Branchement d’alimentation en GNL d'un navire

Replacer le gaz au cœur de la transition énergétique

Dossier : Dossier FFEMagazine N°725 Mai 2017
Par Jérôme FERRIER

Quel est le rôle de l’AFG ?

L’AFG réu­nit les prin­ci­paux acteurs de l’industrie gaz­ière. Elle joue un rôle majeur dans la pro­mo­tion du gaz dans le cadre de la tran­si­tion énergétique. 

Avant la COP21, nous avions des dif­fi­cultés à faire val­oir nos argu­ments en faveur de la pro­mo­tion du gaz et de l’industrie gaz­ière. Les avan­tages con­cur­ren­tiels du gaz par rap­port aux autres éner­gies fos­siles sont pour­tant incon­testa­bles : la réduc­tion des émis­sions de CO2, l’absence d’émissions de par­tic­ules et d’oxyde de soufre, ain­si qu’une émis­sion réduite d’oxyde d’azote.

Lors des débats autour de la Loi Tran­si­tion Énergé­tique pour la Crois­sance Verte, l’AFG a mené une action effi­cace auprès des par­lemen­taires qui s’est traduite par la recon­nais­sance des avan­tages du gaz. Nous avons réus­si à faire pren­dre con­science de l’importance de réin­tro­duire la notion de car­bu­rant alter­natif au vu des avan­tages du gaz naturel ou du GPL sur les autres hydrocarbures. 

Lors du som­met du G20 en Chine en sep­tem­bre 2016, le gaz a été pour la pre­mière fois men­tion­né de manière favor­able et pos­i­tive. Les pays du G20 ont sig­nifié leur volon­té d’encourager leur col­lab­o­ra­tion avec l’industrie du gaz, recon­nais­sant ain­si que le gaz est l’énergie la moins émet­trice et qu’il est impor­tant d’accompagner son développement. 

L’Union Inter­na­tionale de l’Industrie du Gaz (UIIG) dont l’AFG est mem­bre et que j’ai eu l’honneur de présider entre 2012 et 2015, a été invitée aux travaux pré­para­toires relat­ifs à l’énergie des derniers som­mets du G20. Nous avons d’ailleurs été les seuls représen­tants pour les éner­gies fos­siles à avoir eu la pos­si­bil­ité de faire val­oir nos argu­ments pen­dant les trois derniers som­mets en Aus­tralie, en Turquie puis en Chine. 

La prési­dence française de l’UIG s’est achevée sur le Con­grès Mon­di­al du Gaz, organ­isé en juin 2015 à Paris. Nous y avons accueil­li plus de 4000 par­tic­i­pants de 90 pays. 

En 2015, en prévi­sion de la COP21, l’AFG a pub­lié un doc­u­ment pour soulign­er l’avantage com­para­tif du gaz qui est la seule énergie fos­sile capa­ble d’accompagner le développe­ment des Éner­gies Renou­ve­lables (EnR). En 2016, forts de cette expéri­ence, nous avons com­mis un livre blanc sur « les 10 propo­si­tions de l’industrie gaz­ière pour 2017 ». 

Nous avons choisi de nous lim­iter à une dizaine de propo­si­tions accom­pa­g­nées d’un plan d’action con­cret soumis au monde poli­tique, indus­triel et médi­a­tique. Nous com­mençons à en mesur­er les retombées. 


Branche­ment d’alimentation en GNL du navire AIDA Pri­ma. © HAROPA — Port du Havre

Dans le cadre de la transition énergétique et de la promotion des EnR, le gaz occupe une place importante.
Pouvez-vous nous en dire plus ?

Les ENR élec­triques (le solaire, l’éolien) ont de nom­breux avan­tages au regard de l’environnement, mais elles ont un hand­i­cap majeur : leur inter­mit­tence. Celle-ci ne peut pas être sat­is­faite par l’énergie nucléaire. Seule une pro­duc­tion d’électricité à par­tir de cen­trales ther­miques peut répon­dre à cette défail­lance intem­pes­tive de généra­tion électrique. 

Actuelle­ment, il est man­i­feste que les EnR sont insuff­isam­ment con­tribu­tives aux besoins nationaux. Les éoli­ennes sont encore peu nom­breuses et ne peu­vent pas fonc­tion­ner au-delà d’une cer­taine force du vent. 

Heureuse­ment, la France dis­pose encore de 14 cen­trales à gaz qui peu­vent com­pléter la pro­duc­tion nucléaire et celle des EnR. Cet hiv­er afin de faire face à une demande élec­trique intense, elles ont con­tribué à sat­is­faire 11 % du besoin électrique. 

Nous avons pu démon­tr­er que le gaz est indis­pens­able à l’équilibre du réseau. Néan­moins, il a une place encore très mod­este dans le mix énergé­tique français à cause de la place prépondérante du nucléaire dans notre mix énergétique. 

Quelle est la place du biogaz ?

Le biogaz, ou bio­méthane lorsqu’il est épuré, est renou­ve­lable. Sa place est encore très mod­este en France même s’il tend à se dévelop­per. Aujourd’hui, il y a 27 pro­jets qui injectent du gaz dans les réseaux, mais il y a plus de 600 pro­jets en attente de concrétisation. 

Pour accélér­er le déploiement du biogaz, il faut sim­pli­fi­er les procé­dures admin­is­tra­tives qui restent très com­plex­es, et faciliter les dossiers de finance­ment. Pour attein­dre l’objectif fixé par les pou­voirs publics de 10 % de biogaz sur le réseau en 2030 con­tre à peine 0,5 % en 2017, un rythme de rac­corde­ment de 60 à 70 pro­jets par an serait nécessaire. 

Quelles sont les actions que vous menez dans le cadre de l’amélioration de l’efficacité énergétique ?

Par­mi les nom­breuses actions que nous pré­con­isons, il y a une propo­si­tion inno­vante basée sur la réno­va­tion des sys­tèmes de chauffage. Cela néces­site un cadre fis­cal et régle­men­taire sta­ble, sim­ple et pérenne. Nous avons pro­posé « une prime à la casse » pour le rem­place­ment des chaudières anci­ennes par des chaudières à gaz plus per­for­mantes dans les loge­ments occupés par des per­son­nes en sit­u­a­tion de précarité. 

Nous esti­mons qu’il y aurait env­i­ron 3 mil­lions d’appareils de chauffage obsolètes qui pol­lu­ent bien au-delà des normes en vigueur et dont la con­som­ma­tion est supérieure à ce qu’elle pour­rait être si elles étaient rem­placées par des chaudières de nou­velle généra­tion plus performantes. 

Nous pen­sons qu’il est pos­si­ble de recourir au Cer­ti­fi­cat d’Économie d’Énergie (CEE) pour inciter les indus­triels à pren­dre en charge le rem­place­ment de ces appareils moyen­nant un retour sur investisse­ment à tra­vers une fis­cal­ité appropriée. 

Cette démarche sat­is­faisante pour tous favoris­erait la baisse de la con­som­ma­tion et la réduc­tion des émis­sions polluantes. 

Dans le monde de la mobilité, le gaz apparaît aussi comme une solution de plus en plus intéressante…

Le gaz est déjà util­isé dans le secteur du trans­port depuis de nom­breuses années. Très présent dans les flottes de trans­port en com­mun ou les flottes cap­tives, le gaz est très peu dévelop­pé pour les véhicules par­ti­c­uliers con­traire­ment à nos voisins européens, notam­ment alle­mands et ital­iens qui comptent plus d’un mil­li­er de sta­tions pour le gaz naturel véhicule, alors qu’il n’en existe que 65 en France. 

Site Letang Biogaz à Sourdun.
Site Letang Biogaz à Sour­dun. © Gre­go­ry Brandel

Il y a un effort à faire sur ce seg­ment en dévelop­pant, entre autres, les car­bu­rants alter­nat­ifs pour accom­pa­g­n­er le développe­ment du véhicule électrique. 

Au niveau de la mobil­ité ter­restre, nous voyons aus­si un fort développe­ment dans le domaine du trans­port routi­er de marchan­dis­es ; en trois ans, nous avons enreg­istré une hausse de 12 % du nom­bre de poids lourds roulant au gaz naturel. 

Avec des régle­men­ta­tions de plus en plus strictes sur l’accès aux cen­tres-villes, les acteurs du trans­port de marchan­dis­es con­ver­tis­sent leur flotte au gaz naturel pour livr­er la nuit, car la car­bu­ra­tion au gaz est silen­cieuse, et surtout n’émet pas de particules. 

En par­al­lèle, pour le trans­port mar­itime et flu­vial, le gaz naturel liqué­fié (GNL), pour lequel nous maîtrisons tous les procédés de fab­ri­ca­tion de trans­port et de stock­age, offre des per­spec­tives fan­tas­tiques, alors que les régle­men­ta­tions européennes sur les émis­sions de soufre se durcissent. 

Avec le monde mar­itime, nous réfléchissons aux moyens d’encourager le GNL qui ne pol­lue pas et n’émet qua­si­ment pas d’oxydes de soufre et de car­bone. Même si nous sommes aux prémices du proces­sus, aus­si bien en France que dans le reste du monde, d’importants don­neurs d’ordre se posi­tion­nent dans une démarche d’anticipation en com­man­dant des bateaux fonc­tion­nant au GNL. 

Les car­nets de com­man­des se rem­plis­sent et nous anticipons d’excellentes per­spec­tives sur les 5 prochaines années. Les arma­teurs de navires de croisières, de fer­rys et de porte-con­teneurs s’engagent vers la propul­sion au GNL ou sont prêts à le faire avec le sou­tien des four­nisseurs comme Total ou Engie. Aujourd’hui, les grands don­neurs d’ordre ont encore besoin d’être ras­surés sur les réserves de gaz, les capac­ités d’approvisionnement et les per­spec­tives de prix par rap­port aux pro­duits concurrents. 

Il y a aus­si des ques­tions impor­tantes à régler con­cer­nant les infra­struc­tures por­tu­aires et la logis­tique de rav­i­taille­ment. Sur ces points, l’AFG s’est pro­posée afin d’être la plate­forme fédéra­trice de l’ensemble des acteurs pour cette activ­ité de GNL car­bu­rant avec les grands ports, les indus­triels, les acteurs du monde mar­itime et d’une manière générale l’ensemble des par­ties prenantes. 

Qu’en est-il du power-to-gas ?

Il s’agit de la pos­si­bil­ité d’utiliser l’excédent d’électricité pro­duite à cer­taines péri­odes pour le trans­former par élec­trol­yse en hydrogène dans un pre­mier temps. C’est un procédé sim­ple et con­nu auquel nous ne pou­vons avoir recours que de manière lim­itée, car nous ne pou­vons stock­er que de très petites quan­tités. Actuelle­ment l’hydrogène peut être réin­jec­té en par­tie dans les réseaux de gaz. 

L’autre option est de com­bin­er l’hydrogène avec du CO2 pour recon­stituer du méthane qui pour­ra être injec­té dans les gazo­ducs ou stocké dans les stock­ages souter­rains exis­tants, tout en réglant le prob­lème du recy­clage du CO2.

Un pro­jet est en cours de réal­i­sa­tion pour démon­tr­er la fais­abil­ité du sys­tème à par­tir de 2018. Il s’agit du pro­jet Jupiter 1000, un démon­stra­teur con­stru­it à Fos-sur-Mer, dont les prin­ci­paux action­naires sont GRTgaz et TIGF. L’industrialisation du procédé pour­rait inter­venir à par­tir de 2020. 

Et pour conclure ?

En sep­tem­bre 2017, nous allons organ­is­er notre con­grès nation­al qui ne s’est pas tenu depuis 2013 pour cause de con­grès mon­di­al en 2015 en France. 

Nous espérons accueil­lir 800 par­tic­i­pants représen­tants de toute la chaîne gaz­ière qui vien­dront partager leur expéri­ence sur des pro­jets inno­vants et témoign­er que la France reste à la pointe de l’innovation et de la recherche avec des acteurs d’excellence.

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