Château Siran à Margaux

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°559 Novembre 2000Rédacteur : Laurens DELPECH

Entre la Gironde et l’Océan, le vig­no­ble du Médoc recèle quelques-uns des plus grands crus du monde. C’est notam­ment le cas à Mar­gaux, mon­di­ale­ment célèbre par son pre­mier grand cru classé, Château Mar­gaux. Les vins de Mar­gaux comptent par­mi les plus élé­gants du Médoc. Pro­fonds et sub­tils, ils sup­por­t­ent très bien un long vieil­lisse­ment qui leur apporte beau­coup de charme et de complexité.

Château Sir­an, qui s’étend sur près de 25 hectares, est un des fleu­rons de Mar­gaux. Son ter­roir excep­tion­nel, enclavé par­mi des grands crus, aurait dû être classé en 1855 ; s’il ne l’a pas été, c’est surtout en rai­son de l’insouciance de ses pro­prié­taires (qui étaient alors les Toulouse- Lautrec). Sur des ter­roirs en pente vers la Gironde et ori­en­tés sud-est, le caber­net sauvi­gnon domine l’encépagement (46 %), suivi du mer­lot (35 %), du petit ver­dot (12 %) et du caber­net franc (7 %). La forte pro­por­tion de petit ver­dot mar­que forte­ment le style du vin vers la rigueur et la structure.

De fait, sir­an est un vin de longue garde : vingt ans de vieil­lisse­ment ne lui font pas peur. Le 82, par exem­ple, se déguste très bien aujourd’hui et, lors d’une dégus­ta­tion récente, le 53 est apparu dans tout l’éclat de sa maturité…

Etiquette de Château SIRANSous l’impulsion de Brigitte Miail­he, direc­trice du Domaine, tous les efforts sont con­sen­tis, afin d’amener Sir­an au plus haut niveau : le vig­no­ble est main­tenant drainé dans sa qua­si-total­ité ; des “ ven­dan­ges vertes ” sont con­duites entre juil­let et sep­tem­bre ; les raisins sont récoltés manuelle­ment et recueil­lis en cagettes de 60 litres afin de les préserv­er et d’optimiser le tri sélec­tif réal­isé au chai ; les ren­de­ments sont main­tenus à 45 hl/ha en moyenne ; enfin les instal­la­tions de vini­fi­ca­tion sont par­faite­ment équipées, notam­ment au niveau des moyens de con­trôle de la température.

Les vini­fi­ca­tions sont d’ailleurs con­duites depuis 1995 sous le con­trôle de l’œnologue Michel Rol­land, le plus réputé de tout le Bor­de­lais. Elles restent clas­sique­ment médo­caines, avec des extrac­tions qui savent respecter l’élégance du ter­roir de Margaux.

Comme tous les grands crus, Sir­an pro­duit un grand vin (90 000 bouteilles/an) et un sec­ond vin (50 000 bouteilles/ an), appelé “ S de Sir­an ”, issu des cuvées qui n’ont pas été retenues pour le grand vin ain­si que des raisins pro­duits par les jeunes vignes. Si pour le grand vin, c’est la richesse aro­ma­tique, la com­plex­ité et un cer­tain vol­ume tan­nique qui sont recher­chés, le sec­ond vin se car­ac­térise plutôt par sa sou­p­lesse et son fruité. La sélec­tion est très poussée, cer­taines années, c’est jusqu’à 60 % du raisin qui est écarté du grand vin. On com­prend mieux les raisons de la qual­ité de sir­an dans les petits mil­lésimes, où il fait sou­vent jeu égal avec des crus classés autrement plus coûteux…

À Sir­an, comme à Mou­ton-Roth­schild, les éti­quettes du grand vin sont illus­trées depuis 1980 par des artistes con­tem­po­rains, qui doivent illus­tr­er un événe­ment mar­quant du mil­lésime. Comme, par exem­ple, Miro et le Mundi­al de foot­ball en 82, Jean-Michel Folon et la navette spa­tiale Colum­bia en 81, Pierre Yves Tremois et la comète de Hal­ley en 86, William Alsop et le tun­nel sous la Manche en 1990, le “ French para­dox” illus­tré par Loon, le célèbre dessi­na­teur anglais en 1993, l’avènement des com­mu­ni­ca­tions sur Inter­net par Jere­my Ram­sey, pein­tre bri­tan­nique rési­dant à Sin­gapour en 1996, la France cham­pi­onne du monde de foot­ball célébrée par Ray­mond Moret­ti en 1998…

Par ailleurs, Sir­an est un des rares châteaux du Médoc qui peut se vis­iter libre­ment tous les jours. Out­re une élé­gante char­treuse rose et un superbe jardin fleuri de cycla­mens d’août à sep­tem­bre, on peut vis­iter les chais et les instal­la­tions de vini­fi­ca­tion ain­si qu’un petit musée du vin, qui ne manque pas d’intérêt. De la ter­rasse de Sir­an, on a un superbe point de vue sur le Médoc et l’estuaire de la Gironde.

Voici nos com­men­taires sur les mil­lésimes de Sir­an que l’on trou­ve en ce moment dans le com­merce ou sur les cartes de restaurants :

1997

Belle couleur rubis aux reflets som­bres. Nez fin et com­plexe de petits fruits rouges et de cas­sis. Attaque sou­ple et fraîche, bonne acid­ité. La bouche est bien struc­turée et les tan­nins soyeux. Belle finale sur des notes épicées.

1996

Belle couleur fon­cée de baies mûres. Nez fruité avec de belles notes d’épices douces. Attaque sou­ple, tanins fon­dus, corps puis­sant et généreux. Belle longueur sur des notes fruitées (cas­sis) et tor­ré­fiées. Un grand vin de garde qu’il faut savoir attendre.

1995

Robe rouge som­bre avec un reflet brun. Nez intense et com­plexe de fruits noirs, de tabac, de cacao et de cèdre. La bouche est mûre et opu­lente avec une grande richesse tan­nique, un fruit remar­quable, une trame fine et élé­gante. Finale équili­brée, sur des notes d’épices.

1994

Couleur intense et bril­lante avec une frange orangée. Nez com­plexe dom­iné par des arômes de fruits rouges bien mûrs et des notes de cuir, d’épices et de tabac. Beaux tan­nins. Vin équilibré.

1993

Belle couleur, bonne con­cen­tra­tion, struc­ture équili­brée, riche en tan­nins. Arômes fruités, notes de sous-bois et bonne longueur en bouche.

Château Sir­an, Labarde, 33460 Mar­gaux, tél. : 05.57.88.34.04, fax : 05.57.88.70.05.

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