La Valve HighLife permet de lutter contre l’insuffisance mitrale.

La MedTech qui traite l’insuffisance mitrale sans intervention chirurgicale

Dossier : Vie des entreprises - HealthtechMagazine N°793 Mars 2024
Par Malek NASR
Par Georg BÖRTLEIN

Pour lut­ter contre l’insuffisance mitrale, High­Life Medi­cal a conçu et déve­lop­pé une alter­na­tive à la chi­rur­gie à cœur ouvert : une inter­ven­tion non-inva­sive et à cœur bat­tant. Georg Bört­lein, fon­da­teur et CEO, et Malek Nasr, vice-pré­sident de High­Life Medi­cal, reviennent sur la créa­tion de la Med­Tech, son dis­po­si­tif et ses pers­pec­tives de déve­lop­pe­ment. À ce stade, trois études cli­niques sont en cours eu Europe, en Aus­tra­lie et aux États-Unis.

Quel est le contexte autour de la création de HighLife ?

Georg Bört­lein : High­Life est un acteur de la car­dio­lo­gie dite inter­ven­tion­nelle. Cette spé­cia­li­té a vu le jour et s’est déve­lop­pée dans les années 80 dans le but de trai­ter les mala­dies car­diaques en pri­vi­lé­giant des méthodes moins inva­sives que la chi­rur­gie à cœur ouvert. Pro­gres­si­ve­ment, les pon­tages coro­na­riens pra­ti­qués à cœur ouvert ont ain­si été rem­pla­cés par la pose de stent. Dans les années 2000, nous avons assis­té à l’émergence des TAVI, les trai­te­ments trans-cathé­ter par voie natu­relle des valves cardiaques.

En 2000, j’ai par­ti­ci­pé à la créa­tion de Core­Valve, qui a eu un rôle moteur dans le lan­ce­ment de cette thé­ra­pie avec un focus sur la valve aor­tique. À cette époque, Malek fai­sait par­tie de l’équipe Core­Valve et tra­vaillait sur un pro­jet axé sur la valve mitrale.

En 2009, l’entreprise a fina­le­ment été ven­due à Med­tro­nic. Avec Malek, nous avions la volon­té com­mune de pour­suivre le tra­vail ini­tié au sein de Core­Valve avec un inté­rêt par­ti­cu­lier pour les valves mitrales.

Dix-huit mois après la ces­sion de Core­Valve, nous avons créé, fin 2010, High­Life. Aujourd’hui, High­life emploie une qua­ran­taine de col­la­bo­ra­teurs répar­tis dans plu­sieurs pays. Nous avons notam­ment une filiale en Cali­for­nie du Sud, où nous fabri­quons les valves et où nous réa­li­sons la plu­part de nos tests, mais aus­si des col­la­bo­ra­teurs basés en Aus­tra­lie qui tra­vaillent direc­te­ment sur le volet cli­nique, avec Malek.

À date, nous avons levé près d’une soixan­taine de mil­lions d’euros. Nous pré­pa­rons des tours de finan­ce­ments addi­tion­nels avec pour objec­tif d’obtenir le mar­quage CE en 2025.

Au cœur de votre positionnement, on retrouve l’insuffisance mitrale. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Malek Nasr : L’insuffisance mitrale est une mala­die qui touche prin­ci­pa­le­ment des per­sonnes d’un âge avan­cé. Sa pré­va­lence dans la popu­la­tion est de 2 %, mais de près de 10 % chez les plus de 75 ans. Elle n’est pas tou­jours sévère ou symp­to­ma­tique, mais avec le temps, elle le devient, de manière inexo­rable, et l’état de san­té des patients se dégrade.

Sa forme dégé­né­ra­tive peut être trai­tée avec suc­cès par une chi­rur­gie à cœur ouvert, à condi­tion que la san­té et l’état géné­ral du patient le per­mettent. Il existe éga­le­ment une forme secon­daire, consé­cu­tive à une autre mala­die car­diaque, comme l’infarctus, pour laquelle la chi­rur­gie peut éga­le­ment être envi­sa­gée, mais les résul­tats ne sont pas satis­fai­sants dans la durée.

Il y a donc un nombre impor­tant de patients qui n’ont pas de solu­tions thé­ra­peu­tiques pour cette mala­die inva­li­dante, qui, à terme, entraîne l’insuffisance car­diaque et affecte signi­fi­ca­ti­ve­ment la qua­li­té de vie des patients.

C’est pour répondre à cet enjeu de santé publique que vous avez développé la technologie HighLife qui est une alternative innovante aux traitements disponibles sur le marché. Quelles en sont ses principales caractéristiques ?

G.B : Nous avons sou­hai­té déve­lop­per un trai­te­ment effi­cace capable de résor­ber à 100 % la fuite de la valve mitrale, et obte­nir ain­si le même résul­tat qu’une chi­rur­gie. Dès le départ, notre objec­tif a été de trou­ver une alter­na­tive à la chi­rur­gie qui demande une ouver­ture majeure du tho­rax et l’arrêt du cœur, en pri­vi­lé­giant le pas­sage par l’intérieur des vais­seaux à cœur battant.

M.N : Pour ce faire, nous avons conçu un sys­tème com­po­sé de deux implants : une valve et un anneau, que nous intro­dui­sons donc dans le corps du patient avec des ponc­tions mini­males vers les vais­seaux au niveau du pli de l’aine refer­més immé­dia­te­ment après la mise en place de la valve, sans avoir recours à une chi­rur­gie inva­sive à cœur ouvert.

Dans un pre­mier temps, nous posi­tion­nons l’anneau qui va par­ti­ci­per à l’ancrage de la valve et qui se place autour de la valve native. Une fois cette pre­mière étape réa­li­sée, nous allons pou­voir implan­ter notre valve à l’intérieur de cet anneau, la bio­pro­thèse pre­nant en charge la fonc­tion de la valve native défaillante instantanément.

Quel est l’apport médical de cette technologie ?

G.B : Il s’agit d’une alter­na­tive très inté­res­sante pour trai­ter des patients à cœur bat­tant, mais sur­tout des per­sonnes qui ne pour­raient pas subir ou sup­por­ter une chi­rur­gie inva­sive. Nous ciblons véri­ta­ble­ment ces patients qui n’ont aucune autre alter­na­tive thé­ra­peu­tique à qui on pres­cri­vait essen­tiel­le­ment des diu­ré­tiques pour drai­ner les fluides, une démarche tota­le­ment pal­lia­tive. Avec la tech­no­lo­gie High­Life, nous appor­tons donc un trai­te­ment concret pour soi­gner cette patho­lo­gie. 

Où en sont les études cliniques en cours ? Et à partir de là, quels seront les prochains jalons pour HighLife ?

M.N : Nous avons actuel­le­ment trois études en cours sur trois conti­nents : en Europe, en Aus­tra­lie et aux États-Unis. En paral­lèle, nous avons un par­te­na­riat en Chine avec une entre­prise locale qui peut fabri­quer et dis­tri­buer nos pro­duits dans le pays. 

Les pro­chaines grandes étapes pour High­Life sont bien évi­dem­ment le mar­quage CE, puis l’autorisation de mise sur le mar­ché en Europe.

En paral­lèle, nous sommes éga­le­ment mobi­li­sés par le lan­ce­ment sur le mar­ché amé­ri­cain avec une étude spé­ci­fique. Nous avons démar­ré une étude de fai­sa­bi­li­té qui nous a per­mis de convaincre la FDA du bien fon­dé de la démarche de High­Life. Nous atten­dons l’accord pour lan­cer une étude pivot aux États-Unis pro­chai­ne­ment ce qui, à terme, nous per­met­tra de com­mer­cia­li­ser le pro­duit sur le mar­ché américain. 

Quels sont les freins qu’il vous reste à lever ?

G.B : Depuis 2010 et grâce à l’engagement et la moti­va­tion de nos équipes, nous avons répon­du avec suc­cès à la ques­tion du défi tech­nique, même si nous pour­sui­vons nos efforts en R&D afin de nous ins­crire dans une démarche d’amélioration conti­nue. Nous avan­çons éga­le­ment très bien sur la par­tie cli­nique avec des études qui sont pro­met­teuses. Les résul­tats sont très encou­ra­geants pour la popu­la­tion de patients que nous ciblons. Sur le court terme, notre objec­tif est que la tech­no­lo­gie High­Life puisse se sub­sti­tuer aux trai­te­ments actuels.

En paral­lèle, nous avons un enjeu constant en matière de finan­ce­ment. En effet, tant que notre pro­duit n’est pas approu­vé par toutes les auto­ri­tés com­pé­tentes, nous ne géné­rons pas de chiffre d’affaires et sommes donc dépen­dants des finan­ce­ments extérieurs.

Au fil des années, High­Life a su convaincre de nom­breux par­te­naires finan­ciers de pre­mier rang comme Sofin­no­va Part­ners, Ande­ra Part­ners, USVP en Cali­for­nie, Sec­to­ral au Cana­da ou encore VI Part­ners en Suisse. Autant d’acteurs de réfé­rence dans le monde de l’investissement dans les tech­no­lo­gies médicales !

Aujourd’hui, il s’agit de conti­nuer de convaincre, car cette aven­ture scien­ti­fique et tech­no­lo­gique dans un domaine aus­si régle­men­té que la san­té est extrê­me­ment coû­teuse. Nous avons donc un impor­tant tra­vail de vul­ga­ri­sa­tion et d’évangélisation pour expli­quer et démon­trer la per­ti­nence de notre démarche, de notre tech­no­lo­gie et de notre produit.

Et pour conclure ?

G.B : Le sec­teur de la Med­Tech en France est très dyna­mique et a connu de nom­breux suc­cès qui sont pas­sés inaper­çus au niveau du grand public. Dans cet uni­vers, High­Life se posi­tionne comme un lea­der fran­çais et euro­péen et va pro­chai­ne­ment et poten­tiel­le­ment deve­nir la pre­mière socié­té à obte­nir le mar­quage CE et lan­cer ses pro­duits sur ce mar­ché. Avec notre équipe diri­gée par la France, mais avec une très forte dimen­sion inter­na­tio­nale, nous sommes plus que jamais sur la bonne voie pour appor­ter, le plus rapi­de­ment pos­sible, une nou­velle solu­tion thé­ra­peu­tique aux patients !

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