Champagne territoires

Au plus près des territoires

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°760 Décembre 2020
Par Manuel REMAN (97)

Manuel Reman (97) est Prési­dent de MHCS, l’entité qui regroupe les activ­ités « Cham­pagne » de LVMH. Il nous en dit plus sur l’ancrage ter­ri­to­r­i­al, l’engagement en ter­mes de RSE, de développe­ment durable et les ambi­tions portées par les Maisons de Cham­pagne dans un con­texte où la crise actuelle pousse les entre­pris­es ain­si que les ter­ri­toires à revoir leurs organ­i­sa­tions et leurs priorités.

Le groupe LVMH et ses Maisons de Champagne se sont engagées dans une démarche environnementale et sociétale depuis plusieurs années. Qu’en est-il ?

Les engage­ments envi­ron­nemen­taux et socié­taux sont depuis tou­jours ancrés au cœur des actions de LVMH. Nous agis­sons de manière con­crète en tra­vail­lant des pro­duits avec de meilleures per­for­mances envi­ron­nemen­tales, notam­ment sur la réduc­tion d’émissions de CO2, en amélio­rant l’impact envi­ron­nemen­tal de nos sites et de nos points de vente. Le Groupe est égale­ment engagé à faire de l’excellence un levi­er de l’insertion sociale et pro­fes­sion­nelle, en sol­i­dar­ité avec les ter­ri­toires sur lesquels nous sommes implan­tés, avec la volon­té de démul­ti­pli­er l’impact social posi­tif de nos activ­ités. 

Il en est de même au sein des Maisons de Cham­pagne. Le développe­ment durable nous a tou­jours préoc­cupé. En tant qu’entreprise, il est de notre respon­s­abil­ité d’œuvrer pour une société plus pro­pre, plus juste, plus sol­idaire. Nous avons d’ailleurs un devoir d’exemplarité en tant que leader de la caté­gorie Cham­pagne et pre­mier employeur privé de la région. Parce que notre impact économique et socié­tal sur le ter­ri­toire est majeur, nous nous efforçons de jouer notre rôle tout en étant sol­idaire avec de nom­breuses ini­tia­tives pour amélior­er l’employabilité, l’insertion pro­fes­sion­nelle, la for­ma­tion et favoris­er ain­si le tis­su local. Dans cette con­ti­nu­ité, par exem­ple, la Mai­son Krug a créé le « Fonds K pour la musique », un fonds qui investit dans des pro­jets phil­an­thropiques autour de la musique. J’encourage les nom­breux lecteurs mélo­manes à aller vis­iter leur site ! 

Quelles sont les actions que vous déployez dans ce cadre et en lien avec les territoires ?

Notre vig­no­ble est le plus grand de la Cham­pagne, en cumu­lant les 6 mar­ques du Groupe : Dom Pérignon, Krug, Merci­er, Moët & Chan­don, Ruinart et Veuve Clic­quot. Nos vig­no­bles ont été enher­bés par­mi les pre­miers dans la région et nous n’utilisons plus d’herbicide. Ceci nous oblige à adapter nos méth­odes cul­tur­ales. C’est un défi exci­tant, c’est à l’Homme — nos vignerons et œno­logues — de s’adapter à ce que nous donne la Nature, tout en garan­tis­sant à nos con­som­ma­teurs « Une seule qual­ité, la toute pre­mière », comme dis­ait Madame Clic­quot. Nos vig­no­bles sont cer­ti­fiés Viti­cul­ture Durable depuis 2014 et nous inci­tons les vignerons qui nous vendent leurs raisins à faire de même : primes à la cer­ti­fi­ca­tion, aide admin­is­tra­tive, con­seil technique…

Depuis 2015, nous avons réduit nos con­som­ma­tions d’eau d’un tiers. Nous expé­dions nos bouteilles par trans­port flu­vial ou par camions au gaz. 

La majeure par­tie des émis­sions de CO2 provi­en­nent de la fab­ri­ca­tion de la bouteille en verre. Nous avons con­tribué à alléger cette par­tie en adop­tant une démarche d’éco-conception pour les embal­lages : le meilleur exem­ple est l’étui 100 % recy­clé et recy­clable de Ruinart Blanc de Blancs « Sec­onde Peau » en fibre de cel­lu­lose. Cet étui n’a pas été breveté pour per­me­t­tre à nos con­cur­rents d’utiliser cette tech­nolo­gie, car c’est l’ensemble de la Cham­pagne qui doit progresser. 

Sur le plan socié­tal, le rôle de nos Maisons est cru­cial dans la région. Pre­mier employeur privé avec plus de 2 000 salariés, nous injec­tons près de 800 M€ par an dans l’économie locale. Les travaux d’investissements dans nos vig­no­bles, cuver­ies et ate­liers sont majori­taire­ment con­fiés à des entre­pris­es locales, plus à même de com­pren­dre les con­traintes et enjeux spé­ci­fiques du Cham­pagne. Nous signons régulière­ment des parte­nar­i­ats avec des entités locales : l’ONF, l’Agence de l’Eau, l’Université de Reims-Cham­pagne-Ardenne, NEOMA Busi­ness School, le Lycée Viti­cole d’Avize, une classe ULIS (Unités local­isées pour l’inclusion scolaire)… 

En 2015, LVMH a créé l’IME (Insti­tut des Métiers d’Excellence) pour offrir à des jeunes des pro­grammes de for­ma­tion pro­fes­sion­nelle pour la trans­mis­sion du savoir-faire, tout en val­orisant les fil­ières de l’artisanat. Nous avons aus­si créé une entre­prise adap­tée pour per­me­t­tre aux per­son­nes atteintes d’un hand­i­cap de repren­dre une activ­ité en inté­grant une de nos Maisons. Près de 100 per­son­nes en ont déjà bénéficié.

Cette année, la crise de la Covid-19 a renforcé cet enjeu de RSE et de développement durable pour les entreprises. Comment avez-vous vécu cette période ?

Cette péri­ode éprou­vante s’avère être aus­si un test pour les organ­i­sa­tions : capac­ité à met­tre en sécu­rité ses salariés, à innover pour trou­ver de nou­velles oppor­tu­nités com­mer­ciales, à gag­n­er en agilité, à tra­vailler en équipe, à aller à l’essentiel. En ter­mes de RSE et de développe­ment durable, elle n’a fait qu’accélérer un mou­ve­ment déjà enclenché : plus pro­pre, plus respon­s­able, plus trans­par­ent, plus authen­tique. Nous avons soutenu les struc­tures médi­cales locales : dis­tri­b­u­tion de gel et de masques ; élab­o­ra­tion des paniers-repas pour les soignants par nos chefs ; mise à dis­po­si­tion de loge­ments pour le per­son­nel médi­cal ; sou­tien à la recherche de nou­veaux traitements…

Je suis égale­ment per­suadé que cette crise va redessin­er les ter­ri­toires. Sur les derniers mois, de nom­breuses entre­pris­es ont démé­nagé à Reims, une ville située à moins de 45 min­utes de Paris, et à 1 heure des aéro­ports. Avec des loy­ers 7 fois moins élevés qu’à Paris, dotée de très bonnes écoles de la mater­nelle au supérieur et d’un vivi­er de tal­ents (45 000 étu­di­ants : Sci­ences Po, NEOMA Busi­ness School, chaires de biotech de Cen­trale­Supélec et d’innovation d’AgroParisTech…), Reims est une ville dynamique, verte et où le tra­jet moyen domi­cile-tra­vail est de 12 min­utes. 2020 a accéléré la ten­dance des dernières années.

Actuellement, quels sont les sujets et les enjeux qui vous mobilisent ?

Nous avons investi 20 m€ dans un nou­veau cen­tre de R&D pour aller plus loin et plus vite sur ces nou­veaux enjeux de développe­ment durable : quels sont les pra­tiques cul­tur­ales ou les cépages les plus adap­tés au réchauf­fe­ment cli­ma­tique ? Inté­gr­er davan­tage de bio­di­ver­sité dans nos vig­no­bles peut-il être une voie pour élim­in­er totale­ment les traite­ments ? Com­ment éla­bor­er des pro­duits encore plus qual­i­tat­ifs et répon­dant aux nou­velles attentes des con­som­ma­teurs : moins de sucre, moins d’alcool ? Com­ment réduire notre empreinte car­bone en cap­tant le CO2 de la fer­men­ta­tion alcoolique ? Ce cen­tre, que nous inau­gurerons en milieu d’année 2021, tra­vaillera pour l’ensemble des Maisons de Moët Hen­nessy. Cela nous per­me­t­tra de con­serv­er ce « petit quart d’heure d’avance », pour repren­dre la devise de la Mai­son Moët & Chandon.


« Carrières » chez LVMH

Parlez-nous de votre carrière chez LVMH.

Après avoir démar­ré ma car­rière dans le con­seil en stratégie, j’ai rejoint LVMH et plus par­ti­c­ulière­ment la Mai­son Moët & Chan­don en 2004, comme chef de cab­i­net du PDG. J’ai ain­si pu décou­vrir toutes les facettes d’une Mai­son de Cham­pagne, les pieds ancrés dans la craie et les caves et les yeux tournés vers les con­som­ma­teurs du monde entier. 

Après ce rôle trans­ver­sal et ini­ti­a­tique, j’ai pris la respon­s­abil­ité des équipes de con­trôle de ges­tion. J’ai égale­ment été directeur de pro­duc­tion de Moët & Chan­don, où j’ai pris con­science des enjeux humains : sécu­rité, moti­va­tion et développe­ment d’une équipe de 400 per­son­nes tra­vail­lant sur 5 sites dif­férents, inter­ac­tions avec les syn­di­cats, pro­jec­tion de l’évolution des métiers de l’entreprise…

J’ai ensuite eu la chance en 2016 de béné­fici­er d’une mobil­ité inter­na­tionale pour pren­dre la direc­tion de la fil­iale de dis­tri­b­u­tion Ibérique afin de ren­forcer la désir­abil­ité de nos mar­ques sur ces marchés et pour ouvrir une fil­iale au Por­tu­gal. En vente, vos actions ont un effet immé­di­at ce qui ne fait que ren­forcer l’adrénaline liée à ce type de postes. De retour en France, j’ai pris la direc­tion générale des activ­ités « Cham­pagne » : déf­i­ni­tion et suivi des straté­gies indus­trielles et d’approvisionnement, M&A, fonc­tions sup­port aux dif­férentes Maisons, représen­ta­tion du Groupe auprès de l’Interprofession… Ma mis­sion : garan­tir que tout soit en place pour soutenir les Maisons dans leurs ambitions. 

J’ai eu la chance de pou­voir vivre des expéri­ences var­iées et intéres­santes. C’est aus­si un bel exem­ple de l’engagement de LVMH et de ses maisons dans le développe­ment de ses collaborateurs. 

Au travers de votre parcours, quelles sont pour vous les compétences clés qui font la différence ? 

Les entre­pris­es sont rem­plies de cadres exigeants, tra­vailleurs, com­pé­tents dans leurs domaines et qui savent cal­culer vite et faire de belles présen­ta­tions. Le suc­cès que con­nais­sent les mar­ques du groupe LVMH repose en par­tie sur la recon­nais­sance du fac­teur humain dans nos métiers. Ce qui fait la dif­férence, c’est ce qu’on appelle les « soft skills » : empathie, créa­tiv­ité, con­fi­ance, écoute, hon­nêteté, être ori­en­té solu­tion, esprit d’entreprendre, prise de recul… Peu importe que vos équipes soient des financiers, des vignerons, des tech­ni­ciens, des vendeurs, don­nez-leur un cap, motivez-les, écoutez-les, respectez-les, sup­port­ez-les. Prenez soin de vos équipes, elles pren­dront soin de votre entreprise !

Comment pourriez-vous définir la culture LVMH ? 

Le groupe LVMH respecte l’identité et la cul­ture de cha­cune des Maisons qui le con­stituent. Si nous sommes un groupe décen­tral­isé, le groupe reste une entre­prise famil­iale où l’esprit entre­pre­neur­ial est clé dans le développe­ment de chaque Mai­son. Mais il existe bel et bien une « cul­ture LVMH » sur nos dénom­i­na­teurs com­muns : une ten­sion pos­i­tive entre notre ancrage dans la tra­di­tion et une quête de moder­nité et d’innovation quo­ti­di­enne, une pas­sion pour les pro­duits que nous élaborons en recher­chant tou­jours l’excellence pour nos clients, et cette volon­té d’avoir un impact posi­tif sur la société dans laque­lle nous évoluons.


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