Luxia Scientific : Diagnostic de la microbiote

Diagnostiquez votre microbiote pour rester en bonne santé !

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°783 Mars 2023
Par Alessandra Cervino

Alessan­dra Cervi­no, fon­da­trice et CEO de Lux­ia Sci­en­tif­ic, nous présente son entre­prise qui a dévelop­pé et pro­pose des tests de diag­nos­tic inno­vant ciblant le micro­biote. Dans cet inter­view, elle revient sur la créa­tion de Lux­ia Sci­en­tif­ic, son posi­tion­nement et ses per­spec­tives de développe­ment alors que l’intérêt crois­sant du grand pub­lic pour le micro­biote ne flé­chit pas.

Au cours des dernières années, il y a eu un regain d’intérêt pour le microbiote intestinal. Pouvez-vous nous en dire plus ? Comment expliquez-vous ce phénomène ?

L’étude des bac­téries intesti­nales remonte à plus d’un siè­cle avec notam­ment les travaux d’un élève de Pas­teur qui a étudié les bien­faits des fer­ments lac­tiques. Toute­fois, la grande révo­lu­tion autour du micro­biote intesti­nal est plus récente. Elle remonte à une dizaine d’années. Elle a été doc­u­men­tée par les travaux de plusieurs chercheurs dans le monde qui ont décou­vert et démon­tré que les bac­téries intesti­nales étaient non seule­ment beau­coup plus nom­breuses que ce que l’on pen­sait jusque-là, mais qu’elles avaient surtout un rôle et des béné­fices majeurs pour la san­té humaine. C’est notam­ment grâce aux dernières évo­lu­tions tech­nologiques en matière de séquençage géné­tique que cette décou­verte a été possible.

Aujourd’hui, nous savons donc que le micro­biote est diver­si­fié. Il com­prend donc une grande var­iété de bac­téries qui assurent des fonc­tions essen­tielles afin que notre corps soit en bonne san­té. En effet, ces bac­téries nous pro­tè­gent à tra­vers leur fonc­tion bar­rière con­tre les pathogènes extérieurs, la pro­duc­tion de métabo­lites et la syn­thèse de cer­taines vit­a­mines, ou encore via l’éducation de notre sys­tème immu­ni­taire. Elles influ­en­cent égale­ment nos humeurs et nos émo­tions. C’est pour l’ensemble de ces raisons qu’on con­sid­ère aujourd’hui, et à juste titre, que le micro­biote intesti­nal est un organe à part entière.

En parallèle, au cœur de Luxia Scientific, on retrouve l’ambition d’améliorer le bien-être et la santé grâce à des tests innovants de diagnostic ciblant le microbiote. Quelle a été la genèse de ce positionnement ?

Après ma thèse en géné­tique humaine, j’ai passé de nom­breuses années dans l’industrie phar­ma­ceu­tique à chercher les poten­tiels gènes liés à l’obésité. Les résul­tats que j’ai obtenu alors étaient assez déce­vants. La géné­tique dite de « l’hôte » n’avait que peu de respon­s­abil­ité dans le risque de dévelop­per ou non l’obésité. Approchée par la société Enterome qui mène des travaux ultra-inno­vants dans ce domaine, j’ai pu observ­er que le micro­biote intesti­nal des per­son­nes obès­es était totale­ment différent.
Cette décou­verte a été une véri­ta­ble révéla­tion. Le sig­nal biologique de l’obésité ne se trou­ve pas dans nos gènes, mais bien dans les gènes des bac­téries intestinales.

Le micro­biote intesti­nal est une source très riche de décou­vertes sci­en­tifiques et médi­cales qui va nous per­me­t­tre d’améliorer la prise en charge des patients en dévelop­pant une médecine beau­coup plus per­son­nal­isée. Depuis, des travaux de recherche sont en cours dans le monde entier. Il me sem­ble, par ailleurs, évi­dent que nous allons voir de plus en plus de nou­veaux médica­ments et diag­nos­tic, qui s’appuient sur le micro­biote, se dévelop­per sur le court et moyen ter­mes. Actuelle­ment, la plu­part des entre­pris­es qui se sont intéressées au micro­biote se sont plutôt posi­tion­nées sur l’exploitation thérapeu­tique, un axe qui attire plus par­ti­c­ulière­ment les investis­seurs pour des raisons finan­cières évidentes.

Pour ma part, en créant Lux­ia Sci­en­tif­ic, j’ai fait le choix de me con­cen­tr­er sur le développe­ment diag­nos­tic qui est au cœur de mon exper­tise et savoir-faire sci­en­tifique. Et parce que le dérè­gle­ment du micro­biote est plus sou­vent la con­séquence et non la cause des mal­adies, il m’a sem­blé plus per­ti­nent de me con­cen­tr­er sur le développe­ment de diagnostic !
Aujourd’hui, Lux­ia Sci­en­tif­ic est donc une entre­prise de diag­nos­tic qui développe exclu­sive­ment des diag­nos­tics basés sur la métagénomique, donc le séquençage géné­tique des micro-organ­ismes dans un milieu par­ti­c­uli­er. Il s’agit, par ailleurs, d’une toute nou­velle généra­tion de diagnostics.

Dans cette continuité, vous proposez donc deux tests de diagnostic qui permettent de diagnostiquer de façon fiable la perte de diversité et le déséquilibre du microbiote. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le micro­biote intesti­nal est un acteur san­té et bien-être à la fois ce qui remet en ques­tion les bar­rières régle­men­taires et juridiques dans ces deux secteurs. À par­tir de là, Lux­ia Sci­en­tif­ic a fait le choix de dévelop­per des diag­nos­tics dits in vit­ro (DMDIV) pour diag­nos­ti­quer le déséquili­bre du micro­biote intesti­nal ou la vagi­nose bac­téri­enne. Ce posi­tion­nement dans le domaine de la san­té implique donc des val­i­da­tions ana­ly­tiques et clin­iques qui per­me­t­tent de garan­tir la qual­ité et la fia­bil­ité des résul­tats pour le patient.

Aujourd’hui, quels sont vos enjeux ? Quels sont les sujets qui vous mobilisent ?

Le grand pub­lic est de plus en plus éduqué et au fait de ce sujet du micro­biote notam­ment grâce au tra­vail réal­isé par de nom­breux chercheurs et jour­nal­istes qui l’ont relayé dans les médias. Le grand pub­lic est aus­si con­scient de l’importance d’avoir un bon micro­biote alors que de plus en plus d’hommes et de femmes ont la volon­té forte d’être acteurs de leur pro­pre bien-être et santé.
Lux­ia Sci­en­tif­ic s’inscrit totale­ment dans cette démarche en dévelop­pant des out­ils de diag­nos­tic sim­ples à utilis­er chez soi et qui per­me­t­tent donc à cha­cun et cha­cune d’être respon­s­able de sa san­té. Ces diag­nos­tics per­me­t­tent de sen­si­bilis­er les per­son­nes au fait qu’elles ont une dys­biose, c’est-à-dire un déré­gle­ment de leur micro­biote. Le cas échéant elles peu­vent y remédi­er grâce à la mise en place de pro­grammes nutri­tion­nels spé­ci­fiques si cela con­cerne le micro­biote intesti­nal ou la prise de traite­ments médica­menteux dans le cas de vagi­nose bactérienne.

Toute­fois, il per­siste un impor­tant enjeu de sen­si­bil­i­sa­tion et de com­mu­ni­ca­tion auprès des pro­fes­sion­nels de san­té sur ces sujets. En par­al­lèle, actuelle­ment les diag­nos­tics ne sont pas rem­boursés ce qui com­plex­i­fie et lim­ite leur util­i­sa­tion. Par ailleurs, il s’agit d’un proces­sus qui reste long et lent. Nous restons toute­fois opti­mistes. Récem­ment, le gou­verne­ment a annon­cé la mise en place de con­sul­ta­tions de préven­tion gra­tu­ites à trois moments clés de nos vies. Ces ini­tia­tives visant à pro­mou­voir la préven­tion per­me­t­tront à terme de con­stru­ire un meilleur accom­pa­g­ne­ment de la préven­tion avec poten­tielle­ment l’intégration des analy­ses du micro­biote dans ces con­sul­ta­tion à but préventif.

Qu’en est-il de vos perspectives de développement ? Quelles sont les prochaines étapes pour Luxia Scientific ?

En trois ans, Lux­ia Sci­en­tif­ic a réus­si à dévelop­per deux tests inno­vants pour diag­nos­ti­quer la perte de la diver­sité bac­téri­enne au niveau des intestins et de la vagi­nose bac­téri­enne. Ces tests sont des­tinés aux lab­o­ra­toires de biolo­gie médi­cale que nous for­mons au séquençage métagénomique. Les tests sont com­mer­cial­isés en France par Syn­Lab, un acteur majeur du diag­nos­tic en Europe. Sur les prochaines années, nous ambi­tion­nons de ren­forcer notre présence en France, de dévelop­per notre offre en Europe et dans le reste du monde.

Plus par­ti­c­ulière­ment, en 2023, nous cher­chons aus­si à lever et mobilis­er de nou­veaux fonds afin de men­er de nou­velles études clin­iques en vue d’obtenir à terme le rem­bourse­ment de nos tests de diag­nos­tic, mais aus­si afin de dévelop­per de nou­veaux tests en 2026.

Et pour conclure ?

Avoir un micro­biote sain, c’est extrême­ment impor­tant pour la san­té. Il est donc essen­tiel que les autorités se penchent sur le rem­bourse­ment de ces diag­nos­tics qui per­me­t­tent de détecter un déséquili­bre à ce niveau. C’est une prob­lé­ma­tique de fond en France, car, au cours des dernières années, très peu de diag­nos­tics ont obtenu le rem­bourse­ment sur le ter­ri­toire nation­al. Au-delà, cette ques­tion du rem­bourse­ment impacte aus­si la capac­ité de notre pays à créer les con­di­tions qui per­me­t­tront à une médecine plus per­son­nal­isée de se développer.

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