Face à la cybermenace, ensemble nous sommes plus forts !

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°784 Avril 2023
Par Michel VAN DEN BERGHE

Inau­guré il y a un peu plus d’un an, le Cam­pus Cyber est la vit­rine de l’excellence française en matière de cyber­sécu­rité. Son prési­dent Michel Van Den Berghe nous présente ce lieu totem de la cyber­sécu­rité, son périmètre d’action et ses pri­or­ités pour 2023.

Qu’est-ce que le Campus Cyber ?

Le Cam­pus Cyber est né de la volon­té du Prési­dent de la République, Emmanuel Macron, de dot­er la France d’un lieu totem de la cyber­sécu­rité pour, d’une part, fédér­er l’ensemble des acteurs de cet écosys­tème, et, d’autre part, faire ray­on­ner l’expertise et l’excellence français­es dans ce domaine.

Pour ce faire, l’action du Cam­pus Cyber s’articule autour de qua­tre grands piliers :

  • Une approche opéra­tionnelle de la cyber­sécu­rité qui s’appuie sur le partage des don­nées pour ren­forcer la capac­ité de cha­cun à maîtrise le risque numérique ; le rassem­ble­ment d’experts de l’analyse cyber afin de ren­forcer les capac­ités de veille, de détec­tion et de réponse à la menace… ;
  • Le développe­ment de la for­ma­tion et de l’attractivité des métiers de la cyber­sécu­rité : aujourd’hui, nous avons un fort enjeu de vis­i­bil­ité afin de cass­er les stéréo­types et idées reçues sur ce secteur, de sus­citer des voca­tions et d’attirer plus de femmes et de jeunes. En par­al­lèle, nous par­ticipons à la for­ma­tion ini­tiale et con­tin­ue ain­si qu’à la mon­tée en com­pé­tences des dif­férents publics (agents de l’État, salariés, étu­di­ant, per­son­nels en recon­ver­sion…) au tra­vers du déploiement de pro­grammes com­muns d’entraînement et de for­ma­tion, le partage de ressources… D’ailleurs, une quin­zaine d’écoles a adhéré au Cam­pus Cyber et cinq y dis­pensent des cours ;
“Le Campus Cyber est né de la volonté du Président de la République, Emmanuel Macron, de doter la France d’un lieu totem de la cybersécurité.”
  • L’accélération de l’innovation et de la recherche en matière de cyber­sécu­rité pour faciliter le trans­fert tech­nologique vers les indus­triels et les entre­pris­es. Pour ce faire, nous tra­vail­lons notam­ment avec l’INRIA, le CEA, l’IMT et le CNRS afin que les chercheurs inven­tent, dévelop­pent et créent les solu­tions et les tech­nolo­gies qui nous per­me­t­tront de con­tr­er les cyber­me­n­aces. À par­tir de là, il s’agit aus­si de les trans­fér­er vers la sphère privée mais aus­si de faciliter la créa­tion de start-up inno­vantes voire des licornes ;
  • L’animation de cet écosys­tème : le Cam­pus Cyber a été pen­sé pour être un lieu vivant et ouvert. Il pro­pose ain­si une pro­gram­ma­tion très riche avec des événe­ments inno­vants prop­ices aux échanges, aux partages de bonnes pra­tiques, à la veille tech­nologique et à la décou­verte des évo­lu­tions de la société numérique de con­fi­ance (con­férences, webi­naires, pod­casts, tables ron­des, pitchs, job dat­ing, créa­tion des com­muns de la cyber, expéri­men­ta­tions, learn­ing expe­di­tions, événe­ments inter­na­tionaux, speed dat­ing investisseurs…).

Aujourd’hui, pourquoi est-ce essentiel de disposer d’un acteur comme le Campus Cyber en France et en Europe ?

Le Cam­pus Cyber a été inau­guré le 15 févri­er 2022. C’est une société privée avec une par­tic­i­pa­tion publique à hau­teur de 39 %. Elle a un cap­i­tal de près de 9 mil­lions d’euros et 167 action­naires, qui sont essen­tielle­ment des grandes entre­pris­es, des écoles, des asso­ci­a­tions… Ce lieu totem s’étend sur plus de 26 000 m², dont 17 000 m² d’espaces de tra­vail partagés ou privés, 6 000 m² de plateau pro­jets et inno­va­tion, et 3 000 m² dédiés à la for­ma­tion. Il accueille plus de 1 800 experts et 134 sociétés y sont implantées.
Face à la pro­fes­sion­nal­i­sa­tion des pirates et cyber­at­taquants, mais aus­si la sophis­ti­ca­tion et la recrude­s­cence des cyber­at­taques, qui sont de plus en plus organ­isées et struc­turées, il était essen­tiel et stratégique de pou­voir se dot­er d’une struc­ture comme le Cam­pus Cyber afin de pou­voir invers­er ce rap­port de force.

Nous sommes, en effet, con­va­in­cus qu’ensemble nous sommes plus forts pour lut­ter con­tre cette men­ace. L’idée est de réfléchir et de tra­vailler ensem­ble pour créer et dévelop­per les solu­tions qui per­me­t­tront aux grands groupes, PME, TPE, admin­is­tra­tions et organ­i­sa­tions gou­verne­men­tales de con­tr­er ces menaces.

Au-delà, le Cam­pus Cyber est aus­si une vit­rine de l’excellence française en matière de lutte con­tre la cyber­crim­i­nal­ité et de cyber­sécu­rité. Nous avons reçu plus de 50 vis­ites de délé­ga­tion inter­na­tionales dans nos locaux depuis l’ouverture. Enfin, c’est aus­si un lieu que nous avons aus­si voulu attrac­t­if afin de sus­citer des voca­tions et de con­tribuer à pro­mou­voir une cer­taine diver­sité et mix­ité dans cette fil­ière. En effet, con­traire­ment aux idées reçues, dans le monde de la cyber­sécu­rité, on ne retrou­ve pas seule­ment des ingénieurs ou des hack­ers éthiques. On retrou­ve égale­ment les métiers de la com­mu­ni­ca­tion, de la for­ma­tion et relat­ifs aux rela­tions géopolitiques.

Un peu plus d’un an après l’ouverture du Campus Cyber, quel bilan tirez-vous ?

Il est extrême­ment posi­tif ! Quand le Prési­dent de la République m’a con­fié cette mis­sion, de nom­breuses per­son­nes de mon entourage étaient scep­tiques sur le fait d’arriver à réu­nir et à faire tra­vailler ensem­ble et au sein d’un même endroit des entre­pris­es et des cen­tres de recherche dans un con­texte mar­qué par une véri­ta­ble guerre des tal­ents. Nous avons relevé haut la main ce défi ! Tous les postes de tra­vail sont actuelle­ment occupés. Plus de 500 par­tic­i­pants issus d’entreprises dif­férentes col­la­borent et échangent au sein d’une douzaine de groupes de tra­vail pour pro­duire des livrables con­crets sur les enjeux de la cyber­sécu­rité à des­ti­na­tion de tout l’écosystème. Nous avons ain­si pub­lié le rap­port « Hori­zon Cyber 2030 Per­spec­tives et Défis » sur l’anticipation du risque et de la men­ace cyber.

Aux côtés de l’ANSSI, nous avons con­tribué à l’organisation de REMPAR22, un exer­ci­ce de mise en sit­u­a­tion et de ges­tion de crise auquel plus de 120 sociétés ont pris part. Pour accélér­er l’innovation et le trans­fert des solu­tions et des tech­nolo­gies vers le monde des entre­pris­es et de l’industrie, avec le Secré­tari­at Général pour l’Innovation, nous col­laborons avec deux entités : Cyber Boost­er, qui aide les jeunes por­teurs d’idée à struc­tur­er leur pro­jet, et un incu­ba­teur, pour accom­pa­g­n­er les pro­jets les plus promet­teurs et les met­tre en rela­tion avec des investisseurs.

Aujourd’hui, la réus­site du Cam­pus Cyber est jalousée dans le monde entier. En effet, s’il existe des struc­tures équiv­a­lentes dans dif­férents pays, notre prin­ci­pal vecteur de dif­féren­ci­a­tion est qu’aux côtés des écoles et des cen­tres de recherche, nous avons des entre­pris­es qui, de manière volon­taire, se sont instal­lées au sein de ce lieu totem : Total­En­er­gies, Asltom, Bouygues, SNCF, Siemens, BNP Paribas, la Société Générale, la Banque Postale, PwC, Deloitte…

Quelles sont vos priorités pour 2023 ?

Nous en avons iden­ti­fié deux. La pre­mière con­cerne les tal­ents. Pour pal­li­er le manque d’attractivité de notre fil­ière, nous col­laborons, par exem­ple, avec les Min­istère de l’Éducation nationale dans le cadre de la réforme des col­lèges et des lycées pour lancer une grande cam­pagne de pro­mo­tion des métiers de la cyber­sécu­rité. Nous souhaitons aus­si for­mer plus de 1000 pro­fesseurs et édu­ca­teurs aux métiers ou aux enjeux de la fil­ière cyber­sécu­rité. Ces derniers sont en con­tact direct avec les lycées et peu­vent les informer et leur présen­ter nos métiers qui sont pas­sion­nants, à la pointe de l’innovation tech­nologique, mais qui ont aus­si une véri­ta­ble dimen­sion sociale. En par­al­lèle, nous tra­vail­lons sur la créa­tion d’une série télévisée qui s’inspire du suc­cès de la série « Le Bureau des Légen­des » et qui avait, par ailleurs, con­tribué à aug­menter l’attractivité et la vis­i­bil­ité de la DGSE. Nous prévoyons aus­si de pren­dre part à des événe­ments qui attirent les jeunes et leurs par­ents, comme le Fes­ti­val du Jeu Vidéo et du Numérique des Hauts-De-Seine.

“Nous collaborons, par exemple, avec les Ministère de l’Éducation nationale dans le cadre de la réforme des collèges et des lycées pour lancer une grande campagne de promotion des métiers de la cybersécurité.”

La sec­onde pri­or­ité est plus opéra­tionnelle et con­cerne la sécuri­sa­tion de nos PME face à la men­ace cyber. Si le nom­bre de cyber­at­taques est en con­stante hausse, le nom­bre d’attaques réussies con­tre des grandes entre­pris­es français­es a dimin­ué. Selon les chiffres de l’ANSSI, 1 082 inci­dents ont été réper­toriés en 2021 con­tre 831 en 2022. Cela mon­tre que ces grands groupes et entre­pris­es met­tent en place les moyens et solu­tions pour se pro­téger et se défendre et surtout qu’ils y arrivent. Toute­fois, cela n’est pas le cas des PME et des TPE qui sont dému­nies face à la cyber­me­n­ace. On estime, d’ailleurs, qu’une entre­prise sur deux vic­times d’un ran­somware qui refuse de pay­er dépose le bilan dans les 18 mois qui suiv­ent l’incident. Pour les accom­pa­g­n­er nous allons notam­ment met­tre en place un plan de recom­man­da­tions afin de les aider à sécuris­er leurs sys­tèmes et à dévelop­per leur résilience pour être en capac­ité de pour­suiv­re leur activ­ité même après une attaque. En par­al­lèle, nous dévelop­pons avec BpiFrance une offre dédiée, le Boucli­er Cyber, des­tinée aux entre­pris­es accom­pa­g­nées par cet organisme.

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