Marc Pélegrin

Marc Pélegrin (X43) ingénieur visionnaire du monde aéronautique

Dossier : TrajectoiresMagazine N°793 Mars 2024Par Alain GENEL (X62)

Décé­dé le 1er jan­vier der­nier, Marc Péle­grin a consa­cré sa vie pro­fes­sion­nelle à l’aéronautique. Spé­cia­liste des sys­tèmes de gui­dage et pilo­tage, il a très tôt com­pris la néces­si­té du cou­plage recherche ensei­gne­ment et inté­gré les contraintes envi­ron­ne­men­tales dans ses travaux.

Marc naît le 28 novembre 1923 à Paris. Son père est ingé­nieur dans le sec­­teur fer­ro­viaire. Études se­­condai­res et pré­pa au lycée Saint-Louis. Après l’X, il fait un séjour d’un an à l’université de Roches­ter où il tra­vaille sur les rayons cos­miques en liai­son avec le tra­vail entre­pris dans le labo­ra­toire de Leprince-Rin­guet. Il fait ensuite SupAé­ro dont il sort en 1949 et retourne aux USA pas­ser un an au MIT où il débute une thèse sur le cal­cul sta­tis­tique des sys­tèmes asser­vis. Il est doc­teur ès sciences (Sor­bonne 1952).

En 1948, il épouse Renée Leboime, élève de Mau­rice Denis, peintre de talent dont la voca­tion a été quelque peu contra­riée car elle avait fait le choix avec Marc de don­ner nais­sance à une nom­breuse famille.

Création du CERA

Marc Péle­grin se consacre très vite à l’aéronautique (pilo­tage et gui­dage d’avions et de mis­siles, études et réa­li­sa­tion du pre­mier simu­la­teur…). Il fonde en 1958 le CERA (centre d’études et de recherches en auto­ma­tique). Entre 1960 et 1964, il est conseiller scien­ti­fique au SHAPE (Supreme Head­quar­ters Allied Powers Europe) et enseigne à l’université de Gand dont il devient doc­teur hono­ris cau­sa (Joliot-Curie avait eu cette chaire en 1938). 

Il se consacre au déve­lop­pe­ment des sciences des asservis­sements et des auto­ma­tismes qu’il pro­fesse à SupAé­ro, fai­sant auto­ri­té par ses publi­ca­tions et ses nom­breuses communica­tions dans la plu­part des grandes uni­ver­si­tés étran­gères. Char­gé du trans­fert de SupAé­ro à Tou­louse en 1968, il obtient de son ministre de tutelle la créa­tion du Centre de recherche de Tou­louse, inté­gré à SupAé­ro. Ce modèle qui com­bine ensei­gne­ment et recherche, dont il est un pré­cur­seur, fera école. Il dirige les deux éta­blis­se­ments (SupAé­ro jusqu’en 1978 et le CERT jusqu’en 1988). 

Il pour­suit ensuite ses acti­vi­tés au sein de l’Académie des techno­logies, dont il est membre fon­da­teur ; il est vice-pré­sident de l’Académie natio­nale de l’air et de l’espace et devient cor­res­pon­dant de l’Académie des sciences. La liste de ses publi­ca­tions est impres­sion­nante, à com­men­cer par un rap­port sur « l’École poly­tech­nique vue par trois élèves sor­tants après une année d’études aux USA » en 1947.

Les dangers d’une croissance sans limites

Très tôt, Marc a per­çu les dan­gers d’une crois­sance sans limites dans une pla­nète dont les res­sources sont limi­tées. Anti­ci­pant les causes et les consé­quences du réchauf­fe­ment cli­ma­tique, il mili­tait inlas­sa­ble­ment contre la socié­té de consom­ma­tion. Ses étu­diants ont encore en mémoire sa concep­tion d’un cou­plage indis­pen­sable entre ensei­gne­ment et recherche, et de la néces­si­té pour l’ingénieur d’avoir une vision pla­né­taire et une vision phi­lo­so­phique qui ne fassent pas du dévelop­pement un objec­tif à tout prix.

Il conclut un dis­cours d’accueil aux élèves de SupAé­ro par cette phrase : « En bref, vous devez inté­grer dans vos acti­vi­tés pro­fes­sion­nelles des contraintes de nature « socié­tales », ce que ma géné­ra­tion n’a pas fait… mea culpa ! »

Tout à la fois péda­gogue et ani­ma­teur de colo­nie de vacances, moni­teur de voile béné­vole sur le bas­sin d’Arcachon, guide de mon­tagne béné­vole à La Plagne, il a pas­sé sa vie à expli­quer à ses enfants et ses petits-enfants la course des étoiles et les phé­no­mènes scien­ti­fiques, leur deman­dant d’apprendre chaque jour au moins deux choses. Quand il les emme­nait au palais de la Décou­verte, à la Vil­lette ou à la Cité de l’espace, au bout d’un moment il y avait un attrou­pe­ment autour de lui pour écou­ter ses expli­ca­tions… Hyper­ac­tif, il est res­té très spor­tif jusqu’à plus de 95 ans. Il est vrai qu’il avait mené une vie simple en man­geant chaque matin une pomme… Il avait 6 enfants, 13 petits-enfants et 20 arrière-petits-enfants.

Poster un commentaire