Assemblée générale en mars 2022. De gauche à droite, ligne du bas : Marion Roger (X10), Philippe Cherabier (X14), Enzo Sèle (X21), Axel Garreau (X20), Rémi de Vergnette (X20), ligne médiane : Maxime Ropars (X21), Pauline Amrouche (X21), Victor Chabirand (X21), Claire Bach (X17), Quentin Montes (X20), ligne du haut : Antoine Bonnet (X21), Elie Prost (X18), Camille Ghibaudo (X06), Florian Tedeschi (X06), Quentin Garnier.

L’enfant@l’hôpital et Polytechnique : une merveilleuse aventure humaine

Dossier : Environnement et sociétéMagazine N°786 Juin 2023
Par Claire BACH (X17)
Par Camille GHIBAUDO (X06)
Par Juliette LYNCH (X18)

Chaque année, depuis déjà vingt-cinq ans, des élèves poly­tech­ni­ciens réa­lisent leur stage de for­ma­tion humaine civile à L’enfant@l’hôpital. Ils étaient deux en 1998, ils sont au nombre de cinq aujourd’hui. Nous sommes trois à prendre la plume ici pour vous par­ler de notre enga­ge­ment, de notre impli­ca­tion auprès de l’association L’enfant@l’hôpital, et de l’épanouissement qu’ils nous procurent.

L’association existe depuis plus de trente-cinq ans et se donne pour mis­sion d’accompagner les enfants en situa­tion de han­di­cap ou malades, à tra­vers toute la France, pour les rame­ner à la lec­ture et à la culture.

Les missions de L’enfant@l’hôpital

L’accompagnement qu’elle pro­pose repose sur des ate­liers conçus sur-mesure en fonc­tion de l’âge, de la patho­lo­gie et du niveau cog­ni­tif de chaque enfant. Lors de ces ate­liers, les enfants accèdent ensemble à Koli­bri, une appli­ca­tion numé­rique conçue pour s’adapter à toutes les formes de han­di­caps. Via Koli­bri, les enfants suivent chaque semaine les aven­tures de voya­geurs soli­daires et cha­leu­reux aux quatre coins du monde. Lec­ture, écri­ture, géo­gra­phie, chants, gastronomie…

Via Kolibri, les enfants suivent chaque semaine les aventures de voyageurs solidaires et chaleureux aux quatre coins du monde.”

Chaque car­net est pré­texte à la décou­verte et à l’apprentissage : en étu­diant les pays tra­ver­sés, en cal­cu­lant le nombre de kilo­mètres par­cou­rus, en cui­si­nant une recette, en écri­vant une lettre au voya­geur. Les enfants reçoivent les récits heb­do­ma­daires et peuvent direc­te­ment poser des ques­tions à leurs voya­geurs qui y répondent pour la séance suivante.

L’association est présente dans de nombreuses régions et est gérée par des délégations régionales : Paris intra-muros, Île-de-France, Côte d’Or, Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Grand Est et Loire, Limousin.
L’association est pré­sente dans de nom­breuses régions et est gérée par des délé­ga­tions régio­nales : Paris intra-muros, Île-de-France, Côte d’Or, Occi­ta­nie, Pro­vence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Grand Est et Loire, Limousin.

Le rôle des animateurs

Les ani­ma­teurs, poly­tech­ni­ciens ou issus d’autres for­ma­tions, se rendent dans les éta­blis­se­ments par­te­naires pour faire le lien entre les voya­geurs et les enfants. Ils sont les véri­tables mes­sa­gers du voya­geur sur le ter­rain. Ils tra­versent la France et les huit délé­ga­tions régio­nales de l’association pour décou­vrir les récits de voyage, dis­tri­buer la parole, ima­gi­ner des acti­vi­tés annexes. Bref : créer, inven­ter, renou­ve­ler et sur­prendre les enfants et leur redon­ner l’envie d’apprendre et de découvrir.

Une association en constante évolution

Depuis sa créa­tion il y a trente-sept ans, l’association ne s’est jamais repo­sée sur un modèle de fonc­tion­ne­ment acquis et immuable. Au contraire, elle a tou­jours cher­ché à s’adapter aux besoins d’une socié­té en constante évo­lu­tion et elle ques­tionne en per­ma­nence son sens, sa popu­la­tion cible, les outils uti­li­sés ou son péri­mètre d’intervention.

En par­ti­cu­lier, elle a fon­dé son déve­lop­pe­ment sur l’observation de ses béné­fi­ciaires et sur l’adaptation la plus fine et la plus souple pos­sible à leurs besoins. Sa longue expé­rience lui offre ain­si suf­fi­sam­ment de recul pour obser­ver plu­sieurs évo­lu­tions. Celles-ci consti­tuent des défis à rele­ver dans les toutes pro­chaines années pour une amé­lio­ra­tion conti­nue et active de sa méthode péda­go­gique : l’adaptation au rac­cour­cis­se­ment des séjours hos­pi­ta­liers, l’accompagnement des enfants souf­frants de troubles dys (troubles d’apprentis­sages cog­ni­tifs) dont le nombre croît d’année en année, et la com­mu­ni­ca­tion avec les enfants atteints de grands handicaps.

Kolibri : une plateforme interactive

Aux débuts de l’association, le logi­ciel outil, Kana­ri, ne pos­sé­dait que très peu de fonc­tion­na­li­tés. En 2005, un nou­vel outil a été déve­lop­pé en interne : Koli­bri qui per­met d’éditer des car­nets de bord avec images, vidéos, d’établir une com­mu­ni­ca­tion entre les enfants et les voya­geurs par mes­sa­ge­rie, ain­si que de créer des quizz direc­te­ment sur la pla­te­forme. En 2019, face à la len­teur de Koli­bri, l’association s’est lan­cée dans la refonte com­plète de l’outil avec l’aide en par­tie en mécé­nat de com­pé­tences de l’entreprise digi­tale Tymate. 

Un long tra­vail avec des anciens ani­ma­teurs et des anciens voya­geurs a per­mis d’établir le nou­veau cahier des charges du logi­ciel. Ce tra­vail de remise à niveau per­ma­nent, certes coû­teux en temps et en argent, est indis­pen­sable pour que l’association conti­nue d’attirer les voya­geurs et faci­lite le tra­vail des ani­ma­teurs au quo­ti­dien. Depuis 2019, la ges­tion de Koli­bri a été aus­si confiée à Tymate : elle est désor­mais entre les mains expertes de cette agence de déve­lop­pe­ment web, qui adapte le site aux attentes des jeunes sui­vant un cahier des charges que l’association lui trans­met. Le mécé­nat de com­pé­tences per­met à l’association de réa­li­ser ces évo­lu­tions à moindre coût.

Dorian et Claire lors d’un atelier en décembre 2017.
Dorian et Claire lors d’un ate­lier en décembre 2017.

Les quatre-vingt-un ateliers de l’association à travers la France

L’association est pré­sente dans de nom­breuses régions et est gérée par des délé­ga­tions régio­nales : Paris intra-muros, Île-de-France, Côte d’Or, Occi­ta­nie, Pro­vence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Grand Est et Loire, Limou­sin. Chaque délé­ga­tion est en contact direct avec les centres de son ter­ri­toire et s’interroge sur la per­ti­nence des ate­liers. Ces réflexions conduisent le plus sou­vent à la recon­duc­tion et à la créa­tion d’ateliers, et par­fois à leur fer­me­ture, selon les besoins des enfants. La par­ti­cu­la­ri­té de l’association est de pri­vi­lé­gier les lieux dif­fi­ciles d’accès dans les­quels peu d’associations inter­viennent, et où l’isolement géo­gra­phique s’ajoute à l’isolement cau­sé par la mala­die ou le handicap.

Une journée type en période de formation humaine civile

Chaque jour, les ani­ma­teurs se rendent dans les dif­fé­rents éta­blis­se­ments. En arri­vant, ils font un point avec l’enseignant de la classe ou l’équipe médi­cale pour défi­nir le pro­gramme de l’atelier. Les ate­liers durent entre 45 min et 1 h.

L’atelier démarre par la lec­ture du car­net de voyage de la semaine par les enfants. Des acti­vi­tés sont orga­ni­sées en lien avec le conte­nu du car­net : ate­lier de cui­sine, sui­vi sur une map­pe­monde, recherche sur des ins­tru­ments de musique locaux… Chaque semaine, les enfants découvrent les réponses aux ques­tions posées aux voya­geurs lors de l’atelier pré­cé­dent. Cer­tains ate­liers revêtent une impor­tance par­ti­cu­lière : les visites de départ et de retour des voya­geurs sui­vis. Lors de ces visites, les voya­geurs inter­agissent direc­te­ment en pré­sen­tiel avec les enfants. Ils montrent le conte­nu de leurs bagages avant leur départ, racontent des anec­dotes sur leur voyage à leur retour, expliquent com­ment les inter­ac­tions avec les enfants ont influen­cé leur voyage. Ce sont des moments très riches durant les­quels les enfants se sentent privilégiés.

« Les six mois passés à L’enfant@l’hôpital sont riches d’enseignement pour les élèves de Polytechnique. »

Le soir, les ani­ma­teurs poly­tech­ni­ciens rentrent à l’appartement qu’ils par­tagent en colo­ca­tion à Paris. Ils échangent autour de leur jour­née et rédigent sur Koli­bri leurs comptes-ren­dus d’ateliers pour infor­mer l’équipe de l’association. Chaque semaine, des points de sui­vi sont éga­le­ment orga­ni­sés avec l’équipe de l’association et avec les délé­gués régio­naux, pour s’assurer de la cohé­rence des inter­ven­tions et du bien-être phy­sique et psy­cho­lo­gique des ani­ma­teurs. Les ser­vices d’une psy­cho­logue par­te­naire de l’association sont éga­le­ment pro­po­sés aux ani­ma­teurs en cas de besoin.

Les six mois pas­sés à L’enfant@l’hôpital sont riches d’enseignement pour les élèves de Poly­tech­nique. Ils sont sur­tout l’occasion de rela­ti­vi­ser les évé­ne­ments, mesu­rer sa chance et prendre conscience des choses qui comptent vraiment.

Nous fai­sons le vœu que ce par­te­na­riat fruc­tueux, tant pour les élèves poly­tech­ni­ciens que pour l’association, dure­ra encore long­temps et fera la une de La J&R 2048 à l’occasion de ses 50 ans !

Cinq ans, dix ans, quinze ans après, qu’est-ce que signifie notre soutien à l’association L’enfant@l’hôpital ?

Aujourd’hui notre enga­ge­ment, bien que moins opé­ra­tion­nel, consiste à amé­lio­rer la visi­bi­li­té de l’association.

La sor­tie de la crise sani­taire consti­tue un tour­nant pour de nom­breuses asso­cia­tions, qui ont vu leurs bud­gets dras­ti­que­ment réduits par les coupes de dons de la part des entre­prises, par­te­naires et par­ti­cu­liers. Au moment où L’enfant@l’hôpital pour­suit son adap­ta­tion aux outils numé­riques et aux dif­fé­rents pro­fils des publics accom­pa­gnés, en réin­ven­tant ses méthodes pour les faire col­ler le plus pos­sible aux attentes des nou­velles géné­ra­tions, nous inter­ve­nons en sup­port pour sus­ci­ter l’intérêt de mécènes poten­tiels. À tra­vers les fon­da­tions d’entre­prise ou les réponses à des appels à pro­jet, nous appor­tons notre contribution.

Nous cher­chons éga­le­ment à tis­ser un réseau sur l’ensemble du ter­ri­toire, en vue notam­ment de ren­for­cer les délé­ga­tions régio­nales, qui sont les ambas­sa­deurs auprès des éta­blis­se­ments comme les IME (Ins­ti­tuts médi­co­édu­ca­tifs), les IEM (Ins­ti­tuts d’éducation motrice), les ser­vices hos­pi­ta­liers et les éta­blis­se­ments scolaires.

Enfin, nous inter­ve­nons dans une visée fédé­ra­trice, pour ravi­ver et main­te­nir le réseau des anciens ani­ma­teurs, tout en cher­chant à trans­mettre nos expé­riences aux nou­velles géné­ra­tions d’élèves de l’X.

Vous sou­hai­tez en savoir plus sur l’association ou savoir com­ment nous aider ? Contac­tez Claire, Camille ou Juliette ou ren­dez-vous sur le site : www.enfant-hopital.org


En illus­tra­tion : Assem­blée géné­rale de L’enfant@l’hôpital en mars 2022. De gauche à droite, ligne du bas : Marion Roger (X10), Phi­lippe Che­ra­bier (X14), Enzo Sèle (X21), Axel Gar­reau (X20), Rémi de Ver­gnette (X20), ligne médiane : Maxime Ropars (X21), Pau­line Amrouche (X21), Vic­tor Cha­bi­rand (X21), Claire Bach (X17), Quen­tin Montes (X20), ligne du haut : Antoine Bon­net (X21), Elie Prost (X18), Camille Ghi­bau­do (X06), Flo­rian Tedes­chi (X06), Quen­tin Garnier.


Claire (X17)
« Le besoin de voyager des enfants m’a permis de voyager tout en restant en Suède ! »

Une fois ren­trée dans le monde de L’enfant@l’hôpital pen­dant la période de for­ma­tion humaine civile, c’est dif­fi­cile d’en sor­tir. Alors bien sûr, une fois sur le cam­pus, le temps se fait plus rare entre les cours, le sport et les binets. J’ai sui­vi de loin leurs acti­vi­tés. Puis la Covid est arri­vée et, en consé­quence, les dif­fi­cul­tés ren­con­trées par l’association pour recru­ter : com­ment per­mettre aux enfants de suivre des voya­geurs qui par­courent le monde quand les fron­tières sont fer­mées ? Pour moi, cette période était syno­nyme de départ en 4A à Stock­holm. J’ai pro­po­sé à l’association d’être une voya­geuse – un peu sta­tique certes, mais voya­geuse quand même – si les dif­fi­cul­tés de recru­te­ment se poursuivaient.

Voi­là com­ment pen­dant un an, j’ai écrit chaque semaine un article sur ma vie en Suède : un moteur incroyable pour m’encourager à explo­rer plus, faire des ren­contres ou des acti­vi­tés folles. Un bon pré­texte éga­le­ment pour inter­ro­ger mes amis ren­con­trés sur place sur leur culture. Le besoin de voya­ger des enfants m’a per­mis de voya­ger tout en res­tant en Suède ! Une fois ren­trée en France, j’ai été élue vice-pré­si­dente de l’association en 2022 pour conti­nuer à la soutenir !


Camille (X06)
« L’enfant@l’hôpital, c’est avant tout une aventure humaine. »

L’enfant@l’hôpital, c’est avant tout une aven­ture humaine : avec les enfants et les ado­les­cents certes, mais aus­si leurs parents, les équipes médi­cales, les ensei­gnants, l’équipe de l’association et nos cama­rades de for­ma­tion. J’ai vécu des moments très dif­fi­ciles, en ser­vice d’hématologie à Tou­louse notam­ment, où j’ai été confron­tée à trois décès. Tra­ver­ser cela avec l’enseignante du ser­vice, en par­ler avec mes cama­rades de for­ma­tion qui avaient par­fois tra­ver­sé des épreuves simi­laires, et en par­ler aus­si avec l’équipe de l’association lors de nos réunions heb­do­ma­daires, a créé des liens indéfectibles.

Seize ans après, je revois régu­liè­re­ment l’enseignante de Tou­louse, qui a tis­sé de forts liens avec mes enfants quand j’habitais dans cette ville. Nous nous sommes à nou­veau retrou­vées pour un déjeu­ner avec les quatre sta­giaires et l’ancienne secré­taire géné­rale de l’association en jan­vier 2023. Et l’assemblée géné­rale de l’association est tou­jours l’occasion de retrou­vailles. C’est donc natu­rel­le­ment que j’ai dépo­sé cette année un dos­sier auprès de la fon­da­tion de mon employeur pour accom­pa­gner un pro­jet de l’association.


Juliette (X18)
« J’ai appris à me dépasser, à vaincre mes peurs, à captiver un auditoire sur des sujets que je maîtrisais à peine. »

L’expérience avec L’enfant@l’hôpital ne se limite pas à six mois de période de for­ma­tion humaine civile. L’influence de cette aven­ture sur ma vie va bien plus loin que mon enga­ge­ment aux côtés de l’association. Être béné­vole dans cette asso­cia­tion a d’abord été pour moi l’occasion de décou­vrir un monde que je ne connais­sais pas : voir les frac­tures sociales géné­rées par le han­di­cap, échan­ger avec des jeunes de nos quo­ti­diens, rire avec des soi­gnants et des édu­ca­teurs. D’un point de vue humain, ces six mois m’ont autant appor­té que dix ans d’existence.

J’ai appris à me dépas­ser, à vaincre mes peurs, à cap­ti­ver un audi­toire sur des sujets que je maî­tri­sais à peine. Tra­vailler auprès d’enfants en dif­fi­cul­té est un com­bat de tous les jours. C’est par exemple l’histoire du com­bat que j’ai mené avec une petite fille de dix ans, qui osait à peine prendre la parole en début d’année car elle ne savait pas lire, et qui a acquis tel­le­ment de confiance en elle qu’à la fin de ma mis­sion elle était volon­taire pour lire en atelier.

Flexi­bi­li­té, adap­ta­tion, confiance, sou­rire, espoir. C’est ain­si que je pour­rais décrire ce que j’ai vécu six mois durant, et que je serais prête à recom­men­cer à n’importe quel moment, si l’occasion m’était donnée. 

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