurs aujourd’hui en opéra­tion sur trois con­ti­nents : l’Europe, l’Asie et l’Amérique du Nord. Nous dis­posons d’une capac­ité de pro­duc­tion de 160 mégawatts, ce qui fait d’Elogen le pre­mier pro­duc­teur d’électrolyseurs en France. 

Concrètement, que proposez-vous ? 

Nous pro­posons à nos clients des machines clé-en-main qui vont leur per­me­t­tre de pro­duire de l’hydrogène pres­surisé à une trentaine de bars env­i­ron à par­tir d’eau et d’électricité haute ou moyenne ten­sion. Nous dis­posons au sein d’Elogen de toutes les com­pé­tences pour con­cevoir, dévelop­per, pro­duire, assem­bler, faire assem­bler et met­tre en opéra­tion les élec­trol­y­seurs sur les sites de nos clients. Aujourd’hui, nos machines se présen­tent sous la forme d’un ou plusieurs con­teneurs, et peu­vent pro­duire jusqu’à plusieurs tonnes d’hydrogène par jour. De telles instal­la­tions peu­vent, par exem­ple, ali­menter en hydrogène la flotte de bus d’une ville de taille moyenne. 

En par­al­lèle, nous avons la par­tic­u­lar­ité d’être le seul acteur en France à utilis­er la tech­nolo­gie dite « PEM », à mem­brane échangeuse de pro­tons. Cette tech­nolo­gie a l’avantage d’offrir des sys­tèmes très com­pacts et réac­t­ifs, ce qui est idéal pour fonc­tion­ner avec des éner­gies renou­ve­lables, par essence inter­mit­tentes. Ce sont aus­si des sys­tèmes qui con­ti­en­nent unique­ment de l’eau. Donc, aucun pro­duit chim­ique tel la potasse.

Nos ingénieurs R&D sont experts en élec­trochimie et dis­posent d’une très fine con­nais­sance des proces­sus de l’électrolyse aus­si bien sur un plan chim­ique que physique, ain­si que de com­pé­tences fortes en mod­éli­sa­tion et pro­to­ty­page. Ces exper­tis­es et savoir-faire nous per­me­t­tent de maîtris­er totale­ment la chaîne de valeur de pro­duc­tion de l’électrolyseur.

Il est aujourd’hui évident que l’hydrogène vert est un des leviers de la transition énergétique. Comment appréhendez-vous cette dimension et comment y contribuez-vous ? 

Aujourd’hui, plus que jamais, les indus­triels de tous secteurs ont besoin de verdir leurs proces­sus de pro­duc­tion. Dans le con­texte économique et géopoli­tique actuel se pose aus­si la ques­tion de l’autonomie et de la sou­veraineté énergique, ain­si que la néces­sité, à terme, de sub­stituer le gaz par un autre vecteur d’énergie, comme l’hydrogène vert. Le prin­ci­pal frein au développe­ment de l’hydrogène vert est actuelle­ment son coût, qui reste supérieur à celui des hydro­car­bu­res et de l’hydrogène « gris », pro­duit à par­tir de méthane. L’enjeu est donc d’être en mesure de pro­duire de la façon la plus effi­cace et mas­sive­ment de l’hydrogène vert, pour réduire les coûts. Cela passe, en aval, par une néces­saire struc­tura­tion du marché et la sécuri­sa­tion des débouchés com­mer­ci­aux avec des indus­triels prêts à inve­stir dans l’acquisition de ces équipements. Afin d’accompagner la struc­tura­tion de la fil­ière et du marché de l’hydrogène, l’Europe a mis en place un dis­posi­tif de finance­ment de pro­jets cou­vrant l’ensemble de la chaîne de valeur de l’hydrogène : le Pro­jet Impor­tant d’Intérêt Européen Com­mun (PIIEC). Notre pro­jet de gigafac­to­ry fait par­tie de la quin­zaine de pro­jets sélec­tion­nés par l’État pour faire par­tie de ce dis­posi­tif. Dans ce cadre, nous allons béné­fici­er d’un sou­tien de l’État français à hau­teur d’un mon­tant max­i­mal de sub­ven­tions de 86 mil­lions d’euros afin, d’une part, de ren­forcer nos capac­ités de R&D pour dévelop­per des stacks inno­vants d’électrolyseurs et leurs com­posants, et, d’autre part, con­stru­ire à Vendôme, dans le Loir-et-Cher, une usine per­me­t­tant la pro­duc­tion en masse de ces stacks.

Assemblage d’un stack Elogen.
Assem­blage d’un stack Elogen.

Quels sont les projets qui vous mobilisent actuellement ? 

Nos clients sont de divers­es natures. On retrou­ve des entités publiques qui souhait­ent se dot­er d’une unité de pro­duc­tion et de dis­tri­b­u­tion d’hydrogène essen­tielle­ment pour des appli­ca­tions de mobil­ité (camions, bus, util­i­taires). Nous avons égale­ment des clients indus­triels qui souhait­ent met­tre en place des pilotes afin de véri­fi­er la fais­abil­ité de la pro­duc­tion d’hydrogène vert pour leurs besoins. Au-delà, nous pou­vons aus­si apporter des répons­es pour des appli­ca­tions par­ti­c­ulières. Prenons un exem­ple intéres­sant : dans le cadre de l’électrolyse, quand nous cas­sons la molécule d’eau, nous récupérons égale­ment de l’oxygène qui peut être util­isé dans les sous-marins pour per­me­t­tre à l’équipage de respir­er en plongée. C’est une appli­ca­tion d’intérêt stratégique, pro­pre à Elogen. 

En par­al­lèle, nous tra­vail­lons sur des sys­tèmes d’électrolyse de plus grande taille pour nos clients indus­triels, en rem­plaçant les con­tain­ers par des bâti­ments. Ce sont des sys­tèmes qui pour­ront être util­isés par les indus­triels de l’énergie et du gaz, ou encore des sidérur­gistes qui pour­ront intro­duire de l’hydrogène vert dans leurs proces­sus en rem­place­ment des hydro­car­bu­res. Nous dévelop­pons actuelle­ment de tels pro­duits en parte­nar­i­ats avec des acteurs « EPC » (engi­neer­ing, pro­cure­ment, construction).

Sur le plan R&D, quels sont vos enjeux ? 

Notre pre­mier défi est de par­venir à réduire le coût de nos machines en trou­vant des solu­tions tech­niques astu­cieuses et plus com­péti­tives. Pour ce faire, nous dévelop­pons des stacks (des réac­teurs d’électrolyseurs) plus gros afin d’équiper des élec­trol­y­seurs de plus grande taille. En par­al­lèle, nous tra­vail­lons sur les matéri­aux afin d’améliorer la mem­brane qui est inté­grée dans le stack, tou­jours en priv­ilé­giant les alter­na­tives les plus per­for­mantes et les moins coûteuses.

Notre sec­ond enjeu est de tra­vailler sur la réduc­tion de la con­som­ma­tion élec­trique et énergé­tique des élec­trol­y­seurs. En effet, la part du coût de l’énergie est la plus impor­tante dans le coût final de l’hydrogène vert.

Sur l’ensemble de ces sujets, nous avons noué des parte­nar­i­ats avec des indus­triels ain­si qu’avec l’Université Paris-Saclay. 

Comment vous projetez-vous sur ce marché qui a vocation à se développer ?

La pub­li­ca­tion de plans hydrogène à l’échelle des pays et de l’Europe dans le cadre du Plan de Relance a créé un engoue­ment extra­or­di­naire pour l’hydrogène de la part des investis­seurs, mais aus­si des four­nisseurs de tech­nolo­gies qui se sont posi­tion­nés sur le seg­ment de l’électrolyse. Aujourd’hui, nous évolu­ons dans un envi­ron­nement extrême­ment com­péti­tif même si la fil­ière est encore en cours de structuration. 

Pour Elo­gen, l’enjeu est de con­tin­uer à tra­vailler dans la sérénité et de don­ner les moyens à nos ingénieurs R&D de dévelop­per des pro­duits les plus com­péti­tifs et effi­caces pos­si­ble de manière à nous dif­férenci­er au tra­vers d’une offre fiable et per­for­mante. Au moment de notre arrivée au sein du groupe GTT, nous étions une trentaine de per­son­nes. Nous devri­ons être une cen­taine dans les prochains mois. Nous recru­tons sur de nom­breux métiers : la R&D, le bureau d’études, les achats, la ges­tion pro­jet, l’industrialisation… Si nous priv­ilé­gions actuelle­ment le recrute­ment de pro­fils expéri­men­tés afin de struc­tur­er l’entreprise et son activ­ité, nous com­mençons égale­ment à rechercher des pro­fils et tal­ents juniors qui seront les experts de demain. 

Notre objec­tif est de croître pour qu’Elogen soit recon­nue comme un leader à l’échelle mon­di­ale. C’est une oppor­tu­nité de car­rière pas­sion­nante pour de jeunes diplômés de l’École qui ont une véri­ta­ble appé­tence pour la tech­nique et la technologie.


En bref

  • Plus de 15 ans d’expérience dans l’électrolyse par la tech­nolo­gie PEM (ou mem­brane échangeuse de protons)
  • Des élec­trol­y­seurs en opéra­tion en Europe, en Asie et aux États-Unis
  • Plus de 70 col­lab­o­ra­teurs haute­ment qualifiés
  • Une capac­ité de pro­duc­tion annuelle jusqu’à 160 MW, supérieure à 1 GW en 2025 (avec un pro­jet de « gigafac­to­ry » à Vendôme, en Région Cen­tre-Val de Loire)
  • Une prise de com­man­des de 6,2 mil­lions d’euros en 2021
  • Un chiffre d’affaires de 5,6 mil­lions d’euros en 2021

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