Daniel Tenenbaum

Daniel Tenenbaum (59), l’énergie au service de l’innovation

Dossier : TrajectoiresMagazine N°759 Novembre 2020
Par Jean-Paul TROADEC (67)

Daniel Tenen­baum, ingé­nieur géné­ral de l’armement, est décé­dé en août 2020. Sa car­rière a été mar­quée par son action à la Direc­tion géné­rale de l’aviation civile (DGAC), qu’il a diri­gée pen­dant huit ans.

Daniel Tenen­baum est né à Paris le 28 juin 1937 de parents venus de Pologne dans les années 30. Réfu­gié pen­dant la guerre à Cagnes-sur-Mer, il ne fut sco­la­ri­sé qu’à l’âge de 8 ans. Entré à Poly­tech­nique en 1959 après une pré­pa au lycée Char­le­magne, une ren­contre avec un ingé­nieur de l’air lui fait choi­sir ce corps d’ingénieurs à la sor­tie de l’X. Il reçoit en 1964 une pre­mière affec­ta­tion au Centre d’essais en vol de Bré­ti­gny, alors char­gé d’essais de l’hélicoptère Alouette III, ce dont il res­sen­tait une grande fier­té. Tout natu­rel­le­ment, il devint en 1966 char­gé des héli­co­ptères au ser­vice tech­nique de l’aéronautique, puis de la coopé­ra­tion fran­co-bri­tan­nique à la Direc­tion des affaires inter­na­tio­nales (1970).

L’expérience ministérielle

En 1973, nom­mé conseiller auprès d’Yves Gué­na, ministre des Trans­ports, il suit les pro­grammes Concorde et Air­bus A300. Il occupe ensuite des fonc­tions de conseiller tech­nique auprès du délé­gué géné­ral à l’armement et de deux ministres du Com­merce exté­rieur, expé­riences essen­tielles aux fonc­tions qui lui seront confiées en 1980 à la tête de la Direc­tion des pro­grammes aéro­nau­tiques civils de la DGAC. 

À la tête de la DGAC

Après avoir œuvré au lan­ce­ment du pro­gramme ATR, il prend en 1982 la tête de la DGAC, direc­tion char­gée de l’action de l’État dans le domaine de l’aviation civile : contrôle du tra­fic aérien, tutelle du trans­port aérien en matière éco­no­mique et droits de tra­fic, tutelle des aéro­ports, contrôle tech­nique des aéro­nefs, for­ma­tion des pilotes, rela­tions inter­na­tio­nales… Il sau­ra y faire la preuve de ses grandes qua­li­tés de dyna­misme, de diplo­ma­tie et de connais­sance des rouages de l’administration fran­çaise, et cela pen­dant huit ans et sous six ministres successifs !

Dans ce poste, il joue­ra un rôle déter­mi­nant dans le lan­ce­ment du pro­gramme A320 qui connaî­tra un suc­cès com­mer­cial extra­or­di­naire. Il y condui­ra, aux côtés des dif­fé­rents ministres des Trans­ports, les négo­cia­tions à Bruxelles et Luxem­bourg qui ont abou­ti en 1987 à la pre­mière étape de libé­ra­li­sa­tion du trans­port aérien européen.

Priorité à la sécurité aérienne

Comme direc­teur géné­ral de l’aviation civile, Daniel Tenen­baum fai­sait de la sécu­ri­té du trans­port aérien sa pré­oc­cu­pa­tion majeure.

Ain­si, le 1er sep­tembre 1983, un avion de ligne coréen éga­ré au-des­sus de la Sibé­rie fut abat­tu sans som­ma­tion par la chasse sovié­tique sur un soup­çon d’espionnage. L’émotion mon­diale sus­ci­tée par la mort des 269 occu­pants de l’avion condui­sit l’Organisation de l’aviation inter­na­tio­nale à vou­loir inter­dire le recours à la force des États vis-à-vis des avions civils. La modi­fi­ca­tion de la conven­tion inter­na­tio­nale cor­res­pon­dante, pro­po­sée par la France à l’initiative de Daniel Tenen­baum, fut adop­tée à l’unanimité.

Le 26 juin 1988, un A320 d’Air France s’écrasa sur l’aérodrome d’Habsheim, à la suite d’une manœuvre irres­pon­sable de l’équipage. L’avion venant d’être mis en ser­vice, il était essen­tiel de s’assurer qu’il ne pré­sen­tait pas de défaut met­tant en cause sa sécu­ri­té. Daniel Tenen­baum trans­por­ta les enre­gis­treurs de vol vers la région pari­sienne afin d’y être décryp­tés, à la demande du pro­cu­reur char­gé de l’enquête. Les défen­seurs des pilotes l’accusèrent de les avoir fait tra­fi­quer afin de sau­ve­gar­der les inté­rêts d’Airbus. Daniel Tenen­baum obtint leur condam­na­tion pour dif­fa­ma­tion, mais cette accu­sa­tion le mar­qua profondément.

Des pistes aux autoroutes

Il quit­ta la DGAC en 1990 pour prendre la pré­si­dence de la Sanef où il fera encore preuve de ses qua­li­tés d’innovation, en met­tant en place le télé­péage et la modu­la­tion des tarifs et des vitesses en période de pointe.

En 1993, il quit­ta son poste à la suite d’un acci­dent vas­cu­laire céré­bral et pour­sui­vit néan­moins une acti­vi­té pro­fes­sion­nelle adap­tée à son han­di­cap au sein de la DGAC.

Jusqu’à son décès, il sera l’objet des soins dévoués et atten­tifs de son épouse Fran­çoise et de sa famille.

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