Couverture Le Capital-Investissement

Pour NEOPAR, le capital humain est le premier critère d’investissement !

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°778 Octobre 2022
Par François-Denis POITRINAL

La réus­site d’un retourne­ment ne repose pas unique­ment sur des critères financiers, mais aus­si sur le cap­i­tal humain : des hommes et les femmes qui vont porter ce pro­jet et sur la solid­ité de leurs ambi­tions et éner­gies. Pour se faire, l’enjeu est de pou­voir s’appuyer sur les bons parte­naires. C’est cette réal­ité qui guide NEOPAR, un spé­cial­iste de la reprise d’entreprises en dif­fi­culté, qui investit aux côtés des man­agers his­toriques de ces mêmes entre­pris­es pour leur per­me­t­tre de renouer avec la crois­sance et la créa­tion de valeur. Expli­ca­tions de François-Denis Poitri­nal, fon­da­teur de NEOPAR.

Quel regard portez-vous sur la situation actuelle ? 

Le con­texte est mar­qué par la sor­tie de crise, un regain économique et l’inflation. En par­al­lèle, le marché du retourne­ment et du redresse­ment des entre­pris­es reste encore large­ment inférieur à celui d’avant le début de la pandémie : sur douze mois, entre mai 2021 et mai 2022, 32 000 ouver­tures de procé­dure ont été recen­sées, con­tre une moyenne de 50 000 sur les années précé­dant la crise san­i­taire. Le « rat­tra­page » annon­cé n’a finale­ment pas eu lieu. Même si le marché est en-dessous de la moyenne, il est toute­fois por­teur de belles oppor­tu­nités. En effet, les sig­naux économiques sont posi­tifs. À cela s’ajoutent des évo­lu­tions règle­men­taires et lég­isla­tives qui ont égale­ment des impacts posi­tifs. On peut notam­ment citer l’ordonnance du 15 sep­tem­bre 2021 qui trans­pose en droit français la direc­tive européenne Restruc­tura­tion et Insolv­abil­ité. Elle vient ain­si péren­nis­er un cer­tain nom­bre de règle­men­ta­tions et de dis­posi­tifs mis en place pen­dant la pandémie et qui sont rel­a­tive­ment favor­able aux entre­pris­es. Elle ren­force, par ailleurs, le pou­voir des juges dans un cadre de la con­cil­i­a­tion et apporte des mod­i­fi­ca­tions assez tech­niques sur les class­es de créanciers qui ne sont doré­na­vant plus dis­tin­gués en fonc­tion de la nature de la créance, mais au regard du niveau du risque pris par ces derniers. On assiste aus­si à un recours au pré­pack ces­sion dès que les con­di­tions sont réu­nies. En effet, ce dis­posi­tif de repris­es d’actifs est appré­cié pour sa rapid­ité d’exécution et le fait que cette procé­dure ne pèse pas sur l’activité de l’entreprise. 

Sur ce marché, vous avez un positionnement original qui distingue NEOPAR des autres acteurs. Qu’en est-il ? 

Générale­ment, les sociétés ou les fonds d’investissement qui opèrent dans le secteur du restruc­tur­ing détachent des dirigeants de crise ou des experts spé­cial­isés dans la ges­tion de ce type de sit­u­a­tion. Chez NEOPAR, nous avons fait le choix de col­la­bor­er avec le man­age­ment his­torique de ces entre­pris­es, des hommes et des femmes qui con­nais­sent son ADN et ses métiers, qui sont con­scients des dif­fi­cultés et qui sont prêts à tir­er les leçons du passé pour réin­ve­stir et s’impliquer à nos côtés. Ce critère est décisif, car nous ne nous intéres­sons qu’à des entre­pris­es avec un man­age­ment sus­cep­ti­ble, prêt et volon­taire pour tra­vailler avec nous. Sur un plan opéra­tionnel, il nous a tou­jours sem­blé plus per­ti­nent d’échanger avec une équipe qui était à bord du navire lors de la tem­pête. Il est bien évidem­ment néces­saire que ces per­son­nes ne soient pas en sit­u­a­tion d’échec per­son­nel ou dans le déni pour pou­voir s’engager et con­tribuer à la renais­sance de l’entreprise. D’un point de vue éthique, il s’agit de pou­voir don­ner une sec­onde chance aux man­agers his­toriques de l’entreprise. La reprise d’une entre­prise con­stitue à la fois une rup­ture sur tout ce qui pèse et entrave, et une con­tin­u­a­tion par la pour­suite de l’activité et de l’aventure entrepreneuriale.

Ce posi­tion­nement implique un diag­nos­tic partagé de la sit­u­a­tion, la lucid­ité du man­age­ment his­torique sur l’état de l’entreprise, mais aus­si un con­sen­sus autour de la stratégie de retourne­ment et de la mise de fonds, qui est générale­ment com­prise entre 1 et 5 mil­lions. Enfin, il demande aus­si une con­fi­ance mutuelle et un engage­ment de toutes les par­ties prenantes, y com­pris les équipes sur le terrain.


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Vous accordez donc une place importante au capital humain… 

C’est même le pre­mier critère d’investissement ! Chez NEOPAR, nous sommes con­va­in­cus que l’humain est la clé du suc­cès d’un retourne­ment. Le dis­cerne­ment, la capac­ité d’analyse cri­tique et pos­i­tive, la volon­té de se réin­ven­ter et de trou­ver les voies de redéveloppe­ment de l’entreprise doivent être au cœur des moti­va­tions et de l’engagement du man­age­ment historique. 

Mal­heureuse­ment, ce sont des dimen­sions qui ne sont pas assez val­orisées sur le marché. 

Et quelles sont les entreprises dans lesquelles NEOPAR investit ? 

Entre­prise à taille humaine, NEOPAR s’engage véri­ta­ble­ment aux côtés du man­age­ment. Pour ce faire, nous ne réal­isons qu’une à deux opéra­tions chaque année. Nous nous intéres­sons à des entre­pris­es dont nous appréhen­dons claire­ment les caus­es des dif­fi­cultés et qui opèrent sur des marchés por­teurs, que nous com­prenons et qui nous plaisent. En par­al­lèle, nous sommes vig­i­lants à ce que, au-delà des aspects financiers, l’activité et l’entreprise démon­trent un impact envi­ron­nemen­tal, social ou socié­tal posi­tif et tangible.

De manière générale, nous reprenons des PME et des ETI avec un chiffre d’affaires com­pris entre 10 et 250 mil­lions d’euros. Nous avons repris en 2014 le groupe PARISOT pour lequel nous avons reçu le prix Ulysse de l’Association pour le Retourne­ment des Entre­pris­es en 2018. En 2017, nous avons aus­si repris la société d’ingénierie routière Vec­tra que nous avons dévelop­pée, d’abord au moyen d’une aug­men­ta­tion du cap­i­tal, puis par l’acquisition d’autres entre­pris­es (build-up). Aujourd’hui, l’entreprise, renom­mée Nex­tRoad, réalise un chiffre d’affaires de 35 mil­lions d’euros et a de très belles per­spec­tives de développe­ment. En 2018, nous avons repris l’Étude Généalogique Guénifey, dont le cœur de méti­er est la recherche d’héritier. La société est aujourd’hui le 3e acteur de ce secteur en France. Actuelle­ment, nous sommes à l’écoute du marché où il y a de très belles opéra­tions potentielles.

En tant qu’investisseur en retournement, NEOPAR contribue à la redynamisation du tissu industriel national… 

Nous don­nons les moyens à des entre­pris­es de rebondir et de renouer avec la crois­sance, de créer de la valeur, de se dévelop­per. Nous prenons en compte la dimen­sion finan­cière et humaine de l’entreprise pour per­me­t­tre à son man­age­ment et à ses équipes de franchir un cap. 

Dans le con­texte actuel, à mon sens, il est impor­tant de pro­mou­voir cette activ­ité d’investissement en retourne­ment afin d’en faire un out­il vertueux et effi­cace au ser­vice de la reprise économique et de la créa­tion de valeur de manière générale. Cela demande des efforts com­muns en ter­mes de trans­parence et d’éthique pour que l’utilité de ce méti­er sur le plan économique, social et humain soit reconnue.

Et pour conclure ?

Nous dis­posons en France d’outils très effi­caces pour prévenir les dif­fi­cultés. Toute­fois, les dirigeants ne sont pas suff­isam­ment for­més et pré­parés à la ges­tion des dif­fi­cultés et des crises de leur cur­sus, en école de com­merce ou à l’université. Une crise est une sit­u­a­tion à laque­lle tous les dirigeants et entre­pre­neurs devront faire face au cours de leur car­rière, et c’est une réal­ité encore plus prob­a­ble à l’heure actuelle. Il con­viendrait de « nor­malis­er l’exceptionnel » et que les dirigeants d’entreprise con­nais­sent et utilisent plus facile­ment l’ensemble des dis­posi­tifs con­cer­nant la préven­tion et le traite­ment des dif­fi­cultés des entre­pris­es en France. C’est un con­stat que j’ai fait déjà depuis de nom­breuses années. J’y con­sacre, par ailleurs, un chapitre dans mon livre (Le Cap­i­tal Investisse­ment – Guide Juridique et Fis­cal, 6e édi­tion 2020 – Édi­tion Revue Banque). 

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